Autisme : Echo, un lieu d’accueil pour rompre l’isolement et créer du lien social

Rue Courteline existe Echo, le groupe d’entraide mutuelle lié aux troubles du spectre de l’autisme à Tours. Un lieu d’accueil chaleureux et forcément de soutien.

C’est quoi ?

Direction le 92, rue Courteline, à Tours. C’est ici qu’a ouvert Echo, « un groupe d’entraide mutuelle (Gem) lié aux troubles du spectre de l’autisme », comme le précise la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH37).

Ce lieu de soutien, d’écoute, a organisé une journée portes ouvertes il y a quelques jours, pour faire découvrir ses locaux, son rôle, et la grande aide qu’il apporte. Car ici peuvent venir personnes majeures, avec ou sans diagnostic médical, et qu’elles soient accompagnées ou autonomes.

Rompre l’isolement

Regarder un film, se reposer, jouer, parler et échanger, ou encore participer à des ateliers… L’espace Echo est avant tout un lieu pour rompre l’isolement. Il suffit de jeter un œil à la page Facebook du lieu (1) pour constater à quel point les animations sont nombreuses. Café-rencontre, bœuf musical, projet vidéo, atelier d’écriture, ou encore petit déjeuner et initiation LSF (langue des signes) étaient notamment au programme du planning d’octobre. Avec, en ligne de mire, créer du lien social.

Comment ça marche

Pour faire fonctionner tout ça, la structure est passée en association au printemps et des animateurs sont présents. Parrainé par les Maisonnées (maisons d’accueil en Touraine pour adultes autistes dont tmv parlait déjà en 2012), ce groupe d’entraide mutuelle qu’est Echo perçoit aussi un financement de l’ARS, l’Agence régionale de santé. De quoi payer par exemple le loyer et les charges.

En chiffres

On estime qu’un enfant sur 150 naît avec un TSA, un trouble du spectre de l’autisme. L’association internationale Autisme Europe, quant à elle, le chiffre à un sur 100. En France, environ 700 000 personnes sont atteintes d’un TSA, résume l’asso principale Volontaires pour les personnes avec autisme.

Aurélien Germain / Photos : archives tmv et NR


(1) facebook.com/GEMTSA37

> Echo, au 92, rue Courteline à Tours. Ouvert du lundi au vendredi de 13 h à 17 h (9 h 30 à 17 h le vendredi). Contact : gemtsa37@gmail.com. Tél. 06 37 35 39 53.

 

Handicap : accompagner grâce au travail

L’ouverture du Café joyeux, à Tours, a mis en lumière l’emploi des personnes en situation de handicap. Dans l’ombre, les personnes handicapées n’ont pas attendu ce café pour travailler, comme c’est le cas dans les ESAT, Établissements et Services d’Aide par le Travail. Envie d’en savoir plus ?

Vendredi. Tout le monde s’affaire. On passe le balai, et on déplace les meubles pour accueillir le public. L’ESAT Les Vallées, à Luynes, a en effet choisi d’ouvrir ses portes au public le mardi 21 juin : « l’événement s’adresse aux personnes handicapées et à leurs proches intéressés par notre structure, bien sûr. Mais nous avons aussi déposé des dépliants dans les boîtes aux lettres du quartier, où les voisins ne savent pas toujours ce que nous faisons ici », explique Aline Palleschi, directrice adjointe de la structure.

Et la publication récente du livre-enquête Handicap à vendre par le journaliste Thibault Petit, pour dénoncer l’exploitation à bas coût des travailleurs et le filtrage en fonction de la productivité des candidats, n’est pas faite pour arranger les choses : « Bien sûr, les réalités décrites existent malheureusement dans certains ESAT, mais pas ici. Il faut bien comprendre qu’un ESAT n’est pas une entreprise, c’est un établissement médico-social. Mais nous avons conscience du risque de glissement », complète Aline Palleschi.

