Cap sur l’emploi avec la formation en alternance

Pourquoi et comment se lancer dans une formation en alternance : voici quelques clés pour ne rien rater !

67 % des élèves de CAP en 2022 ont trouvé un emploi dans les six mois suivant leur diplôme (Dares – 73 % pour les bacheliers professionnels), 75 % pour les diplômés du BTS, et on ne vous parle même pas des étudiants sortant d’une licence pro. Enfin si, on vous le dit quand même pour les diplômés de 2020 : 92 % ont trouvé rapidement un boulot, alors bravo !

L’alternance serait-elle donc la voie royale pour décrocher un emploi ? Pour certains métiers, la question ne se pose même pas : tous les métiers de l’artisanat ou du bâtiment par exemple, qui impliquent des savoir-faire techniques, pratiques, passent forcément par l’alternance, et depuis un bout de temps !

Coiffure, mécanique, menuiserie, cordonnerie, maçonnerie… Pas d’autre option que d’être sur le terrain pour devenir un pro. Et pour les élèves, c’est le moyen de toucher du doigt dès les premiers mois de formation le métier qui les passionne.

Pénélope, en CAP coiffure au Campus des Métiers de Joué-lès-Tours.et dans un salon de Tours centre.

Pénélope, en CAP coiffure au Campus des Métiers de Joué-lès-Tours et dans un salon de Tours centre, est ravie de son choix : « Mon stage de 3e m’a permis de confirmer que je voulais bien être coiffeuse, donc aller en seconde générale aurait été pour moi une perte de temps, car je savais ce que je voulais ! Et on n’est pas nul parce qu’on va en voie professionnelle, il faut arrêter les clichés : si c’est le métier qu’on veut faire plus tard, il ne faut pas hésiter ! »

Trouver un salon qui l’accueille n’a pas été simple, mais les efforts ont payé, et aujourd’hui Pénélope fait les shampooings, les soins, bientôt les couleurs, et dans quelques mois des coupes. Au CFA comme au salon, Pénélope est traitée comme une adulte, à 16 ans tout juste.

C’est sans doute la grosse différence pour les élèves qui choisissent l’alternance : on quitte le statut de simple élève pour endosser l’habit du salarié. Et ce, qu’on soit mineur en CAP, ou prochainement diplômé du supérieur. Pour Matthieu, qui a opté pour la licence en alternance pour sa 3e année de Bachelor Communication à Tours, avant un Master Diplomatie et relations internationales à Paris, « l’alternance m’a permis de monter en maturité, et j’aurais presque préféré commencer l’alternance dès ma deuxième année si c’était possible ».

Olga, étudiante en Bachelor Marketing & Communication.

Olga, aujourd’hui étudiante en Bachelor Marketing & Communication en alternance, a trouvé la formule qui lui convenait : « J’ai fait deux fois la première année de psycho, et je me suis arrêtée à la fin de la L2. C’était la période Covid, mais je crois que même en temps normal le système ne m’aurait pas convenue. J’avais besoin d’être un peu plus dans l’action. »

Si d’un établissement à l’autre, les rythmes de l’alternance varient (2 semaines sur 4 en entreprise pour les Bachelors de l’IUT de Tours, 3 jours par semaine chez Pigier, tous les après-midis pour les alternants du Cercle Digital…), le principe reste en effet le même : acquérir une véritable expérience professionnelle au cours de sa formation, en étant salarié d’une entreprise.

Salariés pas comme les autres

Congés payés, 35 h hebdomadaires, contrat de travail, arrêts maladie… L’alternant est en effet un salarié à part entière pour ce qui est du statut. Dans la pratique, charge à l’employeur de ne pas oublier que les alternants ne sont pas tout à fait des salariés comme les autres ! Encore en formation, c’est un expert en devenir, pas encore 100 % efficace sur les missions qui relèvent de son champ d’activité.

Et hors de question de lâcher l’alternant dans la nature : en entreprise comme dans son centre de formation, il est placé sous la responsabilité d’un tuteur ou d’une tutrice qui l’encadre tout au long de son année d’alternance.

Côté entreprise, il faut donc regarder plus loin que le bout de sa fiche de paie. Certes, l’alternant est rémunéré de 50 % à 100 % du Smic (selon son âge et son niveau de formation), avec une exonération de cotisations sociales. Il coûte moins cher qu’un professionnel qualifié, mais il est aussi là moins souvent, et n’a pas encore toutes les clés pour exercer son métier en autonomie totale. Attention ! L’alternant c’est aussi plein de bonnes choses : de l’énergie, l’envie d’apprendre, des compétences au goût du jour puisque sa formation est en cours, et plein de bonnes idées à apporter !

Texte et photos : Emilie Mendonça / Photo ouverture : Adobe stock


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Création d’entreprise : ça bouge en Touraine !

En Touraine, rien qu’à la Chambre de Commerce et d’Industrie, on a enregistré près de 3 500 entreprises nouvelles en 2022. Les anciens étudiants de Pépite sont de la partie, mais ils ne sont pas seuls : reconversions en quête de sens et entrepreneuriat au féminin sont les grandes tendances observées depuis quelques années, loin des clichés du vieux patron assis dans son fauteuil en cuir pour diriger une entreprise à la papa.

« Le secteur de la création d’entreprise évolue beaucoup depuis quelques années », constate Vincent Gérard, vice-président de la CCI Touraine (en charge de la création-transmission d’entreprise) et vice-président d’Initiative Touraine.

« On observe un véritablement mouvement de fond de jeunes diplômés, souvent des bac+5, qui après un premier emploi qui ne les satisfait pas se tournent vers la création d’entreprise. Le plus souvent dans un domaine différent de leur spécialité de départ. » Viennent à l’esprit ces chercheurs devenus maraîchers, ces travailleurs sociaux transformés en épiciers, ou des ingénieurs rebranchés sur l’ébénisterie.

Pour le vice-président de la CCI Touraine, cette nouvelle génération d’entrepreneurs est en recherche non seulement d’indépendance, mais aussi de sens : « Ils créent des entreprises dans des secteurs qui les font vibrer, après avoir découvert que ce qui les passionnait pouvait devenir leur métier, quitte à baisser leurs revenus. »

Des femmes plus nombreuses

Autre tendance forte, la présence accrue de femmes dans le monde de l’entrepreneuriat : « Depuis deux ou trois ans, elles sont de plus en plus nombreuses, et c’est tant mieux ! » se félicite Gérard Vincent. La multiplication des récompenses, concours et autres associations de femmes entrepreneuses n’y est sans doute pas pour rien.

Le mois de mars 2023 voit d’ailleurs revenir pour une troisième édition le concours Kléopatres, « Césars de l’entrepreneuriat par les femmes » porté par l’association Touraine Women. En plus de ses rencontres régulières, l’association tourangelle créée en 2020 organise un Startup Weekend Women, et ce concours Kléopatres qui donne une visibilité accrue à l’entreprenariat au féminin. Après une édition 2022 récompensant dix lauréates, pour 116 candidates actives dans des domaines aussi variés que le bien-être, la gastronomie, le conseil, le patrimoine ou les transports, le concours Kléopatres recueille les inscriptions jusqu’au 15 avril, avant une remise des prix prévue pour juin 2023.

Femmes, étudiants, séniors, repreneurs d’entreprises ou créateurs d’entreprises, une chose est sûre : s’appuyer sur les associations, institutions et dispositifs d’aides existants semble indispensable pour partir sur de bonnes bases, et voir son projet prendre forme tel qu’on l’a rêvé !

M.M. / Photo : Adobe stock

Entreprises : Emmanuel Moyer accompagne la transition environnementale

#VisMaVille Emmanuel Moyer est gérant d’Arevol, une société de coaching d’accompagnement des entreprises dans les transitions. Sa dernière création, un accompagnement à la transition environnementale.

