Place au « Lol Project »

David Ken est en train de construire la plus grande galerie d’éclats de rire du monde. Il a également posé son studio itinérant à l’Ehpad de l’Hermitage.

 

Après avoir passé plusieurs années à photographier des mannequins pour les plus grands magazines, David Ken a décidé de revenir à l’essentiel et de nouer un peu plus de lien avec ses modèles.

En 2009, ce photographe a dit adieu au papier glacé pour démarrer un projet ambitieux mais brillant : le Lol project. Il s’est lancé dans un tour de France des hôpitaux et des Ehpad pour y photographier patients et soignants et leur redonner le sourire à travers ses clichés.

Résultat, David Ken est en train de construire la plus grande galerie d’éclats de rire du monde, pour le plus grand bonheur de ses modèles. En dix ans, il a rassemblé presque 19 000 photographies.

Un travail titanesque. Vendredi dernier, le photographe a installé son studio itinérant à l’Ehpad de l’Hermitage, à Tours. Une cinquantaine de résidents et de membres du personnel se sont succédé devant l’objectif.
Un moment d’échange entre l’artiste, les résidents, et le personnel de l’Ehpad.
De quoi redonner le sourire à tout ce petit monde, et pour de bon.

> www.lolproject.com

Manhattan Stories : tranches de vies à New York

Après avoir écumé les festivals de cinéma indépendant, Manhattan Stories arrive sur les écrans français. Un film choral prenant place dans les quartiers de Big Apple.

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Une journée à New York. Cinq histoires distinctes mais qui se chevauchent plus ou moins. Un film choral à la photographie automnale… Le second long-métrage de Dustin Guy Defa a tout pour plaire en festival. Archétype du ciné US indépendant, Manhattan Stories (Person to person, en VO) a effectivement écumé les Sundance et autres South by Southwest l’an dernier.
Débarquant seulement maintenant sur les écrans français, laissera-t-il chez nous un souvenir impérissable alors qu’il n’a pas franchement marqué les esprits outre-Atlantique ?

Sur le papier, Manhattan Stories organise donc sa narration autour de différentes histoires. Il y a par exemple ce fan de vinyles collectors, obsédé par un disque rare. Mais aussi Wendy, étudiante un peu paumée à la recherche de sa sexualité ou encore Claire, apprentie-journaliste accompagnant Phil, fait-diversier fana de metal…
Centré sur l’humain, les relations et la notion de recherche, Manhattan Stories déroule son récit (trop) doucement, avec un côté authentique rappelant le cinéma new yorkais de Woody Allen. Le film de Defa a cet aspect anodin et ordinaire, attachant mais interchangeable.

Magnifiée par sa photographie (tourné en 16 mm, le rendu est chaud et délicieusement vintage), cette chronique « urbaine » empile les histoires courtes comme un recueil de nouvelles, une mosaïque sympathique mais peu marquante. S’il a le mérite d’avoir réduit son oeuvre au minimum (à peine 1 h 30 au compteur), Manhattan Stories, bien trop anodin, a tout de même du mal à accrocher le spectateur.
L’expérience cinématographique est limitée, l’écriture est trop impersonnelle.

Loin d’être désagréable, mais pas assez enthousiasmant et mémorable pour marquer les esprits : vite vu, vite oublié.

> Comédie dramatique, de Dustin Guy Defa (USA). Durée : 1 h 25. Avec Michael Cera, Abbi Jacobson, Tavi Gevinson…
> NOTE : 2,5/5 

Gilles Martin, artiviste à la Une

Gilles Martin, photographe tourangeau est à l’origine du concept d’artivisme qui consiste à utiliser l’art à des fins militantes. Le mensuel Chasseur d’images de ce mois-ci salue par un dossier exceptionnel à la fois son travail de photographe et son engagement pour la cause animale.

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(Photo Gilles Martin)

Ses photos faisaient la Une de tmv en juin 2016. Gilles Martin, photographe animalier tourangeau et infatigable globe-trotteur nous présentait les images qu’il a faites des gorilles des montagnes au Rwanda, au Congo et en Ouganda pendant plus de dix ans. Mais pas seulement des images pour faire joli. Des images aussi et surtout pour alerter sur la situation de ces grands singes qui pourraient bien avoir disparu à l’état sauvage à l’horizon 2027. C’est à dire demain.