À Luynes, dans les ateliers « conditionnement », on fabrique des caissettes en bois pour des fromages de chèvre, on assemble boulons et pièces de plastique, on fabrique des boîtes de toutes sortes. Un peu plus loin, des ordinateurs servent aux prestations de saisie informatique. À l’atelier « espaces verts », on prend l’air : pour des entreprises ou chez des particuliers, l’équipe entretient les arbustes, pelouses et autres massifs de fleurs. D’autres travailleurs interviennent aussi pour du nettoyage de voiture 100% écologique (sans eau ni produits chimiques).

« Mais on n’est pas là pour faire du chiffre ! Le travail est un support à l’accompagnement des personnes que nous accueillons. » François est moniteur, et suit une douzaine de travailleurs dans leurs parcours respectifs. Avec ses collègues, ils créent des modes d’emploi illustrés, découpent les missions en tâches successives, ou adaptent les gabarits par exemple.

« On est là pour adapter le travail aux capacités de chacun, et pour valoriser leurs compétences. On se questionne en permanence : est-ce que la personne se sent bien dans son travail ? Je ne suis pas sûr que des employeurs du milieu ordinaire se posent ce genre de questions pour leurs salariés ! ». En témoigne la variété des temps de travail (partiels, mi-temps, temps plein), ou cet écran situé dans le deuxième atelier, qui diffuse chaque matin une vidéo de la kiné pour un échauffement physique avant d’attaquer la journée.

Moniteurs, assistante sociale, psychologue, kinésithérapeute… Ils sont en effet une vingtaine de salariés pour encadrer et accompagner une centaine de travailleurs. « C’est un métier riche, où l’humain a toute sa place. En dix ans passés ici, j’ai vu aussi comment évoluait la société, et notre défi est que l’ESAT évolue aussi. Ce sont des enjeux liés à la citoyenneté, » commente François.

Travailleurs extra-ordinaires

Manuela, 40 ans, est arrivée il y a dix jours. « Dans la restauration rapide, mon statut de travailleuse handicapée n’était pas pris en compte. L’aggravation de mes problèmes de dos m’a motivée à me tourner vers les ESAT, car je ne veux pas rester chez moi sans travailler. Ici, on travaille à son rythme, et après quatre ans sans emploi, je me remets dans le bain. » Son but : retourner dans ce qu’on appelle ici « le milieu ordinaire ».

Comme Manuela, de plus en plus de personnes arrivent à l’ESAT après un passage dans le monde des travailleurs lambda : « Historiquement, nos établissements accueillaient des personnes avec déficience intellectuelle, issues des IME (Instituts Médico-Éducatifs). Mais depuis la loi de 2005, le handicap psychique et social est aussi reconnu, et les parcours sont donc de plus en plus divers », ajoute Aline Palleschi.

L’ESAT est pour certains une simple étape après un monde ordinaire qui les a abîmés, où ils ne trouvent plus leur place ; pour d’autres, c’est un aboutissement. L’équipe y accompagne donc chacun vers son projet, qui signifie parfois aller travailler seul au sein d’une entreprise extérieure… toujours sous le regard vigilant et bienveillant des moniteurs, anges-gardiens de ces travailleurs qui ne sont pas sous nos yeux, mais qui n’en ont pas moins l’air joyeux.

Maud Martinez

Madeline chante pour les enfants autistes

#VisMaVille Madeline Ardouin est musicienne (son groupe est Jane is beautiful) et chanteuse. Elle s’est spécialisée dans l’expression auprès des enfants en situation de handicap. Reportage à l’hôpital Bretonneau où ses notes enchantent les enfants.

Quelques notes de ukulélé résonnent dans la toute petite salle d’activités nichée au sein du centre pédopsychiatrique de l’hôpital. Madeline Ardouin accueille en chanson et par leur prénom les trois enfants présents pour la séance.

Wellan, ravi, bat des mains, Nazim est un peu sonné par son rhume mais n’en perd pas une miette tandis que Sharif s’agite dans un coin de la salle. Ils sont tous trois atteints de troubles autistiques. Ils ont 7 ans. Depuis la rentrée, ils participent, tous les quinze jours, à une séance musicale de trente minutes avec Madeline Ardouin.