C’était il y a 15 ans. Emmanuel Moyer était alors chargé d’affaires dans une importante structure. Ce scientifique de formation commence à s’interroger sur le sens du management, celui qu’il exerce sur son équipe et celui qui est produit sur lui par sa boîte. « On croulait sous les procédures et les méthodes. J’avais déjà envie de casser le système, d’agiter le potentiel de la personne. »

Il bascule alors dans le coaching et crée une école à Tours, avant de monter sa société de coaching en accompagnement dans la transition humaine, Arevol. Entre temps, l’arrivée de ses deux enfants, Valentin et Sacha, réveille en lui sa conscience écologique. Ils ont aujourd’hui 7 et 12 ans.

« Je suis devenu éco anxieux pour leur avenir, je devenais lourd pour mes proches. En réponse, j’ai trouvé un terrain de jeu, il y a trois ans, en devenant bénévole à la Fresque du climat. Avec la fresque, on peut créer des espaces pour que les personnes puissent s’éveiller sur les sujets du climat et de l’énergie. »

Devenu co-référent de la Fresque du climat à Tours avec Valérie Forgeot, il a eu l’idée d’en transférer le principe dans son travail quotidien. Aujourd’hui, Arevol propose dans sa palette de coaching la sensibilisation au devenir de notre planète et de nos ressources, en partant du jeu de la fresque ainsi que du kit « Inventons nos vies bas carbone », made in Touraine.

« Il y a deux ans, c’était compliqué pour les entreprises qui se posaient la question de l’intérêt économique d’une telle prestation. En fait, il s’agit de s’interroger sur le coût de l’énergie, les ruptures d’approvisionnement, l’économie circulaire et au final les entreprises voient leur intérêt de travailler sur leur bilan carbone. »

Pour y parvenir, Emmanuel Moyer travaille in situ en quatre phases, étalées sur plusieurs mois. D’abord par des ateliers de sensibilisation, puis une phase de recherches d’idées en équipe, la définition d’un plan d’actions et enfin le pilotage et la transmission du projet. Des PME comme Proludic à Vouvray comme des groupes plus conséquents tels Gambetta à Tours ou Dior à Saint-Jean-de-Braye, ont fait appel à ses services.

Emmanuel Moyer constate que l’accompagnement dans la transition environnementale est devenu tendance dans les entreprises comme les grandes écoles.

« Cela monte en puissance, quoi de mieux que le climat pour créer un intérêt commun ? La fresque a remplacé en quelque sorte les journées kart ou gaming. Les grandes entreprises s’emparent du sujet et comprennent qu’au-delà de la cohésion d’équipe qu’elles recherchent d’abord par de tels ateliers, elles ont un véritable retour sur investissement. Par exemple, des salariés ont décidé eux-mêmes de baisser la température de leurs locaux de trois degrés. Des actions concrètes sont mises en place. »

Mais pour cela, encore faut-il que la sensibilisation dépasse la demi-journée de la fresque pour se prolonger sur la durée par un brainstorming collectif.

Aurélie Dunouau

Être alternant(e) : vos droits… et vos devoirs !

Presque tous les métiers peuvent se préparer par une formation en alternance. Grâce aux aides de l’État, les entreprises ont de plus en plus la possibilité d’accueillir des jeunes. Mais être alternant, c’est adopter un statut très particulier, avec des droits mais aussi, des devoirs.

Faire financer sa formation par son entreprise

DROIT

Si les formations en alternance peuvent parfois coûter plusieurs milliers d’euros en frais d’inscription, pour les bénéficiaires, pas d’inquiétude : c’est en effet l’employeur qui doit financer le coût de la formation, tant pour le contrat d’apprentissage que pour le contrat de professionnalisation. En échange, l’étudiant-salarié s’engage à respecter droits et devoirs qui lui incombent.

Respecter les règles de l’entreprise

DEVOIR

Être en contrat d’apprentissage ou de professionnalisation, c’est être un salarié de l’entreprise et respecter les mêmes règles que les autres employés. Cela peut sembler évident, mais rappelons-le quand même : respecter les horaires de travail définis avec l’employeur et le règlement intérieur ; passer la visite médicale d’embauche ; se comporter avec professionnalisme avec les collègues, les supérieurs, les clients, les fournisseurs ; justifier de ses absences.

Transmettre son arrêt de travail

DEVOIR

En cas de maladie, il est essentiel de faire établir un arrêt-maladie par son médecin traitant, à transmettre à l’employeur et à la sécurité sociale. Attention ! Même si l’arrêt a lieu durant la période de formation, il faut respecter cette procédure, sous peine de se voir ôter des jours de salaire pour absence injustifiée !

Bénéficier des congés payés, mutuelle, droits sociaux et aide aux transports

DROIT

Comme tout salarié, l’alternant bénéficie de cinq semaines de congés payés par an. Il cotise aussi pour sa retraite et pour ses droits au chômage : à l’heure de l’allongement de la durée de cotisation, c’est un droit important ! Comme ses collègues, l’alternant peut souscrire à la mutuelle d’entreprise, souvent avantageuse en termes de tarifs puisqu’elle financée en partie par l’employeur.

Il peut aussi demander la participation aux frais de transport : l’entreprise paye obligatoirement 50 % de l’abonnement aux transports publics. Certaines entreprises choisissent aussi de rembourser une partie des frais de déplacement avec véhicule personnel (voiture ou vélo).

Profiter des tickets restaurants et du comité d’entreprise

DROIT

L’alternant a accès au comité d’entreprise, au même titre que n’importe lequel de ses collègues. Les tickets restaurant ou chèques-déjeuners doivent également lui être proposés. Et c’est un avantage non négligeable : ces titres restaurants sont financés au minimum à 50 % par l’employeur, et ils permettent d’acheter son déjeuner ou de payer une partie de ses courses alimentaires !

Être un étudiant modèle

DEVOIR

Tout comme il le fait au sein de son entreprise, l’alternant se doit de respecter les règles de son établissement de formation. Être présent aux cours, passer les évaluations et examens, et s’investir dans sa formation : le but, c’est de décrocher son diplôme ou sa qualification professionnelle, et sans travail et assiduité, c’est compliqué !

Obtenir sa carte d’étudiant ou d’apprenti

DROIT

Et tous les avantages qui vont avec ! Cinéma, salles de spectacles, clubs sportifs… De nombreuses structures proposent des tarifs étudiants : avec la carte d’étudiant ou d’apprenti qui est délivrée par l’organisme de formation, à vous les sorties et loisirs à prix réduits !

Être accompagné en entreprise et en formation

DROIT

Même s’il est salarié, l’alternant est en formation, il ne faut pas l’oublier. À ce titre, il doit être accompagné en entreprise par un tuteur, qui le guidera dans l’accomplissement de ses missions et l’acquisition de nouvelles compétences, tout au long de son contrat. L’organisme de formation assure lui aussi un suivi, via un formateur chargé de veiller au bon déroulement de l’alternance. En cas de difficulté, ces deux interlocuteurs doivent répondre présent pour aider l’alternant à sortir de l’impasse.

Percevoir des aides

DROIT

L’alternant peut prétendre à certaines aides qui lui sont réservées, comme l’aide au logement Mobili- Jeune (cumulable avec les APL). Les différentes régions proposent aussi des aides complémentaires qui concernent aussi bien le logement que le transport ou les loisirs. Et comme étudiant, il a accès aux services du CROUS. Souvent peu connue, l’aide Départ 18-25 de l’ANCV est une autre belle opportunité ! L’Agence Nationale des Chèques Vacances peut en effet financer les vacances des 18-25 ans jusqu’à 250 € par an (et au plus pour 80 % des frais de séjour). Si pour le grand public, il faut justifier d’une situation financière précaire, le fait d’être engagé dans un contrat d’apprentissage ou de professionnalisation donne accès au dispositif sans conditions de ressources.

Le handicap au travail en 3 questions

Mon entreprise est-elle obligée d’embaucher des travailleurs handicapés ? Puis-je demander à mon entreprise des aménagements liés à mon handicap ? Entreprise adaptée : qu’est-ce que c’est ? On fait le point dans tmv, à l’occasion de notre dossier spécial sur le handicap au travail.

Mon entreprise est-elle obligée d’embaucher des travailleurs handicapés ?

Toute entreprise de plus de 20 salariés a pour obligation d’avoir 6 % de son effectif reconnu comme travailleurs handicapés. Si le quota n’est pas respecté, l’entreprise passe à la caisse, et verse à l’État une contribution OETH (Obligation d’emploi de travailleurs handicapés). L’argent servira à l’insertion des travailleurs handicapés.

