Cancer du sein : « Il faut parler prévention ! »

Christine Gaumain-Massé, de l’association Au Sein des femmes, fait partie de l’organisation de l’Échappée rose. Elle revient sur l’aventure qui les attend, la maladie mais aussi sur l’importance de la prévention.

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Selon vous, l’Échappée rose n’est pas qu’un défi physique. Qu’est-ce que c’est alors ?
C’est un bienfait. Une fois qu’on est toutes ensemble, on pédale et on a la patate ! Ça défatigue. C’est une expérience, déjà, pendant laquelle on dit: « laissez-vous vivre, cette semaine est pour vous. Profitez ! » Cela déconnecte du travail, de la famille, on va manger bio et végétarien, etc. Mais on va aussi apprendre à gérer le stress. Pendant tout le trajet, c’est aussi se dire « On est entre nous et je pense à moi ». Enfin, elles vont transmettre le message autour d’elles. Il faut parler prévention.

C’est effectivement un thème très important pour vous, non ?
Oui, il faut en discuter. Ce n’est pas possible de ne pas parler prévention quand on a 20 ans. Ce n’est pas une fatalité. En cinquante ans, on a bousillé notre vie entre les médicaments, les plats préparés, les portables, les hormones, etc. N’oublions pas non plus la contraception : avec le cancer, une fois passée par la case chimio, vous êtes ménopausée de suite. Même si vous avez 20-25 ans ! La pilule, c’est tout de même quelque chose de fou : on la donne parfois dès 10 ans pour l’acné ! Et on la garde jusqu’à 40 ans. C’est beaucoup trop.

Vous êtes en colère contre le monde médical ?
Pas contre le monde médical, mais contre les labos. Je peux en vouloir aussi à certains docteurs qui ne s’ouvrent pas aux médecines alternatives ou ferment le débat dès qu’il faut parler des récidives du cancer.

L’Échappée rose s’inscrit dans le cadre d’Octobre rose. Mais vous cherchiez à vous démarquer un peu avec votre projet ?
Nous sommes associées à Octobre rose, mais notre discours diffère un peu. Je le dis : il y a d’autres moyens de dépistage que la mammographie qui écrase le sein et abîme des cellules. Le dépistage, c’est très bien, évidemment. Mais il ne faut pas oublier la palpation. Le faire même soi-même, toute seule, c’est hyper important ! En France, on fait de la chimiothérapie, des radiothérapies, de l’hormono-thérapie et hop ! Ça détruit, quand même. Vous savez, dans d’autres pays, il est possible d’effectuer un test sanguin au préalable pour savoir si la chimio est réellement nécessaire…

Une partie de l'équipe (Photo Facebook Au Sein des femmes)
Une partie de l’équipe (Photo Facebook Au Sein des femmes)

Revenons-en à l’Échappée rose. Comment s’est déroulé l’entraînement ?
Je précise d’abord que l’idée ne vient pas de moi, mais d’un groupe de filles à Chambéry (l’initiative « À la mer, à vélo », NDLR). Je les ai rencontrées, nos regards se sont croisés et là, je me suis dit : et si on faisait ça à Tours ? Elles m’ont beaucoup aidée. Mais là, on le fait à notre sauce. Je voyais autre chose que le simple défi sportif. L’idée était de quand même retrouver la santé. Avec le cancer, l’activité sportive est indispensable. Bref, on s’entraîne depuis le mois de mars sur nos vélos ! Nous sommes parties de rien du tout et sommes aidées par des coachs qui nous accompagnent tout du long.

Quel âge ont les 20 participantes ?
Elles ont entre 39 et 66 ans. On a ouvert aux cancers féminins, celui du sein est majoritaire dans le groupe. Mais il n’y a pas que ça.

Vous avez lancé à l’époque une campagne de financement participatif sur Ulule pour aider au projet. Une réussite, puisque vous avez récolté 3 536 € sur les 3 000 espérés.
C’était super ! C’est bien d’utiliser ces moyens modernes, car ceux qui veulent donner donnent et on fait connaître le projet. Il y a eu deux retombées : déjà, Ulule a été top, puisqu’ils nous ont épaulées et ont été très gentils. Ensuite, la plateforme a présenté notre projet à la Maif et un partenariat s’est noué. Pour 1 € donné par les internautes, la Maif donnait 1 €.

On se sent comment à quelques jours du départ ? (interview réalisée le 19 septembre – NDLR)
Je me dis que je n’ai plus que quelques jours pour tout fignoler ! (rires) Mais physiquement, je me sens prête, je n’ai pas peur du tout. Je suis contente qu’on se soit entraînées toutes ensemble et je suis curieuse de rencontrer tous les gens qu’on ne connaît pas encore sur le chemin. Je pense par exemple à Jean-Paul le Père Noël comme je le surnomme… C’est quelqu’un qui a aidé à trouver un hébergement à Saint-Brévin, alors qu’on n’avait rien. Il y a eu une solidarité folle sur ce projet.