Artiste de scène avec Jane is Beautiful, elle chante et joue du ukulélé, de la guitare, du violon et du balafon auprès des tout-petits. Madeline endosse le rôle de chef d’orchestre, les enfants de musiciens. « Ce que je recherche, c’est qu’ils puissent s’exprimer et prendre du plaisir. Il n’y a pas d’objectif thérapeutique. J‘ai le luxe de pouvoir prendre le temps avec eux. Parfois, c’est abstrait et difficile, d’autres fois c’est fort et poétique. »

Improviser et s’adapter aux enfants

Le débrief après la séance avec l’équipe soignante le confirme. « On recherche la spontanéité, pas le cadre », explique Clotilde, infirmière. « C’était génial aujourd’hui, Wellan n’a jamais autant parlé. Et ta chanson sur la bulle d’eau et le poisson les a scotchés ! » Madeline improvise beaucoup, s’adaptant aux réactions des enfants. « Il faut accepter que ce ne soit pas un long fleuve tranquille. Comme ce sont des enfants fragiles, la moindre chose prend son importance. Je suis là pour les entendre et recevoir leurs propositions. Ils me touchent et je m’éclate. »

Pour en arriver là, Madeline s’est formée il y a quatre ans auprès du Centre de Formation des Musiciens Intervenants de Fondettes par un diplôme Musique et tout-petits et enfants en situation de handicap. Elle travaille à présent en crèches, auprès du centre médico pédopsychiatrique de Langeais et mène ses ateliers d’expression musicale à Bretonneau depuis un an. Avec Rémi Claire, cadre du service, elle s’est associée pour trouver des financements, aujourd’hui assurés par une fondation de lutte contre l’autisme (l’AESPHOR).

Mais cela reste « un combat » de chercher des subventions, chronophage pour une artiste. Cependant, Madeline et ses doux yeux noisettes gardent la flamme. La joie et l’évolution des enfants lui donnent l’énergie nécessaire. Elle aimerait d’ailleurs les amener voir un concert au Petit Faucheux.

Aurélie Dunouau

Autisme : témoignages à l’Aba

Une personne sur 150 est atteinte d’autisme ou de troubles associés en France, ce qui représente un total d’environ 450 000 personnes. 3 enfants autistes sur 4 sont des garçons. Présentation de la méthode Aba par la directrice clinique nationale de l’association Agir et vivre l’autisme et témoignage d’un moniteur éducateur dans l’établissement Aba de Tours.

ABA, QU’EST-CE QUE C’EST ?

Ana Bibay, directrice clinique d’Agir et vivre l’autisme, explique la prise en charge Aba (Applied behavior analysis) ou analyse appliquée du comportement, dans les établissements du réseau national : « On observe et mesure les comportements de l’enfant pour déterminer sur lesquels on va travailler. »
L’objectif ? Augmenter les comportements appropriés, réduire les inappropriés et en enseigner de nouveaux. Par des techniques de renforcement, les éducateurs amènent l’enfant à développer des comportements souhaités : « Si un enfant crie pour obtenir un ballon, on lui propose une autre manière de le demander : comme répéter le mot « ballon », montrer une image ou faire un signe, selon ses capacités. S’il se remet à crier, on le guide pour remplacer le cri par le comportement approprié, ce qui lui permettra d’obtenir le ballon. » Si chaque enfant dispose d’un programme personnalisé, le travail est forcément axé sur les symptômes de l’autisme, comme le déficit de langage, le développement des centres d’intérêt ou la réduction des comportements répétitifs. « Nos établissements n’ont pas vocation à remplacer l’école, précise Ana Bibay. Nous nous efforçons de développer les comportements d’imitation et d’insérer l’enfant dans un milieu le plus ordinaire possible, afin qu’il progresse en prenant exemple sur ses pairs. »