Sous-traiter certaines tâches à des ESAT est un moyen de réduire le montant de cette taxe. Cependant, toutes les entreprises, quelle que soit leur taille, doivent déclarer leurs travailleurs handicapés auprès du ministère du Travail. But du jeu ? Motiver les entreprises à mener une politique inclusive en termes de handicap au travail.

Puis-je demander à mon entreprise des aménagements liés à mon handicap ?

Non seulement je peux, mais l’entreprise est obligée d’adapter mon poste à mon handicap, si j’ai bien la reconnaissance de ma qualité de travailleur handicapé, délivrée par la Maison départementale des personnes handicapées. Si vous aimez les sigles, on parle donc de la RQTH donnée par la MDPH. CQFD !

Bon, ne poussons pas le bouchon trop loin : le toboggan pour accéder à votre bureau, hors de question. Les aménagements doivent être « nécessaires et appropriés », selon la loi. Fauteuil, rampe d’accès, recours à un interprète en langue des signes française… C’est à voir en concertation avec votre employeur, la médecine du travail ou des professionnels de l’ergonomie par exemple. Et pour tout cela, le chef d’entreprise peut solliciter un financement spécifique.

Entreprise adaptée : qu’est-ce que c’est ?

Attention ! À ne pas confondre avec un ESAT ! L’Établissement et Service d’Aide par le Travail relève du Code de l’action sociale, et en partie du Code du travail. L’entreprise adaptée est quant à elle une entreprise du milieu ordinaire.

Donc la référence, c’est le Code du travail, comme pour toutes les autres entreprises. La seule différence, c’est la proportion d’employés reconnus en situation de handicap, l’adaptation des tâches réalisées, et les aides dont bénéficie l’entreprise pour l’emploi de personnes handicapées. En Touraine, vous en connaissez peut-être certaines : le centre d’appel Handicall Tours, Socia 3 et ses services comptables, ou l’entreprise multi-services ANRH, entre autres.

Texte : Maud Martinez / Photo ouverture : archives NR ESAT de Montlouis Photo Hugues Le Guellec

Handicap : accompagner grâce au travail

L’ouverture du Café joyeux, à Tours, a mis en lumière l’emploi des personnes en situation de handicap. Dans l’ombre, les personnes handicapées n’ont pas attendu ce café pour travailler, comme c’est le cas dans les ESAT, Établissements et Services d’Aide par le Travail. Envie d’en savoir plus ?

Vendredi. Tout le monde s’affaire. On passe le balai, et on déplace les meubles pour accueillir le public. L’ESAT Les Vallées, à Luynes, a en effet choisi d’ouvrir ses portes au public le mardi 21 juin : « l’événement s’adresse aux personnes handicapées et à leurs proches intéressés par notre structure, bien sûr. Mais nous avons aussi déposé des dépliants dans les boîtes aux lettres du quartier, où les voisins ne savent pas toujours ce que nous faisons ici », explique Aline Palleschi, directrice adjointe de la structure.

Et la publication récente du livre-enquête Handicap à vendre par le journaliste Thibault Petit, pour dénoncer l’exploitation à bas coût des travailleurs et le filtrage en fonction de la productivité des candidats, n’est pas faite pour arranger les choses : « Bien sûr, les réalités décrites existent malheureusement dans certains ESAT, mais pas ici. Il faut bien comprendre qu’un ESAT n’est pas une entreprise, c’est un établissement médico-social. Mais nous avons conscience du risque de glissement », complète Aline Palleschi.

À Luynes, dans les ateliers « conditionnement », on fabrique des caissettes en bois pour des fromages de chèvre, on assemble boulons et pièces de plastique, on fabrique des boîtes de toutes sortes. Un peu plus loin, des ordinateurs servent aux prestations de saisie informatique. À l’atelier « espaces verts », on prend l’air : pour des entreprises ou chez des particuliers, l’équipe entretient les arbustes, pelouses et autres massifs de fleurs. D’autres travailleurs interviennent aussi pour du nettoyage de voiture 100% écologique (sans eau ni produits chimiques).

« Mais on n’est pas là pour faire du chiffre ! Le travail est un support à l’accompagnement des personnes que nous accueillons. » François est moniteur, et suit une douzaine de travailleurs dans leurs parcours respectifs. Avec ses collègues, ils créent des modes d’emploi illustrés, découpent les missions en tâches successives, ou adaptent les gabarits par exemple.

« On est là pour adapter le travail aux capacités de chacun, et pour valoriser leurs compétences. On se questionne en permanence : est-ce que la personne se sent bien dans son travail ? Je ne suis pas sûr que des employeurs du milieu ordinaire se posent ce genre de questions pour leurs salariés ! ». En témoigne la variété des temps de travail (partiels, mi-temps, temps plein), ou cet écran situé dans le deuxième atelier, qui diffuse chaque matin une vidéo de la kiné pour un échauffement physique avant d’attaquer la journée.

Moniteurs, assistante sociale, psychologue, kinésithérapeute… Ils sont en effet une vingtaine de salariés pour encadrer et accompagner une centaine de travailleurs. « C’est un métier riche, où l’humain a toute sa place. En dix ans passés ici, j’ai vu aussi comment évoluait la société, et notre défi est que l’ESAT évolue aussi. Ce sont des enjeux liés à la citoyenneté, » commente François.

Travailleurs extra-ordinaires

Manuela, 40 ans, est arrivée il y a dix jours. « Dans la restauration rapide, mon statut de travailleuse handicapée n’était pas pris en compte. L’aggravation de mes problèmes de dos m’a motivée à me tourner vers les ESAT, car je ne veux pas rester chez moi sans travailler. Ici, on travaille à son rythme, et après quatre ans sans emploi, je me remets dans le bain. » Son but : retourner dans ce qu’on appelle ici « le milieu ordinaire ».

Comme Manuela, de plus en plus de personnes arrivent à l’ESAT après un passage dans le monde des travailleurs lambda : « Historiquement, nos établissements accueillaient des personnes avec déficience intellectuelle, issues des IME (Instituts Médico-Éducatifs). Mais depuis la loi de 2005, le handicap psychique et social est aussi reconnu, et les parcours sont donc de plus en plus divers », ajoute Aline Palleschi.

L’ESAT est pour certains une simple étape après un monde ordinaire qui les a abîmés, où ils ne trouvent plus leur place ; pour d’autres, c’est un aboutissement. L’équipe y accompagne donc chacun vers son projet, qui signifie parfois aller travailler seul au sein d’une entreprise extérieure… toujours sous le regard vigilant et bienveillant des moniteurs, anges-gardiens de ces travailleurs qui ne sont pas sous nos yeux, mais qui n’en ont pas moins l’air joyeux.

Maud Martinez

Justine Dubourg, cheffe d’entreprise engagée et présidente de Touraine Women

#VisMaVille Justine Dubourg est consultante en stratégie d’entreprise. Avec son incubateur d’entreprises José.e, elle aide les projets positifs et les femmes à émerger dans l’économie tourangelle.

La jeune cheffe d’entreprise reçoit dans un lieu à son image : moderne et chaleureux. Dans les salles de réunion de l’Étape 84, l’auberge de jeunesse new style de l’avenue Grammont de Tours ou bien au café Concer’thé près de la gare, elle aime donner rendez-vous à ses clients.

Ce jour-là, c’est le premier contact avec Matthieu qui souhaite se lancer dans un projet d’écotourisme. Ensemble, ils débroussaillent le projet, Justine lui prodigue ses conseils, ses pistes, les financements à aller chercher, les acteurs du territoire à rencontrer.

