Dans la rue, aux côtés de Tiphaine Le Berre, éducatrice de prévention spécialisée

#VisMaVille Si on allait un peu vite, on dirait que Tiphaine Le Berre est « éduc’ de rue ». Le terme exact, auquel elle tient tout autant, est « éducatrice de prévention spécialisée », car parcourir les allées du quartier des Fontaines n’est qu’une partie de son quotidien.

Une maman qui ne sait plus trop comment gérer son ado. Un lycéen un peu perdu dans sa scolarité. Une autre en profond mal-être… Tiphaine Le Berre est amenée à traiter des problématiques variées, au coin d’une rue, ou dans le Cube, le local situé entre le 3 et le 5 de la rue Verdi aux Fontaines.

« Dans chaque quartier où nos services sont présents, il y a un local ou un appartement, pour pouvoir accueillir les jeunes ou leurs familles dans un cadre serein », explique l’éducatrice en prévention spécialisée, salariée du Département.

Sur le canapé du Cube, Tiphto nous fait son regard de velours. Ce dinosaure en peluche choisi par de grands ados doit son nom aux prénoms des deux éducateurs, Tiphaine et Thomas. Le babyfoot à côté pourrait être trompeur : « Nous ne sommes pas un centre social bis, où on vient s’inscrire à des activités. Notre objectif est d’aller chercher les jeunes qui se tiennent justement en retrait de ces structures, de ces autres acteurs du territoire. »

Et c’est en étant immergés sur le terrain que les éducateurs spécialisés y parviennent (ou pas, selon les cas). Donc oui, bien sûr, une partie du métier consiste à arpenter les rues du quartier, à s’arrêter devant les halls d’immeubles pour parler avec ceux qui y tiennent les murs.

Aux Fontaines, Tiphaine et Thomas ont ainsi un parcours-type, qui passe par les lieux les plus fréquentés. Mais ce n’est pas tout ! Tiphaine est aussi souvent au Cube, où des permanences sont assurées. Et à force de ténacité, et de liens tissés au long cours avec les habitants, ceux-ci ont trouvé l’astuce : permanence ou pas permanence, si les volets sont ouverts, c’est qu’il y a du monde et qu’on pourra y trouver quelqu’un avec qui dialoguer. Dans l’anonymat, sans contrainte de temps, en toute liberté.

D’ailleurs, ça ne trompe pas : ici, on ne tient pas de dossier sur les gens qu’on rencontre, que ce soit une rencontre unique ou un suivi sur quelques mois. Un élément essentiel pour instaurer un climat de confiance. C’est aussi pour cela que le tutoiement est souvent de rigueur. « On n’est pas en position de supériorité : on écoute d’abord le besoin de la personne, avant d’être à ses côtés dans les démarches qui nous semblent pertinentes pour l’aider. »

Esprit d’analyse, connaissances en sociologie et en psychologie… Educ’ de rue c’est un métier, qui ne consiste pas qu’à se balader dans les rues. Il y a aussi les chantiers éducatifs et projets collectifs avec des partenaires variés (Terres du Son, les Restos du Cœur et bien d’autres), ou le Street Van du Département que les éducateurs amènent dans des collèges des quartiers prioritaires de la politique de la ville, pour rencontrer et sensibiliser les élèves à des questions variées, en concertation avec les équipes enseignantes. Parce que pour aller à la rencontre des ados égarés, il faut être présent sur tous les terrains !

Texte et photos : Emilie Mendonça

Hugo Meslard-Hayot de Zéro Déchet Touraine : « Avec les déchets, c’est l’avenir qui se joue ! »

#VisMaVille En veste jaune fluo, il n’est ni agent de la voirie, ni éboueur, même si son métier à tout à voir avec nos déchets. Hugo Meslard-Hayot est préventeur et maître-composteur pour l’association Zéro Déchet Touraine.

Cette semaine, un habitant voulait « le code du cadenas pour pouvoir balancer mes ordures ». Réponse d’Hugo Meslard-Hayot pour Zéro Déchet Touraine : non. Car les composteurs qu’installe l’association dans la métropole tourangelle et les communes du syndicat Touraine Propre, ce ne sont pas des dépotoirs, loin de là.

Pour que tout fonctionne bien, l’association sensibilise donc entreprises et grand public avec réunions et animations. Et à Tours chaque composteur de quartier est géré par deux habitants référents, volontaires pour garder un œil sur cette drôle de boîte.

Le 25 janvier, c’était jour de galette au local de l’association, rue du Général Renault. Un moment de partage animé par Hugo et ses collègues salariés de l’association, pour permettre aux référents de se rencontrer et d’échanger leurs petites histoires de compostage. Car l’installation d’un composteur dans un quartier ne va pas toujours sans difficulté. Il y a souvent, au départ, des habitants qui craignent des nuisances ou qui ne comprennent pas la démarche.

Mais les choses finissent toujours par s’arranger. Jeudi dernier, une autre rencontre, quartier des Fontaines s’est terminée par un petit café et une chouette discussion. Au programme : faire le point sur la situation du composteur, revoir quelques règles comme le brassage régulier des déchets organiques qui y sont déposés, ou remettre à niveau le bac de copeaux qui permet d’alterner les couches de matières, et ainsi éviter mauvaises odeurs et insectes indésirables.

Il y a d’autres petites bêtes qu’on apprécie car elles contribuent à transformer les déchets en compost. Vers de terre, cloportes et autres bactéries… Pour vérifier que humains et insectes collaborent au mieux, chaque composteur est visité quatre fois par an. Zéro Déchet Touraine en gère plus de 150 dans le département. On vous laisse faire le calcul pour trouver le nombre de visites hebdomadaires dans l’emploi du temps d’Hugo (un problème de maths que notre institutrice de CM2 aurait apprécié !).

Le trentenaire n’a cependant pas toujours eu la tête dans les déchets. Mais dans l’environnement, oui ! Titulaire d’un Master d’écologie et développement durable, il a d’abord été conseiller en énergie. « Mais j’ai ensuite bifurqué vers la prévention et la réduction des déchets, car c’est la priorité. Par exemple, en Touraine, les ordures des bacs poubelles gris vont à l’enfouissement, à Sonzay, et produisent du méthane, donc empirent l’effet de serre. »

Est-ce qu’Hugo s’applique à lui-même ce qu’il nous recommande ? « J’emmène mes déchets végétaux au composteur de l’association, à vélo, et j’essaie de réparer pour ne pas jeter. Les déchets, c’est essentiel. Et si vous hésitez, n’oubliez pas que le coût de leur traitement ne cesse d’augmenter depuis les années 1970, donc ça touche aussi nos porte-monnaie ! »

Texte et photos : Emilie Mendonça

David Jackson, la musique au « chœur » de tout

#VisMaVille Chef d’orchestre et pianiste franco-britannique, David Jackson est chef de chœur de l’Opéra de Tours depuis deux ans. Il multiplie les initiatives auprès des Tourangeaux, à l’instar de la « Maîtrise populaire » pour les enfants.

Installé au fond d’un fauteuil en velours rouge, David Jackson porte son regard sur la mise en place du décor du spectacle qui sera joué le soir même. Les plissures de chaque côté de ses yeux bleus trahissent son profond enthousiasme et sa joie contagieuse. Il plaisante : « J’ai le même âge que le chœur de l’Opéra de Tours (Rires). » Pour information, celui-ci a fêté ses 40 ans l’année dernière.

Chef de chœur de l’Opéra de Tours depuis deux ans, David Jackson initie de nombreux projets, qu’il appelle des « planètes ». Il préfère la métaphore céleste à celle du cœur. « Le soleil, c’est le chœur de l’Opéra, explique-t-il, et tout autour, nous avons les planètes. La première est la chorale populaire. »

Deux fois par semaine depuis deux ans, 220 participants se rassemblent pour chanter. Le virtuose souligne l’implication de ces Tourangeaux : « Les amateurs sont des éponges. Quand ils commencent à chanter ensemble, il y a de la joie. Ce n’est pas difficile de les motiver. »

Sur un autre astre, David Jackson reçoit, avec Marie Saint-Martin, professeure de chant, une trentaine d’enfants de moins de 11 ans issus de tous les quartiers de Tours. « Après un an de travail dans ces lieux, ils s’y sentent chez eux », confie-t-il en souriant. Les deux groupes se retrouvent sur scène, scellant ainsi la volonté de répandre la musique dans chaque recoin de la ville. Une autre planète encore, celle de « À Voix Haute », située à l’église Saint-Julien. Passants, habitués ou personnes isolées s’y retrouvent une fois par mois pour chanter à l’unisson.

Les deux années passées à l’Opéra de Tours ont été « fortes en projets de toutes tailles ». David Jackson a fait entrer cet art à l’école comme à l’Ehpad. Il retient tout particulièrement son expérience de préparation du chœur pour Thaïs de Michel Plasson, chef d’orchestre français.

Quand il dirige, David Jackson se laisse totalement happer par la musique. Il sautille au piano et ne peut s’empêcher de chanter. Impossible de le voir avec le traditionnel nœud papillon ou la baguette ! « Les choses dorées ne m’intéressent pas du tout. Moi, je suis ému par la musique. Je veux la partager avec les gens. »

 

Diplômé de l’Université de Durham et de la Royal Scottish Academy of Music and Drama de Glasgow, il quitte sa terre natale pour son premier poste en tant que chef de chant à l’Opéra national de Cologne, en Allemagne. Après des années à travailler à Paris, il s’est lui-même surpris à vivre à l’étranger : « C’est quelque chose qui m’a étonné. Je n’étais pas du tout comme ça quand j’étais adolescent. […] Je n’aurais jamais imaginé que je vivrais dans un autre pays, et encore moins que je parlerais d’autres langues (Rires). »

Une chose semble essentielle pour le franco- britannique : laisser les portes de l’opéra grandes ouvertes pour tous. Quand il commence à en parler, il perd ses mots. Sa langue natale revient au galop. « Je suis sensible au…. Comment dire ? (Longue pause) Politically, I’m very motivated dans ma vie privée. […] Si je peux amener ça dans le cadre professionnel, ça me fait vraiment plaisir. Musically, on a une responsabilité. »

Texte : Lou Attard, journaliste en formation à l’EPJT
Photos : Emma Sikli, journaliste en formation à l’EPJT

Avec Dalila Azzam, la friperie comme un art de vivre

#VisMaVille Dalila Azzam a créé la friperie Shop Vintage en 2012, bien avant la vogue actuelle de la seconde main. Une aventure qui lui permet de vivre pleinement sa passion de la mode et des vêtements.

Les journées de Dalila Azzam ne se ressemblent pas. Mais elles ont toutes un point en commun : la passion de la mode et de la fripe. Une fois tous les quinze jours, cette ancienne modéliste pour de grandes marques de vêtements part faire la tournée de ses fournisseurs pour remplir sa petite caverne d’Ali Baba vestimentaire.

Car, chez Shop Vintage, pas de dépôt vente. Les produits proviennent d’une poignée de grossistes en seconde main, triés sur le volet, qui la connaissent depuis longtemps et qui lui proposent des pièces essentiellement fabriquées en France ou en Italie.

« Ils savent ce que je recherche et ils sélectionnent des vêtements pour moi. Ensuite, je choisis les pièces une par une, en fonction de mes goûts et de mes envies. » Elle en revient le coffre plein de perles venues parfois du bout du monde, des basiques bien sûr, mais aussi des vêtements plus décalés qui lui ont accroché l’oeil.

Casser les codes et garder l’esprit atelier, c’est un impératif pour Dalila. Car, avant d’être commerçante, Dalila est une passionnée de beaux vêtements. « Quand je travaillais dans l’habillement, comme beaucoup de modélistes ou de couturières, j’allais souvent m’habiller en friperie. Pour trouver des choses un peu différentes et marquer sa singularité. »

Par ailleurs, la commerçante ne renie pas le côté un peu militant de son entreprise. Il s’agit bien, modestement et à sa mesure, de prendre à rebours la vague de la fast fashion qui a laminé les ateliers de coutures locaux et imposé un style uniforme à toute une génération. Il s’agit, aussi, de proposer aux consommateurs d’aujourd’hui une qualité qui a largement disparu et à des prix raisonnables.

« La fabrication dans les manufactures des années 80 et 90, en France ou en Italie, elle tenait vraiment la route. Quand on les retrouve aujourd’hui, on voit que cela n’a pas bougé », explique-t-elle. Il y a un peu plus de dix ans, quand Dalila a voulu baser sa nouvelle boutique sur ce concept, il a fallu faire preuve de pédagogie. Le principe de la seconde main et le concept du vintage n’étaient pas sur toutes les lèvres comme ils le sont aujourd’hui.

Mais Dalila n’est pas du genre à se laisser arrêter par les yeux ronds d’un banquier. Aujourd’hui, dix ans après sa création, la friperie s’est installée dans un espace plus grand et plus central, au bout de la rue du Commerce. L’endroit fait référence. « J’ai dans ma clientèle des personnes qui s’habillent hyper tendance mais aussi des groupes de musique qui viennent se trouver un style ou des régisseurs de spectacles qui ont besoin de costumes. »

Dalila y a reconstitué l’atelier de ses jeunes années de couturière, elle butine à l’envi ces étoffes qu’elle aime tant. Elle conseille sur les tailles et les matières et fait partager sa passion du vêtement à une ville qui ne demande qu’à redécouvrir le plaisir de (bien) s’habiller.

Matthieu Pays

Gaëlle et David Hermange, les innovateurs du chocolat

#VisMaVille Gaëlle et David Hermange dirigent Néogourmets, une entreprise de biscuits et chocolats sans sucres ajoutés ni édulcorants. Leurs mots d’ordre : l’innovation et la gourmandise nutritive.

En cette fin novembre, toute la famille s’affaire à coller les étiquettes sur les dernières gourmandises de Noël sorties de Néogourmets, entreprise de biscuits et chocolats bio et équitables, installée à Saint-Cyr-sur-Loire depuis 2018. Gaëlle et David Hermange, les cofondateurs, sont entourés ce jour-là des parents de Gaëlle et de leur fille, Clémence. Une implication familiale qui résume bien leur état d’esprit.

« Tout est parti de notre cuisine, je ne pouvais plus manger de sucres rapides dans mon alimentation et je me suis posé la question d’un goûter sain pour mes trois enfants », explique Gaëlle Hermange. C’est ainsi que les premières gammes de biscuits sucrés sont nées, sans sucre ni édulcorant, ce qui était unique en France à l’époque. « Nous utilisons le sucre naturel présent dans les fruits, comme la datte », précise-t-elle.

De quoi attirer l’attention du chef Thierry Marx et du scientifique spécialiste de la cuisine moléculaire, Raphaël Haumont, avec qui ils travaillent désormais sur toutes leurs nouvelles recettes, recherchant l’équilibre parfait entre la gourmandise et l’intérêt nutritionnel.

« L’innovation est la raison d’être de notre société, dans le but de faire différemment et plus sainement », souligne David Hermange. Ainsi, le couple passe une grande partie de son temps dans leur laboratoire de recherche et de développement, installé dans leurs locaux. Des créations à la pistache chocolat blanc, à la figue chocolat noir café, des bouchées à l’orange bergamote figurent parmi les dernières innovations. En ce moment, le couple se penche sur les créations de Pâques.

Leur autre exigence a été de contrôler toute la chaîne de production du chocolat qu’ils ont entamée en 2020 avec un partenaire belge. Depuis l’année dernière, ils transforment eux-mêmes les fèves de cacao sur place. C’est ce que l’on appelle le « bean to bar ». « Nous avons la volonté de maîtriser la chaîne de A à Z, du produit brut à son emballage et sa commercialisation », explique David, autodidacte en la matière, qui s’est formé récemment en chocolaterie à l’école Alain Ducasse à Yssingeaux (Haute- Loire).

Il s’occupe également de la partie commerciale et gestion de la société tandis que sa femme, ancienne photographe, gère les finances, le graphisme des emballages et la communication-marketing, une grosse partie de son activité. De multiples casquettes nécessaires pour faire tourner leur entreprise en croissance, s’occuper aussi « des aléas quotidiens de la vie d’une petite société ».

Depuis 2018, Néogourmets, né en quelque sorte dans leur cuisine, a bien grandi et l’équipe s’établit désormais à dix personnes. Ce qui a permis de sortir cette année une vingtaine de nouveautés entre les tablettes, bouchées chocolatées, pâtes à tartiner et autres réjouissances gourmandes.

Aux côtés de Mathieu Tupin, infirmier libéral, tous les jours au service des patients

#VisMaVille Mathieu Tupin est infirmier libéral à Tours. Un métier qui lui permet d’être un acteur social essentiel au système de santé mais qui n’est pas simple tous les jours.

Mathieu Tupin ne croit pas à la vocation mais, aujourd’hui, cet ancien étudiant en biologie exerce son métier d’infirmier libéral comme une évidence, mixant ses deux intérêts, le relationnel et la technique. Après une première expérience en centre de personnes handicapées puis en tant qu’infirmier en clinique psychiatrique, il choisit, il y a 21 ans, de se lancer en indépendant au sein du cabinet de soins Jean Royer, juste à côté de la place de la Liberté.

« Au départ, j’étais intéressé par la santé mentale. Puis les évolutions ont fait que j’ai recherché plus de liberté, d’autonomie. Il n’y pas la contrainte de temps ici, quand vous êtes chez un patient, vous n’avez pas d’autres urgences, le téléphone qui sonne. »

L’infirmier de 46 ans est désormais son propre patron, au côté de ses trois collègues infirmières, ne comptant pas ses heures. « On fonctionne à deux équipes qui se relaient 7 jours sur 7, chacun travaillant un week-end sur deux, principalement sur Tours centre. On commence notre journée à 6 h 30 et on ne sait pas quand on finit dans l’après-midi ou le soir. Certains rendez-vous durent 5 minutes comme la distribution d’un traitement auprès d’une personne âgée, d’autres plutôt 45 minutes chez un patient en chimiothérapie. C’est très varié. »

Le cabinet visite une quarantaine de patients par tournée journalière. Certains seront des patients éphémères, d’autres chroniques recevront la visite de Mathieu et de ses collègues chaque jour durant des années.

« Ce sont des patients pour lesquels on peut commencer par faire un prélèvement sanguin et que l’on va finalement accompagner jusqu’à la fin de leur vie. Cela crée forcément des liens. Au quotidien, le métier, au-delà de la technique intéressante comme lorsqu’il s’agit de poser une perfusion, c’est aussi de redémarrer le modem internet ou d’aider à boire un café. »

Mathieu Tupin souligne cette place unique tenue par l’infirmier : « Nous sommes le seul métier de santé à travailler 365 jours sur 365. Les cabinets d’infirmiers sont au chevet des patients toute l’année. »

Si le rôle premier de l’infirmier est « d’appliquer les prescriptions décidées par le médecin », celui-ci peut se révéler parfois frustrant. Mathieu Tupin déplore un manque de marge de manœuvre. « J’aimerais pouvoir faire des sutures, cela permettrait de désengorger une partie des urgences de l’hôpital .»

Autre frustration : le temps passé à l’administratif qui représente environ 20 % de son travail. « Le soir chez nous, nous devons recenser tous les actes de soins et les transmettre à la sécurité sociale via un logiciel. Il existe une nomenclature pour rémunérer chaque acte, c’est assez complexe puisqu’après il faut gérer les retours de la Sécu, les ordonnances manquantes… »

Le professionnel souligne aussi la partie commerciale du métier. La rémunération dépend du nombre et de la nature des actes de soins prodigués par l’infirmier, auxquels s’ajoutent 2,50 € par déplacement. Un temps de déplacement qui peut coûter bien plus cher en réalité, surtout pour les infirmiers de campagne. Mathieu, lui, songe à passer au vélo électrique pour parcourir la ville de Tours.

Texte et photos : Aurélie Dunouau

Un petit tour avec Christophe Girardet et la déchèterie itinérante « Tri Mobile »

#VisMaVille Christophe Girardet gère la Tri Mobile, la déchèterie itinérante de Tours Métropole. Avec son camion, il va à la rencontre des habitants, collectant les déchets recyclables et renseignant sur le tri.

Le vent souffle sur le carreau des Halles de Tours ce jeudi après-midi. Peu importe les conditions météo, Christophe Girardet et son collègue de la Métropole installent leur stand, bricolant des astuces pour que leurs prospectus et panneaux d’informations ne s’envolent pas.

Depuis 2015, la Tri Mobile sillonne tous les matins et après-midis de la semaine les marchés et les places clés de la métropole, à Tours et alentours, collectant tout sauf les gros encombrants, gravats, déchets verts et produits toxiques.

Aujourd’hui, le camion fait étape durant deux heures trente aux Halles, des habitants du quartier semblent des habitués et s’arrêtent volontiers déposer piles, ampoules, vêtements, lunettes et petits appareils électriques endommagés. « Vous pouvez prendre cette vieille poêle aussi ? Oh, je vous aime vous ! », lance une mamie taquine aux deux collecteurs.

Depuis le mois de septembre, Christophe Girardet est devenu le responsable de ce service itinérant de collecte des objets usagés de la Métropole, choisi par sa direction pour son « dynamisme et son sens de la communication ». Cet ancien commerçant, qui a exercé durant 15 ans comme pâtissier d’apprenti à patron, adore échanger avec les visiteurs de passage.

« C’était aussi ce que j’appréciais lorsque je travaillais en déchèterie juste avant, donner des renseignements, apporter de la joie de vivre en plaisantant aussi. Les gens sont contents de nous voir car nous sommes un service de proximité. »

En effet, Christophe Girardet observe que nombre de personnes âgées, de personnes en manque de mobilité ou n’ayant tout simplement pas de voiture, fréquentent la Tri Mobile. Par ailleurs, les habitudes changent. « Avec le télétravail, nous avons aussi beaucoup de jeunes qui viennent déposer leurs objets en journée à Velpeau et place de Strasbourg. Ce sont d’ailleurs deux lieux qui marchent fort, jusqu’à 200 personnes par passage à Velpeau. D’autres endroits sont moins fréquentés, il faut le temps de se faire connaître », souligne l‘agent du tri.

Actuellement, les questions autour de l’obligation de compostage en 2024 fusent. Les consignes de tri ne cessent d’évoluer, ce qui renforce la mission pédagogique de Christophe. « Dans chaque département, c’est différent. De plus en plus d’objets sont devenus recyclables, alors il est difficile de s’y retrouver, mais cela tend à s’harmoniser avec l’Ademe qui chapeaute tout ça », explique Christophe Girardet.

Pour lui, le tri fait partie de son ADN. « Mon père était agriculteur et a toujours trié à la ferme, dès les années 60. » Ce n’est peut-être pas tant un hasard si cet ancien pâtissier, titulaire d’un BEP passé au lycée agricole de Fondettes s’est reconverti dans le secteur. « Au début c’était un choix financier, j’ai intégré la fonction publique la boule au ventre après mon aventure en pâtisserie, mais aujourd’hui je suis ravi de travailler dans l’environnement. De voir les gens satisfaits du service que nous apportons, c’est ce qui compte. »

La collecte terminée, Christophe Girardet et son collègue remballent le stand, direction la déchèterie pour décharger la collecte en seulement 20 minutes.

Texte et photos : Aurélie Dunouau

Dans le quotidien de Julien Thibault, gardien des cimetières de Tours Nord

#VisMaVille Julien Thibault est gardien des cimetières de Tours Nord. Sa mission : faire appliquer le règlement mais aussi être à l’écoute des visiteurs.

Dans sa loge à l’entrée du cimetière La Salle, Julien Thibault, gardien des cimetières de Tours Nord, y passe très peu de son temps de travail. « Je suis toujours à droite à gauche, il y a toujours du passage entre les visiteurs, les jardiniers, les pompes funèbres. »

Il lui faut, en effet, être aux aguets car le cimetière compte 13 hectares et mesure près d’un kilomètre de long, ce qui en fait le plus imposant de Tours en termes de tombes.

Ce cimetière dont il a la garde principale est celui de La Salle, bordant la rue Saint-Barthélémy et l’IUT de Tours. Au total, ils sont six gardiens à se relayer dans les quatre cimetières de la Ville, trois au nord, un au sud.

Arrivé en 2017 au poste, « un peu par hasard suite à un déménagement » après une expérience de couvreur zingueur à Vendôme avec son père, Julien Thibault semble comme un poisson dans l’eau. Il avait la bougeotte, dorénavant il semble posé. Plaisantant souvent avec ses collègues – il était déjà fan d’humour noir, c’est devenu son quotidien de rire avec dérision. Ici, c’est une nécessité d’y recourir « pour dédramatiser ».

Les inhumations s’enchaînent chaque jour, avec des moments parfois difficiles. « Au premier enterrement, ça m’a serré à la gorge, aujourd’hui je me mets en retrait, comme spectateur », admet le grand gaillard. Parfois sa loge sert de « bureau des pleurs ».

L’échange humain est ici très important. « J’ai appris à peser mes mots, à ne pas rentrer dans les détails techniques de comment un corps se décompose. Ici on se sent utile, on renseigne ceux qui recherchent un défunt, on écoute les peines, on rassure, c’est gratifiant de rendre service. »

 

La surveillance du site constitue l’autre facette de son métier. « Mon rôle premier est de faire appliquer le règlement auprès des visiteurs mais aussi des sociétés qui interviennent ici. Tout doit être fait dans les règles. Je vérifie que tout se passe bien lors des inhumations et exhumations, que les creusements soient faits au bon endroit sans détruire le monument », détaille le fonctionnaire territorial. Il lui arrive aussi de faire la police, pour assurer la quiétude du lieu lors d’intrusions malvenues, parfois nocturnes.

Ici, les semaines longues de sept jours s’alternent avec des gardes de trois jours, avec une semaine d’astreinte par mois, ce qui permet aux six gardiens de la Ville de se relayer sur les différents cimetières de 8 h à 19 h l’été et de 8 h à 17 h 30 l’hiver.

Julien Thibault avoue parfois ne pas avoir l’impression de se sentir au travail, lui qui habite à côté de sa loge avec sa compagne et sa petite fille de 2 ans. « C’est bizarre parfois de ne pas avoir de coupure de lieu avec la vie personnelle. » Une fois les portes fermées, le gardien respire le calme de son lieu de travail. « J’ai l’impression d’avoir un immense jardin pour moi tout seul à la campagne », plaisante-il tout sourire.

Texte et photos : Aurélie Dunouau

Amélie Mendes est l’œil expert de l’immobilier

#VisMaVille Amélie Mendes est experte immobilière à Saint-Avertin. Un métier qu’elle exerce en complément de la vente de biens, gestion de locations et de copropriété.

Ne négliger aucun détail, toujours aller voir sur place et comparer avec des biens similaires situés dans le même périmètre : cette rigueur semble la base de son métier pour Amélie Mendes. La patronne du cabinet immobilier Arthurimmo, installé à Saint-Avertin, possède depuis 2019 la casquette d’expert immobilier qui se rajoute à ses missions d’agent immobilier, de syndicat de copropriété et de gestion des locations.

Une fonction moins exposée qui consiste principalement à estimer la valeur exacte des biens à un moment donné, selon le marché et une multitude de critères objectifs concernant l’état du bien et sa desserte.

Pour cela, l’expert répond aux demandes de ses clients qui peuvent avoir besoin de connaître la valeur précise de leur maison, appartement, terrain ou immeuble en cas d’un divorce, d’un rachat de part, d’investissement dans une société civile immobilière, d’une succession ou encore d’un redressement fiscal. « Cette impartialité est l’essence de notre métier », insiste l’experte de 55 ans qui doit faire preuve de compétences juridiques.

Son autre spécificité est d’étudier la pathologie du bâtiment c’est-à-dire de relever ses moindres défaillances. Ce qui requiert des compétences techniques importantes. « C’est un peu comme le médecin qui va voir les bobos du bâtiment que ce soit des infiltrations, des fissures, un défaut de ventilation, des remontées de sol capillaire… On préconise le remède avant de laisser la main au professionnel du bâtiment ».