MARC JACOB,
MONITEUR ÉDUCATEUR À L’ÉTABLISSEMENT ABA DE TOURS

« Dans notre travail, nous recherchons constamment la motivation des enfants. Je ne vois pas quel intérêt nous aurions à laisser seul dans son coin un petit, qui aurait alors des comportements stéréotypés (par exemple, secouer ses bras sans interruption). Nous les stimulons beaucoup, mais il s’agit d’une stimulation plaisante. Nous portons attention à leurs demandes. D’ailleurs, vu de l’extérieur, on pourrait croire qu’ils passent leur temps à jouer. C’est vrai que les enfants n’ont pas forcément l’impression de travailler. Et quand je vois les progrès qu’ils font, je suis convaincu par cette approche. »

Témoignages recueillis par Nathalie Picard

Reportage : L’enfant autiste au cœur de l’attention

À Tours-Nord, un nouvel établissement expérimental accompagne de jeunes autistes. Parti à la rencontre de leurs éducateurs, tmv est revenu impressionné par leur dynamisme.

Gaëlle Fernandes, éducatrice, amuse les enfants.

Avec ses murs grisés par le temps et ses fenêtres obstruées par des volets roulants, l’ancien collège Paul-Valéry paraît bien triste. Pourtant, depuis le mois de mai, le site connaît une nouvelle vie : « Établissement Aba de Tours », peut-on lire sur la pancarte bricolée à l’entrée. Installé au rez-dechaussée, un établissement médico-éducatif accueille de jeunes autistes. Aba, c’est l’acronyme d’Applied behavior analysis, une approche basée sur l’analyse du comportement. Derrière la haie de thuyas, des fenêtres laissent percevoir quelques têtes d’enfants : l’un d’eux est en train de sauter, une jeune femme à ses côtés. C’est dans la salle de motricité que s’amuse le petit. À l’intérieur, des tapis bleus recouvrent le plancher, et la piscine à balles fait des heureux. Gaëlle Fernandes, l’une des éducatrices, agite un large tissu multicolore, pour le plus grand plaisir de Jules*, qui en redemande. Un joyeux bazar à vocation éducative, explique Johan Toulouse, psychologue Aba de l’établissement : « Jules a bien travaillé, c’est grâce à cela qu’il peut profiter de ce moment de récréation et de détente. C’est un temps de renforcement, une notion essentielle dans notre approche. »
Le renforcement ? « C’est l’inverse de la punition », répond le spécialiste. En somme, une récompense, même si Johan Toulouse n’aime pas utiliser ce mot. « Les punitions restent exceptionnelles. Le renforcement représente 99 % de notre pratique. Suite à un bon comportement, obtenir un moment de plaisir va donner envie à l’enfant de se tenir de la même manière. » À force de répétitions, les jeunes autistes, qui ont du mal à communiquer, finissent par comprendre, par exemple, que crier ou taper n’est pas une solution.

Des étagères pleines de jeux à demander.

Comme Jules, huit autres enfants de trois à sept ans et demi fréquentent les lieux. Un dixième étant sur le point d’arriver, la structure affichera complet. C’est un père d’enfants autistes qui a porté le projet d’ouverture dès 2008 avec Agir et vivre l’autisme, une association qui développe un réseau national d’établissements de ce type. De longues années ont été nécessaires pour obtenir les financements publics. La structure expérimentale, sous la tutelle de l’agence régionale de santé (ARS), se distingue par son taux d’encadrement élevé – un intervenant pour chaque enfant – ainsi que sa prise en charge spécifique (Aba).
Deux critères déterminent l’admissibilité d’un enfant : la notification d’orientation de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) ainsi qu’un diagnostic d’autisme établi. « Nous bénéficions d’un agrément pour dix enfants de deux à douze ans, mais en réalité nous ciblons les plus jeunes, car plus la prise en charge est précoce, meilleurs seront les résultats », explique Félix Tran, le chef de service qui gère l’établissement tourangeau.

Pascaline Lair, éducatrice, montre une image à un enfant.