Comment définit-elle son métier ? « Je suis consultante en stratégie d’entreprise. J’accompagne les porteurs de projets de création d’entreprise, les aide sur le côté entreprenariat et communication. Je donne aux clients une méthode, une structure et surtout de la confiance. »

Créée cette année, sa petite entreprise nommée José.e se distingue par sa sélectivité. Tous ses clients qu’elle appelle « entrepreneur.e.s colibris » font leur part dans la société en ayant une résonance positive et écoresponsable sur le territoire. « Si je fais ce métier, c’est avant tout parce que je crois qu’on peut changer le monde par l’entreprise. Si les gens viennent me présenter des projets uniquement pour faire du cash, c’est non. »

Elle accompagne ainsi pas mal de reconversions professionnelles, des projets d’entreprises qui ont du sens telle une création d’épicerie en vrac ou de cosmétiques 100 % locales. Justine Dubourg n’a pas toujours baigné dans le monde de l’entreprise, ses parents étaient dans l’Éducation nationale. Mais elle s’y sent comme un poisson dans l’eau pour peu que l’humain y prime.

Son côté créatif et innovant, elle a commencé à le développer, à la fin de ses études supérieures, avec Régine Charvet-Pello chez RCP Design, une femme qu’elle admire. « Un modèle, j’ai beaucoup appris avec elle. »

Très vite, à 26 ans, elle monte sa première entreprise dans le consulting, formant 600 personnes à savoir parler vite et bien de leur entreprise. Elle prend conscience que des hommes en cravate sont plutôt attendus à ce poste. À 32 ans, Justine Dubourg s’est trouvé une voie, peut-être l’engagement d’une vie : présidente de Touraine Women(*), elle milite pour l’égalité entre les femmes et les hommes au travail. À côté de son activité de consulting, elle est en train de développer toute une expertise sur l’égalité au travail, qu’elle nourrit ardemment de lectures, podcasts, recherches. Déterminée, engagée, la jeune femme ne lâchera pas son combat féministe dans l’entreprise et rêve de « changer le monde ».

Texte et photos : Aurélie Dunouau


(*) Créée en 2020, l’association Touraine women vise à favoriser la visibilité des femmes dans l’économie tourangelle et sensibiliser à l’entrepreneuriat au féminin. Elle part du constat que les femmes ne sont pas suffisamment mises en valeur sur la scène économique tourangelle => www.helloasso.com/ associations/ touraine-women

Cat-sitter, un job au poil

#EPJTMV Pour les jeunes la garde d’animaux contre rémunération s’est imposé comme nouveau job étudiant. Amandine Penaranda en a fait sa carrière. Elle s’est spécialisée dans le comportement des félins et a créé son entreprise Chatypique en août dernier.

Un chat qui file entre vos pattes, vous mord à la moindre caresse, griffe les enfants… C’est loin de l’image du petit chaton mignon que vous vous faisiez quand vous avez adopté Croquette.

Amandine Penaranda voit ce genre de cas tous les jours : elle est comportementaliste félins. Elle raconte : « C’était un chat qui mordait une dame et sa petite fille au niveau du visage, des épaules et du cou. Le vétérinaire n’a rien trouvé de particulier. Je n’ai pas encore terminé avec ce chat, mais je pense qu’il y a aussi une part de responsabilité des propriétaires. Dans ces cas, les chats sont souvent brusqués pour avoir des câlins ou quand les enfants jouent avec eux ».

Mais le métier plutôt singulier d’Amandine a parfois des côtés amusants. La jeune femme propose également ses services comme cat-sitter. Elle s’amuse : « Il y a un chat qui est fan des infusions de croquettes. Il adore aller à l’autre bout de la pièce chercher ses deux croquettes puis retourner les plonger dans sa gamelle d’eau avant de les manger ».

 « Je suis tombée sur ce métier par hasard »

Après plusieurs années en tant qu’assistante dentaire, Amandine Penaranda décide d’arrêter cette activité qui ne l’épanouie pas : « Dans ce métier, nous sommes très peu reconnus par la hiérarchie. »

Elle décide alors de créer son entreprise. Sa reconversion professionnelle est le fruit du hasard : « Je voulais faire un métier avec les animaux, je revenais d’un week-end au ski, j’ai regardé ce que je pouvais faire et je suis tombée sur ce métier. »

Elle s’est alors renseignée sur ce job insolite et trouve un organisme de formation, Vox Animae, qui lui permet d’apprendre à lire dans nos boules de poils. Elle éradique les urines intempestives et évite que des chats, considérés comme inadaptés, soient euthanasiés. Au quotidien, il s’agit de donner beaucoup d’amour aux chats dont elle s’occupe, mais aussi d’ « éduquer les humains ».

« Il faut de la pédagogie et un poil de psychologie pour apaiser les relations entre les chats et les propriétaires. » Une philosophie qui ne demande qu’à se développer.

 

 

Pour plus d’informations : site internet de chatypique

Manon Bernard et Emilie Chesné, étudiantes à l’École Publique de Journalisme de Tours (EPJT).

Handicap : plus de visibilité en entreprise

Changer le regard du monde professionnel, c’est l’un des enjeux de la semaine européenne pour l’emploi des personnes en situation de handicap.

(Photo Adobe Stock)

Les faits

Du 18 au 24 novembre, c’est la Semaine européenne pour l’emploi des personnes handicapées. Une action coordonnée depuis plus de 20 ans, au niveau national, par LADAPT, une association dont le but est d’accompagner les personnes handicapées dans leur vie de tous les jours.

Dans ce cadre, entre autres manifestations, Cap Emploi 37 organise un « Vis ma vie » de travailleur en situation de handicap, le 18 novembre, dans ses locaux de Saint-Cyr-sur-Loire. L’idée est de répondre aux questions des personnes qui travaillent avec collègue en situation de handicap, par des ateliers, des jeux et des mises en situation.

Les enjeux

En 2018, le taux de chômage des personnes en situation de handicap était de 19 % contre 9 % pour le total de la population active. C’est pour lutter contre cette disparité qu’a été créée, en 1997, la Semaine européenne pour l’emploi des personnes handicapées. Le réseau des Cap Emploi a été créé en 2000. Leur mission est d’aider les personnes en situation de handicap à se maintenir dans leur emploi ou à intégrer le monde du travail. Une action qui passe, bien sûr, par l’accompagnement des employeurs.

Le contexte

Le marché de l’emploi connaît depuis quelques mois une embellie notable. En Centre Val-de-Loire, le taux de chômage est revenu à 8 % tout juste (contre 8,2 pour l’ensemble de la France). L’Indre-et-Loire fait partie des bons élèves régionaux, avec un taux de chômage de 7,7 %. Le but est que les personnes en situation de handicap ne soient pas les grandes oubliées de ce sursaut.

Le point de vue

« 80 % des handicaps sont invisibles, rendons visibles les compétences. » Le slogan de la semaine pour l’emploi des personnes handicapées résume bien son enjeu. Benoît Malbran, chargé de mission à Cap Emploi 37, le résume à nos confrères de La Nouvelle République : « Les situations de handicap au travail sont le plus souvent invisibles et les salariés ne sont pas obligés de les signaler ».
1 758 personnes étaient accompagnées par Cap Emploi 37 en décembre 2018 et 491 entrées en emploi ont été enregistrée. À quoi s’ajoutent 45 personnes ayant bénéficié d’une formation.


> Toutes les infos sur capemploi-37.fr et semaine-emploi-handicap. com/ladapt

 

 

Néogourmets dit halte au sucre !

Des biscuits bio sans sucre ajouté ni additifs et fabriqués au coeur de la Touraine : c’est le pari de Gaëlle Hermange qui a lancé Néogourmets avec son mari. Une entreprise familiale qui veut révolutionner le monde des gâteaux, changer les habitudes… et nos palais.

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Néogourmets est encore tout récent sur le marché. Pouvez-vous rappeler son concept ?
Gaëlle Hermange : Ce sont des biscuits innovants, sans sucre ajouté et sans additifs. De toute façon, le sucre n’a aucun apport nutritionnel, ses effets sont néfastes. Nos gâteaux sont donc sucrés naturellement avec de l’abricot sec qui est un fruit riche en minéraux et en vitamines. Son index glycémique est bas, il arrive doucement dans le sang. Avec mon mari, on s’est dit que sur le marché du sans sucre, les produits proposés étaient quand même trop souvent chimiques et remplis d’édulcorants. Je voulais une alternative saine et gourmande, même sans la présence de sucre.