Munie de sa caméra thermique, elle expertise sur toute la région Centre- Val de Loire. Quand elle n’est pas sur le terrain, elle reçoit à son cabinet ses clients, prépare ses dossiers, rédige ses rapports, répond au téléphone… des journées bien remplies et hétérogènes. Ses diverses missions dans l’immobilier, Amélie Mendes les exerce en complémentarité avec son fils et associé, Maxime Mendes, avec qui elle partage son bureau.

Si à 55 ans elle est devenue rompue à l’exercice, ce métier n’était pas le sien au départ. Il s’est en quelque sorte imposé à elle, il y a trente ans. Alors qu’elle travaillait dans un restaurant italien avec son mari, elle se retrouve à gérer un immeuble après une acquisition de patrimoine. Elle devient alors syndic bénévole avant de passer professionnelle dans une agence comme assistante commerciale puis négociatrice.

Elle gravit vite les échelons dans différentes agences immobilières, passe même par un cabinet de notariat, avant de fonder sa propre enseigne, Averimmo, en 2018. « Je suis une autodidacte pure, je me suis constamment formée et je continue. Je suis friande d’apprendre, je lis beaucoup les informations et législations sur le métier, cela me permet d’avoir une longueur d’avance. »

Dans son bureau, les diplômes et certifications s’accumulent. Une des dernières formations en date concerne la rénovation énergétique, un aspect désormais essentiel pour l’expertise des bâtiments. Pour être toujours « à la pointe des compétences », souligne Amélie Mendes.

Texte et photos : Aurélie Dunouau

Jean-Loup Hadjadj, le médecin des terrains de rugby

#VisMaVille Jean-Loup Hadjadj est médecin du sport et ostéopathe. Sa particularité : il est un des médecins spécialistes en France des joueuses et joueurs de rugby au plus haut niveau.

Rue des Tanneurs, juste en face de la faculté, le bureau du docteur Jean-Loup Hadjadj regorge d’objets inattendus : des vitrines de collection de médicaments anciens qu’il chine dans les brocantes, complétés par ses patients, côtoient des maillots, médailles et accréditations souvenirs qu’il a collectés au gré de son parcours en tant que médecin des équipes de rugby, que ce soit à Tours ou au niveau international.

Un médecin assurément atypique qui vous reçoit pieds nus, décontracté. Celui qui s’occupe aujourd’hui des féminines de l’équipe de France de rugby à 7 en tant que médecin salarié de la Fédération française de rugby (FFR), a connu aussi avec le XV féminin, deux tournois des 6 nations et une Coupe du monde, il a également accompagné les équipes masculines avec les Barbarians et les espoirs.

Le rugby, il a plongé dedans à la faculté de médecine de Tours en intégrant l’équipe universitaire – en même temps qu’il pratiquait la trompette, précise ce personnage éclectique et curieux. « Un sport collectif de combat », qui nécessite un suivi médical étroit, souvent sous le feu des projecteurs avec les cas de traumatologie.

Jean-Loup Hadjadj, diplômé de pathologie du rugby, était d’ailleurs de ceux qui ont connu les débuts de la prise en charge des commotions cérébrales. « Notre rôle, en parcours d’excellence, commence avec l’évaluation de la capacité du jeune joueur à supporter les contraintes cardio-respiratoire, musculo-squelettique et psychologique. Ensuite, nous l’encadrons dans son développement jusqu’au maximum de ses performances. Puis nous assurons le suivi médical réglementaire et la surveillance des entraînements et compétitions, avec prise en charge des blessures. »

Et c’est là qu’on le voit, le médecin de l’ombre, courir sur le terrain voler au secours de ses joueurs. Si ce poste de médecin salarié à la fédération compte aujourd’hui pour 70 % de son temps, les 30 % restants sont dédiés à son cabinet tourangeau et ses 6 000 patients en médecine du sport et ostéopathie. « Ici, je pratique une médecine axée sur le musculo-squelettique pour des sportifs de haut niveau ou non mais aussi pour des non-sportifs », précise le docteur.

Une fois les valises posées des compétitions qui l’ont amené en Afrique du Sud et Nouvelle-Zélande, Jean-Loup Hadjadj redevient un médecin presque lambda dans sa ville, n’oubliant pas son ancrage, auscultant aussi le pôle espoir de canoë-kayak. Après la faculté, il avait installé son cabinet à Autrèche pendant une dizaine d’années avant de se poser à Tours.

Exerçant depuis 33 ans, il transmet aujourd’hui son expérience, enseignant un temps à la faculté de Tours la médecine manuelle-ostéopathie, et auprès des nouveaux médecins du sport, lui qui a une vision globale, sur l’évolution du rugby et sur sa pratique au niveau des hommes et des femmes. « J’y tiens à cette mixité souligne-t-il. Ce n’est pas encore acquis dans ce sport. »

Texte et photos : Aurélie Dunouau

Thierry Bouvet, le pêcheur de Loire penseur

#VisMaVille Thierry Bouvet est pêcheur professionnel sur la Loire. Portrait d’un personnage atypique qui ne passe pas autant de temps sur le fleuve que l’on pourrait imaginer.

Au lever du soleil, Thierry Bouvet embarque pour ramasser ses sept filets posés la veille au soir entre Rochecorbon et Tours. Des filets déployés entre 7 et 50 mètres de long et 3 mètres de profondeur, à proximité des îles de Loire.

Ce jour-là, le butin est maigre : une poignée d’aspes, mulets et silures seulement. Sur cette partie de Loire, l’activité devient en effet de plus en plus difficile avec l’ensablement. « Je suis installé sur la portion la plus urbaine du fleuve d’Indre-et-Loire. Là où il y a de l’activité humaine, c’est là où le pêcheur doit être à la base, ne serait-ce que pour poser son bateau », explique Thierry Bouvet, à l’approche du pont Mirabeau de Tours, guidant sa « plate » de sept mètres, son bateau en acier de type hollandais.

Cet ancien géographe, titulaire d’un DEA sur la pêche maritime au Maghreb, sait de quoi il parle. Amarré au port de La Rabouilleuse à Rochecorbon, il partage avec l’association une vision écologiste de l’écosystème de Loire, une volonté de préserver ses ressources, lui qui observe la raréfaction des poissons et des paysages ligériens au fil des ans.

Thierry Bouvet est venu à la pêche sur le tard, en 2014, après une carrière dans le social et l’humanitaire, débutée chez Emmaüs. Un intellectuel qui n’aime rien tant que partager ses connaissances et discuter du fleuve quand l’occasion se présente. Apercevant un canoë, il fait aussitôt demi-tour pour échanger quelques mots.

Certes, la pêche n’est pas toujours des plus productives, mais ce contemplatif revendique de pêcher mieux. Entre 2,5 et 4,5 tonnes selon les années. Son idée en se lançant dans cette reconversion était de maîtriser la filière en circuit court et de pouvoir utiliser tout le poisson, et non pas de ne garder que les beaux filets achetés dans les poissonneries.

C’est ainsi qu’est né le garum de Loire, ce condiment salé inspiré de la Rome antique et du nuoc man, qu’il a inventé après quatre ans de recherches, se rappelant des récits de son père, jeune marin en Indochine. Depuis 2020, date de sa commercialisation, c’est d’ailleurs devenu à 90 % la source de ses revenus.

Il passe un quart de son temps à le préparer dans son laboratoire, installé à Montlouis-sur-Loire, selon un processus de fermentation dans du sel. La moitié de son temps est consacrée à la logistique, administration et vente du garum. La pêche, effectuée au lever et au coucher du soleil, ne représente en réalité qu’un quart de son activité. « Le modèle du pêcheur qui est uniquement sur son bateau ne tient pas la route aujourd’hui », confirme t-il.

Pour s’en sortir, les pêcheurs transforment leurs produits, avec chacun leur spécialité : le garum donc mais aussi les rillettes de poissons, vendues dans des épiceries fines. « Je ne vends mon poisson frais à des restaurants que pour 10 % de mon chiffre d’affaires. » Son avenir, Thierry Bouvet le voit à promouvoir son précieux condiment, constitué de viscères de poissons et utilisé dans les restaurants étoilés. Le lancement d’une coopérative est imminent (1).

Aurélie Dunouau


> (1) Convergences bio : Thierry Bouvet lancera officiellement la coopérative d’exploitation du garum en agriculture paysanne le 17 septembre, à l’occasion de Convergences Bio. Cet événement se tient sur les quais de la Loire à Tours dès 10 h

 

Tapisserie d’ameublement : Rachel Dubois, la reine des voilages

#VisMaVille Rachel Dubois est tapissière d’ameublement à Tours, quartier Saint-Eloi. Installée avec son mari, elle y déploie son savoir-faire et du sur-mesure de qualité depuis 25 ans.

Dans l’atelier-boutique de la rue Léon Boyer, près de la chapelle Saint-Eloi, Rachel Dubois coud un rideau d’inspiration art déco tandis que son mari fixe des clous après avoir finalisé la garniture sur un fauteuil d’époque XVIIIe destiné à la Pagode de Chanteloup.

Fauteuils, doubles rideaux avec voilages, abatjours, dessus et têtes de lits… Le couple réalise des reproductions comme des créations sur mesure, qu’elles soient traditionnelles ou contemporaines, pour des particuliers le plus souvent, et parfois des clients prestigieux tels que le château de Candé, le Conseil départemental et la préfecture.

Depuis 25 ans, Rachel – plus connue sous ce nom par ses clients – s’est installée comme tapissière d’ameublement indépendante. Après avoir obtenu un double CAP en couture et garniture en apprentissage à l’Atelier du Tissu, avenue Grammont, chez Gérard Labonne, elle s’est lancée à son compte à Notre-Dame d’Oé puis 20 ans, rue Blanqui.

Très vite, Cyrille, son mari-collaborateur l’a rejoint à mi-temps. Depuis 2019, ils sont installés à Tours au 55 bis rue Léon-Boyer, appréciant de dominer depuis leur atelier situé à l’étage, la verdure du jardin de l’éléphant Fritz.

Le contact du tissu a happé Rachel Dubois à l’âge de 5 ans, dès ses premiers pas de couture sur des poupées réalisés grâce à la vieille Singer à pédales de sa grande tante. « Dès lors, je voulais être styliste, travailler le tissu. Une conseillère d’orientation m’a dirigée vers la tapisserie d’ameublement. Ça me plaisait, je voulais passer le maximum de temps à l’atelier, être dans le concret, les rythmes scolaires ne me convenaient pas. »

Rachel est aujourd’hui heureuse de consacrer à la fabrication la majorité de son temps, le reste étant composé de devis, factures, échanges mails et contacts avec les clients. Une autre facette de son métier qu’elle apprécie. « Je suis présente du début à la fin, du conseil à la réalisation et l’installation sur place. Au début, on sélectionne les tissus avec les clients, puis je produis une seconde sélection et je me déplace pour voir in situ ce qui ira le mieux, je ressens comment les personnes vivent, leur sensibilité. Chaque rencontre est unique. On rentre dans leur intimité, il faut de l’écoute, de la confiance. Au final, je fais comme si c’était pour moi. »

Voilà donc le secret de la réussite de sa petite entreprise, outre sa qualité consacrée dernièrement par le titre de Maître artisan d’art : s’adapter constamment, avec sensibilité et un sens artistique. Pour le choix des tissus, le panel est large, composé de grandes maisons comme Pierre Frey, Lelièvre…

Ce n’est donc pas par hasard si Rachel a été élue par le Conseil départemental pour reconstituer une pièce maîtresse du château de Candé : la chambre de Fern-Bedaux, avec pour mission de reproduire à l’identique lit, paravents, tabourets, tentures murales et un immense double rideau en satin de 3,46 mètres de hauteur. Des pièces d’exception qui côtoient des éléments du quotidien dans le travail de la tapissière d’ameublement. Celui de Rachel Dubois n’a pas l’air ennuyeux en tout cas, au vu de son entrain et de sa passion, partagés par son mari depuis 25 ans.

Texte et photos : Aurélie Dunouau

Sewra Mehretab, l’ambassadrice du tourisme Tours Loire Valley

#VisMaVille Sewra Mehretab est conseillère en séjour à l’Office de Tourisme & des Congrès de Tours. Accueil, conseil mais aussi vente constituent la palette de cette ambassadrice qui garde constamment son sourire.

Derrière le comptoir de l’Office de Tourisme de Tours & des Congrès Loire Valley, face à la gare et au Palais des Congrès Vinci, Sewra Mehretab et ses quatre collègues titulaires se relaient chaque jour pour assurer l’accueil et renseigner les touristes et curieux. Une équipe du matin, une de l’après-midi, complétée par les saisonniers d’avril à fin septembre, avec des roulements les week-ends et jours fériés à la clé.

Le métier de « conseiller séjour », Sewra Mehretab l’exerce depuis 13 ans ici au siège de la rue Bernard-Palissy, après avoir tenu la boutique touristique de la place Plumereau durant sept ans.

Titulaire d’un BTS Tourisme passé à Blois, cette Tourangelle maîtrisant l’allemand et l’anglais, a pourtant cru qu’elle devrait faire une croix sur son métier. Elle est, en effet, issue de la promo du 11 septembre 2000. Les perspectives de recrutement dans le tourisme étaient alors au point mort. Sewra a dû exercer un job alimentaire de vendeuse de vêtements avant de pouvoir enfin embrasser son objectif.

« J’aimais voyager, les langues, j’avais envisagé de travailler pour des tours opérateurs et puis j’ai changé d’image sur les offices de tourisme que je trouvais alors trop statiques, répétitifs dans les tâches. En fait, le métier évolue constamment avec les nouveaux produits à proposer et la technologie. »

Le cœur du métier de conseiller séjour réside toujours dans l’accueil et le conseil. La vente d’excursions, de balades en montgolfières ou en canoë, de visites dans les châteaux du Val de Loire surtout, mais aussi d’hébergement touristiques et de souvenirs prend de plus en plus de place. Avec une diversification dans les prestations proposées. « Les dégustations de vins dans des sites insolites sont devenues tendances », souligne Sewra Mehretab.

Les conseillers séjours accueillent physiquement le client, mais répondent également à leurs demandes par téléphone, mail et messagerie en ligne. En arrivant le matin à 9 h, le point est fait sur les affiches, le panneau indiquant la météo, les documents disponibles pour le public et les mails donc. « Nous essayons de répondre le plus vite possible, entre deux clients, assure Sewra. Nous jonglons, nous essayons d’être efficaces, de poser les bonnes questions pour affiner la demande, la recentrer car beaucoup d’informations circulent sur internet. »

Sewra insiste sur sa mission de service public. « Notre but est de promouvoir la destination et le département. » Elle apprécie les retours positifs et les échanges qui peuvent s’instaurer, avec une clientèle large, du jeune couple aux séniors, de tous horizons sociaux et géographiques. « Les gens viennent d’abord chez nous pour découvrir la ville, je sors la carte de Tours maintes fois, mais ce n’est jamais la même explication, la même approche, car chaque personne a une façon différente de visiter. »

Et parfois les échanges prennent une autre tournure. « Quelque part, nous voyageons aussi à travers nos clients. Dernièrement, un Québécois m’a proposé de venir voir les caribous l’automne, c’est tentant. »

Aurélie Dunouau

 

Eric Plat, le glacier des pros tourangeaux

#VisMaVille Eric Plat est le gérant du Palais de la Glace. L’un des rares fabricants de glace local qui vend d’abord aux professionnels.

Généralement, on le reconnaît à son camion rétro de 1963 estampillé « Le Palais de la glace et du sorbet » qui parcourt l’été les marchés, les événements culturels, les mariages et les fêtes d’entreprises. Eric Plat, le gérant, rigole de la notoriété de son camion plus que de la sienne.

Après un parcours dans la restauration, celui qui est devenu artisan glacier a repris en 2018 cette institution tourangelle, connue depuis 1984 pour fournir restaurants et sites touristiques locaux comme le château de Villandry pour qui il crée des parfums particuliers : fraise-thym, framboise-bergamote, citron vert-estragon, verveine-menthe-ortie figurent ainsi sur la carte de La Doulce Terrasse.

Répondre aux commandes des professionnels fait partie des particularités de l‘entreprise qui travaille à 95 % sur le département. Pour son voisin, La P’tite Maiz, il a conçu une glace à la bière ; pour Terres Exotiques, un sorbet au poivre. « On peut tout imaginer, assure Eric Plat. Le tout est de trouver l’équilibre avec les différents goûts. Soit je pars d’une demande, soit je pars d’un parfum que j’ai envie de réaliser, en dosant bien les quantités, au gramme près. »

Dans son local de production et de stockage de 500 mètres carrés, rue de Hollande à Tours Nord, les congélateurs s’alignent : les classiques mangue, caramel beurre salé, vanille, cohabitent avec les créations originales framboise-poivron, et la dernière en date sarrasin.

Depuis la création de l’entreprise, ce sont 900 recettes établies et validées, environ 20 000 litres de glaces écoulés à l’année. Les quatre mois d’été représentent 60 % des ventes, la période de Noël est également active, avec une fabrication des bûches glacées dès septembre. Eric Plat fait tourner la boutique avec un salarié et un apprenti.

Ici tout démarre, avec la matière première. Les incrustations de cookies sont par exemple faites maison. Les produits proviennent autant que possible du local, comme le miel d’Athée-sur-Cher et le beurre de Verneuil. La vanille constitue le produit phare, entre 30 et 35 % des ventes, 180 litres de bacs sont conçus chaque semaine.

Le processus de fabrication demande du temps et surtout des équipements importants. Pour les glaces, le lait frais est livré chaque matin. « On le pasteurise avec le mélange, on laisse maturer 24 heures avant de mixer dans le freezer ou la turbine, explique Eric Plat. On peut produire 300 litres de glace à l’heure avec cette technique. Pour le sorbet, on le travaille avec des purées de fruits surgelées, sans ajout d’arômes, ça permet d’en avoir toute l’année. »

Ici, vous ne trouverez pas un sorbet aux fruits rouges mais des recettes à base de fraise, cassis, myrtille… « Il faut retrouver le goût en bouche, comme si on croquait dedans. » Le seul paramètre dont il ne tient pas compte est celui des calories : « Une glace c’est d’abord gourmand, il faut faire plaisir », dit-il en tendant une petite cuillère tentatrice.

Aurélie Dunouau

Christian Leau, 68 ans, le DJ de la guinguette de Rochecorbon

#VisMaVille Christian Leau est le responsable des animations musicales de la guinguette de Rochecorbon depuis 13 ans. Portrait d’un passionné de danse et de musique.

Il arrive en fin d’après-midi à la guinguette de Rochecorbon, apprêté, foulard autour du cou, couvert de son chapeau, encore imprégné des pas de country qu’il vient d’enseigner dans son association de Saint-Avertin. Souvent à vélo d’ailleurs, son mode de déplacement en même temps que son loisir qu’il pratique en compétition.

Christian Leau, 68 ans, Tourangeau depuis toujours, est un homme qui vit à 100 à l’heure, jamais rassasié de danse, de musique et donc de vélo. Il donne 14 heures par semaine de cours de danse de line country, prend des cours de salsa pour se perfectionner, anime encore des mariages et des fêtes avec ses playlist éclectiques et son sens de l’animation reconnu… bref il n’arrête pas.

A Rochecorbon, on le retrouve les lundis, mercredis, jeudis et dimanches, derrière sa petite table de DJ disposée à côté de la belle piste de danse de la guinguette. Le samedi, il est carrément sur scène pour la soirée dansante qui peut attirer jusqu’à 500 danseurs. Country, valse, bachata, rock, variétés, jazz, il touche à tout, veillant à alterner les styles et ménager le souffle des danseurs, toujours au goût du jour.

« Après deux rock, je peux passer une rumba, c’est une question de dosage. Les gens nous font des retours positifs ici. Je reste aussi moderne, la chanson de Mentissa, Et Bam, je la passe en mode valse. »

Celui que tout le monde appelle ici DJ Christian a de la bouteille dans le milieu musical. « De l’animation, j’en fais depuis 40 ans. Quand j’ai rencontré Bernard Repussard, DJ de la discothèque Club 57 à Tours dans les années 70, j’ai tout de suite accroché. Il m’a vendu des milliers de disques et m’a appris à mixer des vinyles. À l’époque, nous n’avions pas d’ordinateur mais seulement deux boutons. »

Cette passion l’a toujours occupé sur ses temps libres, les soirs et week-end puisque Christian Leau a exercé son métier de géomètre jusqu’à sa retraite. Dans sa vingtaine, du Club 57, il passe à l’animation des mariages avec le magasin Spot’light. « J’ai animé plus de 600 mariages et 2 000 soirées depuis que je suis indépendant », comptabilise Christian Leau.

Autodidacte, il adore parler de musique, glisser quelques enchaînements bien sentis et une pincée d’humour. « J’aime écrire mes textes et présenter les personnages avec humour. Vingt minutes d’animation pour un mariage c’est quatre à cinq pages d’écriture, des dizaines d’heures de boulot. »

À Rochecorbon, il arrive à sa treizième saison, recruté par le patron actuel Gérard Morissseau. Au compteur : 770 soirées, qui sont devenues à thèmes et prisées des Tourangeaux. Aucune playlist établie, Christina s’adapte à l’ambiance du jour. De 20 h à minuit, il enchaîne les disques, tenant sa ligne svelte et son physique grâce à son hygiène de vie, la danse et les kilomètres de vélo avalésprès de 10 000 par an entre les balades et les courses. Il ne s’autorise plus qu’un petit verre de moelleux en arrivant à la guinguette, heureux de retrouver ses patrons Gérard et son fils Romain.

« C’est une famille ici et puis le cadre est tellement agréable en bord de Loire. J’ai l’impression d’être en vacances ici », glisse le retraité actif.

Aurélie Dunouau

Augustin Gassies, l’homme à l’écoute des guitares

#VisMaVille Augustin Gassies est réparateur de guitares dans le quartier Colbert, à Tours, depuis 2019. Un métier où la connaissance des instruments est fondamentale.

Un banjoline de la fin du XIXe siècle côtoie des guitares électriques, une guitare acoustique, un ukulélé. Tous ces instruments se nichent aux quatre coins de l’appartement d’Augustin Gassies, qui constitue aussi son lieu de travail, quartier Colbert. Une table, quelques outils et une prise de courant lui suffisent pour réparer une prise jack, améliorer des réglages sonores, changer des pièces usées.

« Souvent les gens pensent que je suis luthier. Mais je ne fais que réparer les guitares, je ne les fabrique pas. Un peu comme un garagiste pour les voitures. »

Augustin Gassies, connu par son nom professionnel « Gus Le Doc », a le sens de la formule. De l’esprit, de l’humour, de l’attention aux autres, Augustin n’en manque pas. C’est aussi ce qui fait sa marque de fabrique dans un métier marqué par le relationnel.

Gus Le Doc est le nom qu’il a choisi pour son auto-entreprise montée après près de 30 ans à exercer comme responsable des ventes et de l’atelier de guitares dans le magasin Music Stock de Tours Nord. « Les gens apportaient leur guitare et disaient venir voir le docteur. » L’appellation est restée.

Les anciens clients lui sont toujours fidèles. Depuis, le carnet d’adresses s’est élargi pour ce natif de Tours, qui navigue dans les cercles artistiques depuis toujours, issu d’une famille d’artistes peintres. Le bouche à oreille est fondamental dans ce milieu. Gus Le Doc entretient et répare les guitares à 95 % de groupes locaux comme « The Sidewalk Bandits » depuis 1989, « Stuffed Foxes » plus récemment.

Concrètement, « avant leurs tournées, leurs concerts, ils viennent me voir pour que je vérifie les réglages pour être rassurés. Je prépare leurs basses et guitares au mieux. Mon travail se fait en lien avec les musiciens, j’aime bien parler avec eux, comprendre la manière dont ils pratiquent pour cerner au mieux leurs attentes. Également, j’apprécie de travailler avec eux sur la durée, ainsi un rapport de confiance s’installe. »

La majorité des clients de Gus le Doc sont des amateurs. Il intervient également au Centre de Formation des Musiciens Intervenants de Fondettes, Jazz à Tours et Tous en scène pour expliquer les ficelles de son job. Dans ce métier, il faut savoir démarcher, se faire une place, surtout lorsque l’on travaille à son compte.

Autodidacte, ce diplômé de commerce s’est lancé à 20 ans, par passion pour la musique, lui qui jouait à l’époque avec des amis dans un groupe Tribute to Pink Floyd. « J’ai commencé par démonter des guitares, je voulais comprendre comment cela fonctionnait. Le joli hasard a été d’être embauché chez Music Stock, situé à la Tranchée, puis j’ai été rattrapé par les clients et me suis lancé. »

L’avantage est bien entendu l’autonomie, la liberté de gérer son temps. Il répare en moyenne quatre guitares par semaine. Dès qu’il le peut, Augustin Gassies se déplace à vélo, son autre passion. Il formule d’ailleurs ce rêve : allier un jour musique et vélo.

Aurélie Dunouau

Au CHU, Olivia Delrieu la kiné qui vous remet debout

#VisMaVille Olivia Delrieu est masseuse-kinésithérapeute à l’hôpital Trousseau. Le rôle du kiné, ici, est central : celui de remettre debout le patient après une opération.

8 h 30, dans leur bureau du bâtiment de médecine physique et de réadaptation de l’hôpital Trousseau, les kinés sont derrière leurs écrans d’ordinateur. Dans le jargon, c’est l’heure des « transmissions » : l’équipe se communique les informations nécessaires sur les patients, avant de débuter les visites dans les chambres.

Au total, les kinés navigueront dans l’ensemble des services de médecine, chirurgie et de psychiatrie du site. Une transversalité caractéristique de la kinésithérapie hospitalière, ainsi que celle de traiter des patients en situation critique (services des brûlés, de réanimations, SOS main…).

Ce large panel a attiré Olivia Delrieu, masseur-kinésithérapeute à l’hôpital Trousseau depuis septembre 2022, après avoir travaillé à Clocheville pendant 13 ans. « J’ai commencé à exercer en libéral et ce qui me plaît ici c’est d’être dans la pathologie aiguë. À l’hôpital, le kiné a toute sa place, quand le patient est immobilisé depuis un certain temps, le remettre debout est primordial. On se sent utile. »

Cette étape, le kiné la réalise en lien avec l’équipe médicale. « J’aime aussi ce travail d’équipe avec les médecins, infirmiers, aides-soignants, ergothérapeutes. On apprend chaque jour, il n’y a pas de routine. Je suis plus à l’aise en respiratoire, je travaille surtout en réanimation chirurgicale et digestive, sur les greffes hépatiques, mais comme on s’entraide dans tous les services, chacun apporte ses compétences. »

Sortir de sa zone de confort anime la kiné de 39 ans, venue de Belgique. Olivia Delrieu a obtenu son diplôme à Bruxelles, puis suivi son mari en France, d’abord dans le Nord, avant de s’installer à Tours en 2007. Aujourd’hui maman de trois enfants, Chambray était pour elle le lieu idéal, avec un temps partiel à Trousseau. Les journées s’étirent jusqu’à 16 h 30 en semaine, avec des gardes les samedis et dimanches matins.

Les séances dans les chambres durent en moyenne 20 minutes par patient. Les kinés se déplacent avec leur matériel portatif léger, pour la kinésithérapie respiratoire ainsi que pour le renforcement musculaire. En réanimation, les kinés mobilisent leurs patients, pour prévenir les complications liées à l’alitement prolongé, leur apprennent comment se désencombrer, à bouger leurs membres : tout un travail préparatoire à la sortie de service.

« Une fois remis debout, notre rôle est aussi de les autonomiser, leur donner les clés pour qu’ils soient acteurs de leur rééducation, en leur expliquant les exercices. C’est de l’éducation thérapeutique. » Parfois, les histoires des patients sont lourdes mais Olivia Delrieu reste optimiste.

« C’est un métier où il faut être positif, il faut être prêt à accompagner les personnes quand elles sont au fond de leur lit. Il faut avoir envie d’y aller, avoir de l’humour, être dans le contact. Il arrive que les gens opérés soient dans des états confus, vraiment costauds, on se demande si ça va aller, et deux semaines après, ils remarchent dans les couloirs. Je trouve cela beau et je m’éclate dans ce métier. »

Aurélie Dunouau

Ecopia : Aline Lonqueu, la tisseuse de liens culturels

#VisMaVille Aline Lonqueu est directrice d’Ecopia, une structure culturelle d’accompagnement et de formation, basée à Tours. Son métier : épauler les acteurs culturels dans leurs parcours professionnels.

