Léa Lecomte : 100 % pur foot

Membre du club de Tours FC association, en tant que joueuse de l’équipe féminine de Régionale 1, Léa Lecomte est également animatrice et encadre les jeunes pousses jusqu’à 15 ans.

Léa Lecomte, 25 ans, est une vraie meneuse. Normal quand on a grandi dans une famille où le papa, Xavier, footballeur et entraîneur, a écumé tous les terrains de la région.

Membre du club de Tours FC association, en tant que joueuse de l’équipe féminine de Régionale 1, elle est également animatrice et encadre les jeunes pousses jusqu’à 15 ans.

Au rendez-vous de la rentrée des équipes féminines, la semaine dernière à la vallée du Cher, elle espérait que son club allait profiter de l’engouement né de la dernière Coupe du monde.
« Nous comptions plus de 120 licenciées la saison dernière. Alors oui, on attend encore plus après cette Coupe du monde très médiatisée mais s’il y avait beaucoup de filles devant la télé, cela ne veut pas dire qu’elles vont toutes se transformer en joueuses. »

Le club a pourtant, un nouvel atout dans sa manche : le 10 décembre dernier, il a reçu le label école de foot féminine, niveau Or qui vient récompenser le travail des équipes autour du projet sportif, associatif, éducatif et du projet d’encadrement et de formation. Vital.


Thierry Mathiot

Artiste, un parcours de combattante

La prise de conscience des inégalités hommes-femmes semble amorcée. Pourtant, dans les milieux artistiques, le chemin reste semé d’embûches pour les femmes.

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« J’aurais voulu être un artiste », chantait Claude Dubois dans Starmania, en 1979. Quarante ans plus tard, ce rêve, beaucoup d’hommes et de femmes souhaitent encore l’atteindre.

Selon différentes études, ce chanteur aurait même eu plus de chance à notre époque puisque le nombre d’artistes déclarés aurait triplé, voire quadruplé, depuis la sortie de la célèbre comédie musicale. Mais cela reste une sphère très compétitive, qui implique bien souvent un mode de vie précaire, instable et une carrière qui peut s’arrêter du jour au lendemain.
« Et les femmes, qui sont peu nombreuses à entrer, quittent encore plus ce milieu au bout de dix ans parce qu’elles n’arrivent pas à trouver leur place dans un univers qui leur est encore plus hostile que pour les hommes », précise ainsi Marie Buscatto, professeure des universités en sociologie à l’Université Paris 1.

Si vivre de sa passion est une ambition pour certains, cela relève de l’utopie pour certaines. Depuis ses premières études sur l’univers du jazz en 2007, qu’elle vient de rééditer (1), la sociologue a constaté que « rien ou presque n’a changé. Dans le jazz, moins de 10 % des musiciens sont des femmes, dont 4 % de femmes instrumentistes.

Et sur l’ensemble des chanteurs de jazz, 65 à 70 % des femmes sont chanteuses. Aujourd’hui, on est sur le même type de réalité qu’il y a dix ans, en jazz comme dans toutes les pratiques musicales : des concerts masculins ou très majoritairement masculins et des femmes, quand elles sont présentes, parfois batteur, parfois contrebassiste ou trompettiste, très souvent chanteuses », analyse-t-elle à l’autre bout du fil.

DES STÉRÉOTYPES QUI ONT LA VIE DURE

Pour Sylvain Dépée, directeur du pôle chanson de la région Centre-Val de Loire, les Bains-Douches à Lignières (Cher), les chanteuses sont plus présentes dans la chanson française et percent plus difficilement dans le monde de la pop, du rock ou encore du rap. Derrière l’image « moderne » de ces courants musicaux se cachent alors les plus anciens mécanismes machistes.
Chaque art et chaque esthétique ayant ses propres particularités (modes de formations, recrutements, création du réseau social…), la place des femmes diffère dans chaque milieu.

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Bon, bien sûr, il y a toujours l’exception qui confirme la règle et la palme revient… à la musique classique ! Eh oui, elle est « la seule musique qui s’est vue féminisée au niveau professionnel de manière plus importante depuis 30 à 40 ans et notamment la musique d’orchestre, par les instruments à cordes », décrit Marie Buscatto. Toutefois, ces artistes peinent à percer dans les positions hiérarchiques les plus élevées.
On comptait en 2016, dans le monde, seulement 21 femmes cheffes d’orchestre à renommée internationale pour 586 hommes. En France, on les recense sur les doigts d’une seule main.