L’aventure est partie de votre souci de santé, non ?
Oui, suite à un problème, je ne peux plus consommer de sucre. J’ai donc souhaité faire des biscuits que je puisse manger, tout comme mes enfants. C’est dur de l’éviter, le sucre est partout ! Des études ont également prouvé qu’il était plus addictif que la cocaïne ! Difficile de s’en passer…

Faire de Néogourmets une aventure familiale, c’était quelque chose de pensé et réfléchi ou est-ce venu par hasard ?
Mon mari et moi-même sommes entrepreneurs dans l’âme. C’était aussi un nouveau challenge pour moi, puisque ça n’existait pas. On s’est donc dit : ‘’Allez, c’est le moment, c’est maintenant !’’. On voulait faire quelque chose de juste, qui apporte à la société. Et mes trois enfants sont à fond également ! Ils goûtent à tout.

Ce sont vos cobayes !
Oui exactement ! (rires) On travaillait sur ce projet depuis un an et demi et mes enfants sont les meilleurs testeurs. Avec eux, pas de langue de bois. Si ce n’est pas bon, croyez-moi qu’ils le disent tout de suite.

J’ai cru comprendre que vous aviez pris plusieurs engagements au niveaux des ingrédients, comme la farine de blé.
On a pensé le produit pour minimiser la réaction de la glycémie. Donc on utilise de la farine intégrale pour une recette la plus saine possible. Il fallait parvenir à garder le côté gourmand et le plaisir.

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On a beaucoup d’a priori sur le sucre. Un produit sans nous paraît plus fade…
Tout à fait. Je suis consciente qu’il faut aussi rééduquer notre palais. Le sucre est vraiment un exhausteur de goût. Sans, les saveurs fonctionnent différemment. On n’a plus l’habitude. Mais il faut avoir envie de mieux manger, tout en restant gourmands et gourmets.

Une diététicienne vous suit dans le projet ?
Camille Baïssas apporte tous les mardis matins les conseils nutrition et santé à ceux qui nous suivent sur les réseaux sociaux. On a également écrit un livre de recettes avec elle. Le projet l’avait emballée, car elle dit chaque jour à ses patients que l’avenir se fera sans sucre. On nous a tellement bassinés avec le gras qui fait grossir… mais c’est surtout le sucre !

Néogourmets, c’est aussi vegan ?
Sur nos quatre recettes actuelles, il y a en une vegane. Ce n’est pas notre concept de base, car on vise tout le monde. Mais le vegan est de plus en plus présent et celles qui sont dans ce mode de consommation ont déjà fait la démarche de manger mieux. Donc elles sont plus à l’écoute. Nos biscuits vegans sont faits avec de la farine de chia et sans œuf. Le beurre est remplacé par de l’huile de coco.

Quel est le consommateur visé avec vos gâteaux ?
Absolument tout le monde. En revanche, précisons que les matières premières sont très chères comme je le disais tout à l’heure, donc il faut avoir les moyens. On est sur du 4 € à 4,50 € le paquet de 80 g. de biscuits. Mais on veut démocratiser la chose pour baisser les coûts.

Vous ne faites que de la livraison ?
On vend nos biscuits sur la boutique de notre site Internet. Mais Néogourmets est aussi présent à Terres y Fruits à Saint-Cyr-sur-Loire et au Marché de Léopold. On essaye de nouer des partenariats, on a pas mal de pistes. C’est encore nouveau : on a démarré notre production au mois de décembre, donc ça se met en route. Ensuite, l’idéal serait de diffuser au niveau national, dans des magasins bio et dans les épiceries fines.

Vous avez une étiquette « fabriqué en Touraine ».  

(Photo Shutterstock)
(Photo Shutterstock)

C’est un produit de Touraine, oui. Évidemment, toutes les matières premières ne sont pas locales. Mais quand on peut, on travaille le plus possible avec des gens d’ici. La farine vient de Ballan-Miré par exemple.

Vous faites tout de chez vous ?
On a un bel atelier chez nous. On cherche tout de même des locaux et la Région Centre nous a aidés pour installer notre labo de production. Mais le but est de grandir, d’augmenter la capacité de production. Car les matières premières et les certificats bio coûtent cher.

En fait, vous préparez tout ça seuls dans votre sous-sol !
C’est un peu ça ! (rires) Mon mari et moi préparons tous les biscuits. Mais bon, l’idée est quand même de recruter, prochainement, un commercial et deux personnes pour la production et préparation des gâteaux. Il faut être ambitieux. Là, on a quatre recettes, mais on travaille sur d’autres. C’est un concept qui plaît, les gens sont prêts au sans sucre. Ils sont demandeurs.

Propos recueillis par Aurélien Germain
Photo : Néogourmets/GH sauf mentions

> Site internet de Néogourmets

> Page Facebook de Néogourmets

Formations digitales : My-Serious-Game impose son jeu

Spécialisée dans la création de formations digitales personnalisées et axées sur le jeu, My-Serious-Game connaît une croissance fulgurante. Visite de cette entreprise tourangelle devenue leader sur le marché national.

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My-Serious-Game a déménagé rue Édouard-Vaillant pour de plus grands locaux.

Mercredi matin, à deux pas de la gare. Au numéro 21 se dresse un de ces nombreux immeubles de la rue Édouard-Vaillant, coincé entre les hôtels et les résidences étudiantes. Direction le 3e étage. Il y a déjà du mouvement ici et l’ambiance est studieuse. Une poignée de main ferme et énergique nous accueille : c’est Frédéric Kuntzmann, le big boss des lieux.
Bienvenue à My Serious Game, ou MySG pour les intimes.

Ici, on crée des formations digitales sur mesure. Exit les méthodes tradi’ à coup de Power Point ronflants : MySG s’est spécialisée dans des solutions technologiques et modernes qu’elle vend aux entreprises pour qu’elles forment leurs collaborateurs de manière ludique, à travers des jeux sérieux. S’adapter à l’apprenant, en faisant appel à différentes formes comme la simulation 3 D, la vidéo interactive ou encore la réalité virtuelle.

Devenue leader français sur ce marché, My-Serious-Game a pourtant débuté il y a peu. C’était en 2014. Le duo tourangeau Aurélie Duclos et Frédéric Kuntzmann fonde à cette époque cette startup qui va vite affoler les compteurs. Aujourd’hui, elle « affiche une croissance annuelle à deux chiffres », précise la direction. Elle compte des clients comme « des grands groupes du CAC 40, des acteurs publics ou des organismes de formation et des PME ». De sept salariés au départ, on en compte désormais… 40. Un effectif qui devrait encore doubler d’ici la fin d’année.

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Les salariés créent des formations ludiques et technologiques, offrant de vraies aventures immersives.

ESPRIT STARTUP

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Frédéric Kuntzmann, CEO et co-fondateur de My-Serious-Game, dans son bureau

En se baladant dans les immenses et récents locaux (la troupe s’y est installée cet été), on sent que MySG, bien que devenue entreprise, a souhaité garder l’esprit startup. On pense à ces atmosphères typiques des bureaux nés dans la Silicon Valley. Murs blancs, salles lumineuses, canapés confortables à droite à gauche, des plantes un peu partout. Au beau milieu trônent un baby-foot et une cuisine. « Désolé du bazar, on a fait la galette des rois !, lance Clément Horvath, communication manager qui nous présente aussi « la machine à café customisée » : à la clé, des jeux de mots que n’aurait pas renié l’astrologue de tmv (en-dessous du thé à la menthe est inscrit « sans kebab ») et un logo détourné.

Un peu plus loin, on aperçoit un espace avec faux gazon au sol et hamac suspendu. Ambiance décontractée mais studieuse caractéristique pour une équipe dont la moyenne d’âge oscille entre 30 et 35 ans. « C’est assez jeune, car c’est une génération qui oeuvre dans le digital. Les profils sont divers : développeurs web, designers, chefs de projet, commerciaux, ingénieurs pédagogiques ou personnes issues du monde de la formation », énumère Clément.

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Ici, le management se fait à l’horizontale : tout le monde est autonome et responsable.