Lorsqu’un enfant arrive ici, Marc Jacob, moniteur-éducateur, détermine précisément ses difficultés à l’aide d’évaluations. « Ça nous permet de mettre en place un accompagnement individualisé, car chaque enfant est différent », estime par ailleurs le psychologue. Sur la base du curriculum établi à partir des évaluations, l’équipe éducative rédige ensuite des programmes détaillés. Un enfant peut en suivre quatre à douze en une année. Globalement, il s’agit de développer l’autonomie et la capacité à communiquer, apprendre et imiter. À chaque programme son objectif spécifique, comme uriner aux toilettes ou formuler une demande.
Pas facile, pour ces enfants, d’apprendre à demander. L’agencement de « la savane », la salle d’enseignement en environnement naturel (pour les spécialistes), a été pensé pour les y aider. Sur de hautes étagères grises reposent des bacs en plastique soigneusement étiquetés : pâte à modeler, legos, voitures, dînette… Tous ces jouets bien rangés, les enfants peuvent les voir mais pas y accéder. Pour en obtenir un, il faut le demander correctement.

Dans cet espace de jeu, installé à une petite table, Tom* tient consciencieusement son feutre bleu. Concentré sur sa feuille, il s’applique : « Ils ont l’air heureux, papa et maman », l’encourage son éducatrice, tout en regardant son dessin. Ici, toute la journée, on entend un concert d’encouragements et de compliments. Toujours dans l’idée de renforcer les bons comportements. Dans la pièce d’à-côté, c’est un « bravo, ouhaou ! » qui retentit. Pascaline Lair, éducatrice, s’enthousiasme des efforts d’Emma*, la brunette assise face à elle. Ici, c’est la salle d’enseignement à table. Les espaces de travail, de petits bureaux, sont délimités par des cloisons amovibles.
Première étape : apprendre aux enfants à coopérer. Face à une demande simple, comme « lève les bras », leur collaboration va leur permettre d’obtenir un moment de jeu. L’idée, c’est de leur donner envie de venir travailler au bureau. Les apprentissages plus poussés viennent dans un second temps. « Avion », « fromage », « clé », Emma doit répéter les mots énoncés par Pascaline Lair, reproduire ses gestes ou encore sélectionner des images. À chaque bonne réponse, elle gagne un jeton. Dix jetons accumulés, et elle obtient un temps de jeu. Satisfaite, la fillette s’amuse avec une petite maison rose. « Je ne vais pas tarder à la reprendre », prévient l’éducatrice, qui s’exécute quelques minutes après, pour se lancer dans une nouvelle série d’exercices. Très cadrés, ces temps de travail durent quinze minutes par heure maximum. En parallèle, Pascaline Lair remplit une feuille de cotation, qui lui permet de mesurer précisément le comportement de l’enfant. Pour éviter toute subjectivité dans son suivi.

Au fond de la pièce, un garçon est assis à une table, face à un tableau blanc accroché au mur. Un peu comme dans une classe ordinaire. L’éducatrice, elle, se tient debout, comme le ferait une maîtresse. À sa demande, Léo* se dirige vers le tableau afin d’y inscrire une série de chiffres. Pour l’instant, il est le seul à aller à l’école, dans le cadre d’un temps partagé. « Pour les enfants comme Léo, nous travaillons sur des compétences spécifiques. Par exemple, suivre une consigne de groupe », souligne le psychologue Aba. Pour que la transition s’effectue en douceur, Léo se rend à l’école avec son éducatrice. Permettre à leur petit de rejoindre un jour l’école ordinaire, comme les autres enfants, tel est certainement le plus grand souhait des parents.

* Les prénoms ont été changés.

Reportage et photos de Nathalie Picard

> Retrouvez les témoignages du moniteur éducateur et de la directrice de l’établissement ICI 

Redonner le jeu et se remettre à travailler.