Le mensuel Chasseur d’images (plus gros tirage de la presse photo en Europe) a choisi, ce mois-ci, de consacrer un dossier de treize pages au photographe tourangeau et à son « artivisme » (conjugaison d’art et de militantisme). « Pour ceux qui sont engagés dans la défense des grandes causes, le seul moyen de lutter contre l’indifférence consiste à marquer les esprits avec des actions chocs pour sortir le public de sa torpeur », écrit le mensuel spécialisé.
Et le journal choisit de raconter dans le détail et photos à l’appui l’incroyable campagne de happening que Gilles a menée à l’été 2016, à New York, pour alerter sur la situation des gorilles. NEWS_GILLES MARTIN_Couverture

Une action qui tient à la fois du street art et de l’urbex, cette pratique qui consiste à réaliser des photos dans des lieux abandonnés pour leur redonner sens et vie. On y découvre comment le photographe choisit les endroits de la ville, les coins de rue ou les ponts où il montrera sa photo. Comment il prépare son action en trouvant le bon support, un emballage de téléviseur, un vieux cadre, en le préparant et en le mettant parfaitement au format adapté à sa cible. Puis vient le moment de la pose, du happening.
Ensuite, Gilles se remet dans la peau du photographe et immortalise l’ensemble, avec les mouvements et les lumières de la ville.

Là, un pitbull sous un porche qui semble veiller sur la dépouille d’un gorille, ici un skater qui s’échappe du cadre comme une ombre filante. Le magazine publie même sur une double page, l’image d’un coffre de banque qui semble tout droit sorti d’une grosse production hollywoodienne de l’intérieur duquel un bébé gorille nous contemple avec son regard inquiet. « J’ai vu ce coffre dans une banque abandonnée en pleine ville, raconte Gilles. Et le trésor, bien sûr, c’est le singe… ». Tout est dit.

> Le numéro 402 de Chasseur d’images est disponible en kiosques jusqu’au 10 avril, 5,90 €.

Ouvrage : Lumière sur ma métropole

Les étudiants de l’école Esten Sup’édition et deux photographes professionnels signent Lumière sur ma métropole, un bel ouvrage qui fait découvrir Tours et son agglomération de nuit, avec light-painting et éclairage urbain au menu. Passez du côté obscur dès le 14 décembre !

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Photo de Romain Gibier et Antony Gomes, extraite de l’ouvrage Lumière sur ma métropole.

Faire voyager le lecteur en (re)découvrant la métropole, de nuit et avec originalité : c’est la promesse de Lumière sur ma métropole, un ouvrage de photographies pour voir Tours et son agglomération différemment, axant son regard sur 22 communes, leurs éclairages publics et des lieux passés à la moulinette du light-painting (« peinture à la lumière »).

Cette technique, où l’on déplace une source de lumière en bougeant l’appareil photo dans un environnement sombre, utilise un temps d’exposition long. En résulte une photo qui révèle des traces lumineuses colorées.

À l’origine de l’idée, il y a deux photographes, le Tourangeau Romain Gibier et Antony Gomes, de Paris. « Ils souhaitaient mettre en valeur des lieux avec le light-painting. Ils ont pris contact avec notre école, l’Esten, et le directeur Emmanuel Roc a été emballé par l’idée ! Et a donc confié le projet à notre classe pour une collaboration », retrace Maëva Hughes, l’une des 17 étudiant(e)s à l’oeuvre sur ce livre. « Maquettes, relectures, édition… Nous avons touché à tout », résume Marine Louward, une autre élève.
Sans oublier bien sûr leurs fameux « raids photos » nocturnes, après les cours, pour immortaliser l’éclairage urbain sous toutes les coutures.

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Photo de Romain Gibier et Antony Gomes, extraite de l’ouvrage Lumière sur ma métropole.

Au final, la sélection est aussi diverse que variée. « C’est le patrimoine au sens large du terme », synthétisent Maëva et Marine. Passant des entreprises comme Michelin et SKF, aux anciennes Halles de Luynes, ou encore des jardins du château de Villandry et du lavoir de Ballan-Miré aux ruelles de Chambray et de Mettray…
« À Tours, on a photographié le Musée des Beaux-Arts, la Villa Rabelais, l’hôtel du Grand Commandement, l’hôtel L’Univers, mais aussi à l’intérieur du cinéma CGR et de la Nouvelle République et bien d’autres… », précise Maëva. Chacune des 176 pages est accompagnée d’un petit texte explicatif ou d’une anecdote. « Cela a été un gros travail. Éprouvant, mais enrichissant », soufflent les deux étudiantes.