Carlos par exemple se présente comme « expert en neurosciences ». Sourire vissé aux lèvres, couronne sur la tête (il a eu la fève !), il travaille en ce moment sur une « solution digitale pour les formateurs, afin d’accompagner les gens sur leurs compétences cognitives ». La première version devrait être disponible en mai pour le marché national. Quelques secondes après, il a déjà disparu pour plancher derrière son Mac.

MySG s’est propulsée aux quatre coins du monde, lors de salons à Paris, Las Vegas, Lisbonne ou encore Londres. Montrer son savoir-faire et étoffer le porte-feuille clients avec Sanofi, SNCF ou encore le Ministère de l’Intérieur. Pour ce dernier, My-Serious-Game « a conçu un “ jeu ” pour voir comment réagir en cas d’attaque terroriste », explique Clément. Pour Bouygues Construction, « on a fourni une formation digitale pour que leurs équipes partagent les valeurs de la société. On a ainsi modélisé un chantier dans lequel le collaborateur pouvait s’immerger ».
Il y a également leur gros bébé, IFSImulation, une simulation 100 % digitale dédiée à l’application de prescriptions médicales pour un apprentissage par la pratique. Exit les faux mannequins pour s’entraîner : ici, l’étudiant(e) infirmier(e) évolue dans un environnement 3D et applique les méthodes apprises en formation.

Mais face à « un marché qui bouge vite », My-Serious-Game a les yeux rivés vers le futur. Déjà parce qu’elle vient tout juste de lever 3 millions d’euros auprès de trois fonds d’investissement. Ensuite, parce qu’elle va ouvrir des locaux à Paris prochainement. Et enfin, parce qu’elle vise un gros projet d’internationalisation.
« On est leader sur le secteur national mais on veut désormais l’être au niveau européen », annonce Clément. Leur projet ? Une solution basée sur l’intelligence artificielle. Rendez-vous à l’été 2019.

> My-Serious-Game sera présent au Vinci le 24 janvier au Human Tech Days et les 30 et 31 janvier au Learning Technologies de Paris.

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Une entreprise à l’esprit startup : ça se voit dans l’aménagement du plateau de travail !

Reportage : Aurélien Germain
Photos : Aurélien Germain & My-Serious-Game

Apprentissage : « Notre fierté, ce sont les élèves »

Professeurs en horlogerie au CFA de Joué-lès-Tours, Olivier Rouiller et Adel Berrima ont deux passions : leur métier et leurs élèves. Interview croisée sur l’apprentissage, ses clichés et ses forces.

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Quel est votre rôle au CFA ?
Olivier Rouiller : À la sortie du collège j’ai fait un BEP tourneur-fraiseur puis un bac pro EDPI (étude et définition de produits industriels) ; ensuite un CAP horlogerie et un bac pro d’horloger. J’ai continué un an chez mon maître d’apprentissage en tant qu’horloger, puis j’ai été responsable de SAV pour 14 magasins du groupe français Le Donjon. Enfin, je suis arrivé au Campus des métiers où je suis formateur en pratique horlogère depuis quatre rentrées.
Adel Berrima : Je suis plutôt un pur scientifique. J’ai commencé à enseigner en prépa et j’ai décidé de venir travailler au campus il y a 16 ans. Mais je ne fais pas que des maths : j’enseigne aussi la techno, des cours de pratique en horlogerie et le multi-services en cordonnerie. J’ai donc continué à me former à des métiers manuels, je n’ai jamais quitté l’école.
OR : Même formateurs, on apprend toujours. Nous faisons un métier où on ne prétend pas qu’on connaît toutes les choses. On apprend toute notre vie. Et malheureusement, le jour où on saura tout, on ne sera plus ici.

Comment êtes-vous arrivés dans le monde de l’apprentissage ?
AB : Quand j’enseignais en lycée, quelque chose me manquait. On était profs, on savait tout, on avait juste à recracher notre savoir. Et c’était très frustrant. Je voulais absolument travailler avec des personnes qui avaient d’autres connaissances et me préoccuper de ce que je pouvais leur apporter en fonction de leur diplôme.
OR : À la sortie du collège, on parlait des classes techno, des lycées pro comme des endroits où aller quand on avait des difficultés. Mais moi j’ai toujours voulu faire quelque chose avec mes mains. Et c’est en lycée pro, lorsque j’ai effectué mes stages en entreprises, que j’ai entendu parler de l’apprentissage.

Quel regard porte la société sur l’apprentissage ?
AB : Comme matheux, scientifique, universitaire, le regard porté par la société est très négatif. L’apprentissage est toujours considéré comme une voie de garage : « Tu es mauvais, tu pars en apprentissage ». Mon regard à moi, c’est : « Tu es excellent, tu vas en apprentissage. Tu sais ce que tu veux faire, tu y vas, tu te formes et tu es employé directement après ».
OR : On entend souvent « Passe un bac avant et après tu feras ce que tu voudras ». Mais en apprentissage on peut passer un bac !
AB : Et avoir des diplômes supérieurs, jusqu’à un Master.
OR : Et là il n’y a plus la question de l’expérience quand on cherche un emploi, parce qu’on l’a en temps de formation.

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Vous-mêmes, avez-vous eu à souffrir de ce regard ?
OR : Du côté familial, non. Des membres de ma famille sont artisans, je n’ai jamais eu de souci de ce côté-là. De mes anciens profs non plus car j’ai toujours voulu faire ce métier et quand j’ai envie de quelque chose je suis très borné. Et quand on me demandait « Apprenti ? Apprenti en quoi ? » je répondais en horlogerie. Or l’horlogerie, ça brille, c’est l’or, les diamants… C’est prestigieux.
AB : C’est plus compliqué en tant que prof de maths de dire qu’on va former des jeunes en apprentissage. C’est que quelque part on est un mauvais prof et qu’on se tourne vers les CFA ou autres établissements techniques parce qu’on ne peut pas faire le reste. Mais c’est peut-être qu’on a décidé d’enseigner autrement… En apprentissage, on ne peut pas se permettre qu’un enfant ne suive pas le cours. Notre rôle est là. Tout le monde peut avoir du mal à comprendre que quand on a des diplômes on accepte de perdre 300 € sur son salaire en décidant de venir enseigner dans un CFA et d’avoir moins de vacances scolaires. Oui, j’ai été critiqué : pardon, mais je m’en fiche.
OR : Le matin quand on se lève, on est contents de faire ce qu’on fait. Notre fierté, c’est les jeunes. C’est de voir où ils sont maintenant.

Quelle est la particularité de votre formation ?
AB : En apprentissage, cette formation est unique en France. C’est un métier de passion, on a des jeunes qui sont passionnés et qui adorent ce qu’ils font. C’est un métier historique avec du dessin d’art, énormément de calculs et d’engrenages, donc un petit côté ingénieur. Et chaque jour, en entreprise, nos jeunes ne savent pas sur quoi ils vont tomber : une montre qui a dix ans ou une horloge de 350 ans ?

Qu’est-ce qui motive les élèves et les patrons ?
OR : Quand ils obtiennent leur diplôme, nos élèves sont autonomes sur plein d’actions.
AB : Pour les apprentis, c’est un métier où l’on touche à tout, avec à 99 % une embauche derrière et un salaire correct. En ce qui concerne les patrons, il y a ceux qui cherchent à transmettre leur savoir pour ensuite transmettre leurs horlogeries ; et ceux qui ont besoin de main d’oeuvre mais ne trouvent pas de personnes qualifiées. Donc ils forment par apprentissage, ainsi ils auront pu tester la personne pendant deux, voire quatre ans.

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Les élèves trouvent-ils facilement des entreprises ?
AB : Non. C’est très difficile de trouver un maître d’apprentissage. Déjà il faut que l’horloger fasse confiance en quelques minutes pour travailler avec un jeune dans un petit espace avec des pièces coûteuses. Ensuite il faut que les parents acceptent de laisser leur enfant partir à l’autre bout de la France pour faire sa formation. Le boulanger peut être à dix minutes de la maison. Pour l’horloger il y a très peu de chances que ce soit le cas.
OR : Nous on a une demande mais il n’y a pas assez de maîtres d’apprentissage. Et en plus il faut que ce soit au niveau national. On n’a qu’un apprenti de Tours et son patron est à Orléans. On avait deux maîtres d’apprentissage à Tours mais ils ont embauché leurs apprentis.