Dans le local d’Ecopia, situé en bord de Loire, au bout de la rue des Tanneurs, le coach du jour est Gwendal Stephan. Cet artiste tourangeau, venu du spectacle vivant, partage son expérience sur le cycle de formation visant à organiser un événement culturel dans l’espace public.

Dans l’année, la structure culturelle organise une soixantaine de journées de formation à destination des artistes et des professionnels de la culture sur des thématiques pros telles que « entreprendre dans la culture », « l’éco responsabilité dans le milieu culturel »…

« J’aime bien animer des formations, voir des rencontres se faire et les projets des personnes évoluer », souligne Aline Lonqueu. Ecopia est aussi spécialisée dans le conseil et l’accompagnement, point de départ de la structure qui a pris de l’ampleur en 20 ans d’existence : 200 artistes sont accompagnés chaque année dans leur insertion professionnelle, souvent bénéficiaires du RSA.

Ce métier de formation, conseil et accompagnement dans la culture, Aline Lonqueu l’exerce depuis 2017 à Ecopia. Arrivée en indépendante après un master en politiques culturelles, un premier emploi au centre culturel italien à Paris puis l’accompagnement en production dans le spectacle vivant dans le Loir-et-Cher. Elle en est devenue la directrice en 2021.

 

Son rôle : opérationnel bien sûr, avec la gestion d’une équipe de dix personnes, les RH, les bilans financiers, la recherche de partenariats, mais aussi une partie plus relationnelle, informelle, celle de tisser des liens, créer des réseaux. « Nous sommes à la croisée des chemins entre la culture, l’économie sociale et solidaire, et l’entrepreneuriat. Ce sont des milieux qui ne se rencontrent pas beaucoup. D’où l’originalité de notre structure. »

Aline Lonqueu passe ainsi beaucoup de temps et d’énergie les soirs dans les réunions, les CA, et dans les événements culturels. « C’est ce qui fait la force de ce métier, se donner les moyens de se créer un réseau. » Et elle sait de quoi elle parle : être, à 38 ans, une femme à la tête d’une structure culturelle suppose beaucoup de détermination voire de sacrifices sur sa vie personnelle.

Elle a d’ailleurs apporté à Ecopia sa touche féministe. Un incubateur féminin dénommé Essent.ielles a été lancé l’année dernière, partant du constat « que nous avons deux fois moins de femmes qui entreprennent des projets que des hommes, pour diverses raisons. » En parallèle, elle a participé à titre individuel et bénévole au programme de mentorat régional « Affranchies » en aidant une jeune femme à accéder à un poste à responsabilité.

« C’était une expérience très riche, la cause de l’égalité femme-homme me tient à cœur. Le fait qu’il y ait deux fois moins de femmes à des postes à responsabilité dans la culture est très questionnant », admet Aline Lonqueu qui se souvient de ses débuts à la direction d’Ecopia, et de l’importance des réseaux pour réussir sa carrière à la tête d’une structure culturelle. Elle est d’ailleurs devenue, depuis l’automne dernier, coprésidente du collectif H-F Centre- Val de Loire.

Aurélie Dunouau

Bénédicte Chaleroux, la spécialiste des plantes aromatiques

#VisMaVille Bénédicte Chaleroux est productrice de plantes aromatiques et médicinales à Mettray. Elle les transforme en tisanes et sirops, sous l’étiquette des « Plantes de la Sévaudière ».

Habitant Tours, Bénédicte Chaleroux arrive en vélo électrique sur son lieu de travail, dont les bâtiments sont imposants. La ferme de la Paternelle, à Mettray, est logée dans la ferme de l’ancienne colonie pénitentiaire. Ils sont trois à se partager les lieux, dans une même dynamique et vision du travail : Bénédicte Chaleroux, productrice de plantes aromatiques et médicinales, Julien Davaze, producteur d’huiles et légumineuses et les Savons d’Amélie.

Ensemble, ils ouvrent leur petite boutique bio le vendredi après-midi et partagent leurs savoir-faire et matériels, allant jusqu’à imaginer fabriquer des baumes à base de plantes pour septembre prochain.

Bénédicte Chaleroux occupe le petit bureau derrière la boutique où elle prépare ses 4 000 tisanes à l’année ainsi que ses 1 500 sirops. Semis, séchage, empaquetage, tout est confectionné sur place. Le terrain d’aromates de Bénédicte de 1 000 mètres carrés, mêlant thym, romarin, sauge, aubépine, verveine, camomille, lavande… est situé à quelques mètres, entouré de champs biologiques.

En ce moment, la paysanne herboriste est occupée par les plantations d’une trentaine d’essences de plantes. Un carré supplémentaire de menthes est prévu cette année, suite à la demande de bars tourangeaux qui en ont besoin pour élaborer leurs mojitos. Sinon, elle vend principalement dans des magasins de producteurs et bio, les Amap, mais est aussi connue pour ses sirops créés spécialement pour la guinguette de Tours, la « remise en route » et « le philtre d’amour ».

Car avant de se lancer il y a huit ans dans cette activité sur le terrain de la Sévaudière à Esvres-sur-Indre, Bénédicte Chaleroux baignait dans le milieu socio-culturel. Elle est passée par la guinguette et s’est occupée longtemps de compagnies de théâtre.

Ce réseau qu’elle s’est créé l’aide aujourd’hui à vendre, dans un métier assez précaire et aléatoire. La naissance tardive de ses enfants l’amène à se poser. Son tout jeune fils malade, elle se replonge dans sa bibliothèque garnie de livres sur les plantes médicinales, une passion transmise par sa grand-mère. Et c’est la révélation.

« Cela m’était sorti de la tête, j’avais toujours eu ça en moi et depuis, je ne veux plus faire autre chose que de travailler avec les plantes et les humains, car les deux sont intimement liés. Nous sommes un élément à part entière de la nature. » Que ce soit en prévention ou en curatif, elle ne cesse d’en découvrir les bienfaits et de les associer dans ses tisanes.

Formée à la Maison Familiale Rurale de Chauvigny et en ligne par l’école québécoise d’herboristerie, Floramedicina, Bénédicte Chaleroux avoue que c’est surtout « un métier qui s’apprend sur le tas ». Aujourd’hui, elle transmet elle-même ses connaissances acquises à ses stagiaires et lors d’ateliers qu’elle propose pour étudier les plantes au fil des saisons, sur le terrain de la ferme de la Paternelle. La prochaine session aura lieu le 3 juin.

Aurélie Dunouau

Enzo Petillault, la voix Béton, l’esprit Aucard

#VisMaVille Enzo Petillault est chargé de production. Un temps sur les ondes de Radio Béton, un autre sur l’organisation du festival Aucard de Tours, il surfe sur sa passion : les découvertes musicales.

Sa voix ou son visage ne doivent pas vous être totalement inconnus si vous êtes familier de « Béton », comme on dit à Tours. Depuis 12 ans, on l’entend sur le 93.6 parler de musique ; on le croise le mercredi à l’animation du « Quart d’heure tourangeau » au Balkanic ou à La Gloriette, aux manettes d’Aucard de Tours.

S’il est entré, en 2011, chez Béton Production dont il est l’unique salarié au sortir de ses études, après un master de médiation culturelle à la fac de Tours, Enzo Petillault, 36 ans, est désormais rôdé. « J’avais déjà une expérience d’organisation de concerts, lorsque j’étais lycéen à Bourges. En rentrant à Béton, c’était bien sûr une autre dimension. J’ai beaucoup appris des bénévoles de l’association qui m’ont chapeauté et je suis devenu rapidement autonome. Je partage une vision de la musique alternative, une bonne entente avec les bénévoles. »

Un lien qui compte lors de l’organisation du festival qui mobilise jusqu’à 180 bénévoles par soir. Cela lui avait manqué lors des deux années Covid. « Passer son temps devant un ordinateur à remplir des tableaux Excel et ne pas rencontrer le public ni les bénévoles, c’était très frustrant. Aucard, c’est aussi comme une colonie de vacances pour adultes. On vit des moments intenses sur deux semaines entre le montage et le démontage, la préparation des repas. »

Le festival Aucard de Tours occupe Enzo Petillault à peu près à 70 % de son temps annuel, le reste se lissant sur la vie de la radio. « Sachant que c’est poreux, ajoute-t-il. C’est le même boulot de découvertes musicales. J’écoute beaucoup de musique, je vois pas mal de concerts. Je suis très rock mais j’écoute de tout, de la pop à l’électro en passant par la soul et le metal. »

De septembre à février, il se concentre sur la partie artistique – la programmation, déniche les artistes têtes d’affiche et des moins connus. « L’important est d’allier les deux. Mais ce qui me fait le plus plaisir est que les gens apprécient en concert un groupe qu’ils ne connaissaient pas. »

Au printemps, tout est calé, il passe sur la partie production de l’événement qui se déroule en juin : caler les plannings, réserver les transports et les hôtels, s’occuper de la communication, de la partie technique, toujours épaulé par une quinzaine de bénévoles. « C’est une période plus dense, Il ne faut rien oublier pour que tout le matériel arrive à l’heure et reparte dans les temps. »

Aucard de Tours brasse aujourd’hui de 350 à 400 000 euros de budget. « Nous avons connu 15 % d’augmentation mais le budget programmation n’a pris que 10 000 euros de plus. À moi d’aller chercher des choses moins connues, et pas les artistes les plus demandés qui ne cessent d’être de plus en plus chers. Nous avons aussi une jauge de 4 500 personnes qui ne bouge pas, c’est souvent plein comme l’année dernière et cela permet un équilibre financier. Nous n’avons pas l’intention de grossir. »

Une philosophie qui correspond à l’esprit Béton, libre et à l’écart du moule dominant.

Aurélie Dunouau

Accompagner vers un emploi ou un diplôme, c’est l’affaire de Magali Egliseau !

Magali Egliseau est formatrice à l’Association de Formation Professionnelle Polytechnique de Touraine (AFPP). Son but : accompagner les personnes vers l’emploi ou un diplôme.

Dans les locaux de l’AFPP de Touraine, boulevard Preuilly, Magali Egliseau pousse le tableau numérique roulant devant un groupe de stagiaires à la Garden Cie, entreprise d’entraînement fictive leur permettant de se former aux rouages d’une boîte du tertiaire. Détendue dans son approche, elle fait le point sur leur campagne de communication à venir, comme en vrai.

Difficile de deviner qu’il y a 15 ans, Magali Egliseau aujourd’hui formatrice et coordinatrice du dispositif de l’Entreprise d’entraînement pédagogique (EEP), était elle même à la place des élèves. « Je vous préviens, mon parcours dans la parcours dans la formation est atypique, glisse -t-elle en préambule. Aujourd’hui, pour être formateur, le titre de formateur pour adultes est un minimum. »

Après une licence en AES à Tours, la voici assistante commerciale à Chambéry durant 11 ans. Puis un congé parental l’éloigne du marché du travail, jusqu’à son retour en terre tourangelle et l’orientation de Pôle emploi vers l’AFPP qui l’amène en stage à l’EEP puis à être directement embauchée par l’organisme de formation pour adultes.

Ce n’est donc pas un hasard si Magali Egliseau exerce aujourd’hui son métier avec empathie et compréhension et place la bienveillance comme la principale qualité du formateur. « J’ai pour mission de transmettre un savoir mais aussi d’accompagner les stagiaires. Dans le cadre de l’EEP, je m’immerge dans l’entreprise comme chef de service. Je leur montre comment faire les choses puis ils les font eux-mêmes, avec le droit à l’erreur. La meilleure pédagogie expérimentale, c’est d’apprendre de ses erreurs. »

Magali Egliseau voit son rôle comme un accompagnement au sens large. Ici le public va de jeunes gens au chômage sans qualification ou à bac +5, à des personnes plus âgées, proches de la retraite, avec des parcours de vie propres, parfois éloignés de l’emploi.

« J’ai une écoute active, je m’adapte à cette diversité de profils et j’essaie de gommer les certitudes qu’ils peuvent avoir, dans leurs pratiques et leur image souvent dévalorisée. » Un rôle de coach en quelque sorte pour leur redonner confiance. À l’AFPP, Magali Egliseau a aussi évolué de son côté.

Elle a commencé comme formatrice à l’EEP puis a chapeauté le service. Entretemps, elle a développé les titres professionnels d’assistant commercial et de ressources humaines, qui permettent d’obtenir en 6 mois un bac + 2. Mais elle est revenue à l’EEP car c’est ici qu’elle se sent bien. « J’adore le concept, ce n’est pas comme l’école obligatoire, les stagiaires font une démarche personnelle pour candidater. »

Recrutements, entretiens individuels et collectifs, formations, évaluations,… son métier est assurément au contact des autres même si la part d’administratif n’est pas négligeable. En tout cas, Magali Egliseau ne décroche pas son sourire. « Cela fait 15 ans que je ne me lasse pas, de 9 h à 17 h, je ne vois pas la journée passer. Et même si je gagne moins que mon ancien métier d’assistante commerciale, ici au moins je m’éclate. »

Aurélie Dunouau

Dans le quotidien de Jean-Paul Baunez, président de la Banque alimentaire de Touraine

#VisMaVille Jean-Paul Baunez est le président de la Banque alimentaire de Touraine. Chaque jour, ce retraité donne de son énergie pour lutter contre la précarité et le gaspillage alimentaire.

11 h 30. L’activité bat son plein dans l’entrepôt de 2 200 m2 de la Banque alimentaire de Touraine, installée rue des Grands Mortiers, à Saint-Pierre des-Corps. Les quatre camions de collecte déchargent chacun leur tour les denrées collectées auprès des grandes surfaces de la Métropole.

Une trentaine de bénévoles est à pied d’œuvre, chacun à sa tâche : déchargement, tri, pesée, remplissage des données tracées par informatique, préparation des cartons pour les associations qui viendront les récupérer l’après-midi, administratif…

Au total, ce sont 123 bénévoles et trois salariés qui assurent la mission de collecte et de redistribution de l’aide alimentaire, du lundi au vendredi. Certains sont là de longue date comme Nicole, 82 ans.

Jean-Paul Baunez, le président depuis un an, est au poste depuis 6 h 45. Tous les jours depuis cinq ans, cet ancien expert-comptable tient sa place, imprégné et passionné. « J’ai toujours été attiré par le domaine du social. Je souhaitais donner du temps et de l’énergie à ma retraite. C’est à la Braderie de Tours que j’ai rencontré les membres de la Banque alimentaire sur un stand, et ça a tout de suite tilté. L’idée de se battre contre la précarité et le gaspillage alimentaire m’a parlé. »

La première mission de la Banque alimentaire est en effet de collecter les invendus des grandes surfaces, des plateformes agroalimentaires et des producteurs mais aussi les surplus de la cuisine centrale et de l’hôpital, qui représentent, avec les dons particuliers, 1 600 tonnes en 2022 soit trois millions de repas distribués.

Ensuite, les conserves, les légumes comme les produits frais gardés dans la chambre froide sont dispatchés entre les 62 associations tourangelles et le CCAS selon leur nombre de bénéficiaires. Ils étaient 15 760 à recourir à cette aide l’an dernier dans le département. Des chiffres qui ne cessent d’augmenter.

« Ces derniers mois, nous avons de 9 à 10 % de bénéficiaires de plus tandis que la collecte a baissé de 3 %, détaille Jean-Paul Baunez. Nous sommes obligés de rééquilibrer par des dons et d’aller chercher des solutions. » Le président est, en effet, chargé de coordonner, de superviser les équipes, de gérer les finances mais aussi d’impulser des projets, comme une plateforme informatique pour que les petits producteurs en milieu rural référencent leurs surplus, ou encore le futur atelier de transformation des aliments (« les Restorés de Touraine »).

Cet aspect de lutte contre le gaspillage lui tient à cœur tout comme la sensibilisation à l’équilibre nutritionnel via la cuisinette ambulante qui se balade dans les associations et collèges. « Il ne suffit pas de donner de l’aide alimentaire, il faut aussi l’accompagner. » Ce qu’il aime aussi dans son bénévolat, c’est l’ambiance « chaleureuse ». Il n’y a qu’à le voir plaisanter avec les autres bénévoles, qui n’hésitent pas à faire des kilomètres pour rejoindre l’entrepôt malgré le coût du carburant, pour comprendre qu’il s’agit bien d’une « pette famille ».

Aurélie Dunouau

Socio-esthétique : Renouer avec son corps en cancérologie

#VisMaVille Sylvie Guillemoz est socio-esthéticienne. À l’hôpital de Tours, elle prodigue des soins essentiels pour les malades atteints de cancer.

Je suis contente de voir que vous avez une peau beaucoup plus lumineuse que la dernière fois. » Sylvie Guillemoz, socio-esthéticienne depuis deux ans au CHRU, après une formation au Codes (cf. encadré), accueille ce mardi, au service cancérologie de Bretonneau, une patiente qui vient de subir des séances de chimiothérapie.

Pendant une heure, sur fond de musique douce, pieds, mains, tête et corps seront massés et hydratés par Lorine, stagiaire au Codes, sous le regard de Sylvie qui l’évalue ce jour-là. Lorine finira par un maquillage qui redonnera le sourire à la patiente.

« Nous sommes une petite bulle de douceur au milieu des protocoles de traitement agressifs, explique Sylvie. Nous apportons du bien-être aux patients qui subissent les effets secondaires des radiothérapies et chimiothérapies, des brûlures sur leur peau, la perte de cheveux, d’ongles. »

Également, la socio-esthéticienne ne manquera pas de conseiller la personne sur les soins à suivre chez elle. « Je vous ai préparé un coffret avec des échantillons. Faites le sérieusement pour traiter vos brûlures », lance avec bienveillance Sylvie à la fin de la séance.

En cancérologie, elle reçoit cinq à sept patients tous les mardis dans son petit cabinet ou bien monte prodiguer ses soins dans les chambres, pour les adultes comme pour les enfants et adolescents. Chaque personne peut bénéficier de ces soins gratuits, financés par La Ligue contre le Cancer et l’hôpital principalement.

Au-delà des soins classiques d’esthétique, le rôle de la socio-esthéticienne est de conseiller mais aussi d’écouter la personne. « Il faut beaucoup d’empathie pour exercer ce métier, aimer prendre soin de la personne dans sa globalité. Je prends toujours le temps et je m’adapte dans les gestes et l’écoute. Ce qui est important aussi, c’est le suivi pour voir l’évolution du soin sur la peau. »

Le côté social du métier est ici primordial. « Nous avons certaines personnes en précarité qui découvrent les soins, qui n’ont jamais été massées, n’ont tout simplement pas les moyens de prendre soin d’elles ; ici, elles retrouvent une estime de soi. »

Lorsqu’elle ne travaille pas à l’hôpital de Tours, Sylvie Guillemoz exerce en micro entreprise dans d’autres structures dans le Loir-et-Cher où elle habite, en EHPAD, dans des établissements dédiés aux malades d’Alzheimer ou aux personnes handicapées. Mais c’est à l’hôpital qu’elle s’est révélée. « J’ai l’impression d’être à ma place ici. Je travaillais avant en pharmacie, puis à la vie scolaire d’un collège et j’ai élevé mes six enfants. Ici, depuis deux ans, j’ai découvert le milieu médical et c’est le poste que je préfère. Je ne m’ennuie pas. »

L’infirmière coordinatrice du service d’hospitalisation des enfants-adolescents vient de passer la porte du cabinet de Sylvie. « J’ai un ado qui souhaiterait un massage, ce serait possible ? ». « Je monte dans sa chambre à 13 h », répond, avec le sourire, la socio-esthéticienne.

Texte et photos : Aurélie Dunouau

A l’Atelier d’Offard, Simon Florent est l’orfèvre du papier peint

#VisMaVille Simon Florent est « dominotier » ou imprimeur à la planche de papiers peints à l’Atelier d’Offard de Tours. Depuis huit ans, il y développe son goût pour l’artisanat et l’histoire.

Minutieusement, il déroule son papier peint sur 300 mètres linéaires, y imprime les nuances de vert à l’aide de sa planche faite sur mesure, aidé par Hardy. Simon Florent, le chef d’atelier, est en mode concentré. Dans l’atelier d’Offard, situé en haut de la Tranchée, à Tours Nord, le travail se déroule en silence cet après-midi-là pour les cinq artisans d’art, sur fond musical.

L’entreprise est singulière dans le paysage tourangeau et même français : elles ne sont qu’une poignée à perpétuer le savoir-faire des papiers peints à la planche des grandes manufactures des XVIII et XIXe siècles, par les « dominotiers ».

Ici l’impression se déroule par superposition de couleurs planche après planche, les cylindres n’ont pas droit au chapitre. « Nous reproduisons fidèlement des modèles historiques avec du neuf, explique Simon Florent. Dans 80 % des cas, tout part d’un vieux document décollé envoyé par le client et nous le restaurons à l’identique. »

Pour cela, l’atelier redessine le modèle sur informatique puis crée des plaques en résine sur-mesure. « La planche de gaufrage permet de donner du relief au papier, détaille le jeune chef d’atelier de 31 ans. Nous avons entre 400 et 500 références de ces planches, nous recréons nous-mêmes les couleurs à partir des échantillons et nuanciers. » Au final, il en ressort une qualité picturale et d’impression visible.

« Avec cette technique on a aussi la liberté d’aller chercher des effets de matière, s’amuser à aller chercher un grain particulier » assure Simon Florent. Lui a commencé comme menuisier-ébéniste avant d’intégrer, en 2016, l’atelier d’Offard. « Je suis l’un des plus vieux ici », sourit-il. Chacun maîtrise la fabrication du papier peint de A à Z, il n’y a pas de poste fixe ni de journée type, même si Simon dit pouvoir rester quelques jours coincé derrière la presse. C’est un travail physique, qui demande de l’énergie et une passion certaine pour l’art.

« Je m’éclate surtout avec les commandes des monuments historiques, précise-t-il, dépliant une copie de tenture tissée en velours rouge du XVIIIe siècle. Réaliser le décor du château de Fontainebleau ou de maisons illustres est à la fois classique et intemporel. À l’époque, ils n’étaient pas timides sur les couleurs. On aurait tendance à vieillir les reconstitutions, à ne pas assez doser la couleur, mais c’est une erreur. Cela je l’ai appris aux côtés de François Xavier (F-X. Richard, le fondateur et patron de l’Atelier d’Offard). »

Autre satisfaction du métier : « nous avons la chance d’être à l’embryon du projet jusqu’à la finalisation. Lorsque l’on intervient sur le chantier final pour poser le papier, on se rend compte de la globalité du projet, ce pour quoi on le fait. On arrive parfois dans des décors incroyables. Je me souviens notamment de de la Villa Laurens à Agde qui était assez dingue, comme une villa romaine. C’est émouvant », conclut Simon Florent.

Texte et photos : Aurélie Dunouau

 

Barbara Goutte, la vidéaste aux yeux créatifs

#VisMaVille Barbara Goutte est vidéaste, réalisatrice de contenus audiovisuels. C’est en Touraine qu’elle filme artistes et entreprises, avec l’envie de sublimer chacun par l’image.

Installée sur le canapé de son bureau des ateliers de la Morinerie à Saint-Pierredes- Corps, avec son rouge à lèvres, ses yeux et cheveux bleus, elle a un petit air de Jinx, personnage de la série Arcane, version sympa. Dans la vraie vie, Barbara Goutte n’a pas pour habitude d’être devant le cadre, elle est plutôt derrière sa petite caméra Sony à filmer les autres.

La jeune femme de 27 ans, à peine deux ans dans le métier, a déjà un carnet d’adresses bien rempli et une notoriété qui se construit à grands pas dans le milieu tourangeau. Productrice de contenus audiovisuels, elle filme, prend en photo, construit des images et des clips à destination de ses clients : des entreprises, des particuliers, des institutionnels comme TV Tours, la Ville de Tours et la Métropole, mais aussi des artistes musicaux tels que Shælin, Myosotis, Jane et les autres. Elle réalise également des making-of pour le réalisateur franco-canadien Fred Grivois.

Après une école de cinéma à Toronto où elle est restée vivre cinq ans et un stage à Canal +, elle décide de poser ses valises à Tours, non loin de la Sologne où elle a grandi. En 2020, en plein Covid, elle prend un travail d’agent d’accueil chez Mame tandis qu’elle démarre son activité de vidéaste en auto-entrepreneur.

Les startupers de Mame et la Métropole seront d’ailleurs ses premiers clients. « Grâce à Mame, j’ai pu au bout d’un an arrêter mon job alimentaire et me mettre à mon compte à temps plein. Cela a déterminé le développement rapide de mon activité. »

Aujourd’hui ses vidéos circulent vite sur You Tube et les réseaux sociaux. En ce moment, elle poursuit une collaboration avec la boîte de nuit de Rochecorbon, le Red Club. Un monde du spectacle qu’elle adore filmer. « J’aime ce métier qui me permet de travailler dans plein de secteurs différents, je ne m’ennuie pas. Le milieu artistique me laisse une liberté créative plus grande, plus de couleurs possibles. Pour des entreprises, c’est plus carré. »

Elle est souvent appelée à construire des aftermovies, des films en direct lors de soirées d’entreprises. Elle mène aussi des interviews, construit des scénarios… Un travail élaboré seule de A à Z, de la conception, de l’écriture du script au montage des images. « Le temps de la rencontre avec la personne, l’échange est important. Ensuite, j’essaie de sublimer par l’image ces personnes, qui sont souvent passionnées par leur métier. Je me demande quelles images peuvent correspondre à leur personnalité, à l’entreprise, les mettre en valeur. »

Derrière ce travail à la fois technique et créatif, Barbara Goutte Production y apporte sa patte, sa signature visuelle, reconnaissable d’après son entourage. Un aspect qu’elle développe sur son temps personnel à travers la réalisation de courts-métrages plus expérimentaux, dont un réalisé dernièrement dans le bassin de la piscine du lac.

Texte et photos : Aurélie Dunouau

Alexandra Macou, la psy à l’écoute des élèves

#VisMaVille Alexandra Macou est psychologue de l’Éducation nationale. Orientation et psychologie représentent les deux facettes de son métier qu’elle exerce au CIO de Tours et dans les établissements scolaires.

Les anciens conseillers d’orientation- psychologue sont devenus il y a cinq ans « psychologues de l’Education nationale ». En effet, la psychologie constitue la base de leur formation. Diplômé en bac + 5 dans cette discipline, il faut ensuite poursuivre une année pour obtenir un certificat d’Éducation nationale et ainsi devenir titulaire.

Alexandra Macou, psychologue de l’Éducation nationale au Centre d’Information Orientation (CIO) de Tours depuis cinq ans, décrit trois missions principales : l’orientation – la plus connue, mais aussi le repérage de difficultés scolaires, ainsi que l’accompagnement sur des questionnements personnels de l’élève.

Sur ce dernier point, « il s’agit d’une tendance, nous avons de plus en plus de questions de genre et de transidentité. Nous devons être à l’écoute et accompagner l’élève. Cela peut aller jusqu’à modifier son prénom en interne, son pronom, avec l’accord des parents ».

La semaine d’Alexandra Macou se partage entre sa permanence au CIO, située dans les locaux de Joué-lès-Tours, et sa présence au collège de La Bruyère, à Tours Nord et au lycée professionnel Martin Nadaud, à Saint- Pierre-des-Corps. Un troisième établissement se rajoute pour ceux qui exercent à temps plein, Alexandra Macou étant à 80 %. « On reçoit les élèves à leur demande, celle de leurs parents ou bien celle d’un professeur ou de la direction. Ce peut être également un éducateur qui suit l’enfant. »

Le psychologue travaille en lien étroit avec l’équipe éducative, infirmière et Conseiller principal d’éducation, des acteurs majeurs pour le repérage des difficultés personnelles. « On ne fait pas de suivi psychologique en soi mais un premier accueil, si besoin on oriente vers les bonnes structures. »

Alexandra Macou qui, auparavant, a travaillé à l’Ecole de la Deuxième chance, après une expérience auprès des apprentis à la Chambre des Métiers (CMA) et à Pôle emploi, s’est découvert au fur et à mesure une vocation : lier orientation et psychologie des jeunes adolescents. Un rôle précieux lorsque les premiers choix professionnels se posent pour les collégiens et lycéens qui disposent d’une multitude d’informations sur internet mais peuvent se retrouver perdus.