Car la réalisation du livre n’a évidemment pas été sans difficultés. « Au départ, nous avons essuyé des refus, car les autorisations étaient difficiles à obtenir ! » Délicat, en effet, d’éteindre toutes les lumières en gare de Tours, par exemple ! La création en elle-même a également pris du temps. Effets de light-painting, sélection des multiples clichés, travail minutieux sur les couleurs et sur logiciels, sans oublier de penser à un résultat final qui se devait de comporter « la même ambiance et une certaine harmonie ». Ces dizaines et dizaines de photographies se retrouveront dès le 14 décembre, date de parution de Lumière sur ma métropole. L’occasion de voir Tours et ses environs de nuit… sous un nouveau jour.

> Lumière sur ma métropole (éditions Incunables 2.0)/ 15 € / 176 pages. Disponible à la Boîte à livre et à l’Office de tourisme de Tours.
> Page Facebook

Gilles Martin : photographe et couteau suisse

Bricoleur et rêveur, le reporter-photographe animalier Gilles Martin, a installé son atelier à Tours, au dernier étage d’un immeuble qui surplombe la ville.

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(Photo Gilles Martin)

Sorte de tour d’ivoire, nid de verre où il entrepose avec soin ses photographies et ses objets fétiches comme un scialytique – éclairage d’hôpital – des années 1960, une table de travail réalisée par ses soins ou encore une bibliothèque remplie d’ouvrages sur la biodiversité. L’univers de Gilles Martin en dit long sur sa personnalité : dynamique, artistique, raffinée. Tout commence lorsque, enfant, il pose un regard curieux sur les animaux sauvages. Dans la cour de son école, il reconstitue des zoos avec des figurines d’animaux.
Quand ses parents font l’achat d’un téléviseur en noir et blanc, il dévore les films animaliers de Frédéric Rossif, les aventures de Christian Zuber et les documentaires du Commandant Cousteau. À onze ans, il décide que, lui aussi, deviendra cinéaste animalier. Adolescent, il emprunte les jumelles de sa grand-mère pour observer les oiseaux. Ses premières armes, il les fait dans la forêt de Villandry : « Avec mes amis, on se levait à 4 h du matin pour aller prendre des clichés de chevreuils. » sourit-il. Depuis Gilles Martin a exploré bien d’autres lieux du monde pour photographier la faune, muni de grands-angles et de téléobjectifs.

En 1992, alors qu’il effectue son métier de prothésiste dentaire, ses images sont repérées par l’agence Gamma. Un élément déclencheur pour Gilles Martin qui décide à 32 ans de se consacrer entièrement à sa passion. Il se souvient : « Je ne m’y attendais absolument pas, c’est un rêve qui se réalisait. » Il a depuis coloré les pages de magazines tels que National Geographic, GEO, Life ou encore Terre Sauvage. Il a également publié de nombreux livres aux éditions de La Martinière. Sans cesse en train de se réinventer, Gilles Martin souhaite « sortir la photographie animalière de son cadre habituel pour lui donner une dimension militante. »

Travailler comme un orfèvre

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(Photo Gilles Martin)

Féru de macrophotographie, il focalise parfois l’objectif de son appareil sur des détails du corps, de la peau, des ailes ou des yeux. En témoigne un grand tableau exposé dans son appartement. De l’art abstrait ? « Non, la photographie d’une roche prise au microscope », s’amuse Gilles Martin. La macrophoto c’est « un travail d’orfèvre ». Sur son écran d’ordinateur, il montre la photographie en gros plan d’une araignée saltique à l’affût et commente, enthousiaste : « ses yeux sont comme des bijoux. » Difficile pour lui de choisir, mais sur le podium de ses animaux favoris figurent : la libellule, la baleine à bosse et le gorille des montagnes.

Sur l’un des murs de son bureau s’étend une immense carte du monde magnétique qui situe chaque espèce. « Je suis allé un peu partout, dans 90 pays au total », confirme le reporter. Prochaine destination ? Pour l’adepte de la cryptozoologie – la science des animaux disparus ou mythiques – ce serait de monter dans la DeLorean du Doc (Retour vers le Futur) pour aller photographier les dinosaures du crétacé. Véritable « couteau suisse », comme il aime à se comparer, Gilles Martin multiplie aujourd’hui les projets : « Je veux réaliser tous mes rêves pour ne rien regretter. » Organisation de stages photographiques, de voyages, d’expositions, Gilles Martin a également lancé cette année trois sites.
Un site éponyme au nom du photographe qui présente son travail et ses projets ; L’Arche photographique pour sensibiliser le grand public à la dégradation de la biodiversité ; et Biospher pictures, une collection de plus de 25 000 photos et vidéos destinées aux professionnels de l’image. Dernier projet en cours : la mise en place d’un atelier/galerie, le Top Floor Studio destiné à exposer ses tirages photographiques, sculptures, collages et installations artistiques auprès de collectionneurs privés, galeristes et musées.