DES CONCOURS À L’AVEUGLE

Et si l’émission The Voice, avec ses sélections à l’aveugle, détenait une partie de la solution ? En effet, ce qui a notamment permis à la musique classique de tendre vers l’équilibre, au niveau du pupitre, « ce sont les cursus en conservatoire, dans lesquels il y a une majorité de femmes depuis de longues années, notamment en piano, alto, violon, flûte… et des concours avec des auditions à l’aveugle, qui permettent de recruter des candidats sans connaître leur sexe », précise la sociologue.

Marie Buscatto, sociologue.
Marie Buscatto, sociologue.

Selon l’étude statistique des économistes Goldin et Rouse, qui a été faite aux États-Unis en 2000, quand six des plus grands orchestres du pays ont décidé de mettre en place des auditions à l’aveugle, il y a eu plus de 30 % de femmes recrutées dans ces orchestres après ce changement.
En France, ces auditions « paravents » ne sont pas systématiques et leur impact n’a donc pas pu être étudié. Une formation et des auditions plus « objectives » qui ont bénéficié par exemple aux Violons d’Aliénor, un groupe de cordes jouant un répertoire du XVIIe au XIXe siècle, composé de quatre étudiantes en section musiques anciennes (qui compte 6 hommes et 6 femmes) au pôle Aliénor à Poitiers, centre d’études supérieures de musiques et danses.

« On n’a pas ressenti de frein parce qu’on était des femmes. Aujourd’hui on n’y pense pas, on fonce, on va au contact des lieux de diffusion », constatent-elles.

Mais le son de cloche n’est pas le même selon les instruments et selon les stéréotypes de genre auxquels ils renvoient. Au sein du même pôle, dont une partie de l’enseignement se situe à Tours, seulement 2 femmes étudient les cuivres (trompette et cor) sur une classe de 10 et aucun des 5 élèves de percussions n’est une femme. Julie Varlet, trompettiste de 23 ans, a ainsi commencé son instrument à Dax (Landes), pays des bandas, à l’âge de 7 ans.
« J’ai toujours été la seule fille ou presque, mais ça ne me dérangeait pas, par contre, j’ai eu plus des problèmes avec des professeurs “ de la vieille école ” qui me faisaient des réflexions sexistes. Par exemple, ils disaient que je jouais “ trop féminin ”, pas assez fort », se souvient-elle.

À Tours, son professeur aborde plutôt la question du genre par l’anatomie et lui a conseillé de faire du sport et des exercices de respiration pour améliorer sa capacité pulmonaire. Ainsi, pour que les femmes passent de muses à peintres reconnues, comme le souhaite l’association Aware (Archives of women artists, research and exhibitions) qui tend à replacer les artistes femmes du XXe siècle dans l’histoire de l’art, et pour qu’elles puissent à leur tour vivre de leurs créations, il faut changer les mécanismes sociaux. En développant la formation et la parité parmi les recruteurs, en changeant les stéréotypes négatifs (manque d’autorité ou de force, d’efficacité, objet de désir…) et en donnant plus de place aux femmes artistes dans les écoles et les médias.

Ces dernières n’ont d’ailleurs pas attendu pour se regrouper en collectif, car l’union fait la force. Et même si les choses semblent avancer, il est temps que celles-ci changent vraiment, pour que toutes et tous aient les mêmes chances d’exprimer leur créativité.

(1) Marie Buscatto, « Sociologies du genre », Paris, Armand Colin, 2019 [2014] ; Marie Buscatto, « Femmes du jazz. Musicalités, féminités, marginalisations », Paris, CNRS Editions, 2018 [2007].

>> Retrouvez notre dossier intégral sur la place de la femme dans le monde de l’art dans notre numéro 324 <<

Handball : le rêve bleu de Koumba Cissé

#EPJTMV. A 24 ans, Koumba Cissé a déjà passé la moitié de sa vie sur les terrains de handball. Après son expérience en équipe de France, elle évolue aujourd’hui sous les couleurs de Chambray Touraine Handball (CTHB). Cependant, elle garde toujours en tête l’ambition de porter à nouveau le maillot bleu.

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Koumba Cissé a signé son contrat à Chambray en juillet dernier pour une durée de deux ans. (Photo : Victorine Gay)

« Le club de Chambray vise la montée en Division 1 (D1), dans l’élite », pose d’entrée, enthousiaste, Koumba Cissé, la nouvelle recrue du Chambray Touraine Handball (CTHB). Originaire de Pontoise dans le Val d’Oise (95), elle est issue d’une famille nombreuse, composée de huit sœurs et un frère. Koumba Cissé n’est pas le genre de fille à se prendre la tête. Du haut de ses 1,73 m, un chignon bas fait de petites tresses africaines, elle a toujours le sourire aux lèvres. Bien dans ses baskets, elle est de celles qui, tout en étant concentrée pendant son match, lâche un éclat de rire sur le terrain. Mais comme tous les compétiteurs, elle n’aime pas la défaite.