« On les aide à travailler leur projet, les mettre en lien avec leur personnalité, leurs goûts, leurs envies et les possibilités pour rendre ce projet réaliste et réalisable. Cela fait appel à la connaissance de soi. En fait, il est difficile de se projeter professionnellement à cet âge, à part quelques exceptions, il faut savoir que cela se définit plutôt vers 18 ans et que le cerveau se développe jusqu’à 25 ans. »

De son côté, Alexandra Macou apprécie de s’adapter à un public différent, en âge mais aussi en situation de réussite ou d’échec scolaire. « C’est la richesse de notre métier d’être auprès de jeunes à chaque fois différents, que ce soit en collège, lycée général ou professionnel. Et puis on reçoit aussi les parents parfois plus stressés que leurs enfants sur les choix d’orientation à faire. »

Texte et photos : Aurélie Dunouau

Stéphanie Huret, le nouveau visage des antiquaires

#VisMaVille Stéphanie Huret est antiquaire à la Galerie Zola. Elle vient de prendre la relève d’une partie de la galerie Gabillet, bien connue à Tours. Un pari et une reconversion pour cette passionnée d’art.

Une femme dans un monde d’antiquaires, déjà ce n’est pas banal. Mais une prothésiste dentaire qui se reconvertit à la cinquantaine dans ce milieu de niche, encore moins. Richard Gabillet, l’antiquaire-expert référence de la ville avec qui elle travaille en partenariat, souligne son « courage de se lancer dans ce métier en voie de disparition ».

La galerie divisée en deux, Stéphanie Huret a repris le bail commercial de la partie ancienne en juin 2020. La nouvelle antiquaire détonne dans ce milieu par sa fraîcheur mais rivalise par sa passion, comme un poisson dans l’eau au milieu des meubles et tableaux antiques, XVIII et XIXe siècles ainsi que des tapisseries Offard qui ornent les murs de sa galerie.

« J’ai toujours aimé l’art, j’ai visité beaucoup de musées à travers le monde et fait des rencontres incroyables qui m’ont permis de changer de métier. » Aujourd’hui, elle s’investit à fond, apprenant sur le tas. « Quand je cherche un objet, je fonctionne sur le coup de cœur, j’ai d’ailleurs parfois du mal à m’en séparer quand les clients l’achètent. »

Le temps fort de son métier, l’achat d’objets, que ce soit des peintures, des meubles, de sculptures, des horloges… l’occupe aussi en dehors de sa présence à la boutique. « Les dimanches, j’en profite pour aller chercher un objet chez un client collectionneur, livrer ou chiner dans les foires professionnelles. Il n’y a pas d’horaires dans ce métier.»

Les objets proviennent également des successions, des achats entre professionnels physiques ou virtuels via le site internet Proantic qui référence plus de 2 000 œuvres. L’achat et la vente par internet sont d’ailleurs en train de faire évoluer le métier. Stéphanie Huret, inscrite sur Proantic, a par ailleurs monté le site internet de la galerie Zola, l’alimente en textes et photos, lui permettant ainsi une nouvelle visibilité.

Après l’achat, l’étape importante consiste à « rechercher l’historique de l’objet pour apporter une garantie à la clientèle ». Recherche de l’auteur de l’œuvre s’il n’est pas connu, de son histoire, de celle de la vie et des caractéristiques de l’objet, pour aboutir à une fiche complète.

L’accueil attentionné des clients, des expos d’artistes locaux font également partie de la recette maison. Ici, ce n’est pas un hasard si « Expo » est affiché à l’entrée, il s’agit de rendre l’art accessible. « Beaucoup d’étudiants viennent visiter comme dans un musée, et puis vous pouvez, en plus, toucher les objets. »

Enfin, Stéphanie Huret ajoute une corde à son arc d’antiquaire : la petite restauration. Son œil expert de prothésiste dentaire et sa pratique des matières lui permettent de déceler les moindres imperfections mais aussi de resculpter, restaurer, des détails abîmés. Pour les restaurations plus conséquentes, elle fait appel aux artisans d’art. Elle se dit aujourd’hui « dans son élément, entourée de beaux objets ».

Texte et photos : Aurélie Dunouau

Dans le quotidien d’Emilie Juquois, sapeur-pompier professionnelle

#VisMaVille Il y a 20 ans, Émilie Juquois devenait la première femme sapeur-pompier professionnelle à la caserne de Joué-lès-Tours. Aujourd’hui, elle vit son métier avec toujours autant de passion.

Tout a commencé à Montlouis, chez elle, comme pompier volontaire, où elle exerce toujours d’ailleurs avec son mari, durant son temps libre. La vocation de pompier se partage souvent en famille. « Si je suis arrivée là, c’est grâce aux valeurs que m’ont transmises mes parents », n’oublie pas Émilie Juquois, 42 ans, sapeur-pompier professionnelle à Joué-lès-Tours depuis 2003.

Avec son mari, lui aussi pompier professionnel à Amboise, ils alternent des gardes de 12 à 24 heures plusieurs fois par semaine, leur laissant aussi le loisir de s’occuper à tour de rôle de leur fille Jade. Un pompier professionnel réalise cent gardes par an à hauteur de 1 607 heures.

Après des études de commerce et des petits boulots à La Poste, Émilie Juquois a démarré emploi jeune au SDIS 37 puis a passé son concours de sapeur-pompier 2e classe.

Aujourd’hui sergent-chef et très sportive, elle conduit le camion, grimpe les cordes et les planches, ce qui a, au début, impressionné dans un monde d’hommes. « Je n’ai pas un grand gabarit mais il faut des bras. Cela m’a permis de faire ma place ici », rigole celle qui a démarré en étant la seule femme dans l’équipe. Elles sont aujourd’hui quatre dont la cheffe de centre. « Notre présence a déridé un peu aussi les gars, c’est important d’avoir de l’empathie et d’être à l’écoute dans ce métier. »

Car l’activité de pompier est principalement tournée vers les secours à la personne et il faut souvent faire preuve, outre de physique, de psychologie.

« C’est 80 % de nos interventions. Il faut aimer aider les gens car c’est parfois compliqué. Le reste concerne les incendies et opérations diverses. Le problème c’est que de plus en plus de gens nous appellent alors que ce n’est pas justifié, ce qui retarde les secours pour des interventions plus urgentes, déplore la sergent-chef. Dès que quelqu’un ne répond pas au téléphone ou met un message inquiétant sur les réseaux sociaux, on nous appelle pour forcer des portes ! C’est devenu notre quotidien. »

Des interventions qui parsèment une journée type de pompier. Celle-ci démarre à 7 h 30 par le rassemblement, tous en rang, avec l’attribution des fonctions du jour par le sous-officier, puis la vérification du matériel. Enchaînement avec une heure de sport ici à la caserne, à côté au lac des Bretonnières ou sur la piste de Jean Bouin. À nouveau rassemblement, et c’est parti pour deux heures d’exercices de manœuvres.

L’après-midi, le scénario se répète avec également des travaux dans les services, selon les spécialités de chacun. « Je m’occupe du service de prévention et de gérer les manœuvres », explique Emilie Juquois qui possède le permis poids lourd. Tout ceci est, bien évidemment, chamboulé par les multiples sorties des pompiers appelés à intervenir. Avant le retour à la caserne et la poursuite de la garde dans la nuit.

Textes et photos : Aurélie Dunouau

Eric Vasseur, l’agent de collecte tout terrain

#VisMaVille Éric Vasseur est agent de collecte à la métropole de Tours. Un métier loin de la routine, pas tous les jours facile mais qu’il mène, avec son trio, dans la bonne humeur.

8h 30 du matin. Peu à peu, les équipes d’agents de collecte arrivent au dépôt de Tours Nord, situé rue Huygens. C’est l’heure de la pause-café avant de repartir sur la seconde tournée de la journée. Depuis 5 h 45, Eric Vasseur et ses deux coéquipiers sont sur le terrain, après avoir préparé leur camion à 5 h 30.

L’un conduit, les deux autres sont debout accrochés à l’arrière du camion. Ils enchaînent les ramassages de déchets, s’activent, courent, plaisantent parfois entre deux bacs ou échangent quelques mots avec un habitant venu à leur rencontre.

 

Chaque jour, du lundi au vendredi, 10 bennes de 26 tonnes partent du dépôt de Tours Nord, avec chacune sa zone définie. Celle d’Eric Vasseur, Franck Porteboeuf et Richard Marcelline, tous trois agents de collecte de la métropole, anciennement appelés chauffeurs-ripeurs, arpente la zone commerciale du côté de l’hypermarché Auchan, de la zone industrielle et des lotissements de la Milletière.

Sous la pluie, le vent ou le soleil, peu importe les conditions météorologiques, 9 à 10 tonnes sont collectées en moyenne sur ce parcours, avant que les déchets soient amenés au centre d’enfouissement de Sonzay.

 

La journée d’un chauffeur-ripeur se termine vers 12 h 45 en règle générale. Eric Vasseur est, quant à lui, salarié de la métropole depuis juin 2009. Auparavant il exerçait comme chauffeur routier. « Ici les journées ne se ressemblent pas, selon la météo, les gens qu’on rencontre, les obstacles sur la route, ce n’est pas la routine ! Nous avons une tournée type avec des imprévus, des travaux souvent. On s’adapte. »

Une tournée bien rodée par le trio depuis plus d’un an. « On est toujours la même équipe et c’est agréable de travailler avec eux, dans la bonne humeur. » Le teint toujours halé par son travail d’extérieur, il apprécie également de ne pas être enfermé de la journée. « Je me voyais mal travailler dans une usine. »

Eric Vasseur voit son métier comme une manière de « se rendre utile pour les usagers. Nous avons une image de service public à donner ». Même si, parfois, les habitants râlent un peu envers les agents de collecte quand ils ralentissent la circulation. Sur le terrain, on se rend compte de la difficulté de leur mission : grosses voitures mal garées leur laissant peu de passage dans des lieux étroits, vélos et trottinettes circulant sur les trottoirs, il faut être un chauffeur hors pair pour exercer ce métier.

Également, la condition physique est une donnée importante. « C’est sûr qu’il faut avoir une bonne hygiène de vie, conseille Eric Vasseur, qui se lève à 4 h 30 et pratique souvent le VTT à travers le nord de l’agglomération pour se détendre. On n’est pas à l’abri de l’accident, de la blessure. Même si les véhicules sont aujourd’hui automatisés, vous appuyez sur un bouton et le bac se lève tout seul, il faut être en permanence vigilant ».

En moyenne, un agent de collecte parcourt 18 km à pied par jour et collecte 400 bacs à lui tout seul, précise Damien Fraillon, le responsable du dépôt de Tours Nord.

 

Texte et photos : Aurélie Dunouau

Musée des Beaux-Arts : dans le quotidien de Jessica Degain, conservatrice du patrimoine

#VisMaVille Jessica Degain est conservatrice du patrimoine au musée des Beaux-Arts de Tours. Sous les feux des projecteurs avec le commissariat de l’exposition François Boucher, elle mène un travail de fond sur les œuvres.

2022 est une grande année pour Jessica Degain. La jeune conservatrice du patrimoine, arrivée au musée des Beaux-Arts en mai 2020 après un premier poste au service de la Conservation des œuvres d’art religieuses et civiles (COARC) de la Ville de Paris, a la charge des deux expositions du musée. Celle d’Antoine Coypel qui a eu lieu début 2022 et depuis début novembre, François Boucher, deux peintres du XVIIIe siècle.

Au départ spécialiste en art indien, Jessica Degain s’est tournée vers l’art du siècle des Lumières, et complète avec le XVIIe et XIXe au Musée des Beaux-Arts. « J’aime beaucoup le siècle des Lumières très riche au niveau artistique, sensuel et élégant. On perçoit très bien ce côté dans l’œuvre de François Boucher, sa proximité avec la nature et son art délicat. »

Cela fait deux ans qu’elle bâtit cette exposition événement, aux côtés de Guillaume Kazerouni, conservateur à Rennes, avec qui elle avait déjà expérimenté une collaboration pour une exposition au Petit Palais. « Le commissariat d’exposition, c’est d’abord proposer une listes d’œuvres en partant des collections du musée et en enrichissant par des prêts extérieurs. On part d’une liste idéale mais on s’adapte car il est difficile d’obtenir tous les prêts souhaités. L’idée est surtout d’avoir une approche originale pour faire avancer la connaissance scientifique. »

Ensuite, vient le temps de l’élaboration du catalogue d’exposition, puis la mise en place de la scénographie. « C’est une étape stimulante qui permet de se projeter dans les espaces, de choisir les couleurs, l’identité visuelle de l’exposition. » Une étape qui se fait en lien avec le personnel du musée et des prestataires extérieurs. « Nous ne sommes pas isolés dans un bureau, c’est un travail d’équipe collectif », souligne Jessica Degain.

La recherche de mécénat fait aussi partie des missions de la commissaire, avec l’aide du service dédié à la Ville de Tours. « Ensuite, il faut faire vivre l’exposition pendant trois mois, la médiation est ici importante, par des cours d’histoire de l’art notamment. »

En dehors du montage des expos, la conservatrice du patrimoine travaille, telle une fourmi, à enrichir les collections du musée. Là aussi un budget est défini. « Depuis deux ans et demi, nous avons acquis un nombre d’œuvres importantes que l’on peut voir aujourd’hui accrochées, comme un De Boulogne et des tableaux de Girardet qui a illustré des paysages de Touraine. »

Enfin, Jessica Degain est également occupée par la restauration, en ayant un rôle de maîtrise d’ouvrage, qui permet de faire découvrir de nouvelles œuvres au public en les faisant tourner dans le musée. Ce dernier possède au total 18 000 œuvres dont 10 à 15 % seulement sont visibles, les réserves étant stockées sur le site de la Camusière à Saint-Avertin.

Texte et photos : Aurélie Dunouau

La cuisine du monde revisitée par Marie Paulay

#VisMaVille Marie Paulay est cheffe, à la tête du restaurant La Petite Cuisine, à Tours. Une table devenue vite réputée avec une cheffe inventive et passionnée.

Salade de cabillaud et crevettes à la mangue, saveurs thaï ; saumon gravlax, anguille de Loire et labneh wasabi ; tataki de bœuf algues wakamées ; omelette japonaise et trompettes : les plats sortent du comptoir selon un ballet parfaitement orchestré entre Marie Paulay, la cheffe de cuisine, et Agathe Aloin, au service.

Depuis cinq ans, elles partagent l’aventure de La Petite Cuisine, rue Voltaire. Marie Paulay a salarié Agathe Aloin après avoir tenté une première expérience dans une Petite Cuisine plus réduite, juste à côté rue Berthelot. Après des études de juriste, elle décide de suivre, à 26 ans, un CAP accéléré en cuisine au lycée Bayet, avec l’idée d’ouvrir des chambres d’hôtes en fin de carrière.

Ce sera finalement l’inverse. Après des stages à l’ONU et au ministère des Affaires étrangères, elle préfère rentrer dans sa Touraine natale. Le droit français ne l’intéressant pas, elle se tourne alors vers sa passion, la cuisine, et ouvre en 2011 son premier restaurant.

Très tôt, la cuisine du monde l’a inspirée. Vers 12 ans, après avoir goûté un bœuf au paprika et à la marjolaine tchèque, elle se met aux fourneaux dans l’intention de reproduire ce plat. Aujourd’hui, elle affectionne la cuisine thaï, japonaise, libanaise… la cuisine du monde en général. « Je m’intéresse aux cultures et la cuisine est un moyen de réunir les gens malgré les différences de religions. J’ai toujours voulu faire quelque chose pour aider les gens », assure la juriste en droit international. « Mon but est de m’approprier la cuisine du monde, d’en comprendre les codes et d’essayer de la sublimer à ma façon. »

Sa soupe miso 100 % locale ou son poulet à l’orientale mélangeant les goûts syrien, libanais et mexicain en sont la preuve. La cheffe prône une cuisine saine et diététique, elle gramme ses quantités en fonction des apports alimentaires et refuse le gaspillage. « C’est pour cela que mes plats contiennent peu de viande et des portions normales. Je préfère resservir les bons mangeurs », explique Marie Paulay.

En cuisine du mercredi au vendredi, midis et soirs, elle organise également des soirées privées et s’occupe le lundi de la comptabilité et de l’administratif, le mardi des courses et de la mise en place pour la semaine.

Sa fonction de cheffe d’entreprise prend de plus en plus de place : elle gère à présent quatre salariés avec, depuis l’année dernière, le Potager contemporain du CCCOD et la restauration du Grand Théâtre pour lesquels elle est associée à Stanislas Roy. Une inclinaison vers des lieux de cultures logique pour elle. « J’ai ainsi accès à la culture, comme je n’ai plus beaucoup de temps libre avec mon travail. » Ce n’est donc pas un hasard si les tableaux d’Aurélia Vissian, installés sur les murs de son restaurant, accompagnent son inspiration de cheffe dans son quotidien.

Texte et photos : Aurélie Dunouau

Agnès Caillieux, aide à domicile à Tours : « On s’attache forcément aux gens »

#VisMaVille Agnès Caillieux est aide à domicile à Tours. Un métier varié, qui au-delà des courses et du ménage, représente parfois le seul lien social maintenu avec des personnes âgées.

Leurs mains sont serrées et les sourires s’échangent. Les deux Scorpions de signe plaisantent sur leur anniversaire à venir sur un ton enjoué. Mme Deveau fêtera ses 90 ans, Agnès Caillieux ses 59 ans. La seconde est l’aide à domicile de la première depuis qu’elle exerce à l’association d’Aide à Domicile en Milieu Rural (ADMR 37).

Derrière ces quatre années et demi, deux heures passées ensemble les lundis et jeudis, se dessine une complicité évidente. « On s’attache forcément aux gens, je pense à eux même en dehors de mes visites », révèle Agnès Caillieux qui s’est reconvertie après 30 ans à travailler comme gestionnaire de stock à la pharmacie mutualiste.

Elle s’occupe à présent d’une dizaine de personnes, souvent âgées, dans les quartiers de Beaujardin, Bouzignac et de la rue Vaillant, à Tours. De 30 minutes à 2 h 30, le temps consacré aux personnes est flexible selon les besoins. « Cela va de la toilette du matin, à la préparation des repas en passant par le ménage, les courses, bref toutes les tâches qu’on a besoin de faire chez soi », détaille l’aide à domicile.

Au-delà de ces missions bien connues, s’ajoutent des petites choses du quotidien comme changer une ampoule, voir pourquoi la télé ne marche pas, un peu de couture. Agnès peut également accompagner les personnes chez le médecin, au marché, en promenade ou apporter son aide lors de la déclaration d’impôts. Mais c’est surtout le temps passé à créer du lien, à « papoter » comme elle le dit, qui est important.

Agnès a d’ailleurs pris ses habitudes, sur son temps personnel, le mardi midi chez un papy de 94 ans. « Je lui cuisine du poisson, ce qu’il préfère, et partage le repas avec lui. » Car certains sont seuls, d’autres entourés, certains malades, d’autres mieux portants, les situations se révèlent très différentes. Pour Agnès Caillieux, l’essentiel est l’attention portée aux autres. « Ces petites choses qui font plaisir. »

Le tout, avec discernement. « On rentre dans l’intimité des gens, il faut s’adapter à leur environnement. À nous de voir ce qui est faisable et quels sont leurs besoins. » Le métier d’aide à domicile, longtemps cantonné dans les esprits à la femme de ménage fait, depuis la crise du Covid, enfin figure de métier utile. « Tant mieux même s’il n’est toujours pas bien valorisé », assure Agnès Caillieux.

Si elle est passionnée par son métier, elle ne nie pas les difficultés. « Tout n’est pas rose, on voit des choses difficiles, on est souvent confrontés à la mort. Et puis, c’est un métier souvent pénible, le mal de dos, même si aujourd’hui, nous avons du matériel adapté. C’est plus compliqué pour celles qui travaillent en milieu rural et qui ont de la route à faire. »

Elle, de son côté, continue à « s’éclater comme une folle ». Bientôt à la retraite, elle n’envisage pas de couper net pour autant et va poursuivre par des extras à l’ADMR. « Je prendrai toujours de vos nouvelles », dit-elle, rassurante, en se tournant vers Mme Deveau.

Texte et photos : Aurélie Dunouau

Justine Canales : la Maison des femmes, « c’est un vrai enjeu de santé publique »

#VisMaVille Justine Canales est médecin légiste à l’Institut Médico-légal du CHRU de Tours. À la tête de la Maison des femmes, elle soigne la prise en charge des femmes victimes de violences.

C’est une entrée tout en discrétion, à l’entrée de l’hôpital Bretonneau. À l’image de Justine Canales, à peine 33 ans, et déjà responsable depuis plus d’un an de la Maison des femmes. « C’est un vrai enjeu de santé publique », justifie celle qui porte cette « mission », ferraille avec ses collègues pour trouver les financements permettant d’alimenter cette nouvelle structure.

Elle le confie, si elle a accepté ce portrait, c’est pour mettre en avant son service, pas sa personne.

La Maison des femmes, créée en juin 2021, réunit une équipe pluridisciplinaire pour une prise en charge complète des violences faites aux femmes. Peu à peu, l’équipe se structure : le docteur Canales a débuté seule, puis une sage-femme, une infirmière, une éducatrice pour jeunes enfants, l’ont rejointe. Bientôt deux postes de secrétariat et de psychologue compléteront l’équipe.

« Nous avons un petit budget, heureusement nous nous appuyons sur l’Institut médico-légal du CHU dont nous dépendons et des professionnels partenaires : hospitaliers, permanence juridique de France victime et du CIDFF, ateliers de socio esthétique et de karaté. Ici les femmes trouvent un lieu dédié qui n’existait pas auparavant. C’était le chaînon manquant, nous pouvons même organiser le dépôt de plainte grâce à nos relations avec la police », explique Justine Canales.

À 80 % sur ce poste, la docteure reçoit dans son bureau les victimes pour les premiers rendez-vous. « Je pratique un examen général médico-légal, constate les blessures physiques et psychologiques pour établir un certificat qui pourra servir ensuite à la victime pour faire valoir ses droits, puis on leur propose un parcours de soin adapté à chacune », détaille-t- elle. Tous les types de violences sont ici traités : physiques, psychologiques, sexuelles, mutilations, violences au travail…

La médecine légale a très vite été une discipline évidente pour Justine Canales. À la faculté de médecine de Tours, puis à son internat à La Réunion et au service de médecine légale de Montpellier, elle choisit ce métier utile et concret, qui apporte des réponses juridiques et un aspect thérapeutique pour la victime.

Elle rejoint l’équipe de Pauline-Saint Martin à l’Institut-médico-légal du CHRU de Tours en 2018. « On a l’image cinématographique du métier, mais la médecine légale c’est pratiquer des constatations de blessures sur la demande de la justice à 90 % sur des vivants. Les autopsies sur les morts ne représentent que 10 % de notre activité. C’est une discipline exigeante avec des responsabilités par rapports à nos écrits, et également très riche car à la frontière de la médecine, de la justice, de la toxicologie parfois. »

La jeune femme brune pétillante est également médecin légiste d’astreinte sur toute la région. Motivée et animée, elle ne lâche rien.

Texte et photos : Aurélie Dunouau

Juliana Bakaman et Sandrine Vrignaud, les bras solidaires de l’université

#VisMaVille Juliana Bakaman et Sandrine Vrignaud sont bénévoles à l’association « Les Bonnes Mines ». À la faculté des Tanneurs, elles mènent des actions concrètes pour redonner le sourire aux étudiants en situation de précarité.

Ce vendredi midi, au premier étage de la faculté des Tanneurs, le frigo est déjà vide. Chantal et Sandrine, bénévoles de l’association Les Bonnes Mines arrivent avec le chariot rempli de nourriture pour le réapprovisionner en prévision des étudiants qui passeraient par-là, le ventre vide : tomates, concombres, courgettes, pêches, champignons et yaourts prêts à consommer, et accessibles à tous, sans justificatif et surtout totalement gratuits.

Depuis le début du mois de septembre, ce frigo solidaire, financé par le Centre Communal d’Action Sociale de la ville de Tours, est géré par l’association « Les Bonnes Mines ». Un collectif aux trente bénévoles né à la faculté des Tanneurs en février 2022 du constat de « la précarité galopante des étudiants. Les malaises vagaux se multipliaient, beaucoup ne mangent pas tous les jours faute de moyens », observe Sandrine Vrignaud, bibliothécaire aux Tanneurs et chargée de communication à l’association.

Elle bénéficie de son expérience dans des associations caritatives telles que « La Table de Jeanne Marie », tout comme Chantal Lefort, la présidente de l’association côté personnel de l’université. Le partenariat est établi avec les associations caritatives et deux boulangers qui font des dons, tout comme les membres de l’université.

L’originalité des « Bonnes Mines » est d’associer à égalité personnel de l’université et étudiants, sans hiérarchie. Juliana Bakaman est la co-présidente, étudiante en 3e année de psychologie. Arrivée de Guyane pour ses études à Tours, elle connaît aussi son lot de difficultés.

La précarité guette nombre d’étudiants, que ce soit au niveau de la nourriture, du logement ou de la santé, surtout depuis la crise du Covid qui les a privés d’emploi. « J’ai toujours voulu m’engager dans une association, participer à une fondation, quelque chose de nouveau. Avec Les Bonnes Mines, on crée du lien social avec les étudiants, ils se sentent considérés, moins seuls. Je le constate certains sont isolés, sans relation sociale, on crée ainsi un premier contact. »

La distribution alimentaire menée trois fois par semaine, avant le déjeuner, tout près de la passerelle des Tanneurs, est un succès. Environ 200 étudiants viennent s’y approvisionner toutes les semaines. Juliana a aussi développé son anglais car les situations difficiles concernent également les étudiants étrangers. « Je suis un peu devenue la traductrice », sourit la pétillante jeune fille qui aimerait devenir plus tard, après son master, psychologue spécialisée pour les enfants et adolescents. Comme une continuité de son attention envers les autres.

Texte et photos : Aurélie Dunouau

Dans le quotidien de Maël Fusillier, régisseur son et créateur sonore au Théâtre O

#VisMaVille Maël Fusillier est régisseur son et créateur sonore au Théâtre Olympia de Tours. Un métier qui s’exerce en coulisses mais qui se révèle plus créatif et relationnel qu’on ne l’imagine.

Au deuxième étage de l’imposant bâtiment en verre du Théâtre Olympia, Maël Fusillier prépare son matériel dans la petite remise dédiée : micros, câbles et divers matériels sonores attendent la reprise des représentations.

En ce mois de septembre (période à laquelle est réalisée notre rencontre avec Maël – NDLR), il faut s’assurer que tout fonctionne bien. Prévoir est le maître mot du métier, même s’il faudra faire face aussi aux défaillances inattendues telle une panne de micro !

Premier grand rendez-vous pour le régisseur son : la présentation de saison où il sera en première ligne avec l’accueil d’un groupe de musique dans le hall.

Dans son quotidien, Maël Fusillier, à peine 23 ans, s’occupe principalement de la partie sonore pour le Jeune Théâtre en Région Centre (JTRC), les jeunes comédiens en contrat au théâtre, de l’accueil des techniciens qui accompagnent leurs compagnies venant jouer sur place, et de la création sonore et vidéo sur certaines pièces, comme l’an dernier sur « Grammaire des mammifères », de Jacques Vincey, avec qui il va d’ailleurs partir en tournée.

La création sonore, inventer une partition, une ambiance musicale, ajouter des effets de voix, c’est sa spécificité à laquelle il ajoute de la création vidéo. Tous les régisseurs-son n’ont en effet pas ces compétences. Ce côté créatif qui s’ajoute à la technicité du métier (savoir faire fonctionner une table de mixage, des micros,…), le rapproche des artistes qu’il aime tant.