Autisme : "Les parents sont isolés"

À l’occasion des Journées nationales des centres ressources autisme 2014, les 10 et 11 avril au Vinci, nous avons interrogé le professeur Gilbert Lelord. Spécialiste reconnu à l’international, il a mené d’éminentes recherches sur l’autisme, pendant des décennies à Tours.

Où en est-on, dans la recherche sur l’autisme ? 
C’est assez simple : les progrès décisifs viendront des gènes. Mais pour le moment, les progrès sont dans la rééducation. Les thérapies de développement sont, à Tours, efficaces. Surtout quand elles sont pratiquées tôt. Il ne faut pas attendre de résultats immédiats, mais il y a une ébullition. Pour le moment, il n’y a pas de retombées. Il y a bien quelques effets thérapeutiques etc. : c’est sérieux, mais pas décisif pour l’instant.

On dit souvent que l’Indre-et-Loire est en pointe sur le sujet. Est-ce toujours vrai ? 
C’est exact. Surtout avec Catherine Barthélémy. Moi j’étais l’initiateur, je suis le dinosaure ! (rires) En 1972, j’avais fait un colloque à Tours, avec des Américains etc. Déjà à l’époque, je disais que le problème de l’autisme n’est pas la mère, mais le cerveau de l’enfant. Mme Barthélémy a pris le flambeau. Quand elle claque des doigts, 300 chercheurs internationaux viennent au Vinci ! États-Unis, Suède, Inde… Tous à Tours ! Il y a aussi Frédérique Bonnet-Brillault, maintenant que Mme Barthélémy est à la retraite. Elle est très dynamique et compétente. Ce ne sont pas des psychiatres pures, elles sont polyvalentes.

En 2012, on parlait déjà de l’autisme comme grande cause nationale. Est-ce que ça change vraiment les choses ou ce ne sont que des mots ?
Oui et non. Il est exact que l’on s’intéresse à l’autisme, le gouvernement aussi. Mais les moyens ne sont pas extraordinaires. Il faudrait des petites structures qui reçoivent les enfants et les adultes aussi ! Ça n’existe pas. Il faut des thérapies éducatives, que l’on demande aux enfants de jouer, d’échanger.

Un enfant sur 150 naît avec un trouble du développement lié à l’autisme. Les médecins doivent-ils faire des efforts ?
Bien sûr ! Mais c’est une longue histoire. Par exemple, dans les facs ordinaires, il n’y a qu’une petite demi-heure d’enseignement sur l’autisme. Le médecin lambda n’a pas eu de formation sur l’autisme. Cette réunion à Tours (des 10 et 11 avril, NDLR), c’est le type même d’une initiative heureuse. Tours initie les choses et on prend conscience.

Concrètement à Tours, que devrait-on faire ? 
Ici, la recherche ne marche pas trop mal. Mais il ne faut surtout pas de réduction de crédits ! En Touraine et partout ailleurs, il y a le problème de petites structures avec un personnel hyper-spécialisé qui accueille les enfants la semaine – les adultes aussi ! – mais ça demande des moyens. Et plus que tout, il faut une prise de conscience, de connaissance. Les gens sont un peu trop timides face à l’autisme.

Mais vous qui êtes un pionner, trouvez-vous que la perception de l’autisme a changé ?
Oui, mais trop lentement. Les parents sont isolés. Tours a eu de la chance d’avoir Barthélémy, Bonnet-Brillault, l’Arapi. Mais l’alliance thérapeutique entre parents et médecins est capitale.

Propos recueillis par Aurélien Germain

En 2012, tmv interviewait Josette Cousin, directrice des Maisonnées, maisons d’accueil en Touraine pour adultes autistes. L’entretien est à retrouver ICI

Le pionnier Gilbert Lelord et son ancienne interne, Catherine Barthélémy, en 2012. (Photo Patrice Deschamps)
Le pionnier Gilbert Lelord et son ancienne interne, Catherine Barthélémy, en 2012. (Photo Patrice Deschamps)

Autisme : « Rien n'a changé… »

Mardi 2 avril, la Fédération Autisme Centre organise une journée de formation gratuite, ouverte à tous, au Vinci. À quelques jours de cette manifestation, tmv a voulu savoir si la perception de cette maladie avançait enfin.