Koumba commence à toucher la balle à l’âge de 12 ans alors qu’elle est au collège. « Mes sœurs jouaient au handball. J’ai suivi le mouvement », sourit-elle. Et elle n’a jamais décroché. Elle participe rapidement à l’Union nationale du sport scolaire (UNSS). En 2002, elle intègre son premier club de handball à Cergy-Pontoise. Très vite repérée, elle participe à son premier stage jeune au niveau national en 2007 puis entre en sport études à Chartres. Elle poursuit sa passion dans le centre de formation de Fleury en 2009. Elle intègre ensuite plusieurs clubs. D’abord celui de Metz, qu’elle quittera au bout d’un an. Elle revient alors aux sources en intégrant de nouveau le club de Fleury. Le Havre est le dernier club qu’elle ait fréquenté avant de rejoindre l’équipe de Chambray.

Le regard rivé vers le Mondial 2017

« Koumba est la nouvelle étoile montante », glisse un fidèle supporter du CTHB. Il n’est pas difficile de le croire. La jeune joueuse a déjà à son actif 26 sélections en équipe de France. En 2013, lors du mondial en Serbie, Koumba porte le maillot bleu. « Comme tout sportif qui représente son pays, c’était un honneur et un rêve. Je n’en ai retiré que du bon », raconte-t-elle. Une expérience unique par sa cohésion d’équipe également. « Il existait une vraie force dans le groupe. Le Mondial est passé tellement vite, on ne voulait plus se quitter », rit-elle. Une première expérience honorable puisque les filles de l’équipe de France terminent cinquième de la compétition.

Mais blessée en mai dernier, elle n’a pas été appelée pour le Mondial qui débute le 5 décembre au Danemark. Cela ne l’empêche pas de penser d’ores et déjà à l’après-Mondial. « Je vais continuer de travailler et de me battre pour retrouver le maillot bleu. » Une envie confirmée par Linda Pradel, une des coéquipières de Chambray : « elle est déterminée. Quand elle veut quelque chose, elle fait tout pour l’obtenir. Malgré sa blessure, elle est toujours là. C’est un modèle. » Son palmarès ne s’arrête pas là. Elle rafle le titre de championne de France en 2011 avec le club de Metz et celui de la Coupe de la ligue en 2011. Avec Fleury, elle remporte deux titres supplémentaires : vainqueur de la Coupe de France en 2014 et finaliste de la Coupe de la ligue. Elle a aussi remporté le titre de championne d’Europe jeune en France en 2007.

Un début de carrière loin d’être négligeable pour cette jeune joueuse. Mais qui ne lui monte pas à la tête pour autant. Koumba Cissé reste terre à terre. « Je sais que je ne pourrai pas jouer au handball toute ma vie », glisse-t-elle. C’est pour cela qu’elle a toujours voulu concilier le sport de haut niveau et les études. Elle est actuellement en M1 de Management international, par correspondance, avec l’IAE de Poitiers. « La formation classique s’accompagne d’un stage à l’étranger pour 6 mois. Avec le handball, je ne pouvais pas le réaliser. J’ai donc choisi l’enseignement à distance où aucun stage n’est demandé. »

Douce dans la vie, agressive sur le terrain

« Le milieu du handball est un tout petit monde où l’on se connaît tous ». Ses coéquipières de jeu, qui sont aussi devenues ses amies, décrivent Koumba de la même manière. Meneuse et agressive sur le terrain, douce et sage dans la vie de tous les jours. « Les finales que j’ai pu jouer ont un goût particulier, notamment en équipe en France. Il y a une telle joie à ce moment-là. Cela crée forcément des liens », explique la jeune femme. Même si certains passages sont difficiles dans la carrière de haut niveau, la jeune handballeuse relativise. « Quand on se blesse, ce n’est jamais évident mais on fait avec. Il y a plus grave dans la vie. »

Le handball s’avère être bien plus que sa passion. C’est aussi sa force. « On apprend à vivre en équipe, à être autonome et ce dès le plus jeune âge, à être combative et avoir de l’orgueil. Toutes ces choses servent dans la vie de tous les jours. » Dans sa vie quotidienne d’ailleurs, elle aime « toucher à tout », confie Linda Pradel. « Un jour, on rentrait de déplacement. C’était pendant notre première année de D1 à Fleury. Ce jour-là, nous sommes rentrés à 4-5 h du matin. Le lendemain, je n’arrivais pas à avoir de ses nouvelles. J’étais paniquée, rigole avec le recul Laura Kamdop, amie et ancienne coéquipière de Koumba Cissé. Finalement, Koumba, s’était simplement endormie jusqu’à 19 h. »

Apolline Merle