Car Maël, musicien depuis son plus jeune âge, a su très tôt qu’il serait compliqué d’en faire son métier. « Au collège, je me suis décidé à travailler dans le milieu, mais à côté, car j’avais aussi une appétence pour la technique et le bricolage. » Il débute par la régie son dans une salle de musiques actuelles, à La Rochelle, avant d’atterrir, il y a deux ans, à Tours. Le théâtre est une totale et heureuse découverte pour lui. « J’ai mon mot à dire, on apporte à la création, on échange avec l’équipe, il y a beaucoup de réflexion. Dans la musique, j’avais plus l’impression d’être plus passif, à l’affût le jour du concert. »

Cet échange avec les artistes, Maël le définit comme réciproque. « On dit que la technique est au service des comédiens. Mais le son et la vidéo donnent aussi un contexte aux comédiens qui vont les restituer dans leur jeu. »

Le régisseur voit aussi son rôle comme celui d’un accompagnateur, facilitateur, de par sa place en retrait de la mise en scène. « Au moment des créations – une période intense – je leur apporte un café pour décompresser, je m’assure qu’ils vont bien, cela peut débloquer certaines choses. »

Un travail d’équipe qu’il souhaiterait poursuivre au-delà de son contrat qui s’achève en juin prochain. Intermittent du spectacle, le jeune homme s’imagine travailler pour différentes structures et, pourquoi pas, mêler le théâtre et la musique.

Texte et photos : Aurélie Dunouau

 

Dans le quotidien des drôles de dames de la cinémathèque

#VisMaVille Agnès Torrens et Elsa Loncle animent la cinémathèque de Tours. Depuis plus de 15 ans, elles nous transmettent leur passion des films de patrimoine.

Le rendez-vous est bien connu des cinéphiles tourangeaux. Tous les lundis soirs, de septembre à juin, les fauteuils sont prisés aux cinémas Studio pour la séance hebdomadaire de la cinémathèque.

L’accueil par le trio de ses salariées, Agnès Torrens sa directrice, Elsa Loncle chargée de communication et Corinne Bellan de la comptabilité et logistique, est aux petits oignons. Un ou deux films du muet aux années 2000 sont diffusés, accompagnés d’une présentation fouillée par Agnès ou Elsa, d’un débat avec la salle, et souvent d’un invité.

 

Depuis 50 ans, la cinémathèque Henri Langlois de Tours a pour mission « d’intéresser les gens à l’histoire du cinéma, leur permettre d’accéder à une culture cinématographique, souligne Agnès Torrens. L’idée est que les jeunes générations puissent découvrir sur grand écran des classiques tandis que les gens qui viennent depuis plusieurs dizaines d’années puissent toujours découvrir un film, être étonnés ».

La programmation concoctée par Agnès Torrens et Elsa Loncle se compose en effet d’un subtil mélange de grands classiques (Ophüls, Lubitsch, Lynch, Pasolini…) et de nouveautés (deux films inuits inédits seront montrés), le tout relié par un fil conducteur, les femmes cinéastes et la question des rapports entre femmes et hommes pour cette saison.

« Nous aurons beaucoup de réalisatrices programmées comme Agnès Varda, Jane Campion, Sofia Coppola… Je suis partie du documentaire de Juliette Klinke qui rend compte de leur présence tant que le cinéma était un art, et qui constate que celle-ci s’est amoindrie lorsqu’il est devenu une industrie. Elle viendra présenter les deux soirées consacrées aux pionnières Lois Weber et Ida Lupino », détaille Agnès Torrens.

La programmation découle d’heures de recherches, d’inspirations, de visionnages, de lectures au fil de l’année et d’une part de hasard aussi. Quant à la logistique, elle est plus simple à présent car les films en 35 mm sont remplacés par le numérique. Un bouleversement dans leur fonctionnement et leurs habitudes. « Les gens ne sont plus habitués à voir une image qui saute ou entendre un craquement ! ».

Outre la construction de la saison, Agnès Torrens s’occupe des partenariats (Studio, médiathèque, musée des Beaux-Arts,…) et de l’accueil des tournages de films avec Elsa. « Nous sommes le guichet unique, nous faisons le relais des cinéastes auprès des services municipaux pour obtenir les autorisations de tournage », explique Elsa Loncle. Toutes deux possèdent en effet « trois ou quatre casquettes différentes. Nous sommes une toute petite équipe et il faut savoir tout faire », relève Agnès.

Gardant intacte leur flamme pour le cinéma et « le plaisir toujours présent d’accueillir notre public le lundi », elles espèrent que les 50 ans marqueront le début d’un nouvel élan car les spectateurs ont eu du mal à retrouver les salles depuis le Covid.

Texte et photos : Aurélie Dunouau

Abdelkader Zighem, le boxeur qui a plus d’un coup dans son gant

#VisMaVille Abdelkader Zighem est le directeur sportif du club de boxe de Joué-lès-Tours. Ancien champion international, il vit pleinement son rôle d’éducateur et de faiseur de lien social par le sport.

Abdelkader Zighem n’est pas du genre à tenir en place, à part peut-être sur les rings où il ne peut s’échapper de ses 7 m² de concentration imposée. Sa vie semble à l’image de son flot de paroles : inépuisable. Occupée d’abord par sa passion, la boxe.

Champion du monde de boxe française en 1995 et quadruple champion de France dans les moins de 74 kilos (les super mi-moyens), il est diplômé de l’Insep (l’Institut National du Sport), de la génération des David Douillet et Jamel Bouras.

Après ses titres, le champion revient dans son quartier jocondien où il fonde en 1998 le club « Bouge ton corps à La Rabière ». Les débuts ne sont pas faciles, à enseigner la boxe française dans une ancienne salle de danse, principalement à des filles.

Aujourd’hui, à 54 ans, directeur sportif, entraîneur de kick-boxing dans son club de 80 adhérents dorénavant nommé les Eagles Boxing Club Joué, il vit ce sport en famille (sa femme Fatia est la présidente du club). Pour s’y consacrer ainsi qu’à ses enfants qu’il voulait voir grandir, il a choisi pour gagner sa vie, lui l’éducateur, un poste de veilleur de nuit pour l’association dans laquelle il exerçait, le CAES 37 de Fondettes qui accueille des 10- 18 ans confiés par l’Aide sociale à l’enfance.

Les enfants, c’est aussi ce qui l’anime. Les siens d’abord, mais aussi les autres. En ce moment, il se bat pour accueillir sa nièce algérienne, un bébé atteint de surdité et cherche le financement de son opération d’appareillage qu’il souhaite voir réalisée à Clocheville. « C’est mon objectif et je m’en donne les moyens. »

La boxe, il la voit aussi comme un moyen, celui de créer du lien social. « Quand je vois les mamans qui amènent leurs enfants me demander d’essayer de boxer aussi, ça me rend heureux. Je les vois ensuite, grâce à la boxe, s’ouvrir, prendre confiance en elles, c’est incroyable. » Le cours de boxe éducative pour les ados est d’ailleurs constitué à 70 % de filles. « Elles ne sont plus les mêmes après », assure Abdelkader Zighem.

Avec Nedid Elbaja, fondateur et dirigeant de El Baja Boxing Académy à Tours, il travaille main dans la main pour faire découvrir les bases techniques de la boxe dans les quartiers via Poings Communs 37.

Cet été, ils ont installé des rings gonflables dans les quartiers sensibles d’Amboise, de Saint-Pierre des Corps et de la Riche. Avec comme idée de partager les valeurs de la boxe : respect, écoute et concentration. « C’est là que je m’enrichis, souligne celui que tout le monde appelle Kader. En créant du lien social. » Il n’est pas rare d’ailleurs de le voir improviser en vacances une partie de basket avec son fils et les estivants autour.

Texte : Aurélie Dunouau / Photos : Ficta Effect

Dans le quotidien de Baptiste Dupré, charpentier et éco-constructeur

#VisMaVille Baptiste Dupré est charpentier et éco-constructeur. Avec son entreprise Canopée Ecoconstruction, il construit des maisons en bois, avec une réflexion constante sur les matériaux utilisés.

Devant l’atelier de 327 m₂ de la Morinerie, à Saint-Pierre-des-Corps, un camion se remplit des décors en bois destinés au festival Terres du Son. Les locaux s’alignent dans cet espace dédié aux entreprises et celui de Canopée Ecoconstruction se partage avec un menuisier et un autre éco-constructeur.

« J’aime que ce soit animé. Nous ne sommes que 20 % de notre temps à l’atelier alors c’est pratique de partager ou prêter le local », explique Baptiste Dupré, le cofondateur de Canopée Ecoconstruction avec Christophe Ayguepsarsse. La société s’est formée il y a sept ans, après une reconversion en charpente des deux associés, aux Compagnons du devoir en un an pour Baptiste Dupré.

Cet ancien projectionniste du cinéma associatif de Richelieu, dont il est originaire, avait envie de changer de voie, après avoir tenté l’expérience sur les toits avec son cousin charpentier. « On a une autre vue du monde en haut des toits. J’étais enfermé dans une salle obscure, je suis passé du tout au tout. C’est cet aspect qui m’a plu ainsi que l’enjeu de l’éco-construction. »

Il y trouve très vite du concret, « le côté satisfaisant de voir le travail accompli. Sur le premier chantier, une couverture de bâtiment, j’ai pu me rendre compte du côté esthétique mais aussi utile. La maison est repartie pour 50 ans ! ».

Baptiste Dupré et son associé s’occupent de monter des charpentes, mais aussi des ossatures bois, des aménagements extérieurs que ce soit des bardages, appentis ou terrasses. L’isolation par l’extérieur des maisons représente la seconde facette de leur activité. « Nous utilisons principalement de la laine de bois et de la ouate de cellulose parce que c’est le plus performant et le plus abordable. »

Pour le bois, il s’agit principalement du pin douglas, venu du Jura et de la région Centre, un matériau non traité et bio-sourcé. « On essaie d’être le plus vertueux possible même si la surexploitation actuelle du pin douglas, produit en mono culture, remet aujourd’hui en question son côté écologique. »

Le métier évolue rapidement et les compétences avec. « On travaille de plus en plus avec des matériaux différents pour l’isolation, avec une recherche de performance énergétique. Il faut sans cesse s’adapter aux nouveaux matériaux », souligne Baptiste Dupré. À deux, c’est une toute petite structure.

L’administratif et les devis, compliqués avec la fluctuation du coût des matières premières, prennent un temps important. « Car il faut faire les allers retours entre les fournisseurs et les clients, comprendre d’où ça vient et l’expliquer ensuite au client. » Pédagogue, voilà encore une autre casquette revêtue par Baptiste Dupré.

Texte et photos : Aurélie Dunouau

Mac-Kenley et Morena, réfugiés haïtiens à la tête de l’atelier de couture de la Table de Jeanne-Marie

#VisMaVille Morena Paulas et Mac-Kenley Darius sont créateurs de mode et bénévoles à la table de Jeanne Marie. Réfugiés haïtiens, ils donnent de leur temps à l’atelier couture.

Ils devaient arriver en Espagne mais le sort en a décidé autrement. Suite à des tests PCR perdus à l’aéroport de Roissy, les voilà réfugiés en France, atterrissant finalement à Tours, chez une connaissance, en décembre 2021. Demandeurs d’asile, ils ont fui Haïti, ses violences et insécurités quotidiennes, menacés dans leur chair pour leurs opinions et pour ce qu’ils sont.

Car Mac-Kenley Darius, 29 ans et Morena Paulas, 25 ans, étaient là-bas des artistes émergents, designers et créateurs de mode reconnus, ayant habillé Miss Universe Haïti en 2021 et participé dernièrement au défilé de mode annuel, « Fortuny », à Grenade, en Espagne.

 

À Tours, ils ont très vite rencontré Damien, bénévole de la table de Jeanne Marie – association qui distribue des repas chauds à ceux qui poussent sa porte, qui les prend sous son aile. Les voilà propulsés à la tête de l’atelier de couture, avec comme défi de réaliser, pour les six ans de l’association, une collection pour un défilé de mode en à peine une semaine.

« Ils ont fait avec ce que l’on avait sous la main, du papier peint, des tissus… Cela les a motivés », assure Damien. La débrouillardise, les deux compères designers connaissent dans leur pays. « On a commencé dans la récupération des vêtements jetés. On récupère les tissus, tout accessoire permettant de créer autre chose ».

Dans le duo, Morena dessine des patrons, ajuste des perles sur des robes, s’occupe de la partie maquillage. Mac-Kenley, peintre et plasticien, a été formé à l’École nationale d’art de Port au Prince. Ensemble, ils ont créé leur collection « Minokan » avec pour but de « mettre en valeur la culture haïtienne vaudou, ses cultures ancestrales, à travers la mode ». Ainsi, des couronnes imposantes tutoient des tenues traditionnelles, flamboyantes, revisitées à travers le prisme des deux créateurs.

Ces derniers mois, réfugiés à Tours, les deux jeunes hommes s’occupent à l’atelier de couture de Jeanne Marie, essayant de ne pas perdre le fil de leur passion. « Nous aimerions faire découvrir notre talent à Tours. Aider les gens qui participent à la table de Jeanne Marie et leur créer des vêtements. Ils nous aident et nous souhaitons les aider aussi. »

En attendant, logés dans des foyers d’hébergement temporaire, Morena et Mac-Kenley apprécient la vie tourangelle paisible. « Nous pouvons marcher dans la rue tranquilles ici. » Soucieux de s’intégrer, ils vont s’inscrire à la faculté des Tanneurs, en langues étrangères et sociologie appliquées pour l’un, et en sciences humaines pour l’autre. Le duo cultivé devrait vite être remarqué.

Aurélie Dunouau

Canelle Penot, la pro de l’animation périscolaire : « Un métier toujours prenant »

#VisMaVille Canelle Penot est animatrice périscolaire. À Tours, elle jongle entre différentes écoles et l’association Courteline pour un métier prenant mais précaire.

Ce mercredi, autour de la table basse à hauteur d’enfant, Canelle Penot lance une partie de « La Chasse aux monstres » avec une poignée de petits de grande section maternelle, inscrits à l’accueil de loisirs du centre Courteline. Très vite, la quasi-totalité des autres enfants la rejoignent, attirés par ce qu’elle raconte, et sa voix à la fois grave et chaleureuse.

C’est ainsi que l’animatrice périscolaire aime son métier. « Utiliser et réinterpréter des jeux classiques pour leur apprendre des choses, comme leur raconter des histoires, les faire rire, réagir, fabriquer des objets qui a priori ne servent à rien… »

La pédagogie de l’animatrice s’appuie sur l’émerveillement et l’imaginaire des enfants qu’elle apprécie tant pour « leur inculquer des savoirs de base, sans stress, sans devoirs à rendre à la fin. Ainsi, en ce moment, on travaille sur l’espace et les planètes. Pour les mettre dans l’ambiance, je me suis mise, pendant le temps calme, à dessiner un ciel étoilé et ça les a intrigués ».

Canelle Penot voit son métier comme « jamais rébarbatif, toujours prenant », elle qui jongle entre l’accueil du midi dans des écoles de Tours, les fins d’après-midis dans l’aide aux devoirs et l’accompagnement des enfants et parents en difficulté à George Sand et Paul Racault, et l’accueil de loisirs à Courteline le mercredi ainsi que certaines vacances scolaires.

« J’adore cette diversité, avec des niveaux d’enfants différents et c’est aussi enrichissant pour eux d’avoir des animateurs avec leurs propres compétences. »

Mais Canelle Penot ne cache pas les revers de la médaille : l’épuisement parfois et la précarité. Car le rythme est décousu. Un animateur peut faire des journées de 7 h 30 à 18 h 30, parsemées de pauses, avec au final un contrat de 24 heures par semaine, comme celui de Canelle. Les contrats des 49 animateurs périscolaires actuels de Courteline oscillent entre 4 et 28 heures.

La tendance est à la professionnalisation du métier alors que certains le voient encore comme un job d’étudiants qui, en réalité, viennent plutôt en renfort lors des vacances scolaires. Le profil de Canelle Penot, 39 ans, arrivée à l’animation il y a 7 ans en reconversion, n’est en fait pas banal. Diplômée en librairie et histoire de l’art, elle a exercé différents métiers avant de pousser la porte de Courteline en 2015. Elle qui voulait être bibliothécaire s’est découverte dans ce métier.

« Au début je ne savais pas trop où j’allais mais je me suis rendue compte très vite que j’aimais ce travail et l’évolution que cela permet, de l’animation à la direction. » Aujourd’hui, la jeune femme ambitionne de passer son BPJEPS (Brevet professionnel de la jeunesse, de l’éducation populaire et du sport), de faire ainsi plus d’heures, pour parvenir peut-être à un temps plein, combinant animation pure et direction. Elle cite en exemple le parcours du directeur actuel de Courteline, Romain Ménage, qui a démarré ici-même en étant… animateur.

Texte et photos : Aurélie Dunouau

 

Dans le quotidien de Jessy Gerin, conservatrice-restauratrice de tableaux

#VisMaVille Jessy Gerin est conservatrice-restauratrice de tableaux et d’objets d’art en bois. Elle vient tout juste de s’installer dans le quartier des arts à Tours, ajoutant à sa palette le métier de copiste.

Un atelier de restauration de tableaux ouvert en pleine rue, ce n’est pas si courant. En général, le conservateur-restaurateur d’œuvres d’art recherche le calme propice à la concentration. Jessy Gerin, qui a connu pendant quatre ans l’effervescence du château de Chenonceau où elle s’occupait des collections et des restaurations en public, se trouvait au contraire trop isolée dans son atelier-domicile de Francueil.

Alors, quand elle a su que le local de la Boîte Noire, rue du Grand Marché à Tours, se libérait, elle a sauté sur l’occasion. Dans cet espace, le public peut se rendre compte de son double métier : restauratrice et copiste de tableaux.

Des toiles inspirées de Rubens, Rembrandt, Vermeer et Picasso s’y côtoient sous sa signature. Jessy Gerin aime tout peindre, « sauf les paysages et le contemporain », selon différentes techniques, découlant des époques, de la cire, à la tempera à l’œuf, en passant par l’huile. Quant à la restauration, « les techniques évoluent beaucoup, explique la jeune femme trentenaire. Elles deviennent très chimiques, comme le solvant appliqué en gel, le travail de plus en plus fréquent avec le PH pour mesurer la réaction de l’œuvre. Il faut régulièrement se former ».

Jessy Gerin voit sa mission de restauratrice comme celui d’une passeuse d’œuvres d’art. « Ce qui m’intéresse, c’est leur sauvetage. Je suis dans la peau du médecin et dans la transmission. On nous amène quelque chose qui est détérioré et notre objectif est de le rendre sain et lisible pendant des années. Que ce soit une œuvre de famille ou une œuvre classée, c’est du patrimoine que l’on transmet selon la même importance. »

Et si ce métier demande une maîtrise totale du geste, l’erreur est toutefois permise. « Dans le code déontologique, tout ce qu’on fait doit être stable dans le temps et réversible. Heureusement il existe des produits qui permettent de reprendre son geste si on était pas dans un bon jour », sourit celle qui maîtrise également la basse dans un groupe de musiciens professionnels.

Jessy Gerin fait ce métier depuis dix ans, après s’être essayée à la coiffure dans les salons de ses parents, en région parisienne. « Ce n’était pas pour moi. Je peignais et dessinais depuis toute petite, c’était ma voie. J’ai repris des études dans une école spécialisée pour cinq ans. » C’est le château de Chenonceau qui lui commande son premier chantier qui la fait venir en Touraine qu’elle n’a pas quittée depuis.

Son activité de conservation-restauration l’occupe en grande partie même si elle compte désormais se consacrer plus à la copie, en ouvrant aussi son atelier à des cours en septembre. « J’ai commencé par enseigner la copie, j’ai envie de m’y replonger. »

Texte et photos : Aurélie Dunouau

Garance Duplan, étudiante et championne de rugby

#VisMaVille Garance Duplan joue depuis dix ans à l’US Joué Rugby. Avec son tempérament de battante, la jeune femme participe à l’accession de son club au haut niveau.

Elles ne sont pas professionnelles mais les féminines de l’US Joué Rugby évoluent déjà à un très bon niveau. Une saison en Fédérale 1 qui vient de se conclure par une accession en Elite 2, le deuxième échelon national, après leur victoire en championnat de France ce week-end.

C’est toute la fierté de Garance Duplan, elle qui a déjà été championne de France de sa catégorie en rugby à 7. Celle qui joue en 2e ligne, numéro 5, attrape les ballons en touche, les gratte, bataille aussi rude en mêlée et dans les plaquages.

Si elle s’est tournée vers ce sport à 16 ans, intégrant l’US Joué déjà, c’est parce qu’elle avait envie « d’un sport de combat et d’équipe ». Dans le club jocondien, elle a trouvé son équilibre sportif et ses meilleures amies. Garance Duplan se souvient « qu’à l’époque, on s’appelait les Panthères de Touraine. On a démarré à 7, aujourd’hui on constitue une vraie équipe. Ce n’était pas facile, car le rugby féminin n’avait pas la même place qu’aujourd’hui. Depuis quelques années, ça s’est bien développé au club, nous avons chaque année de nouvelles joueuses. »

À l’instar du rugby féminin en France qui commence à attirer l’œil des médias, avec en ligne de mire la coupe du monde cet automne en Nouvelle-Zélande. Mais pour la jeune femme, les préjugés demeurent. « Bien souvent, le rugby ce n’est pas encore pour les filles ! ». Chez les Duplan, originaires de l’Ile Bouchard, ce n’était pas le cas : les deux filles jouaient au rugby tandis que le frère de Garance pratiquait la danse.

Si le rugby occupe une grande place dans sa vie, Garance, 26 ans, est d’abord étudiante en master de commerce, en alternance dans une enseigne sportive. Elle enchaîne donc ses journées de travail avec l’entraînement le soir, deux à trois fois par semaine, ainsi que la salle de sport deux fois par semaine. « Cela demande beaucoup d’efforts. »

Mais elle se sent récompensée par le niveau atteint cette année par l’équipe. « Sur la fin de saison, on commence enfin à se trouver sur le terrain, c’est un travail de longue haleine pour parvenir à comprendre et anticiper les comportements individuels des autres joueuses sur le terrain. »

À la rentrée, Garance Duplan aura terminé ses études. Elle continuera le rugby de haut niveau, pas de doute là-dessus. Quant à son avenir professionnel ? « Il reste à tracer, je suis ouverte aux opportunités », avoue celle qui possède une seconde passion : la décoration et la friperie de seconde main. « Je passe tout mon temps libre et mon salaire d’étudiante dans les ressourceries », sourit-elle. Une fille bien dans sa vie et dans ses crampons tout usés qui devront encore tenir pour la finale tant attendue.

Texte et photos : Aurélie Dunouau

Arsène Kouakou, l’épicier du soleil, de la Côte d’Ivoire à Tours

#VisMaVille Arsène Kouakou, 26 ans, est le gérant de Konu, l’épicerie du soleil. Ce jeune commerçant veut mettre en lumière les produits exotiques, inspirés des saveurs de son enfance, en Côte d’Ivoire.

Rue Constantine, à Tours, une nouvelle devanture attire l’œil des passants, près de la fac des Tanneurs : celle de Konu, l’épicerie du soleil. Son gérant, Arsène Kouakou, a fait le choix de s’installer il y a 9 mois en plein centre-ville pour se démarquer des épiceries du monde de quartiers, plutôt tournées vers les communautés.

« Je souhaitais m’ouvrir à tous, partager, faire découvrir les produits exotiques que l’on ne connaît pas forcément, au plus grand nombre de personnes, dans une boutique lumineuse et aux rayons aérés. »

Et ça marche, puisque les étudiants et les habitants d’à côté s’arrêtent volontiers. Sur les étagères, se côtoient des produits essentiellement venus d’Afrique et des Antilles mais aussi d’Asie et d’Amérique latine : du baobab, du manioc, du taro, du gombo, de la pulpe d’açaï, de l’igname…

Arsène Kouakou a également sélectionné des produits moins connus comme la bouillie de mil du Mali, le netetou « qui vient du Sénégal et que l’on utilise dans la confection du plat traditionnel, le tierboudien ».

De prime abord discret et réservé, Arsène Kouakou devient intarissable lorsqu’il parle de ses produits, de leurs bienfaits à leurs usages en cuisine. Par exemple, « le fonio est la plus vieille céréale d’Afrique, nous révèle-t-il. Cela ressemble au sorgho, avec la consistance du sable ». Ce qu’il aime mijoter par-dessus tout ? L’attiéké alloco qui correspond à un couscous au manioc et du mafé accompagné d’un jus de bissap (à base de fleur d’hibiscus).

« Certains produits sont rares et nous allons les chercher directement auprès des producteurs, grâce à mon frère qui est grossiste en région parisienne et fait les allers-retours ainsi qu’à mes contacts locaux. » Arsène Kouakou compte d’ailleurs travailler encore plus étroitement avec des producteurs du Sénégal, de Côte d’Ivoire et de Madagascar pour renforcer les circuits courts et développer sa propre marque, Konu. On trouvera notamment du chocolat ivoirien, une rareté.

 

La Côte d’Ivoire est le pays d’origine d’Arsène Kouakou, arrivé en France lorsqu’il avait une dizaine d’années pour rejoindre son grand frère, suite au décès de sa mère qui l’élevait seule. Sa maman tenait une boutique de cosmétiques en Côte d’Ivoire et cela ne semble pas un hasard dans le fait d’ouvrir une épicerie pour Arsène Kouakou. « Je la suivais partout, dans sa cuisine, dans son magasin, j’ai le souvenir du beurre de karité frais. »

Ouvrir cette boutique représentait donc plus qu’un pari professionnel pour ce diplômé de commerce : un retour aux sources, à la famille. « Cela me tenait à coeur », avoue-il sobrement.

Texte et photos : Aurélie Dunouau


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Selon Arsène Kouakou, « Konu » signifie « bienvenue » dans un dialecte du Zimbabwe.

Dans le quotidien de Véronique Mathis, la « gardienne » du CDI

#VisMaVille Véronique Mathis est professeur-documentaliste au collège Anatole-France, à Tours. Une vocation pour celle qui anime de nombreux projets autour de la lecture.

Il est 13 h 55, la sonnerie retentit dans tout le collège Anatole-France mais il ne s’agit pas d’une reprise des cours classique. Elle signe le début du quart d’heure lecture. Dans chaque classe, les 500 élèves se plongent dans leur bouquin pour quinze minutes silencieuses. Tel un sas de décompression.

Cette initiative du collège Anatole-France, tout comme la boîte à livres installée dans la cour, démontre la place accordée à l’apprentissage de la lecture, ce qui fait le bonheur de sa professeur-documentaliste, Véronique Mathis.

Depuis 13 ans, elle est celle qui accueille les collégiens au CDI pendant la pause méridienne, les heures de permanence et lors des ateliers pédagogiques dédiés. « Les élèves aimeraient bien que le CDI soit ouvert de 7 h 30 à 18 h non-stop mais ce n’est pas possible », sourit-elle.

Car l’emploi du temps de notre professeur- documentaliste est aussi rythmé par un gros travail administratif : l’inventaire, la gestion des prêts (« il faut courir derrière les élèves pour les prêts en retard ! »), le rangement des documents, les achats de livres…

Côté pédagogique, elle participe également, avec ses collègues professeurs, aux cours interdisciplinaires, travaille avec les élèves sur leur « parcours avenir », anime le club lecture qui regroupe une quinzaine de petits lecteurs fidèles. « C’est passionnant dans ce collège car nous menons beaucoup de projets. Regardez l’exposition sur les femmes célèbres faite par les élèves ! Ils viennent beaucoup au CDI pour leurs recherches documentaires, ils me demandent des conseils, notamment au niveau informatique. Mon but c’est de les rendre autonomes pour qu’ils sachent faire des recherches dans n’importe quelle médiathèque. »

Véronique Mathis a su qu’elle serait professeur-documentaliste dès qu’elle a franchi la porte du CDI de son lycée à Amboise. Elle enchaîne ensuite par un diplôme de documentation à l’IUT de Tours, une licence en langues étrangères appliquées et le CAPES en 1990, sésame indispensable pour entrer dans la profession.