Et quel avenir pour les jeunes au sortir de cette formation ?
OR : Beaucoup sont embauchés par leurs maîtres d’apprentissage. Après, il y a les horlogers qui recherchent, certains partent à l’étranger… Et d’autres finissent dans le milieu aéronautique qui recherche leur profil parce qu’ils sont minutieux, ont la dextérité, savent travailler des micro-mécanismes avec des procédures bien développées.

Et devenir profs à leurs tour ?
OR : Oui, ça arrive. L’apprentissage est une façon de penser les choses, de transmettre et de pérenniser.
AB : Et qu’est-ce que c’est agréable quand on est formateur de voir arriver un enfant en situation d’échec et de l’emmener vers un diplôme — qu’il obtient, de le voir partir avec le sourire et trouver un emploi rapidement…

Sur la trentaine d’élèves horlogers du CFA, quelle proportion de femmes ?
AB : Je me souviens que quand Olivier était apprenti, en horlogerie, on avait très, très peu de filles. Aujourd’hui, elles représentent environ un tiers de nos élèves.
OR : Si vous tapez manufacture horlogère sur Internet, vous allez tomber sur de vieilles photos et voir des ateliers, avec des hommes sur des choses à complications, mais le reste de la manufacture, ce ne sont que des femmes. Parce qu’au départ on disait qu’elles étaient minutieuses, possédaient une dextérité particulière, donc on leur donnait des tâches bien précises et elles faisaient toujours la même chose.
AB : Mais ce n’est plus le cas. J’ai une ancienne apprentie qui, après avoir fait son bac pro chez nous, est aujourd’hui responsable production chez Patek Philippe. Et c’est une femme, et elle est passée par l’apprentissage. C’est une certaine fierté et il y a des fiertés qui n’ont pas de prix.
OR : On forme à un diplôme, mais aussi au monde professionnel.

Propos recueillis par Chloé Chateau
Photos : Chloé Chateau

Réfugiés : l’intégration par le travail grâce à Kodiko

L’association Kodiko accompagne des réfugiés tourangeaux vers l’emploi. Son cheval de bataille : transmettre les codes professionnels et culturels.

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Lors d’un speed-meeting fin mars, les réfugiés de la première promotion s’entraînaient à présenter leur projet à des professionnels tourangeaux. (Photo Kodiko)

« Sonita Alizadeh me ressemble : comme elle, j’ai dû quitter mon pays… », raconte cette femme réfugiée s’efforçant de reconstruire sa vie en Touraine. Aujourd’hui, elle participe à une formation regroupant une quarantaine de réfugiés demandeurs d’emploi et de salariés tourangeaux.

La rencontre se déroule dans un joyeux brouhaha, au sein des locaux du Crepi à Saint-Avertin, à l’initiative de l’association Kodiko. Sa mission ? Accompagner les personnes réfugiées vers l’emploi, grâce au tutorat de salariés volontaires en entreprises. « Avec la crise des migrants en 2015, l’initiative répond à un besoin : ces personnes n’ont ni le réseau, ni la langue, ni les codes pour s’insérer », explique Cécile Pierrat Schiever, cofondatrice et présidente.

 Le coach David Pinto propose différentes activités pour favoriser les rencontres entre salariés et réfugiés. (Photo NP)
Le coach David Pinto propose différentes activités pour favoriser les rencontres entre salariés et réfugiés. (Photo NP)

Kodiko concentre ses efforts sur les réfugiés statutaires reconnus par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides : en danger dans leur pays d’origine, ils bénéficient d’une carte de résident valable dix ans. Née en 2016, l’association parisienne s’est implantée en Touraine « suite au constat posé par une conseillère de Pôle Emploi, Sophie Perard : dans notre offre de service, aucune prestation ne répondait aux besoins spécifiques des réfugiés, un nouveau public en recherche d’emploi », raconte Michel Gueguen, chargé d’affaires entreprises à Pôle emploi. L’antenne tourangelle est donc née afin de mener une expérimentation financée par Pôle emploi, pour accompagner une première promotion de réfugiés de septembre 2017 à mars 2018.

Danser pour faire connaissance

Ce mercredi printanier marque le lancement de la deuxième promotion. Salariés et réfugiés choisissent son nom à l’unanimité : Sonita Alizadeh. Réfugiée aux États-Unis, la jeune Afghane a fui son pays pour échapper à des mariages forcés et s’est fait connaître grâce au rap, un exutoire pour exprimer sa colère et dénoncer la condition des femmes. Des activités permettent aux salariés et aux réfugiés de faire connaissance, mais la barrière de la langue s’avère parfois gênante.

Difficile de parler ? Eh bien, dansez maintenant ! C’est l’étonnante proposition du coach David Pinto : les binômes salariés – réfugiés se forment, et sur un air de Yann Tiersen, l’un des deux ferme les yeux et se laisse entraîner dans la danse par son partenaire. Pour Maria Lépine, responsable emploi chez Manpower, c’est « un moment de détente ». Une autre manière, aussi, d’entrer en relation avec son partenaire soudanais, Al Fatih Mohamad Moussa, qui s’exprime peu en français. Ensuite, les danseurs se mettent en cercle pour partager leurs impressions.

Dans son pays, le Soudanais Al Fatih Mohamad Moussa était chauffeur de bus. En France, il espère trouver un emploi grâce à Kodiko.
Dans son pays, le Soudanais Al Fatih Mohamad Moussa était chauffeur de bus. En France, il espère trouver un emploi grâce à Kodiko.

Parmi les réfugiés, les langues ont du mal à se délier : « Il faut parler français, vous en êtes capables. Osez ! », invite Elvira Haxhiu, chargée de mission chez Kodiko. Les salariés français, eux, s’interrogent sur les différences culturelles : A quelle distance se tenir ? Peut-on se prendre par la taille ? Tels sont ces précieux « codes » (kodiko en grec) chers à l’association : transmettre des codes professionnels et culturels est l’un des axes clés de son projet. Comment s’habiller ? Comment se comporter en entretien ? « Ces codes socio-professionnels sont différents d’une culture à l’autre. Par exemple, la ponctualité est cruciale pour nous, mais pas en Afrique de l’Ouest », illustre la présidente.

Pour lever cette barrière, les réfugiés bénéficient d’un accompagnement de six mois. Au programme : des ateliers collectifs sur la posture et la communication (verbale et non verbale), la mobilité, l’écriture, les outils de recherche d’emploi, la définition du projet professionnel, l’expression orale… « Travailler sur la confiance est essentiel. Les réfugiés doivent faire le deuil d’une vie, d’une position et repartir à zéro. Nous sommes là pour les aider à reprendre confiance », souligne David Pinto. Mais ce n’est pas tout : l’originalité du programme repose sur le tutorat en entreprises : l’accompagnement individuel d’un réfugié par un salarié volontaire.

Ainsi, chacun peut avancer à son rythme. Certains ont besoin de faire mûrir leur projet, d’autres de rechercher un travail, comme Fadi Toshi, arrivé d’Irak il y a un an : « Je pensais trouver facilement un emploi dans la maintenance industrielle car j’ai de l’expérience dans plusieurs entreprises internationales. Mais ici, je ne connais personne et je ne sais pas comment ça marche. J’espère me faire un réseau grâce à Kodiko. » Tours est la première antenne locale de l’association parisienne, qui compte bien s’implanter dans d’autres grandes et moyennes villes françaises.

Reportage : Nathalie Picard

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SUR KODIKO.FR

Mais aussi par mail : elvira@kodiko.fr

Et par téléphone : 06 21 35 76 89

Entreprises : "un autre regard" sur les femmes

Les inégalités entre hommes et femmes dans le monde du travail restent immenses. Femmes 3000, qui prépare son forum en janvier, fait le point.