En France, l'autisme touche un enfant sur 150. C'est une maladie complexe et multifactorielle, à forte composante génétique.
En France, l’autisme touche un enfant sur 150. C’est une maladie
complexe et multifactorielle, à forte composante génétique.

 
Mardi 2 avril, la Fédération Autisme Centre organise une journée de formation gratuite, ouverte à tous, au Vinci (lire cidessous). À quelques jours de cette manifestation, tmv a voulu savoir si la perception de cette maladie avançait enfin.
Entretien avec Josette Cousin, directrice des Maisonnées, maisons d’accueil en Touraine pour adultes autistes.
 
L’autisme était « Grande cause nationale 2012 ». Un an après, est-ce que les choses ont changé ?
Ça a bougé sur le plan médiatique, avec beaucoup d’émissions, certes. Mais sur les moyens supplémentaires, rien de neuf. Rien qu’en Indre-et-Loire, pourtant à la pointe côté recherche, un accueil de jour avec six places devait ouvrir. Le coût est faible, et pourtant, on nous a dit que cela ne se ferait pas avant janvier 2014. Six places, ce n’est pas beaucoup, mais cela aurait pu servir à six jeunes. On espère vraiment que ça se fera. Il faudrait des ouvertures tous les ans. Plus les personnes autistes sont prises en charge jeunes, moins les troubles seront importants plus tard.
 
Que faut-il faire alors ?
Il faut que l’État et le conseil général réagissent malgré les problèmes financiers. Il faut que les gens fassent des dons aux associations pour financer les aménagements, les locaux, etc. C’est impératif que l’on nous donne des moyens. Je suis allée à Stockholm, il y a cinq centres ressources autisme. Dans la région Centre, il n’y en a qu’un… L’État doit arrêter de multiplier les mille-feuilles administratifs. Il faut aussi que les médecins traitants fassent des diagnostics. C’est impératif. Un enfant sur 150 naît avec un trouble du développement lié à l’autisme !
 
Qu’espérez-vous de la journée du 2 avril ?
On veut faire parler de l’autisme, mais pas pour se donner bonne conscience. En Indre-et-Loire, il y a eu des progrès, mais les besoins sont importants. Il ne faut pas mollir, on sait où sont les personnes autistes. Et elles peuvent vivre jusqu’à 80 ans, comme nous. Cela a un coût. Alors, il ne faut pas tout arrêter.
 
Propos recueillis par Aurélien Germain
 


Journée au Vinci : le programme
 
« Autisme : itinéraires de vie », c’est le nom de la manifestation du 2 avril. La journée débutera à 9 h pour se terminer à 17 h 15, au centre des congrès Vinci. Le programme est chargé. Dès 9 h, la présentation du plan autisme par la ministre de la Santé (message vidéo) et le Pr. Barthélemy. À 9 h 45, un débat : où en est la recherche ? En fin de matinée, dès 10 h 30, placée à Autis’sports et des témoignages, notamment, de Stéfany Bonnot-Briey, autiste Asperger. Un repas sera organisé sur place et, à 14 h, les établissements de la Fédération Autisme Centre présenteront les activités d’adultes avec autisme. En fin de journée, une table ronde sera organisée. Une occasion unique, pour qui le veut, d’apprendre à porter un regard différent sur les autistes et leurs familles. Inscriptions et informations sur www.cra-centre.org

Reportage : des autistes chez eux

Nous avons passé la journée au Maisonnées, une structure qui accueille des adultes autistes. Ici, ce sont des résidents, ils ont leur chez-soi et leurs activités. Le but, c’est qu’ils vivent dans de bonnes conditions.

Nous avons passé la journée aux Maisonnées, une structure qui accueille des adultes autistes. Ici, ce sont des résidents, ils ont leur chez-soi et leurs activités. Le but, c’est qu’ils vivent dans de bonnes conditions.

 

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