Elle a choisi d’exercer en collège parce que « ce n’est pas le même rapport avec les élèves qu’au lycée. Il y a encore tout à faire au niveau lecture, on peut encore raccrocher ceux qui en ont besoin ».

Véronique Mathis s’occupe des groupes de soutien à la lecture ainsi que de l’apprentissage par les élèves allophones (des sessions d’une heure par semaine). En fin d’année, ces groupes iront faire la lecture devant des maternelles, « une façon de les valoriser ». Pour les plus à l’aise avec la lecture, Véronique Mathis leur partage ses coups de cœur. « Dès la 5e, je commence à connaître leurs goûts. Au niveau de l’achat des livres, j’évite les BD et mangas qu’ils trouvent facilement ailleurs. Je mets la priorité sur les collections vendues en librairies indépendantes. »

Texte et photos : Aurélie Dunouau

Sandra Baujard réalise des « soins suspendus » pour les personnes fragilisées

#VisMaVille Sandra Baujard est à la tête de Sonara, une association portée sur le bien-être solidaire. Elle rend massages et soins esthétiques accessibles aux personnes les plus vulnérables tout en insufflant de la solidarité.

Le local de Sonara, aux petites salles intimes et accueillantes, est situé au cœur de Tours, au croisement des rues Nationale et du Commerce. « Ce lieu accessible et central, c’était important pour le projet », souligne Sandra Baujard, la fondatrice et coordonnatrice de l’association.

« Déjà que les personnes des quartiers fragilisés se déplacent jusqu’ici et acceptent de recevoir un soin dans un lieu normal, c’est un premier pas vers leur bien-être et leur inclusion. » Bien-être et inclusion sont d’ailleurs les deux objectifs de Sonara, complétés par l’aspect solidarité.

L’association fonctionne selon un concept original : ici, personnes vulnérables mais aussi personnes lambda viennent suivre des cours de yoga, gym posturale, des séances de réflexologie, sophrologie, massage ayurvédique ou d’esthétique. Tous sont mélangés lors des séances collectives et ne savent pas qui est qui.

Certains viennent suivre une séance comme dans n’importe quel autre centre de bien-être et paient leur prestation à tarif normal. D’autres font partie du « programme Sonara ». Ils sont envoyés par des structures sociales et débourseront le prix qu’ils pourront pour leur séance.

« Je me suis inspirée du principe des cafés suspendus, explique Sandra Baujard. Je voulais que ceux qui viennent ici le fassent avec du sens en plus, celui de la solidarité. De 20 à 40 % du prix de leur séance est provisionné pour les soins suspendus, le reste en gros pour le loyer du local. »

Depuis quatre ans déjà, cette graphiste de métier s’est reconvertie dans le projet de sa vie, « mon deuxième bébé », dit-elle. Il lui prend beaucoup de son énergie mais lui donne, à elle aussi, du sens. « Petite, je voulais être assistante sociale, cela m’a rattrapée aujourd’hui, j’avais besoin d’un métier plus tourné vers les autres », sourit cette empathique.

Sandra s’est formée sur le tard en ayurvéda, la médecine indienne, à la réflexologie et sophrologie, ce qui lui permet de dispenser ces soins pour Sonara. « Ces séances de massage individuel permettent un véritable échange avec les personnes qui arrivent recroquevillées parfois et retrouvent le sourire, osent se confier sur leur vie personnelle dans ce moment de détente. Je considère que c’est une première étape dans leur parcours de soin. »

Aujourd’hui, Sandra Baujard tente de développer son association, elle va enfin se rémunérer grâce à une aide de la Région (emploi CAP’Asso). Les liens avec les centres sociaux, le Secours Populaire, Entraide et solidarité et autres structures sociales fonctionnent bien. « Le projet serait aussi d’aller dans les quartiers populaires pour développer des ateliers avec les personnes encore plus vulnérables ».

Texte et photos : Aurélie Dunouau

Bruno Puccilli « bichonne » les animaux du Muséum

#VisMaVille Bruno Puccilli est chef soigneur animalier au Muséum de Tours. Pour lui, le temple tourangeau des reptiles et amphibiens est autant un refuge qu’un espace d’exposition.

Depuis septembre dernier, Bruno Puccilli, 22 ans, est devenu le chef soigneur animalier du Muséum de Tours. « Une création de poste », souligne le responsable du vivarium, Arnaud Leroy, qui témoigne de l’importance dévolue au soin des animaux dans ce lieu d’exposition.

Car le profil de Bruno Puccilli est tout sauf anodin. Ce Lorrain d’origine combine la double formation de soigneur animalier et d’auxiliaire vétérinaire. Après un passage dans un grand zoo de Bruxelles et des stages dans des refuges, le voilà arrivé à Tours, dans ce musée avec des animaux plus petits mais bien vivants.

« Ce premier vrai emploi » lui sied comme un gant. « Ici, je m’occupe, avec mes collègues, de soigner les animaux et d’entretenir les terrariums et les aquariums. Du soin quotidien : les nourrir, m’occuper des reproductions, des naissances et parfois des blessures, leur apporter les premiers gestes d’urgence. » A

u muséum, le jeune soigneur recueille les animaux blessés sur la route, ceux maltraités par leur propriétaire ou bien les animaux exotiques saisis par la police car détenus illégalement. « À plus de 80 % nous avons des animaux saisis. Je vois ce musée, au-delà de l’aspect pédagogique, comme un refuge. On leur offre un nouveau logement. C’est pour moi un engagement. »

Le jeune homme tatoué, amoureux de la nature, dégage une certaine quiétude, qui doit bien lui servir au quotidien pour faire face à des animaux parfois dangereux : un python de trois mètres, des serpents venimeux ou tout simplement des animaux nerveux qu’il faut amadouer. Depuis son premier lézard obtenu à l’âge de 9 ans et les lectures assidues de la revue National Geographic, le champ d’occupation de de Bruno Puccilli s’est bien élargi.

Il veille aujourd’hui sur une soixantaine d’espèces et plus de 400 spécimens dont une centaine de serpents et nombre d’amphibiens, iguanes, geckos, caméléons, et autres tortues. Quand il parle des animaux, le soigneur animalier parle souvent « d’individus ». « Ce n’est pas de l’affection, mais une habitude qui s’est installée, une adaptation entre nous. »

La mission du chef soigneur animalier ne s’arrête pas au soin et à l’élevage. En ce moment, il recompose avec Arnaud Leroy, le responsable du vivarium, les terrariums et l’espace tropical. « On réfléchit aux compositions pour se rapprocher au plus près de la nature et aux espèces qu’on pourrait accueillir. On évite de mélanger les espèces qui ne sont pas des mêmes pays pour éviter les risques de maladies ou d’agressions. »

Pour découvrir le fruit de leur travail, il va falloir encore un peu de patience. Le vivarium est pour l’instant fermé, au moins jusqu’à cet été. Mais pas d’inquiétude, en attendant, Bruno bichonne ses occupants.

Texte et photos : Aurélie Dunouau

 

Stéphane Balzeau, le souffle du Conservatoire

#VisMaVille Stéphane Balzeau est professeur de musique au Conservatoire de Tours. Il y a développé la filière tuba, aujourd’hui en pointe.

Il est au cœur de la spécialité musique du Conservatoire de Tours, un important complexe artistique niché entre la rue du Petit Pré et celle des Ursulines. Parmi les 82 professeurs de musique, Stéphane Balzeau imprime sa marque, donne du souffle depuis près de 25 ans pour que soit reconnue sa filière, celle du tuba.

Cet instrument, le plus grave de la famille des cuivres, n’a pas la réputation flamboyante du piano ou du violon. Méconnu, il regroupe deux familles, celle des tubas et celle des saxhorns, aux formes et tessitures variées. « Il a pour rôle d’accompagner l’orchestre, permettre que tout sonne bien, c’est la fondamentale. Il est très utilisé aussi dans les brass band et permet de tout jouer des classiques aux thèmes, comme les Beatles », précise Stéphane Balzeau.

S’il a choisi cet instrument, c’est par hasard. « J’ai commencé à jouer en Harmonie à 11 ans, mon père qui jouait de la clarinette en était le président ; et il manquait une « basse », c’est ainsi que cela s’appelait à l’époque. On m’a donné l’instrument, et j’ai adhéré. »

Depuis 1998, Stéphane Balzeau, formé aux conservatoires de Poitiers et Paris, enseigne le tuba au Conservatoire de Tours. C’est d’ailleurs l’année de création de cette filière qu’il n’a eu de cesse, depuis, de développer. « J’ai beaucoup donné d’énergie car c’est un métier passion. Il faut se bouger dans ce milieu pour donner envie aux enfants de découvrir cet instrument. Aujourd’hui, nous sommes deux professeurs de tuba pour une trentaine d’élèves. »

Ce qui en fait une filière majeure et une singularité tourangelle. Stéphane Balzeau enseigne au Conservatoire la pratique du tuba 16 heures par semaine (pour 24 h de préparation instrumentale, d’arrangement, de répétition, de réunion avec ses collègues).

Les cours d’une heure se déroulent en petits comités de un à trois musiciens. Ce jour-là, Elie, en Diplôme d’enseignement musical, s’échauffe et répète avec Stéphane. Avant le cours et dans ses interstices, les échanges se font parfois personnels, détendus. « Nous avons une relation privilégiée avec nos élèves, je ne suis pas seulement leur professeur de tuba, mais je les accompagne dans leur vie. Pour certains, de 7 ans à l’âge adulte ! »

Stéphane Balzeau apprécie également les cours donnés à l’extérieur via l’opération Orchestres à l’école « qui touche des enfants qui n’ont pas forcément accès à la musique ».

Moteur dans son domaine, il a également créé le concours international de tuba regroupant 180 candidats du monde entier. Il a aujourd’hui « passé la main », ce qui lui permet de retrouver le temps de jouer en brass band, quintet de cuivre ou encore à l’orchestre symphonique de Tours et celui de chambre de Nouvelle-Aquitaine.

Textes et photos : Aurélie Dunouau

Véronique et Malvina : le quotidien de deux maraîchères en famille

#VisMaVille Véronique Jeanneau et Malvina Bouet sont maraîchères à La Riche. Elles produisent des légumes de saison dans une ferme familiale à taille humaine.

Leur visage n’est pas inconnu des habitués des marchés des Halles, de Strasbourg, à Tours, ainsi que de celui de Notre Dame d’Oé. Les deux maraîchères associées à la tête de la ferme du Saugé, à la sortie de la Riche en direction de Saint-Genouph, sont en effet appréciées pour la fraîcheur de leurs légumes, herbes aromatiques et fleurs comestibles, cultivés sans pesticides.

Dans la vie, Malvina, 31 ans, est la nièce de Véronique. Elles ont toutes deux repris la ferme familiale en 2016. Une ferme maraîchère qui date de 1917. Ce sont Auguste et Thérèse, les grands-parents de Véronique qui y officiaient alors. Leurs descendantes sont aujourd’hui passées à la permaculture depuis deux ans, cultivant avec le calendrier lunaire et des engrais verts.

Sur leur petite ferme d’un hectare, elles aiment produire des variétés atypiques telles que la chayotte, la poire de terre ou remettre au goût du jour les légumes anciens comme le cardon, le rutabaga, les ocas du pérou ou l’héliantis. « Nous faisons en permanence des tests de semis, des renouvellements de cultures, comme sur les concombres ou les aubergines. »

Véronique et Malvina sont des maraîchères d’une nouvelle génération, travaillant avec passion sans se tuer à la tâche pour autant. D’ailleurs elles n’habitent pas sur place, ce qui leur permet « de couper ». Elles prennent quatre semaines de congés par an, et le dimanche, c’est repos. Les parents de Malvina qui habitent toujours sur la ferme, se chargent d’ouvrir et de fermer les serres ainsi que d’arroser si besoin.

Leur ferme à taille humaine fonctionne grâce à leur organisation au cordeau et leur complémentarité. Véronique s’occupe plus des serres, Malvina des productions extérieures. Les tâches sont bien réparties. « Le lundi tout le monde est là pour de l’entretien, du désherbage, des plantations. Ensuite, on prépare les récoltes pour les marchés les mardis et vendredis. Et quand l’une est au marché, l’autre est à la ferme, sauf le samedi où nous sommes toutes les deux de marché. »

Les deux femmes sont aidées par Althéa, la fille de Véronique, et Antoine, le salarié. Si « le rapport à la terre, voir pousser leurs productions » constitue leur principale satisfaction, elles apprécient aussi le côté vente directe sur les marchés et les échanges avec les clients.

Tôt le matin, vous croiserez des restaurateurs du quartier des Halles venus se fournir sur le stand de Malvina. Dans l’idéal, les deux maraîchères se verraient bien reprendre la vente à la ferme « pour nourrir les habitants d’à côté », expérience qu’elles ont appréciée durant le confinement.

Textes et photos : Aurélie Dunouau

Anthony Coué veille sur les jardins de Villandry

#VisMaVille Anthony Coué est chef-jardinier au château de Villandry. Arrivé apprenti, il y mène depuis 10 ans une belle carrière, régnant sur les buis, tilleuls et charmilles des jardins Renaissance.

Les allées du jardin de Villandry sont désertes en ce début mars. Le calme plat en attendant les milliers de touristes qui devraient affluer dès le printemps. Chaque jour, les dix jardiniers du domaine mesurent leur chance de travailler dans ce cadre exceptionnel, hérité de la Renaissance et de la gestion actuelle de la famille Carvallo.

Anthony Coué, le nouveau chef-jardinier, savoure chaque instant passé le nez dehors tout en inspectant les derniers travaux effectués. « Nous venons de tailler les 1 500 tilleuls. Cela a occupé quatre jardiniers pendant deux mois, détaille le chef-jardinier à la tête d’une équipe de dix personnes. Nous profitons également de l’hiver pour remettre du gravier dans les allées, faire un dallage sous les buis, tondre les deux hectares de gazon, faire un peu de binage, couper du bois pour chauffer le château… ».

Anthony Coué dit ne pas s’ennuyer tant son métier est diversifié. De 7 h à 16 h, « le planning est précis mais peut varier selon la météo. » Nettoyer le matériel ou travailler dans la serre peuvent être des solutions de repli en cas de grosse pluie ou de grand froid. Véronique, la responsable de la serre, est en train de préparer les 1 900 pots de semis de fèves. Anthony a élaboré avec elle les plants de culture du potage pour ce printemps.

Arrivé apprenti en 2002, il a gravi tous les échelons du domaine, depuis son stage de découverte effectué ici-même, devenant chef-jardiner l’été dernier, en remplacement de Laurent Portuguez. Passé l’effet de surprise, il dit que cela représente pour lui « un beau challenge ».

Ce rôle le ravit, même s’il passe un peu moins de temps dehors car il gère désormais l’équipe, les plannings, les commandes. « C’est beaucoup d’anticipation et de gestion », concède-t-il. Ce qu’il aime surtout, « c’est la taille. Tailler les buis, les fruitiers – pommiers et poiriers, les rosiers… c’est l’essence, mon domaine. Former et maîtriser les végétaux, c’est sympa et ça demande de la précision. »

Autre aspect particulièrement apprécié par le chef-jardinier : son cadre de travail. « Travailler ici, ce n’est pas comme en entreprise classique. On prend le temps de faire les choses pour avoir un bon résultat. On cherche la finition et la propreté. »

Des jardins à la française, rigoureux, appréciés par les touristes, connaisseurs ou non. « Ils nous interpellent souvent, et c’est plaisant, valorisant d’échanger avec eux. » Certains les qualifient d’ « artistes », ce qui n’a pas l’air de déplaire à notre chef-jardinier du château de Villandry.

Textes et photos : Aurélie Dunouau

Chantal Charron, sage-femme tout-terrain

#VisMaVille Chantal Charron est sage-femme libérale à Tours. Un métier passion qu’elle aime pratiquer à domicile, au plus près des histoires personnelles.

Le mot « passionnant » revient comme un leitmotiv lorsqu’elle décrit son activité de sage-femme libérale. Cela fait plus de 30 ans que Chantal Charron exerce dont 14 à Tours et la flamme ne s’est pas éteinte.

Ce n’est pas un hasard d’ailleurs si petite elle voulait devenir archéologue pour finalement se tourner vers « les origines de l’homme avec un petit h ». C’est au lycée, à Tours, qu’elle découvre sur une pancarte « ce métier mystérieux » et rencontre une sage-femme qui lui transmet sa passion.

Pour Chantal Charron, son métier est très « riche, il combine l’aspect médical, physiologique et éducatif. Une sage-femme, explique-t-elle, c’est la gardienne de la physiologie tout au long de la vie. Elle suit celle de la jeune fille, pour sa première contraception, celle de la femme lors de ses grossesses, et même celle de la grand-mère pour la rééducation de son périnée ».

Consultations gynécologiques, suivi médical de grossesse, échographies, rééducation périnéale, IVG médicamenteuse, acupuncture (et même shiatsu pour Chantal Charron !),… l’activité s’est diversifiée et intensifiée ces dernières années avec une montée en compétences. Une sagefemme poursuit désormais des études de médecine, de niveau bac + 5.

En libéral, la sage-femme reçoit à son cabinet pour des consultations d’une demi- heure minimum, mais se rend aussi à domicile pour le suivi de sa patiente, dès 48 heures après l’accouchement afin de surveiller le bien-être du bébé et de sa maman. C’est la partie que préfère Chantal Charron. « Voir comment les gens vivent, rentrer dans leur intimité, c’est touchant et cela permet de mieux appréhender des situations complexes. »

Des familles démunies, sans aucun matériel à domicile, ni compresses ni sérum, pour soigner le bébé et la maman, elle en voit à Tours. Des familles aux situations difficiles mais aussi des gens « extrêmement accueillants, notamment des familles africaines qui m’invitent à manger chez elles ». Chantal Charron, qui a le goût des voyages, affectionne ces échanges humains.

« Des histoires de vies, j’en ai connues », sourit-elle dans son bureau tapissé des faire-part des bébés qu’elle a accompagnés dans la naissance. Elle ne compte plus leur nombre depuis longtemps, mais se souvient de moments intenses, comme lorsqu’elle travaillait en Nouvelle-Calédonie où les femmes accouchaient sur la table du dispensaire au milieu des poules. Elle caresse désormais le rêve de travailler dans une maison de naissances. Pour boucler sa découverte totale du métier après la crèche, l’hôpital, la clinique, le dispensaire et le libéral.

Texte et photos : Aurélie Dunouau

Dans le quotidien de David Herbron, propriétaire de l’hôtel du Cygne

#VisMaVille David Herbron est le propriétaire gérant de l’hôtel du Cygne, à Tours. Cet hôtelier de métier s’y épanouit en alliant ses deux passions : la décoration et le contact client.

Des cheminées en marbre, un bel escalier d’époque en bois, des lampes et des vases de collection, des tableaux, des miroirs chinés, un vieux tourne-disque… l’hôtel du Cygne, niché dans le quartier Colbert à Tours, s’apparente à un vrai cabinet de curiosités, mêlant le moderne et l’ancien, le chic et le bohème.

Ses deux gérants, David Herbron et Cyril Alzy ont voulu un « lieu atypique, qui nous ressemble et dans lequel la clientèle se sente bien, décoré et coloré comme elle n’aurait pas osé le faire chez elle. On ose pour elle ! ».

David Herbron a le goût certain de la décoration comme il a celui du contact avec le client. Ce sont d’ailleurs les deux facettes du métier qui l’ont poussé à reprendre l’hôtel du Cygne en 2019.

Après une rénovation totale – un patio a même été créé en lieu et place d’un garage, l’ouverture s’est faite au gré des confinements. « Nous n’avons pas encore fait une année complète mais la clientèle est au rendez-vous, plutôt jeune et française pour le moment. »

Exerçant auparavant à Paris puis à Orléans, ce natif du Mans a jeté son dévolu sur Tours avec son compagnon et associé, comme une évidence pour celui qui aime travailler avec la clientèle étrangère, notamment américaine, friande des châteaux de la Loire. « J’étais prêt à lâcher le métier, et puis j’ai fait un bilan de compétences et tout me réorientait vers l’hôtellerie. Pour moi, c’est le plus beau métier en termes de contact car les gens se posent à l’hôtel et un échange se crée. »

Les 18 chambres réparties sur trois étages occupent bien les journées de David et Cyril, ainsi que des deux femmes de chambre. « Une toute petite équipe parce que je fais plus de l’hôtellerie pour le contact avec les clients que pour gérer du personnel », explique David Herbron.

De la mise en place des petits-déjeuners, à 7 heures du matin, à la fermeture de l’hôtel à 21 heures, « ce sont beaucoup d’heures. Les rôles sont répartis avec mon ami. Je m’occupe plutôt des réservations, de l’accueil des clients et de la partie réputation de l’hôtel. La visibilité d’un hôtel est une donnée déterminante de nos jours, entre les avis et les influenceurs qui passent nous voir. » Si l’hôtel du Cygne se fait discret dans sa rue du même nom, à deux pas de la gare et des restaurants du quartier Colbert qu’affectionne David Herbron, son établissement trois étoiles, au style chatoyant et à l’ambiance chaleureuse, ne semble laisser personne indifférent.

Photos et textes : Aurélie Dunouau


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Le boom des ouvertures

Quatre nouveaux hôtels ont ouvert leurs portes en 2021 à Tours. Le plus visible avec ses deux tours qui bordent l’entrée de la rue Nationale côté Loire, les hôtels du groupe Hilton, le Hilton Garden Inn et le Hampton, respectivement quatre et trois étoiles. Un autre trois étoiles a vu le jour, rue du Maréchal Foch, à deux pas de la place Plumereau : le Ferdinand Hôtel, qui a pris la place de l’ancien hôtel Foch entièrement rénové et modernisé. Enfin, dernier né fin 2021, face aux halles, après d’importants travaux dans les locaux de l’Entraide Ouvrière, l’hôtel de luxe Les Trésorières vient d’obtenir ses cinq étoiles.

Fabrique d’usages numériques (FUN) : Carol Simonet, une femme à la tête des « makers »

#VisMaVille Carol Simonet est présidente de la Fabrique d’Usages Numériques (la FUN), installée à Mame. Cette prof d’arts appliquée y expérimente connaissances et pratique numérique, sous le signe du partage.

Ce mercredi après-midi, ça ponce, ça découpe et ça modélise au Funlab-Fablab de Tours. Alexia, l’artiste, utilise l’imprimante laser pour ses découpes de bois tandis qu’un groupe de jeunes hommes s’affaire sur son projet d’économie circulaire dans le textile.

C’est cela l’esprit Funlab, du partage et de la créativité. Cet atelier de fabrication, installé dans les locaux de Mame, à Tours, « facilite la mise en commun de machines et favorise l’esprit du faire soi-même ».

Des profils diversifiés s’y croisent, ce qui ravit la présidente de l’association La Fun, Carol Simonet. « Nous avons des particuliers mais aussi des projets sur lesquels nous collaborons, qu’ils soient artistiques, écologiques ou pédagogiques. Par exemple, j’ai créé en 3D pour la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO), cinq espèces de chauves-souris qui vivent en Touraine, ce qui leur sert pour leurs actions pédagogiques. »

Le Funlab était également en première ligne lors des débuts de la crise du Covid et a fabriqué 100 000 visières lorsque les masques manquaient. Carol Simonet, par ailleurs professeur d’arts appliqués dans un lycée tourangeau, n’est certainement pas arrivée ici par hasard mais « dans des circonstances particulières ».

En 2019, elle obtient un congé formation et se passionne pour la fabrication additive par des stages au Funlab, puis partout en France, « afin d’acquérir de nouvelles compétences et, entre autres, pouvoir les réutiliser ensuite dans l’Éducation Nationale. » Sa formation finie, elle devient membre de la FUN puis, un an après, elle prend la tête de l’association. Elle en rigole : « Une femme présidente des makers, ce n’est pas si courant. Je suis là aussi grâce à la confiance de la directrice, Catherine Lenoble ».

Depuis, c’est simple, si Carol Simonet ne travaille pas au lycée, vous la trouverez forcément à l’atelier, en train de modéliser, fabriquer ou bien de former d’autres makers. « J’ai toujours eu la volonté d’apprendre et de transmettre. Ici c’est la débrouillardise, l’autonomie et la collaboration, des manières bien différentes de faire de l’Éducation nationale. »

Elle apprécie aussi le côté économie circulaire : « Les machines permettent de réparer, pas que de créer de nouvelles pièces. C’est un système D qui solutionne des problématiques de l’industrie. » Ici à Tours, le Funlab reste amateur mais certains en France ont franchi le pas de la professionnalisation. Carol Simonet tient au modèle associatif. « Cela nous permet d’accueillir tous types de projets et de profils, à tout âge et horizon social. » Un complément salutaire à son métier de prof.

Texte et photos : Aurélie Dunouau

Justine Dubourg, cheffe d’entreprise engagée et présidente de Touraine Women

#VisMaVille Justine Dubourg est consultante en stratégie d’entreprise. Avec son incubateur d’entreprises José.e, elle aide les projets positifs et les femmes à émerger dans l’économie tourangelle.

La jeune cheffe d’entreprise reçoit dans un lieu à son image : moderne et chaleureux. Dans les salles de réunion de l’Étape 84, l’auberge de jeunesse new style de l’avenue Grammont de Tours ou bien au café Concer’thé près de la gare, elle aime donner rendez-vous à ses clients.

Ce jour-là, c’est le premier contact avec Matthieu qui souhaite se lancer dans un projet d’écotourisme. Ensemble, ils débroussaillent le projet, Justine lui prodigue ses conseils, ses pistes, les financements à aller chercher, les acteurs du territoire à rencontrer.

Comment définit-elle son métier ? « Je suis consultante en stratégie d’entreprise. J’accompagne les porteurs de projets de création d’entreprise, les aide sur le côté entreprenariat et communication. Je donne aux clients une méthode, une structure et surtout de la confiance. »

Créée cette année, sa petite entreprise nommée José.e se distingue par sa sélectivité. Tous ses clients qu’elle appelle « entrepreneur.e.s colibris » font leur part dans la société en ayant une résonance positive et écoresponsable sur le territoire. « Si je fais ce métier, c’est avant tout parce que je crois qu’on peut changer le monde par l’entreprise. Si les gens viennent me présenter des projets uniquement pour faire du cash, c’est non. »

Elle accompagne ainsi pas mal de reconversions professionnelles, des projets d’entreprises qui ont du sens telle une création d’épicerie en vrac ou de cosmétiques 100 % locales. Justine Dubourg n’a pas toujours baigné dans le monde de l’entreprise, ses parents étaient dans l’Éducation nationale. Mais elle s’y sent comme un poisson dans l’eau pour peu que l’humain y prime.

Son côté créatif et innovant, elle a commencé à le développer, à la fin de ses études supérieures, avec Régine Charvet-Pello chez RCP Design, une femme qu’elle admire. « Un modèle, j’ai beaucoup appris avec elle. »

Très vite, à 26 ans, elle monte sa première entreprise dans le consulting, formant 600 personnes à savoir parler vite et bien de leur entreprise. Elle prend conscience que des hommes en cravate sont plutôt attendus à ce poste. À 32 ans, Justine Dubourg s’est trouvé une voie, peut-être l’engagement d’une vie : présidente de Touraine Women(*), elle milite pour l’égalité entre les femmes et les hommes au travail. À côté de son activité de consulting, elle est en train de développer toute une expertise sur l’égalité au travail, qu’elle nourrit ardemment de lectures, podcasts, recherches. Déterminée, engagée, la jeune femme ne lâchera pas son combat féministe dans l’entreprise et rêve de « changer le monde ».

Texte et photos : Aurélie Dunouau


(*) Créée en 2020, l’association Touraine women vise à favoriser la visibilité des femmes dans l’économie tourangelle et sensibiliser à l’entrepreneuriat au féminin. Elle part du constat que les femmes ne sont pas suffisamment mises en valeur sur la scène économique tourangelle => www.helloasso.com/ associations/ touraine-women

Aurélie Blanchard, le « couteau suisse » du Musée du compagnonnage

#VisMaVille Aurélie Blanchard est médiatrice pédagogique au Musée du compagnonnage. Polyvalente, elle s’occupe entre autres de dévoiler les trésors du musée aux yeux des enfants.