> Pour suivre l’aventure et les encourager : facebook.com/auseindesfemmestours

Propos recueillis par Aurélien Germain

VIH : la prévention autrement avec PlaySafe

Retenez ce nom : PlaySafe. C’est celui d’un projet étudiant qui veut sensibiliser les étudiants au VIH par le buzz et la surprise !

playsafe

Léa, Bastien, Tom, Clara. Quatre étudiants de l’IUT de Tours. Des idées plein la tête et un nom à retenir : PlaySafe. C’est leur projet, leur bébé. Qu’ils chouchoutent, puisque PlaySafe veut sensibiliser les étudiant( e)s tourangeaux sur le virus du sida.
Leur credo ? Prévenir autrement. Oubliez les discours un chouïa moralisateurs ou complètement anxiogènes. Les quatre amis vont plutôt organiser « trois opérations “buzz” qui ne laisseront pas indifférents » qui auront lieu aux facs des Tanneurs et des 2-Lions, mais aussi à l’IUT de Tours-Nord. Des actions de prévention originales qui restent pour l’instant assez secrètes (et nous, on adore ça, curieux qu’on est !).

Pour parfaire le tout, ils organiseront aussi un concert étudiant le 17 mars au Temps Machine, au profit de l’association AIDES. Au menu ? Last Train, We are match et Thylacine. Bref, prévention et gros son.

 > Vous pouvez les aider grâce au financement participatif. Faites péter leurs compteurs sur fr.ulule.com/playsafe

Paul Brunault : « prévenir l’addiction »

Paul Brunault est psychiatre et addictologue à l’hôpital Bretonneau. Il répond à nos questions sur la digital detox et les accros au numérique.

Pascal Brunault, addictologue à Bretonneau
Paul Brunault, addictologue à Bretonneau

L’addiction au numérique : qu’est-ce que c’est ?
Il existe deux types d’addiction : avec ou sans drogue. Il s’agit donc de la seconde. Ce qui est particulier dans ce type d’addiction, c’est que la personne n’est pas dépendante au digital en tant que tel mais plutôt à l’expérience agréable permise par les outils numériques. Internet est un média plus qu’un objet d’addiction. Par exemple, une personne dépendante des jeux en ligne va utiliser massivement Internet.

Comment identifier une addiction ?
Premièrement, il existe le critère dit de perte de contrôle. Lorsqu’on envisage de rester une heure sur l’ordinateur et que finalement on y reste cinq heures sans pouvoir s’en empêcher, c’est une envie irrépressible. Ensuite, la dépendance physique se traduit par un état anxieux, stressé ou irritable et par une augmentation progressive des doses pour avoir le même effet. Au départ, j’ai besoin de trente minutes par jour sur Facebook, puis pour me procurer le même plaisir, j’y reste une heure, puis deux…
Une addiction entraîne aussi des conséquences personnelles et sociales, lorsque l’activité emmène la personne à s’isoler. Un autre critère est celui de l’utilisation à risque. Il est moins appliqué dans les addictions sans drogue, mais il existe. Notamment au volant, lorsqu’une personne ressent le besoin de consulter son téléphone et qu’il y a donc un risque d’accident. Finalement, la question du temps passé devant un écran ne suffit pas pour diagnostiquer une addiction. Quelqu’un peut y passer beaucoup de temps sans que cela n’entraîne de dommages. L’addiction est présente lorsqu’une personne voudrait s’arrêter mais qu’elle n’y parvient plus.

Que pensez-vous des digital detox ?
Ce qui est intéressant dans la digital detox, c’est de rompre avec ses pratiques et prendre du recul sur celles-ci. Ça peut aider une personne à prendre conscience de son degré d’usage et de son besoin à utiliser les outils numériques. En revanche, après une cure, une dimension importante à prendre en compte est le retour dans le monde réel.

Quelles sont les conséquences des innovations numériques ?
Plus un objet est proche, plus il y a risque d’addiction. Prenons l’exemple du portable, effectivement il y avait moins de risque d’addiction avec le téléphone fixe ! Désormais, on peut emmener notre téléphone partout avec nous. La société rend ce type d’addiction particulier, car les nouvelles technologies sont omniprésentes, utiles et désormais indispensables. Finalement, on entre dans une normalité en utilisant les appareils numériques. L’enjeu n’est pas de s’en passer totalement mais de développer la prévention à l’addiction.