> gilles-martin.com, arche-photographique.org, biospher-pictures.com

2027 : Gare aux gorilles !

Cent trente croix où figure sur chacune la photographie d’un gorille des montagnes, espèce en danger. Avec cette installation créée en 2013 qui reconstitue un cimetière américain, le photographe tourangeau Gilles Martin oriente son travail vers l’artivisme : utiliser l’art pour faire passer des messages. Son happening « 2027 : Mémoires d’un dos argenté » projette le public dans un scénario où il n’y aurait plus de gorille des montagnes.
Objectif : alerter sur un possible futur et « cogner ». Gilles Martin constate : « Explorer cette nouvelle dimension de la photographie m’a permis d’avoir des discussions que je n’avais jamais eues avec mes précédentes expositions. Les personnes qui assistent à l’happening sont très touchées et prêtes à agir pour changer les choses. » Cet été, le photographe se rendra à New York puis à Berlin pour faire des collages. Le street-art est une nouvelle occasion pour lui de mettre sa créativité au service de ses idées. Il confie d’ailleurs : « Aujourd’hui, je me sens plus artiviste que photographe. »

>> Retrouvez l’intégralité du portfolio dans le dernier numéro de tmv (n°216)

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(Photo Gilles Martin)

Expo photo : le droit d’être

Traiter de l’inégalité hommes/femmes, du point de vue… des hommes. C’est le pari d’une jeune photographe tourangelle. Car, les hommes ont aussi le droit d’être sensibles.

Justine Murzeau (Photo tmv)
Justine Murzeau (Photo tmv)

Début janvier, elle nous avait envoyé une photo de la marche Charlie, à Tours. Un très beau cliché, aux tons sépia, plein d’émotion. Elle, c’est Justine Murzeau, 21 ans, jeune photographe tourangelle. Petite blonde aux yeux bleus rieurs qui piquait l’appareil photo de son père à 16 ans. Passion transmise par son grand-père. Le sien, d’appareil, est d’ailleurs toujours à portée de main. Avec, elle veut « embellir » le quotidien et ce qu’elle voit. Elle a des idées plein la tête.
Sa dernière trouvaille ? Un travail qui va à contre-courant et doit faire réfléchir : « La réflexion m’est venue pendant un cours sur les droits des femmes, en socio », raconte celle qu’on connaît aussi sous le pseudo Jaïne, dans la photographie. « Je me suis fait la remarque : on ne parle pas du droit des hommes. Pourquoi pas eux ? Par ce biais, j’ai réfléchi à la condition des hommes dans notre société. »

Son discours est limpide, réfléchi. Elle est attablée au Kaa, le bar où elle expose ses œuvres. Regarde par la fenêtre : « Avant, les femmes n’avaient pas le droit de porter de pantalon. Maintenant, si. Mais ce n’est pas pour autant qu’un homme a le “ droit ” de porter une jupe, par exemple. On octroie les droits des uns en oubliant ceux des autres », sourit-elle.
Tour à tour, elle prend l’exemple du droit de garde chez ces messieurs. Ou bien les cheveux longs (un de ses modèles les a d’ailleurs jusqu’au nombril !), le maquillage, la sensibilité, l’émotivité… « On dit toujours aux garçons : ne pleure pas, c’est pour les fillettes. Sauf que les hommes peuvent être aussi émotifs que les femmes… », remarque, à juste titre, Justine.

C’est ce qu’elle démontre habilement dans son expo photo intitulée On ne naît pas homme, on le devient. Une série de quatorze images, où chacun porte un masque en dentelle noire. Des inconnus, des amis, des passants, peu importent la classe sociale, le physique ou l’âge. Un leitmotiv ? « Chacun est libre. Dès qu’un homme prend soin de lui par exemple, on dit que c’est une “ tarlouze ”. C’est choquant. Honteux. » Un seul but : faire réfléchir. Car ici, pas question de sexisme inversé. Pas de favoritisme. Surtout pas ! « C’est juste de l’égalité. »

EN BREF
L’EXPO

Photo Jaïne Photography
Photo Jaïne Photography

« On ne naît pas homme, on le devient », l’exposition, sera visible au Kaa, tout le mois d’avril. Le bar se situe au 18, rue de la Paix (place des Joulins). SA PAGE FACEBOOK PAR ICI

QUESTIONS BONUS
Parce qu’on n’avait pas fini notre bière lors de l’interview, on a rajouté quelques questions existentielles (ou pas) pour Justine Murzeau.