 

Comme soutenu par l’église Saint-Julien, le Musée du compagnonnage et sa magnifique charpente en forme de coque de navire inversée nous invite chaque fois à un fabuleux voyage à travers les créations des compagnons de France. Depuis 1968, il abrite près de 4 000 de leurs œuvres. Chaque jour, Aurélie Blanchard les observe, les interroge, pour en dévoiler leurs secrets aux enfants.

Depuis près de quinze ans, la médiatrice pédagogique propose aux tout-petits comme aux adolescents des animations et visites sur-mesure. « J’ai été embauchée en tant qu’agent d’accueil mais j’ai très vite évolué. Ici, chacun va vers ce qui l’attire. »

Et pour Aurélie Blanchard, qui a étudié les services aux personnes puis obtenu un BTS gestion d’animation de projets, ce n’est pas un hasard si elle souhaitait d’abord travailler dans des crèches et s’est finalement retrouvée, quelques années plus tard, à proposer au musée les premières visites pour les tout-petits. Ce sont ses chouchous avec les ados de 14 à 16 ans en recherche d’orientation, très curieux.

« Je m’adapte au public. Pour les 7-10 ans, nous proposons des thématiques, sur les voyages, les blasons, pour qu’ils comprennent ce qu’est le compagnonnage, les métiers manuels, les différentes matières premières utilisées…. Pour les 2 ans, ce sera différent, avec des chansons autour des animaux présents au musée, comme le cerf en pièce forgé et le petit escargot. »

Et Aurélie chante avec eux de bon cœur. À partir de 10 ans, un jeu de Cluedo est proposé aux familles, où chaque participant joue un personnage à travers les pièces du musée, les outils se transformant en armes du jeu. « Nous le reproduirons en 2022, C’est une animation qui plaît beaucoup », confirme Aurélie Blanchard.

Pendant les vacances de Noël, il s’agira de chercher l’intrus dans les vitrines, une quinzaine s’y sont glissés. Le renouvellement et la créativité rythment la vie du musée. Aurélie Blanchard cherche sans cesse de nouvelles idées pour concevoir ses expositions, avec ses collègues. Ils sont huit agents comme elle à animer le musée.

Car au Musée du compagnonnage, les petits effectifs obligent à la polyvalence. « Je m’occupe de l’accueil, de la surveillance des salles, des animations pour tous les publics. Ici, on m’appelle le couteau suisse du musée », rigole cette Bourguignonne d’origine qui ne se lasse pas d’admirer sur son œuvre favorite : les hospices de Beaune, réalisés en pâtes à nouilles.

Textes et photos : Aurélie Dunouau

« Le Sens de la vis » : Paul Huguen donne une seconde vie au bois

#VisMaVille Paul Huguen est concepteur et aménageur de mobiliers en bois, quai Paul-Bert, à Tours. Son entreprise « Le sens de la vis » accompagne aussi les particuliers à l’auto-construction. Avec un principe : du bois local et des palettes recyclées.

Au volant de sa camionnette orange, Paul Huguen part ce matin récupérer des palettes destinées à la benne, chez l’entreprise Epalia, à La Ville-aux- Dames. Depuis sept ans, il recycle des palettes pour leur donner une seconde vie. Entre 200 et 300 par an qui deviendront du mobilier de jardin, que l’on retrouve dans certaines enseignes tourangelles comme le café culturel Cubrik, ou bien qui serviront pour ses ateliers d’apprentissage aux particuliers.

« Il y a un côté pédagogique intéressant, car avec les palettes, qui n’ont pas grande valeur même si j’en récupère en chêne, les gens se mettent moins de pression et peuvent se tromper. » À 34 ans, le jeune concepteur de meubles en bois a cheminé avant de trouver sa voie. Le goût des sciences et du bricolage, des études en chimie et une école d’ingénieurs, un Erasmus au Danemark, puis un premier emploi comme fonctionnaire territorial à la métropole de Lille, chargé de gérer la plateforme du recyclage des déchets.

« J’y ai pris conscience de l’énorme gaspillage des ressources qui étaient détruites et notamment du bois. » Paul Huguen quitte alors son travail et Lille pour Tours, en 2015, avec sa compagne apicultrice. Dans son cabanon tourangeau, il monte ses premiers meubles pour sa famille.

Depuis, il s’est installé quai Paul-Bert en atelier partagé avec une menuisière et un maquettiste argentin. Lorsqu’il ne rabote pas ses palettes, il conçoit et monte, seul ou à l’aide du client, des meubles en bois nobles et locaux, principalement du chêne et du pin douglas.

« Je me fournis le plus localement possible, grâce à une scierie à côté de Loches qui coupe le bois dans un rayon de 150 km, jusqu’en en Sologne ; je refuse de travailler avec du bois exotique ou aggloméré. Pour moi, chaque morceau de bois est unique et travailler le bois local a du sens. »

Et ses clients partagent sa philosophie du bois : depuis trois ans, Paul Huguen vit de son travail, le carnet de commandes est plein pour six mois. À son actif, il a réalisé le nouveau mobilier de la bibliothèque universitaire de Tours et anime, avec une paysagère, un atelier avec les habitants dans le jardin partagé du Sanitas, dont une pergola, projet initié par l’association du quartier Pluriel(le)s. Ouvrez bien les yeux, les créations en bois de Paul Huguen essaiment un peu partout dans la ville de Tours.

Texte et photos : Aurélie Dunouau

Dans l’antre des archives municipales avec Lise Schnel

#VisMaVille Lise Schnel est archiviste. Nous l’avons rencontrée aux archives municipales contemporaines, situées à la mairie de Tours. Elle défend une vision vivante du métier.

Au deuxième sous-sol de la mairie de Tours, ce matin-là, dans la salle des archives municipales, Carole peaufine l’exposition à venir sur les 100 ans du Congrès de Tours(*) tandis que Lise nous a sorti quelques documents valant le coup d’œil : une photo sur plaque de verre, l’album du Lycée de Tours de 1891, des photographies du camp Beaumont lors de la Première Guerre mondiale, des plans rares de projets urbains de la ville ou encore les messages et objets conservés déposés par les Tourangeaux devant l’Hôtel de Ville après les attentats de 2015. Preuve de la diversité des documents municipaux conservés.

Les archives contemporaines rassemblent tous les documents écrits concernant la ville depuis 1945, les photographies, les gravures, mais aussi les documents numérisés historiques. Lise Schnel et ses six collègues archivistes naviguent entre deux lieux, les archives contemporaines de la mairie et les archives historiques situées à la chapelle Saint-Eloi.

Les archives contemporaines sont de loin les plus imposantes avec leur 4 500 mètres linéaires. Il faut dire que tout document administratif y est conservé, selon une procédure bien établie. « Nous sommes un service public, explique Lise Schnel. Nous collectons les archives auprès des services municipaux et leur volume reste croissant malgré la dématérialisation. »

Pour le reste, comment établir ce qui a valeur d’archive pour la ville ? « Nous nous référons aux Archives de France. Mais il y a une part de subjectivité, par exemple lorsque nous conservons les messages déposés après les attentats du Bataclan. Les documents privés, en rapport avec l’histoire de Tours, nous intéressent également. »

Lise Schnel, passionnée d’histoire et par sa Touraine natale, souligne cette part importante de collecte. Pour les particuliers, elle n’hésite pas à les solliciter directement. « Nous avons ici le fonds personnel de Jean Meunier, ancien maire de Tours (1944-47), remis par sa fille Mireille Saint-Cricq. Nous avons aussi des associations qui nous donnent leurs archives comme les Fêtes musicales de Touraine ou des sections sportives. On ne s’interdit rien pour la conservation. »

Egalement, l’archiviste suit de près les évolutions de la société pour ajuster sa sélection. « La veille est constante. Nous évaluons les changements sociétaux pour voir quels documents pourraient être importants à l’avenir et nous les conservons plus longtemps. Comme ceux du service petite enfance. »

La valorisation est une autre facette du métier d’archiviste qu’exerce Lise Schnel depuis 1990 à Tours. Présentation en salle de lecture, montage d’expositions, publication de brochures et d’ouvrages… Décidément, l’archiviste loin d’être enfermée dans des salles poussiéreuses s’ouvre vers le public. « Ici, les archives ne dorment pas », conclut Lise Schnel.

Textes et photos : Aurélie Dunouau


(*) Grande exposition du centenaire, péristyle de l’Hôtel de Ville de Tours, du 20 novembre au 14 décembre.

Dans le quotidien de Maxime Desmay, apprenti et futur chef pâtissier

#VisMaVille À 20 ans, Maxime Desmay poursuit des études de pâtissier. Nous l’avons rencontré en apprentissage chez Nicolas Léger à Tours, la main à la pâte.

Concentré, Maxime Desmay s’empare de la poche à douille et se met à verser des crémeux mangue-passion dans le moule. Ils sont deux apprentis et un ouvrier cet après-midi-là dans le petit local de fabrication de la pâtisserie chocolaterie de Nicolas Léger, dans le centre-ville de Tours. La température monte avec la chaleur des fours, bientôt ce sont des sablés qui en sortiront.

Entre deux préparations, Maxime supervise un autre apprenti en CAP et lui donne des conseils. Car le jeune homme commence à avoir un peu de métier et surtout pas mal de formation. Il est en deuxième année de BTM (Brevet Technique des Métiers) pâtissier-confiseur-glacier-traiteur qui prépare notamment à monter sa propre affaire.

Dans le cahier des charges, « le jour de l’examen, il faut savoir gérer un apprenti et confectionner durant 8 heures entremets, salés, viennoiseries, chocolaterie, pièce montée et notre spécialité », détaille Maxime. Une formation polyvalente où il faut savoir tout faire, des classiques aux gâteaux plus complexes. Dans sa promo du Campus des Métiers et de l’artisanat de Joué-Lès-Tours, ils sont 16 élèves inscrits dans sa spécialité de BTM.

C’est le chocolat qui a amené Maxime à vouloir exercer ce métier, et ce dès le plus jeune âge. « Depuis tout petit, je voulais être chocolatier. Mes parents m’ont poussé à faire ce métier en voyant ma passion. Mon père est mécanicien, mais il fait son propre pain, ses brioches, alors j’ai expérimenté avec lui. »

Après la troisième et un stage dans la boulangerie de son village à côté de Loches, Maxime enchaîne les formations : CAP pâtisserie, CAP boulangerie, mention complémentaire chocolaterie, le tout au Campus des Métiers.

À présent en BTM pâtisserie, équivalent à un niveau bac, il revendique son désir d’éclectisme et de maîtrise des différents mets. Nicolas Léger, son maître d’apprentissage, voit en Maxime « un jeune qui sort du lot, qui aime son métier, comprend et qui en veut. » Il est vrai que Maxime est passionné. S’il travaille habituellement le matin dans son entreprise de 6 h à 13 h et dès 4 h 30 les week-ends, « les après-midi et les week-ends, je m’entraîne ».

Il faut de la motivation pour ce métier, quand les jeunes de son âge se retrouvent pour fêter la fin de semaine, Maxime dort… ou se lève. « J’ai quand même mes week-ends après les cours, ça va », tempère le jeune pâtissier. Qui retient l’alliance de la rigueur et de l’esthétisme dans son métier.

« Ce que j’aime, c’est la minutie, le sens de l’esthétique, inventer de nouveaux mélanges de textures et de saveurs, c’est là qu’on se fait plaisir. » Et chez Nicolas Léger, les apprentis peuvent tester, laisser libre cours à leur créativité… sous l’œil encadrant du chef !

Textes et photos : Aurélie Dunouau

Dans le quotidien de Cassandre Richet, coach sportive et prof de yoga

#VisMaVille Cassandre Richet est coach sportive. Elle enseigne le yoga et le Pilates en indépendante à Tours et aux alentours. Elle nous dévoile l’envers du décor de son métier et de sa passion.

Les tapis sont posés, le bol tibétain est en place, les apprenties « yogi », jambes en tailleur et corps bien droit démarrent leur échauffement par des exercices de respiration. L’une d’elles est en visio, car elle n’a pas de pass sanitaire, la caméra est posée juste devant la coach. Inspirations, expirations… cinq minutes de détente et de concentration qui permettent de poser le poids de la journée et se centrer sur soi.

« On peut commencer les choses sérieuses, vous vous sentez bien ? Allez, vous me faites un vinyasa », les interpelle leur professeur de yoga Cassandre Richet. Les cours se déroulent en petit nombre, « dix personnes maximum », dans des salles louées par Cassandre, à Tours et La Riche, ce soir-là à la Dilettante, rue de la Mairie.

Car la vie de coach sportive indépendante, « c’est beaucoup d’organisation, de planification et de rigueur », souligne Cassandre Richet. « L’avantage c’est que je gère mon emploi du temps sans horaire fixe, sans patron, mais en réalité c’est très peu de temps libre, presque du non-stop. Je suis parfois fatiguée, au risque de la blessure et n’ai pas toujours assez de temps pour ma pratique personnelle. Mais avec l’expérience (elle s’est lancée en 2014 – NDLR), je gère bien à présent. »

Entre les cours collectifs et individuels qu’elle propose en yoga mais aussi en Pilates, en salle de gym ou en autonomie, auprès également d’une association comme l’Ardente à la Bergeonnerie ce qui lui permet de proposer des cours à des prix accessibles (« c’est important et de s’adapter à tous les âges et morphologies »), Cassandre jongle aussi avec les stages qu’elle organise au Center Parc de Loudun, les retraites qu’elle propose en yoga et les cours en entreprise.

Derrière cette diversité de prestations, un seul mot d’ordre : « Apprendre aux gens à prendre soin d’eux. On cherche dans les étirements, le renforcement et les postures un bien-être qui bénéfice au corps et au moral. Ça rebooste une séance quand ça ne va pas. En tout cas pour moi c’est vital, c’est ce qui m’a sauvé pendant les confinements. »

Formée en école de coach sportif à Tours après des études de danse au conservatoire et de langues à la faculté (elle a passé un an au Japon), Cassandre se remet en question, abandonne son job d’étudiante à Ikea et se lance avec passion dans la pratique du yoga et du Pilates, dites « méthodes douces » : Paris, Cambodge, Inde, elle se forme et continue d’ailleurs aujourd’hui avec le yoga thérapie.

Devant l’engouement des candidats à un job qui fait rêver, elle nuance : « Derrière nos belles photos sur nos sites internet, il faut savoir que nous avons beaucoup de gestion et d’administratif, beaucoup d’heures en dehors de la présence des cours. Je ne le conseille pas à tout le monde, la plupart peuvent pratiquer en loisir sans en faire un métier. Mais moi je ne ferai pas autre chose », sourit-elle.

Textes et photos : Aurélie Dunouau

Dans le quotidien de Corinne Hamidat, la « vigie » du Sanitas

#VisMaVille Corinne Hamidat est surveillante d’un pâté d’immeubles, dans le quartier du Sanitas, à Tours. Du ménage au relationnel, un métier polyvalent et prenant.

Sous le soleil automnal qui pointe son nez après l’averse, elle retrousse ses manches, enfile ses gants et ramasse aussitôt les débris de meubles qui jonchent le sol au pied d’une barre d’immeubles du Sanitas. Direction « le monstre », le local qui sert de stockage pour les encombrants.

Corinne Hamidat ne compte plus les déchets déversés chaque soir, des « incivilités » qui occupent les surveillants d’immeubles et agents d’entretien de Tours Habitat – le gestionnaire des logements sociaux, une bonne partie de leur matinée.

En tant que surveillante principale d’immeubles, chaque jour de la semaine, depuis sept ans, Corinne Hamidat fait sa ronde du secteur qui s’étale du boulevard Général de Gaulle à l’allée de Moncontour, derrière la gare, bordé par la Rotonde et l’avenue Grammont. À l’embauche, à 7 h 30, après avoir fait le ménage des deux entrées dont elle est chargée, elle s’assure qu’ « il n’y a pas de danger pour les locataires, pas de bris de glace par terre, je vérifie aussi que les ascenseurs ne sont pas en panne, que les portes de hall se ferment bien ».

En chemin, elle interpelle les autres surveillants ainsi que les agents d’entretien et de maintenance qui officient dans le secteur. Corinne a un rôle pivot, chargée de recueillir les informations et de les retransmettre à Tours Habitat. « Il faut aimer le relationnel pour ce métier », pointe la gardienne. En contact avec les autres professionnels mais aussi les locataires, elle assure les états des lieux d’entrée et de sortie.

Le téléphone vissé sur son oreille, elle est régulièrement appelée pour « des changements d’ampoule, des fuites d’eau, une clé perdue ». La surveillante d’immeubles apprécie ces moments d’échange même si « parfois il faut prendre sur soi quand les gens sont agacés, j’attends qu’ils se calment et on parle après ».

Du haut de sa stature imposante, Corinne adoucit les moeurs. Ayant habité auparavant dix ans le quartier, elle connaît bien ses habitants, surtout les personnes âgées, notamment du boulevard de Gaulle, qui ne quitteraient leur logement pour rien au monde. « J’aide les petites mamies à porter leurs affaires quand je les croise à la sortie des courses. »

Pour le reste, il y a du roulement et pas toujours le temps de faire connaissance. Si Corinne Hamidat possède un bureau de gardienne au 12 allée de Luynes, spacieux mais dépouillé, elle n’y passe pas la majeure partie de son temps. « Je ne tiens pas en place, j’aime être sur le terrain et puis il faut que je marche depuis mon infarctus. »

Ses trois grands enfants lui font d’ailleurs la leçon et lui demandent de se ménager, elle qui a du mal à fermer l’oeil lorsqu’elle est d’astreinte les soirs et week-end, de « peur de ne pas entendre le téléphone sonner et ne pas répondre aux locataires. Le bien-être des locataires, c’est mon souci permanent. »

Texte et photos : Aurélie Dunouau

Vrac, local et bio, le pari d’Anne-Gwénolée Tu et de son épicerie « Sur la branche »

#VisMaVille Anne-Gwénolée Tu est gérante de l’épicerie locale et sans emballage, Sur la Branche, à Tours. Investie dans le zéro-déchet, elle se bat pour participer à une économie plus vertueuse.

Place de la Victoire, ce mercredi après-midi, le magasin ne désemplit pas. Familles, étudiants, retraités… tous passent faire leurs provisions et prendre des nouvelles. « Vous ne fermez pas, rassurez- moi ? » Car Anne-Gwénolée Tu, la gérante et fondatrice de Sur la Branche depuis 2017, traverse une mauvaise passe financière et vient d’en informer ses clients par mail (lire ci-dessous).

L’épicerie locale de quartier prend plus que jamais tout son sens. « Nous étions les premiers à Tours à allier vrac, produits locaux et bio, assure Anne-Gwénolée Tu. Nous sommes investis dans un réseau d’associations zéro déchet, nous aimons conseiller nos clients dans leurs démarches, leur donner des recettes, des astuces et les orienter vers les bonnes personnes. L’idée est d’avoir affaire à des hommes, loin de l’industrie agro-alimentaire. »

Bref plus qu’une épicerie, Anne- Gwénolée participe à la promotion du zéro-déchet et d’une alimentation de qualité au sein des réseaux tourangeaux. Ici les clients amènent leurs bocaux et emballages, ce qui permet de choisir la quantité. Dans le magasin, s’affichent les portraits d’une quarantaine de producteurs locaux, du maraîcher de Saint- Pierre-des-Corps aux huileries de Touraine. « Ce n’est pas juste vendre des pois chiches et des pommes de terre mon métier, je suis allée sur leurs exploitations, on partage une démarche. »

Le déclic s’est produit très jeune. Végétarienne à 18 ans, elle parcourt le monde en faisant du woofing et plonge dans ses intérêts : la nature et l’alimentation. Notamment grâce à son colocataire qui était brasseur. Alors installée en région parisienne, elle évoluait dans le milieu de la librairie de luxe. « Je suis passée de la vente de livres qui coûtait des milliers d’euros à des légumes », sourit la pétillante brunette, aujourd’hui 37 ans.

Un milieu dont il lui est resté la rigueur du travail et le goût de la qualité. Elle monte alors une section de la Ruche qui dit oui dans la brasserie de son ami. Elle découvre aussi Tours et tombe amoureuse de la ville. En 2017 la voilà lancée dans l’aventure Sur la Branche.

« Je voulais une épicerie du quotidien. Il est difficile de ne faire que du local et du bio, mais j’essaie que les produits viennent le plus près possible. 95 % de nos produits sont quand même bio avec des valeurs éthiques. » Ce qui n’est pas bio n’en est pas moins respectueux de l’environnement et local comme le garum du pêcheur Thierry Bouvet. Singularité, l’épicerie propose aussi des casiers de poissons frais deux fois par semaine, grâce au réseau Poiscaille, qu’il suffit de choisir sur internet. Et les paniers bio sont sans engagement.

Textes et photos : Aurélie Dunouau


Épicerie bio en difficulté

Depuis la crise du Covid, la fréquentation de l’épicerie n’a cessé de décroître. « Nous étions à 1 600 clients par mois avant le Covid, nous sommes à présent à 1 000 clients par mois, cela s’est surtout creusé depuis le printemps dernier. Notre seuil de rentabilité n’est plus atteint », alerte Anne-Gwénolée Tu, la gérante de Sur la Branche. Résultat : – 30 % de chiffre d’affaires. « Si les clients ne reviennent pas et surtout durablement, nous ne pourrons pas continuer. » Elle signale d’autres cas similaires de boutiques indépendantes en difficulté. Le tout récent drive du bons sens à Chambray-lès-Tours vient de fermer ses portes.

> Sur la branche, 2 place de la Victoire, à Tours.

Dans le quotidien d’Aude Girardeau, bibliothécaire à la médiathèque de Joué-lès-Tours

#VisMaVille Aude Girardeau est bibliothécaire, coordinatrice des publics enfants à la médiathèque de Joué-lès-Tours. Un métier venu sur le tard qui l’enchante aujourd’hui.

Nichée au bord du parc de la Rabière, la médiathèque de Joué offre d’emblée une ambiance apaisée. De par son cadre verdoyant, ses rangées de livres appétissantes, sa taille accessible, mais aussi la bonne humeur de son équipe. Aude Girardeau n’est pas la dernière à plaisanter et à détendre l’atmosphère. « Tu as oublié de rendre Mortelle Adèle. Mais ce n’est pas grave, je vais te le prolonger, tu vas pouvoir en profiter pendant tes vacances. » Voilà la petite fille rassurée qui repart avec sa pile d’ouvrages et de magazines pour passer l’été.

Aude Girardeau fait partie des dernières recrues de l’équipe, en poste depuis presque deux ans. Sa directrice Christine Rico souligne « son profil atypique ». Aude est contractuelle, elle n’a pas eu le fameux concours d’assistant de conservation du patrimoine et des bibliothécaires (ACPB) qui permet généralement d’exercer le métier. Mais son expérience et son savoir-faire ont fait la différence.

Diplômée en art du spectacle, elle se voyait plutôt comédienne ou metteuse en scène. Elle a d’abord exercé dans le milieu associatif : la Boîte vocale où elle s’occupait des actions de formation des demandeurs d’emploi, puis à la Ligue de l’enseignement où elle se chargeait de la quinzaine du livre jeunesse. « C’était une période où j’ai eu mes enfants et fait mes armes sur la littérature jeunesse. »

Ce qui lui plaît dans ce secteur ? « La créativité, l’imaginaire développé par les auteurs avec de toutes petites choses, tout comme pour le spectacle jeune public, et la variété des histoires, des écritures, des illustrations… Des histoires qui nous bousculent et nous émerveillent. »

Aude Girardeau apprécie surtout le contact avec les enfants et les animations développées par la médiathèque en partenariat avec le service petite enfance de la Ville et les établissements scolaires. Derrière son guichet aux emprunts et aux retours, elle ne manque pas une occasion de donner ses conseils au jeune public. Mais ce qui est moins visible dans le métier de bibliothécaire, c’est l’activité déployée lorsque ses portes sont fermées. Souvent le jeudi matin, les bibliothécaires se réunissent pour discuter et choisir les nouveaux documents.

En secteur jeunesse, ils sont cinq et travaillent en partenariat avec les librairies de Tours, Libr’enfants et Bédélire, qui leur proposent une sélection. « Nous achetons 1 200 livres cette année, en comptant les renouvellements des livres abîmés, une centaine de DVD et 50 CD. » La bibliothécaire est aussi chargée de passer les commandes, de saisir les nouveautés dans la base de données, de cataloguer, mettre les étiquettes. Ensuite, mettre en rayon et ranger ! « Les mercredis et samedis soirs, nous avons un gros travail de rangement des mangas qui sont dispersés un peu partout », sourit Aude.

Une activité de tri permanente dans la réserve et, avec les tout-petits, les renouvellements sont plus nombreux. « On se retrouve vite avec des livres cartonnés en lambeaux ; soit on renouvelle, soit on désélectionne. » Ce travail de fourmi, les bibliothécaires l’assurent au quotidien.

Textes et photos : Aurélie Dunouau


Les 40 ans de la médiathèque

La médiathèque de Joué-lès- Tours est en plein renouvellement : depuis cette année, elle est désormais gratuite pour tous les publics et tend à élargir ses horaires d’ouverture. Le mobilier est également renouvelé. Il faut dire qu’elle commence à prendre un peu d’âge puisqu’elle souffle ses 40 bougies cette année !

Les festivités démarrent à la rentrée. Une exposition retraçant l’histoire de la médiathèque sera visible à partir de mi-septembre. Une visite guidée aura lieu le 18 septembre pour les journées du patrimoine. Et l’équipe de la médiathèque nous annonce une belle journée festive le 27 novembre avec de nombreuses surprises.
> mediatheque.jouelestours.fr

Dans les rues de Tours, Annabelle Tourne est la guide-conférencière du street art

#VisMaVille Annabelle Tourne est guide-conférencière. De l’époque gallo-romaine à l’art de rue, cette guide multicarte décrypte la ville sous tous ses aspects.

Rendez-vous est pris devant le parking Gambetta, rue Étienne-Pallu, entre les Galeries Lafayettes et le Monoprix. Dans ce parking souterrain, les œuvres commandées d’Hazul, Chanoir, Emyr, Mr Dheo, Inconito, Mr Plume ou encore Dominique Spiessert se côtoient dans un joyeux mélange de couleurs et d’inspirations.

Un lundi par mois depuis le mois de mai, Annabelle Tourne fait découvrir les créations de street art aux touristes et aux Tourangeaux. Une visite nouvelle proposée par l’Office de tourisme de Tours qu’elle peaufine depuis deux ans.

« J’ai découvert le street art à Lisbonne et cela m’a donné envie de le faire partager à Tours. Les mosaïques de l’artiste orléanais Mifamosa nichées dans les rues de la ville ont été mon second déclencheur. » Dans le Vieux Tours, elle met en valeur les œuvres parfois cachées, comme ces coquillages moulés sur les seins de l’artiste intra Larue. Ou plus visibles et poétiques, comme les pochoirs à la bombe des Filles du vent de Gil KD.

Annabelle Tourne apporte une vraie plus-value à ces visites car, souvent, elle parvient à échanger au préalable avec ces artistes invisibles pour connaître leurs intentions. « C’est l’avantage de cet art vivant. Je fais aussi régulièrement des repérages, les yeux toujours en éveil, car certaines œuvres disparaissent avec le nettoyage et d’autres naissent de cet art illégal. »

Au cours du parcours d’une heure trente, nous aurons croisé les créations d’une quinzaine d’artistes, qu’ils soient tourangeaux ou internationaux, pour une visite ludique. Annabelle Tourne apprécie cette nouvelle facette de son métier et les échanges avec son public qui se demande bien ce qu’a voulu représenter l’artiste.