Le forum de Femmes 3000 lors d'une précédente édition. (crédit Tmv)
Le forum de Femmes 3000 lors d’une précédente édition. (crédit Tmv)

Femmes 3000 prépare son 8e forum de l’entrepreneuriat féminin, qui aura lieu le 30 janvier prochain. Outre des ateliers et des rencontres avec des partenaires, l’association remettra le trophée de l’entrepreneuse 2013. Les candidatures peuvent être soumises jusqu’au 20 décembre. Une initiative pour donner un coup de pouce aux femmes dans le monde du travail qui, au vu des statistiques, est encore d’actualité.
Selon une récente étude du ministère du Travail, les femmes chefs d’entreprise sont de plus en plus nombreuses, elles étaient 134 000 en 1983 et 165 000 aujourd’hui. Une bonne nouvelle ? Pas vraiment, proportionnellement elles ne représentent que 16 % des entrepreneuses (en 2011) alors qu’elles étaient 19 % en 1983.
« Manque de confiance »
Pour Laurence Hervé, la présidente de Femmes 3000 en Touraine, il reste un blocage : « Beaucoup trop de femmes ont encore un manque de confiance en elles. Par ailleurs, leur entourage, s’il n’est pas positif, peut jouer en leur défaveur. Toute la société, culturellement, se tourne vers les hommes, valorise leur travail, les encourage. Quand une femme décide de monter son entreprise, c’est perçu comme anormal. Et même sans être chef, elle va avoir des difficultés à atteindre un poste à responsabilité. »
Les luttes pour la valorisation des femmes dans la société, et en particulier au sein des entreprises, ont pourtant sensibilisé les pouvoirs publics depuis de nombreuses années sur ces sujets. « Les aides de l’État existent pour que les femmes entreprennent, » ajoute Laurence Hervé. « Nous apportons un autre regard sur l’entreprise, sur sa façon de fonctionner. Ces valeurs féminines permettent une pratique différente. J’ai l’exemple d’une entrepreneuse qui, l’autre jour, me racontait qu’elle organisait des massages pour ses collaborateurs, au sein de l’entreprise. Elle l’a proposé naturellement, sans se poser de questions. Ce qu’elle met en place pour le bien de sa société, elle l’offre aux autres. » Plus d’infos sur le forum

Les petites entreprises aussi touchées par l'illectronisme ?

Pourtant indispensable pour les structures commerciales, Internet n’est pas forcément prioritaire pour les TPE.

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L’illectronisme concerne aussi l’économie locale. Et particulièrement les TPE. Internet et les nouvelles technologies ont pris une place importante dans la vie des petites structures. « Regardez le nombre de personnes qui consultent sur internet les horaires d’ouverture d’un commerce de proximité. Si elles ne trouvent pas l’information, il y a des chances qu’elles n’y passent plus, constate Yves Massot, 1er vice-président de la CCI Centre. Si ces commerces ou ces petites entreprises ne prennent pas en compte les nouvelles technologies, ils s’isolent, petit à petit. Quand je rencontre des commerçants qui n’ont pas encore franchi le pas, je leur explique qu’être présent sur internet ne va pas leur faire augmenter leur chiffre d’affaires, mais qe cela va, au moins, l’empêcher de baisser systématiquement. »
Même constat pour Sébastien Huillet à la tête d’une agence web tourangelle, Tribut and co : « L’illectronisme, c’est aussi un phénomène qui existe dans les petites entreprises locales. Dans les budgets, toujours un peu serrés, la création d’un site internet, c’est toujours la cinquième roue du carrosse. Surtout quand la personne n’y est pas sensibilisée. » L’Observatoire de Touraine s’est penché en 2012 sur l’usage d’internet dans les entreprises dans le commerce. À Tours, elles sont 68 % à posséder un site web. Le chiffre évolue en fonction de la taille des entreprises. « Aujourd’hui, les entreprises avec plusieurs employés ont pris le sujet en main, explique Sébastien Huillet. En revanche, les toutes petites structures ne sont, pour la majorité, pas sur internet. » Pour celles qui ont moins de 10 salariés, le chiffre tombe à 62 %.
« Les plus curieux et les plus sérieux s’y mettent facilement »
Seulement, en France, selon Médiamétrie, le nombre de consommateurs sur le net est en constante augmentation. De 2010 à 2013, ils sont passés de 25 à 32 millions. Cette année, la hausse est de 5 %. « Les petits commerces, entre autres, n’ont pas forcément besoin d’avoir un site internet, parfois, une simple page Facebook peut suffire, note Yves Massot. Mais les commerçants ont souvent du mal à faire le premier pas parce qu’ils ne possèdent pas les clés techniques. » Et quand elles le font, ces TPE s’adressent en majorité à un prestataire extérieur. Pour les plus petites structures, le manque de connaissance des entrepreneurs dans le domaine des nouvelles technologies peut parfois les mettre dans des situations financières inconfortables. « J’ai parfois des clients qui viennent me voir complètement dégoûtés, après avoir signé un contrat avec une entreprise qui vend des sites tout faits, témoigne une graphiste web. Peu scrupuleux, ces prestataires jouent parfois sur la crédulité des commerçants ou des entrepreneurs pour vendre des sites qu’ils payent chaque mois, au forfait. Au bout du compte, les contrats sont tellement désavantageux que le nom de domaine ne leur appartient même pas. »
Sébastien Huillet rencontre également, ce manque de connaissances de certains patrons de petites entreprises. « Je vois arriver des entrepreneurs qui, sur le conseil du beau-frère, ont envie d’ouvrir un site internet, raconte Sébastien Huillet. Certains d’entre eux n’ont aucune idée de ce qu’ils veulent ni des coûts que cela engendre. Ensuite, quand nous leur demandons les outils qu’ils veulent si c’est une e-boutique ou les fonctionnalités d’un site internet, ces personnes ne comprennent pas. Mais, il ne faut pas généraliser, les plus curieux et les plus sérieux s’y mettent facilement. » En 2007, la CCI a lancé le site internet achattouraine. com pour aider les petits commerces sur internet. Ce portail recense les 9 500 adhérents de l’Indre-et-Loire. « Quand une personne nous appelle pour améliorer sa fiche d’identité sur l’annuaire, c’est une porte d’entrée, se réjouit Yves Massot. C’est un bon moyen de leur montrer ensuite qu’un commerce in situ ne suffit plus aujourd’hui, qu’il faut se mettre au diapason des consommateurs qui comparent, cherchent, s’informent sur les produits. »

Femmes entrepreneuses : l’avis de la spécialiste

En France, seules 29 % des entreprises sont créées par des femmes. Un chiffre un peu timide quand on sait qu’elles sont autant que les hommes à participer aux réunions d’informations destinés aux entrepreneur(e)s. Quels sont les freins qui les retiennent encore trop souvent de passer le pas ? Rencontre avec, Typhaine Lebègue, une spécialiste de la question.

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Typhaine Lebègue est l’auteure de la première thèse française consacrée à l’entrepreneuriat au féminin, publiée en 2011. Elle est docteure en sciences de gestion et professeure en entrepreneuriat et gestion des ressources humaines à l’école de commerce FBS Tours.

 

Est-ce plus difficile pour une femme de monter son entreprise ?
Le débat n’est pas dans le plus ou moins dur. Le mot serait plutôt « spécifique ». Il faut tenir compte des spécificités de la femme, son identité imprègne la réalité, mais la rédaction d’un business plan c’est la même chose pour tout le monde. Il faut convaincre et cet aspect implique de se vendre, or les femmes peuvent avoir tendance à se sentir moins légitimes pour cela.

Mais, les banques ne sont-elles pas plus sévères avec elles ?
Selon moi, il faut plutôt interroger la perception qu’ont les femmes de leurs propres projets. En fait, elles développent elles-mêmes une gestion plus « prudentielle » de leur entreprise. Elles font en sorte qu’il n’y ait pas de casse au cas où elles échouent, et ont donc tendance à faire plus souvent appel à leur épargne personnelle. Pourtant ce n’est pas un bon choix stratégique que d’éviter la relation avec le financier. Elles n’investissent pas assez d’argent au début ce qui n’est pas bon pour que l’entreprise soit pérenne.

Les femmes s’auto-verrouillent en quelques sortes ?
Oui. Une étude nationale auprès des étudiantes montrent qu’elles ont moins l’intention d’entreprendre. Pourtant lorsque j’ai organisé une conférence sur le thème « femmes entrepreneures, et pourquoi pas vous? » il y a