> Si tu pouvais passer la soirée avec un cinéaste ou un acteur ? « Mmh… Johnny Depp, très bon acteur ! C’est un super guitariste, en plus. Il a joué avec Marilyn Manson. Et j’aime beaucoup de ses films, notamment Edward aux mains d’argent. Bon, et puis aussi parce qu’il est beau gosse ! (rires) »

> Si tu pouvais passer la journée avec un artiste ? « Je ne suis pas forcément admiratrice de gens célèbres. Donc je dirais mon grand-père. »

> Argentique ou numérique ? « Numérique ! Même si l’argentique a son charme, le numérique c’est l’avenir. Les possibilités sont infinies. Je vis avec mon temps ! »

> Des photographes que tu admires ? « À part Doisneau, car c’est une référence… Je suis davantage admirative des talents qui peuvent m’entourer. »

> Ton avis sur la scène artistique et culturelle à Tours ? « On a énormément de talents. Mais c’est dommage, car on ne les voit pas assez. Beaucoup sont prometteurs, ils méritent un gros coup de projecteur. »

Expo au château de Tours : une Maier vue

L’expo sur le travail de Vivian Maier, organisée par le Jeu de Paume, vue par Gaëlle Benoit-Caslot photographe tourangelle. Street photo Vintage.

Extrait de l'expo Vivian Maier au Château de Tours
Extrait de l’expo Vivian Maier au Château de Tours

Elle ne manque aucun détail et prend un sacré plaisir à déambuler dans les salles du Château de Tours. Normal, Gaëlle Benoit-Caslot apprécie la photographie de rue, comme celle de Diane Arbus ou, ici de Vivian Maier. Sur l’exposition de cette dernière, elle la définit en trois mots.
« Contraste ». Avant tout, les photos de l’Américaine sont une affaire de contraste, de contraire. D’abord, dans certains looks. « On a un portrait d’une fille par exemple. Elle est sale, et en même temps porte une grosse montre », décrit Gaëlle. Vivian Maier aime jouer avec les lignes de fuite, les perspectives, les tailles. Comme avec un garçon à côté d’une boîte en carton plus grande que lui. « Elle travaille sur les profondeurs de champ, la démesure » sur certains clichés. Idem sur des extraits de films tournés avec une Super-8, où un homme tire une charrette en pleine ville.
« Humain ». Le style de photographie de Maier implique forcément un bon nombre de visages. Au cours de la visite, des gamins, des sans-domicile fixe, des personnes âgées, riches ou moins riches se succèdent sur les murs. « Elle capte des expressions naturelles, des moments de vie qui se lisent sur les visages. Le noir et blanc leur apporte plus d’intensité ». Une salle où sont exposés des portraits en grand format en est le reflet. « Elle montre aussi qu’il n’y a pas besoin d’être à la mode, ou d’avoir une plastique formatée pour être beau », analyse Gaëlle. Elle justifie la qualité et diversité des oeuvres par un atout : « Elle était libre et n’était pas contrainte par une commande et ne se focalisait pas sur une typologie de personne ». L’humain, chez Vivian Maier, c’est aussi des clichés de précaires, comme les sans-abri. « Il faut avoir de l’empathie pour réaliser ce genre de photos. »
« Instant T ». Gaëlle note que le travail est « spontané, frais », grâce à des photos prises dans l’instantané. Elle aime l’ancrage au sein d’une époque, les années 50. « Elle montre le quotidien. On aime ce retour en arrière. La photo avec tous les hommes lisant le journal dans le train et un chapeau sur la tête, on ne voit plus cela aujourd’hui », explique Gaëlle. La photographe conclut en louant le travail de scénographie de l’exposition, permettant de saisir l’essence des clichés de Maier.
+ Notre Guide : Gaëlle Benoit-Caslot, 40 ans, s’est installée à Tours, à son compte, après avoir passé plusieurs années à Paris au sein d’une agence. Elle est intéressée par les photos sur les personnes en situation de précarité. son site : gaellebcphotographe.fr
++ L’expo : Jusqu’au 1er juin 2014 au Château de Tours. Horaires : du mardi au vendredi, de 14 h à 18 h. Samedi et dimanche, de 14 h 15 à 18 h. Entrée libre. Plus d’infos par ici.
 