Guide-conférencier reste une profession méconnue. « Pour les gens, je suis dans un château et je tourne en boucle mon discours. En fait, c’est un métier très diversifié et je bouge tout le temps. J’ai trois employeurs pour qui je propose des visites très différentes, l’Office de tourisme, le service patrimoine de la ville et l’institut de Touraine avec qui je fais des excursions dans la région et au-delà, jusqu’à Poitiers et Angers. »

Annabelle n’aimait pas l’histoire scolaire mais voulait travailler dans les langues, dehors et voir du monde. Elle entame donc des études en langues et tourisme après son bac et devient guide-conférencière. Ils sont 4 000 en France à posséder la carte professionnelle obligatoire, une dizaine à Tours.

À avoir particulièrement souffert aussi de la crise sanitaire car avec leur statut hybride, ils n’ont eu aucune ressource et certains sont restés sur le carreau. Annabelle, 30 ans de métier, est heureuse de reprendre peu à peu son activité depuis le mois de mai, même si « c’est en douceur pour le moment ». Elle a dû aussi composer et faire des petits boulots en attendant : de l’accueil en Ehpad et la cantine le midi à Savonnières, où elle habite et court juste après sa visite sur le street art. Une touche-à-tout, décidément.

Textes et photos : Aurélie Dunouau

Sandrine Abello, cheffe du Chœur de l’Opéra de Tours : « Il y a autant de musique que d’humain dans mon métier »

#VisMaVille Sandrine Abello est à la tête du Choeur de l’Opéra de Tours qui compte treize chanteurs permanents. Rencontre avec une mélomane pianiste entraînante par son enthousiasme.

Devant la scène du Grand Théâtre de Tours, elle sautille, s’anime, ses bras donnent le tempo. À l’instar du chef d’orchestre qui dirige les musiciens, la cheffe de chœur dirige les musiciens du chœur.

Nous sommes en pleine répétition du spectacle qui se tiendra le soir même. Les Indes Galantes et Hippolyte et Aricie, de Jean-Philippe Rameau sont au menu. « La couleur est très belle, continuez comme cela, on frôlait la perfection. » En tenue décontractée, jean et baskets blanches, derrière son pupitre, Sandrine Abello, distille ses conseils et derniers réglages aux chanteurs, veillant à l’homogénéité des voix et aux nuances. « Ne forcez pas la voix, tout est dans la souplesse et la tranquillité. Après, il faudra y aller. »

Être cheffe de chœur, c’est comme « un entraîneur sportif. Mon rôle est de préparer musicalement le chœur. Il faut que ce soit nickel pour le concert et quand le chef d’orchestre prendra le relais. » Car le jour J, pour un opéra, Sandrine Abello écoutera dans le public.

Avant cela, de multiples répétitions, selon un rythme rigoureux (deux fois par jour cinq jours par semaine minimum), se déroulent entre les premières répétitions par pupitre (les femmes, les hommes, les aigus, les graves) les scènes-piano, les italiennes, les scènes-orchestre et la générale. La plupart du temps, le chœur travaille entre lui, sans l’orchestre ou les solistes.

Treize chanteurs permanents et un pianiste, Vincent Lansiaux, forment le Chœur du Grand Théâtre de Tours auxquels s’ajoutent parfois des intermittents. Soit un des plus petits effectifs de France mais une équipe soudée que Sandrine Abello dit avoir plaisir à diriger. « On apprend beaucoup avec l’échange humain, il faut savoir écouter. Être cheffe de chœur, c’est du management aussi, ne pas être trop raide. Il y a autant de musique que d’humain dans mon métier. »

La cheffe d’origine nîmoise est arrivée là un peu par hasard. Études de piano, conservatoire, elle s’est mise à accompagner le chœur avec son instrument à Avignon. Au gré des concours, elle est devenue cheffe de chant auprès de solistes puis de chœur à Nantes, à l’Opéra national du Rhin enfin à Tours depuis 2018. « Je ne suis pas chanteuse mais musicienne. Je ne donne donc pas de conseils techniques aux musiciens qui sont des professionnels et maîtrisent leur sujet à la perfection, mais je les guide sur une interprétation. Je veille à la qualité musicale ainsi que scénique lorsque ce sont des opéras. »

Sandrine Abello affectionne particulièrement le répertoire lyrique, les opéras classiques. En dehors de son temps au Grand Théâtre, elle se branche sur du jazz, son autre passion. « Je viens de découvrir Chet Baker, c’est extraordinaire. »
Aurélie Dunouau

Johana Boktor, l’architecte du patrimoine

#VisMaVille Johana Boktor et son mari Benoît Moreau sont architectes à Tours. Leur petite entreprise s’appuie sur la réhabilitation du patrimoine. Avec talent et humilité.

Il a fallu convaincre Johana Boktor pour réaliser cet article. Pourquoi elle plutôt qu’un ou une autre ? Sa modestie réelle n’empêche pas qu’à 39 ans, elle a déjà réalisé d’importants projets architecturaux comme le hall du musée Guimet. Elle planche en ce moment sur la rénovation du bâtiment historique de la Chambre de Commerce et d’Industrie et sur la nouvelle entrée du musée du Compagnonnage. Benoît Moreau n’est pas en reste avec la façade de la bibliothèque de Tours.

Un couple complémentaire qui s’est associé à leur arrivée en Touraine, en 2016. Lui est « technique, la tête chercheuse des pathologies du bâtiment », elle est « créative et part de l’identité du lieu pour la prolonger dans sa réalisation ». Ce qui relie le duo d’architectes qui s’est rencontré sur les bancs de l’école d’archi à Paris, c’est leur enclin pour la réhabilitation de l’ancien, et tout particulièrement du patrimoine.

Diplômés de l’Ecole de Chaillot qui délivre une spécialisation complémentaire en patrimoine en deux ans, ils travaillent en grande partie sur les monuments historiques. Ce n’est pas un hasard s’ils se sont installés près du couvent des Capucins, à Tours-Nord, sur un ancien terrain divisé en parcelles appartenant jadis à l’ordre des Frères mineurs. Ils y ont construit et expérimenté leur maison bioclimatique, vitrine de ce qu’ils font et de ce qu’ils sont. Murs épais isolés, nombreuses fenêtres pour des ventilations naturelles et croisées, luminosité, grande pièce de vie traversante : ils prônent le confort des usages et la simplicité des volumes.

Leur maison abrite leur bureau à l’étage. C’est là qu’ils reçoivent leurs clients. Des particuliers mais aussi des collectivités locales. Parfois, leurs garçons de 6 et 8 ans débarquent en pleine réunion pour récupérer des crayons de couleur. L’ambiance est familiale. Qu’elle s’en souvienne, Johana a toujours voulu être architecte, voyant son père s’épanouir dans le métier. Petite, elle bricolait des meubles pour ses poupées.

Après le bac, l’école d’architecture s’est donc imposée. Naturellement. A Paris, elle était salariée pour une agence de logements. « C’était passionnant, il y a le côté pratique que j’adore, toucher et comprendre l’usage de chaque pièce, matériau. »

Aujourd’hui Johana Boktor garde, dans son métier, ce goût du fonctionnel et y ajoute sa touche personnelle, créative. « Je m’inspire de l’ancien pour reproduire une atmosphère. L’idée est de réhabiliter ou construire des extensions en partant de l’essence du lieu, souvent chargé d’histoire. » La meilleure récompense pour elle, qui parvient tout juste à se définir architecte ? « Susciter de l’émotion dans la réponse qu’on a su apporter au client. »

Textes et photos : Aurélie Dunouau


> L’Indre-et-Loire compte une dizaine d’architectes spécialisés dans le patrimoine. Sachant que le département compte 867 édifices bénéficiant de cette protection au titre de monuments historiques, les chantiers en perspective ne manquent pas.

 

François Pérona, le sourire et l’accueil du CCCOD

#VisMaVille Jean-François Pérona est chargé d’accueil au centre de création contemporaine Olivier Debré de Tours. Rencontre avec cette figure du lieu.

Les habitués du musée d’art contemporain connaissent forcément Jean-François Pérona. Au CCC rue Marcel-Tribut puis désormais au CCCOD en plein coeur de ville, il en est un des visages historiques. Depuis 2005, il est au service du public, ce qui en fait le plus ancien de l’équipe.

Au milieu des sept autres jeunes personnes qui s’occupent des visiteurs, il apporte son expérience et son savoir-faire. Car avant tout, Jean-François Pérona a le don de recevoir et de vous mettre à l’aise comme si vous entriez dans sa propre maison. Avec tact, il vous ouvre la porte de son univers professionnel, celui de l’art contemporain.

Un univers auquel il n’était toutefois pas destiné, lui qui n’a pas fait d’études d’art ou d’histoire. Ce Normand d’origine, débarqué à Tours dans les années 80 pour ses études, a travaillé dans le commerce, un temps caissier chez Mammouth. Déjà, le contact avec le public l’attire, « j’étais moins doué pour vendre », concède-t-il. Seule incartade avec le milieu des artistes avant son entrée au musée : sa participation à l’organisation niveau régie d’une grande expo en 2000 avec Jeff Koons entre autres.

Car s’il est amateur d’art sans être spécialiste, « c’est un hasard si j’y travaille aujourd’hui après avoir répondu à une annonce du CCC. Je devais rester un an, j’ai manifesté l’envie de rester et j’y suis encore », explique Jean-François Pérona. Rue Marcel-Tribut, il n’était pas rare de le voir quitter l’entrée pour faire visiter les expositions.

Aujourd’hui, ce n’est plus le cas. Avec la nouvelle dimension du centre d’art, il reste attaché au public et à la billetterie, mais il n’est pas pour autant bloqué derrière le comptoir. Car il ne tient pas en place, Jean-François. Quand il n’y a pas trop de monde, il apprécie de se promener au milieu des expositions ou de dispenser quelques informations aux visiteurs, « même si je ne suis pas capable de faire le travail des médiateurs et conférenciers ».

Bavard lorsqu’il tient sa place au musée, il sait toutefois s’adapter au public. « Je reconnais les personnes qu’il ne faut pas aller embêter ou bien les jeunes pressés qui n’aiment pas trop les longs discours », tempère-t-il. « Mon travail, c’est orienter, recevoir, être attentif aux caractères de chacun et à ce qui se passe. Le public ici est bienveillant et détendu. Notre idée est d’accueillir simplement. »

D’un public d’habitués rue Marcel-Tribut, il est passé à un panel plus large, jeunes et touristes inclus. Ce qui n’est pas pour lui déplaire. « L’esprit d’accueil demeure l’âme du CCCOD. » En dehors de son temps au musée, Jean-François Pérona aime voir des comédies au cinéma, quelques spectacles de danse.

Mais son côté casanier prend vite le dessus. « En fait timide dans la vie privée », il n’aime rien tant que cultiver son petit bout de potager et se plonger sur les chaînes youtube des agriculteurs stars. Ce qui lui rappelle le rapport à la terre de ses aïeux dans l’Orne.

Textes et photos : Aurélie Dunouau

Sophie Jouhet, bénévole chez Emmaüs 100 pour 1, accompagne les familles demandeuses d’asile

#VisMaVille Sophie Jouhet est bénévole chez Emmaüs 100 pour 1. Elle accompagne les familles demandeuses d’asile, privées de toit et de droits.

Le rendez-vous est fixé chez Christine et Stéphane, jeune couple installé dans un immeuble du quartier des Fontaines, à Tours. Avec leurs deux enfants, ils sont logés depuis quelques mois par Emmaüs 100 pour 1. Ils ont fui l’Arménie avec un fils handicapé. N’ayant pas de titre de séjour, ils ne peuvent pas travailler (Christine est coiffeuse, Stéphane menuisier) et donc ne disposent pas de ressources.

C’est là qu’Emmaüs 100 pour 1 intervient. Tout comme à quatorze autres familles tourangelles, l’association fournit un logement (meubles inclus), une aide humaine et financière, « le temps de se retourner et d’obtenir cette fameuse carte de séjour qui leur permettra d’être autonomes », explique Sophie Jouhet, bénévole chez Emmaüs 100 pour 1.

En contrepartie, la famille donne au moins deux ou trois jours par semaine à Emmaüs ou une autre association caritative pour « une action solidaire qui donne droit au statut de compagnon ».

Un lien essentiel

Ce jour-là, Stéphane travaille à la communauté d’Esvres et Sophie Jouhet rend visite à Christine et son petit Adam, dans les bras, âgé de quelques mois. Depuis mars 2020, elle s’installe régulièrement dans le canapé de la petite famille pour suivre leurs démarches administratives mais aussi dispenser quelques cours de français à Christine. Un lien essentiel pour ces réfugiés dépourvus de ressources et de droits.

Une mission que prend à cœur Sophie Jouhet. Co-animatrice de la commission accompagnement des familles, elle a adhéré par conviction à l’association depuis 2014 avec son mari. Depuis qu’elle est à la retraite, elle y est pleinement engagée, toujours avec son mari. Ancienne orthophoniste, elle a ensuite été professeure dans un CFA, enseignant le français aux jeunes les plus en difficulté.

Le lien vers l’associatif s’est fait naturellement. « Les dernières années, il y avait beaucoup de mineurs réfugiés qui faisaient leur apprentissage. Dès le début, j’ai trouvé dans l’association une vision qui me correspondait. Une vision très simple, de solidarité, d’économie solidaire, et à la fois concrète, implantée localement. Mettre en place les choses pour que ces familles trouvent de la sécurité dans un appartement. On les met à l’abri et on les accompagne jusqu’à ce qu’elles n’aient plus besoin de nous. Cela me touche car je suis moi-même mère et grand-mère. »

Pour Sophie Jouhet, il s’agit d’un engagement « important, cela m’apporte beaucoup de par les échanges avec les autres bénévoles et les familles. J’y trouve aussi une action politique, une manière de prendre ma place dans la cité. C’est l’engagement de notre retraite ».

Textes et photos : Aurélie Dunouau

Dans l’atelier de Marine Vanpoulle, la passion des fleurs locales

#VisMaVille Marine Vanpoulle est fleuriste-designeuse. Elle crée son univers propre à partir de fleurs fraîches et locales, installée dans son atelier de Will you Marine me.

Les branches des feuillages atteignent presque le plafond dans l’atelier de Will You Marine me. « Chic et brut » : le décor est planté, selon les mots de Marine Vanpoulle, jeune cheffe d’entreprise et propriétaire des lieux. Son magasin de fleurs, installé rue Berthelot à Tours, détonne par son concept innovant et la fraîcheur de son équipe, quatre jeunes femmes de moins de 30 ans.

Ici, vous n’aurez pas l’embarras du choix mais vous ressortirez avec un bouquet inspiré par la production du moment. Les fleurs sont locales, elles proviennent principalement du producteur blésois Clément fleurs et, en complément, du grossiste Rose d’or. « Les fleurs sont fraîches et de qualité. Les tulipes sont coupées la veille de l’arrivage, sont en terre, et peuvent durer jusqu’à trois semaines. »

Les bouquets chez Will You Marine, c’est un style, avec du feuillage et des fleurs non pas sélectionnées par le client mais par les fleuristes qui proposent « des bouquets à la volée, en fonction de ce qu’on a, de notre inspiration et humeur aussi. »

Chaque semaine, un bouquet surprise est confectionné et le système d’abonnement au mois séduit les clients. « Nous changeons leurs habitudes, nous aimons les surprendre », sourit Marine. Autre avantage : en travaillant à la demande, il n’y a pas de pertes. Le fait que ses fleurs soient bio et équitables n’est pas revendiqué. Tout simplement naturel pour cette jeune équipe, imprégnée de convictions écologiques. Les végétaux sont recyclés pour faire du compost.

Will You Marine Me n’est pas qu’une boutique de fleurs. C’est aussi une agence événementielle spécialisée dans l’organisation des mariages, le métier d’origine de Marine. En fait, l’idée de la boutique en click and collect est née au mois de mai de l’année dernière, « alors que le chiffre d’affaires baissait de 80 %, il a fallu rebondir », explique Marine Vanpoulle. « Marie, de La Petite Cuisine, m’a proposé de m‘installer dans son ancien restaurant de la rue Berthelot. »

Auparavant, Marine travaillait dans son atelier de Fondettes. Passionnée et hyperactive, elle a appris son métier en Australie en étant wedding planner puis wedding designer en fleurs fraîches et locales. Elle rentre à 25 ans en France, car sa Touraine d’origine lui manque, passe son CAP de fleuriste et se lance. Sa maîtrise de l’anglais lui sert aujourd’hui pour renseigner les touristes qui s’arrêtent à sa boutique. Et avec son équipe, elle adore ça et projette déjà de transformer son magasin en « Life style shop ».

Texte et photos : Aurélie Dunouau

Avocates… rien que pour les enfants !

#VisMaVille La justice des mineurs ce n’est pas que des enfants qui commettent des délits ou en danger. C’est aussi, au quotidien, des avocats qui recueillent la parole d’enfants empêtrés dans les histoires de divorce de leurs parents. Rencontre avec deux avocates tourangelles, Karine et Valérie.

Le mercredi après-midi, la salle d’attente est remplie d’enfants dans le cabinet des Maîtres Bourgueil et Dubois, boulevard Heurteloup. Ces deux avocates tourangelles ont une prédilection pour ces clients pas ordinaires. Si être avocat d’enfant n’est pas une spécialité reconnue dans le droit, certains sont passés maîtres dans l’art de l’exercer, avec tact et empathie.

Valérie Bourgueil reçoit dans son bureau chaleureux, et met à l’aise, rassure l’enfant qui voit pour la première fois un professionnel de la justice. « Est-ce que tu sais qui je suis ? Je suis un avocat un peu particulier. Je ne suis ni l’avocat de ton père, ni l’avocat de ta mère. Je suis là pour toi. Tout est secret et je ne le répéterai à personne. »

Justine, 11 ans, semble très vite en confiance. Ses parents viennent de se séparer. Maître Bourgueil l’interroge pour évaluer si elle a envie de voir le juge et faire part de ses souhaits en termes de garde. L’avocat joue ici le rôle de « filtre ». Pour Karine Dubois, « les enfants y sont très sensibles car ils ont des messages à faire passer aux parents qu’ils ne peuvent pas transmettre directement. Il y a une liberté de ton. C’est à nous de porter cette parole auprès du juge. Nous avons aussi un rôle d’explication de ce qui va se passer. Pour eux, ce peut être compliqué à comprendre ».

Pour un cas de divorce, après avoir vu son avocat, l’enfant décide s’il souhaite être entendu par le juge aux affaires familiales. Après un entretien à huis clos, toujours sans ses parents, un rapport sera établi puis lu à ses parents, lors de l’audience de la procédure de divorce. « Leur parole sera écoutée mais pas toujours entendue », précise Maître Dubois. « Je suis claire avec eux sur ce point. »

Comment appréhender ces « clients » pas comme les autres ? À Tours, ils sont entendus à partir de 8 ans. L’avocat est chargé d’évaluer s’il est capable de discernement et s’il n’est pas manipulé par un de ses parents. Maître Bourgueil va au-delà, en « soutenant les enfants. Je les aide à traverser cette épreuve et prendre du recul, on est là pour qu’ils nous disent ce dont ils ont besoin et pas ce dont leurs parents ont besoin ou veulent entendre ».

Une relation de confiance et de complicité se noue. L’enfant sait qu’il peut joindre à tout moment son avocat. Comme ces deux sœurs qui souhaitaient revoir Maître Bourgueil, juste avant leur audition par le juge. Simplement besoin d’être rassurées. Et tout cela, gratuitement. Pas d’honoraires pour les avocats, l’aide juridictionnelle les rémunère, un forfait de 96 euros, quel que soit le temps passé. Autant dire que c’est une vocation.

Texte : Aurélie Dunouau / Photos : Aurélie Dunouau et Adobe Stock

Dans le quotidien de Magali Brulard-Pénaud, une CPE au rythme de ses élèves

#VisMaVille Magali Brulard-Pénaud est Conseillère principale d’éducation (CPE) au collège Lamartine de Tours. On l’a suivie une matinée, toujours le regard avisé et bienveillant sur « ses » élèves.

Elle court, elle court, la CPE… « Je vous préviens, c’est un établissement speed, là vous êtes dans le bain. » Il est 9 heures, les collégiens sont en cours depuis une heure déjà, et Magali Brulard-Pénaud, un thermomètre à la main, prend des nouvelles d’un petit malade pris de vomissements, allongé à l’infirmerie d’à côté, tente de trouver une solution pour un autre dont le jean s’est déchiré, une autre qui a la cheville gonflée, puis enjambe les escaliers vérifier les occupations d’une classe à l’étude…

Le bureau de la vie scolaire, c’est un peu le bureau des solutions permanentes. On y répare les bobos, on y règle les petits et grands soucis. Pour cela, Magali est entourée « d’une équipe fantastique », qui jouxte son bureau, la porte toujours ouverte. D’ailleurs, dans son bureau, à part pour passer des coups de téléphone urgents, elle ne s’y arrête guère ce matin-là.

Toujours affairée, baskets brillantes aux pieds et une pêche qui ne la quitte pas. « Le cœur de mon métier, c’est de placer l’élève dans les meilleures conditions possibles, et cela commence dès l’accueil, en lui faisant respecter les règles de vie scolaire, être à l’heure et avec leurs affaires. »

Un seul retard d’élève constaté aujourd’hui, « c’est beaucoup mieux, ça se cale car il y en avait 15 les premiers jours. Avec le confinement, certains élèves ont perdu leurs repères et il faut être à 7 h 45 en rang devant la classe pour débuter les cours, ce peut-être tôt pour des adolescents ». Même chose, pour leurs affaires, tous ne proviennent pas de milieux familiaux aisés et « il faut leur fournir des cahiers et une trousse. »

Le collège Lamartine est en effet un établissement d’une grande mixité sociale, avec 19 nationalités, à la réputation « difficile, mais l’équipe pédagogique est stable et on a une grosse énergie et envie pour que nos élèves se sentent bien. Je me sens totalement épanouie dans ce collège et c’est un choix. Depuis 7 ans. Je ne retournerais pour rien au monde dans un grand lycée », explique Magali.

Il n’y a qu’à la voir courir lors de la récréation : en 10 minutes, Magali a intercepté pas moins d’une vingtaine d’élèves, baissant les capuches, refaisant faire les lacets, réprimandant les garçons gentiment batailleurs et prenant des nouvelles d’une élève qu’elle a repérée en phobie scolaire depuis la rentrée. Toujours avec tact, fermeté et bienveillance. « J’applique la pédagogie de l’humour, car les élèves comprennent vite la discipline. »

Investie à 100 %, la CPE du collège Lamartine, aimerait « que les élèves aient envie de venir au collège et s’y identifient parce qu’à cet âge, ce n’est pas facile de faire la connexion entre les apprentissages et la vie réelle ». Le souci permanent de l’élève, c’est bien le fondement du métier de CPE.

Textes et photos : Aurélie Dunouau

 

Plongée dans le quotidien d’une maître-nageuse

#VisMaVille Bérengère Gault est maître-nageuse à la piscine du Mortier de Tours-Nord. Surveiller, apprendre à nager, développer des cours aquatiques… petite plongée dans son quotidien.

25 degrés, du soleil, et des maillots de bain… Non, nous ne sommes pas partis en vacances sous les tropiques mais nous avons simplement rendez-vous à la piscine du Mortier en ce tristounet mois de décembre.

Gris, bleu, vert, jaune, les couleurs extérieures automnales se reflètent dans les trois bassins de la piscine, grâce à l’imposante baie vitrée. Comme « l’impression d’être dehors en étant dedans », observe Bérengère Gault. Ici, les maîtres-nageurs sont un peu hors du temps, en short, T-shirt et claquettes.

10 h 30 à la pendule, les cours battent leur plein. Dans le bassin, Bérengère remue sa joyeuse troupe en aquagym tandis que Jérôme tente de rassurer les récalcitrants en aquaphobie. De son côté, David initie aux premiers gestes de nage à ses élèves du jour. Dans son travail, Bérengère Gault, vive blonde aux grands yeux clairs, « aime transmettre le côté dynamique de l’exercice » et apprécie de tenter de « pousser les limites ».

La surveillance ? « Pas le gros de notre temps »

La dimension sportive du métier représente une motivation importante pour elle qui a toujours nagé. Mais pas que. La base, c’est la surveillance, « mais ce n’est pas le gros de notre temps. Les activités prennent de plus en plus de place. On a au moins deux heures par jour rien qu’avec les scolaires. Et les cours du soir, enfants et adultes pour apprendre à nager ou se perfectionner ».

L’amplitude horaire est vaste, de 8 h à 21 h. Le côté relationnel est important dans ce métier. « On a des habitués, tous les jours à la même heure ; ils nous demandent des nouvelles, nous préviennent quand ils partent en vacances. »

Ce que préfère Bérengère ? « La diversité des publics. L’avantage de travailler avec des enfants le matin et l’après-midi avec des adultes. Cela va de 6 mois aux personnes âgées. Et le plaisir d’apprendre à nager. C’est super sympa de voir un enfant qui part de zéro, réussir à avancer au bout de quelques séances sans matériel. »

Peut-être que ça lui rappelle ses débuts à la piscine du Lude, dans la Sarthe, à quelques kilomètres de Château-La-Vallière, où elle a appris à nager à 6 ans, puis s’est affirmée en club avant d’y prendre son premier poste de maître-nageuse, après des études en sport études au lycée Balzac de Tours puis en STAPS, à Poitiers. Aujourd’hui, Bérengère est éducatrice sportive de la fonction publique territoriale et apprécie sa vie en eaux tourangelles, à l’extérieur et dans le bassin, aux côtés de ses six collègues du Mortier.

Textes et photos : Aurélie Dunouau

Architecte des Bâtiments de France : « Veiller sur la ville et le patrimoine de demain »

#VisMaVille L’Architecte des Bâtiments de France Régis Berge est un gardien des monuments et secteurs patrimoniaux, qui regarde vers l’avenir des villes et villages de Touraine. De chantier en réunion, ses journées ne se ressemblent pas.

Ce matin-là, Régis Berge arpente la rue Nationale avec les services de la municipalité. Mission du jour : valider la couleur des futurs réverbères. La question semble anodine, mais pour l’Architecte des Bâtiments de France arrivé à Tours en juin dernier, il en va de tout l’équilibre visuel de cette artère majeure.

Alors, oui, il est l’homme qui viendra vous taper sur les doigts si vous avez choisi une couleur de volets un peu trop olé-olé au centre de Tours, secteur sauvegardé. Mais avec l’équipe de dix personnes de l’Unité Départementale de l’Architecture et du Patrimoine, sa mission ne se niche pas (seulement) dans ces détails : « Notre rôle est de veiller au respect des règles urbaines, qui permettent d’insérer harmonieusement un projet dans la ville. »

Lors de ses rendez-vous avec les municipalités et les maîtres d’oeuvres, publics ou privés, l’Architecte des Bâtiments de France (ABF, pour les intimes) accompagne donc les projets dès l’étude des plans. « J’aime ce dialogue avec les architectes, au stade de l’avant-projet, pour faire en sorte qu’ils donnent le meilleur d’eux-mêmes, et contribuer à la constitution du patrimoine de demain. »

Chantier des Portes de Loire, plans de rénovation des Halles, réunion pour le choix des sites « d’architecture contemporaine remarquable » à labelliser, où l’on retrouve les grands ensembles des Rives du Cher ou la chapelle Saint-Martin du quartier Monconseil… Notre ABF n’est décidément pas homme du passé, comme le voudrait le cliché. Quand il s’occupe des monuments d’hier, c’est donc les pieds ancrés dans le présent.

On le suit ainsi dans les travées de la cathédrale Saint-Gatien et au cloître de la Psalette, monuments historiques qu’il connaît comme sa poche, puisque l’Unité doit en assurer l’entretien et la sécurité. Là, il se passionne tout autant pour les reliques médiévales que pour les vitraux contemporains, témoins de leur époque. De retour sur le parvis, Régis Berge s’interroge : que deviendra l’ancienne clinique Saint-Gatien ? « Les cyclotouristes ne savent pas où faire leur pause, il n’y a pas de commerces… On peut tout repenser, imaginer un café, des boutiques… pour favoriser un vrai espace de vie. »
Car derrière le bâti, c’est l’humain qui émerge, au cœur du métier.

Textes et photos : Maud Martinez