Quelques clichés de Nahim Houée

Nahim Houée, jeune photographe tourangeau, et auteur des photos sur les sans-abris du tmv n°32 nous délivre quelques clichés supplémentaires. Paysage, architecture, concert, portrait, détails…

Pour découvrir l’ensemble des clichés de Nahim Houée, cliquez sur la première afin de faire défiler la série de clichés. Appréciez.

Place Plumereau, à Tours, zoom sur une main en dit beaucoup sur l'homme. (Photo Nahim Houée)
Un couple se promenant sur l'avenue Grammont, à Tours, séparé par un panneau "des deux cotés"... (Photo Nahim Houée)
Le chanteur Patrice lors du festival Terres du son 2011 au Château de Candé (Monts). (Photo Nahim Houée)
Le chanteur Patrice lors du festival Terres du son 2011 au Château de Candé (Monts). (Photo Nahim Houée)
Vue sur le Pont Wilson de Tours. (Photo Nahim Houée)
Une autre vue sur le pont Wilson de Tours, et jeu de lignes. (Photo Nahim Houée)
Rue de la Monnaie, à Tours, illustration du lien fort entre l'homme et son chien, notamment dans la rue. (Photo Nahim Houée)
Le pont suspendu de Saint-Symphorien, à Tours, et sa couleur bleue si caractéristique, vus de nuit. (Photo Nahim Houée)
Contre-plongée sur la rue Nationale, à Tours. (Photo Nahim Houée)

Nahim Houée, chasseur de clichés 

Nahim Houée, chasseur de clichés

Nahim Houée, jeune photographe tourangeau, est l’auteur des photos sur les gens de la rue publiées dans notre tmv n°32. Rencontre avec un photographe modeste en devenir.

(Photo Nahim Houée)

 

Nahim Houée a posé ses valises à Tours en mars dernier (comme tmv, tiens !). Depuis, il se sent tel un touriste en soif de connaissance de cette nouvelle terre d’accueil : il erre dans les rues de la ville, son appareil photo sous le bras, accumulant les images et refusant tous les clichés.

Nahim n’a eu qu’un appareil-photo dans sa vie, qu’il a toujours sur lui d’ailleurs. Résultat : 4 000 photos en neuf mois. « J’ai toujours eu envie d’exprimer mon côté artistique. Mais je n’avais jamais osé, ni trouvé le bon moyen à Roissy-en-Brie (sa ville d’origine, ndlr). Venir à Tours m’a permis de m’ouvrir l’esprit et de m’intéresser davantage à la culture. J’ai ainsi appris à me mettre moins de barrières, à tenter le coup. » Bref, le jeune homme a pris confiance en lui et tente de se faire connaître. L’important dans ses photos : « il faut qu’elles suscitent quelque chose » que ce soit drôle, plus sérieux, voir chargé d’émotion. Le jeune photographe évite un maximum la mise en scène sauf lorsqu’il ébauche un portrait.

La photograghie : un acte social

Les portraits sont d’ailleurs l’une des spécialités de ce grand gaillard et notamment ceux de gens de la rue. « Ce sont les premières personnes que j’ai rencontrées à Tours en errant dans les rues. » Pour établir le contact, Nahim Houée s’est fié à son instinct : un regard, un bonjour, une pause cigarette partagée et quelques paroles échangées. « Les gens ne prennent pas la peine de s’arrêter. Pour eux, les SDF font partie du mobilier. Je voulais montrer la personne, des regards forts. » Son cliché fétiche, c’est celui que l’on aperçoit derrière lui sur la photo et qui fait aujourd’hui la Une de tmv. « C’est l’une des premières que j’ai faites à Tours. Lorsque je la regarde je me focalise sur ses yeux. Il y a quelque chose dans ses yeux. Elle me prend. » Au cours de son travail auprès des gens de la rue, le jeune homme a essuyé quelques refus mais qu’importe, ses quelques clichés lui ont permis « de contribuer à quelque chose à son échelle ».

Une contribution sociale dont il souhaite faire son métier : il est actuellement en préparation des concours d’éducateur spécialisé. Nahim Houée rêverait de vivre de la photographie mais il garde les pieds sur terre. « Ce serait génial de faire une expo voire de vivre artistiquement, mais je sais que c’est dur alors je laisse faire le temps. »

Quelques clichés de Nahim Houée