#WTF 56 : Pour votre bien-être, des chats et des festivals

Vous avez loupé l’actualité #WTF et insolite ? Petite piqûre de rappel avec tmv !

PAUSE_WTF

Depuis le 28 mars, vous pouvez trouver en kiosques la revue Miaou. Ce « mook » trimestriel tourne uniquement autour du… chat (dingue, non ?) et veut faire « ronronner de bonheur le lecteur ». Actu, tendances, interviews, visuels, petits cadeaux sont au programme. L’éditeur, Prisma Media, indique « proposer un contenu dédié à la communauté des catlovers dans la tendance feelgood ». Alors « catlovers » de tout poil, réjouissez-vous : au sommaire de ce premier numéro, un dossier sur « vivre dans la peau d’un chat » et un entretien avec Anny Duperey notamment ! Youpi !

— D’après une récente étude britannique, assister à des concerts augmenterait l’espérance de vie. Mieux, y aller tous les 15 jours permettrait de faire grimper l’espérance de vie de neuf ans. Sachant que chaque année, tmv part au Hellfest, nous sommes donc en mesure de dire que nous vivrons centenaires. Joie !

— C’est à Montpellier que s’est tenue une course en chaussures de ski. Le projet, appelé logiquement Shoeski’Run, a été lancé par cinq étudiantes de l’école Idrac.

Dans le Gers, le père Rodrigue a fait le buzz en chantant du Sardou pendant la messe. « Vraiment, c’était juste pour rigoler, je ne m’attendais pas à un tel succès », s’est étonné le prêtre en voyant les 42 000 vues sur sa vidéo en 4 jours.

— Un serveur français a été licencié par un restaurateur canadien pour agressivité envers ses collègues. Il a donc porté plainte devant un tribunal des droits des personnes… en plaidant que son attitude n’était pas due à de l’impolitesse, mais « à sa culture française ».

Spotlight : Eglise, scandale et leçon de journalisme

Spotlight, le film du mois ? Assurément ! Le film retrace l’enquête menée par des journalistes américains qui ont révélé le scandale des prêtres pédophiles dans le diocèse et de l’étouffement de l’affaire par certains politiques et hommes de pouvoir. Glaçant.

Spotlight

C’était en 2002. The Boston Globe éclaboussait le monde de ses révélations : le journal sortait une enquête qui faisait froid dans le dos, dénonçant le scandale des prêtres pédophiles du diocèse de Boston… en prouvant aussi que police, politiques et hommes de pouvoir avaient tenté d’étouffer l’affaire.
C’est ce que raconte Spotlight (du nom du groupe de journalistes qui ont écrit sur le sujet), une histoire vraie, glaçante, mettant sous le feu des projecteurs des hommes dévoués corps et âmes à dénoncer l’impensable. Une virée dans l’envers du décor du journalisme d’investigation.

Loin d’être ennuyeux, Tom Mc Carthy (scénariste de Là-haut !) accouche là d’un film sobre et intelligent. Ici, le spectateur devient le bloc-notes des journalistes. Assiste, au fur et à mesure, aux terrifiantes révélations. Il est seul au milieu des cliquetis des claviers, des téléphones qui chauffent et des montées de stress. Dans Spotlight, la narration est conventionnelle, mais l’interprétation est magistrale : de Mark Ruffalo (remarquable !) à Michael Keaton, en passant par Stanley Tucci… Seule Rachel Mc Adams semble, pour une fois, un peu trop transparente.
Tout en retenue (la parole des victimes se fait sans pathos), Spotlight bénéficie d’un montage précis et d’une mise en scène discrète. Poussant le spectateur vers une question : qu’est-ce qui est pire ? Les abus sexuels en toute impunité des prêtres ? Ou l’Église qui ferme les yeux et protège ses membres en les faisant par exemple déménager ?

Au final, le film de Mc Carthy est un portrait glaçant de Boston, un thriller aux allures de documentaire, une plongée et surtout une ode au vrai journalisme, au 4e pouvoir. À l’époque, la rédaction du Boston Globe avait obtenu un Prix Pullitzer pour son enquête. Spotlight aura-t-il droit à son Oscar, le 28 février ?

>Drame (USA) de Tom Mc Carthy. Durée : 2 h 08. Avec Mark Ruffalo, Liev Schreiber…
NOTE : 4/5

[youtube]https://www.youtube.com/watch?v=uzLs_2hgv0k[/youtube]

Portrait : le père Vincent Marik, prêtre à Saint-Étienne de Grandmont

On a rencontré le père Vincent Marik, prêtre à Saint-Étienne de Grandmont. Tmv vous en fait son portrait.

Le père Vincent Marik, toujours exalté, parle de sa vocation comme d'une « aventure ».
Le père Vincent Marik, toujours exalté, parle de sa vocation comme d’une « aventure ».

« Habemus Papam ». Il est 20 h 05. Joie respectueuse du témoin d’un événement historique, le père Vincent Marik regarde avec attention la télévision et l’élection de François 1er. À ses côtés, dans son petit appartement collé à l’Eglise de Saint-Avertin, se trouve son vicaire et tout jeune prêtre, Pierre-Xavier Penaud. Les deux hommes rigolent un peu, même s’ils restent attentifs à l’histoire qui se joue devant eux. « Tu sais ce qu’ils mettent dans la cheminée pour faire la fumée noire ? Un pneu. Et pour la fumée blanche ? Un pneu neige ! » Le père Marik a entendu la blague un peu plus tôt dans la journée de la bouche d’un autre curé facétieux. Les yeux un peu fatigués, il souffle après une journée remplie. Une journée ordinaire pour lui, qui a commencé à 8 heures et doit se finir par une réunion dans la soirée.
Presqu’un rôle de chef d’entreprise. La foi en plus…
Fan d’astronomie, il sort son nouvel iPod pour faire admirer la « magnifique » galaxie M51. Pendant ses vacances d’été, il file régulièrement vers le pic du midi, dans les Pyrénées, pour poser son télescope et admirer le ciel. Oui, les curés ont une vie privée. Non, ils ne sont pas dans l’isolement. « Nous ne sommes pas des moines ». Il se décrit comme un prêtre intégré à la société. Moderne ? « Je respecte la tradition. À trop enlever la forme, nous enlevons le sens. » Conservateur alors ? « Je suis un peu difficile à enfermer. » Il a le regard et la façon d’être du scientifique un peu réservé. Droit, qui ne sait pas encore ce qu’il trouvera mais cherche toujours et encore. Dix ans qu’il fait ce « métier ». Lui, préfère parler d’une vocation. À 45 ans, il parle encore d’aventure, avec un ton exalté. Depuis quelques années, il s’occupe de la paroisse Saint-Étienne de Grandmont. Un territoire étalé qu’il couvre avec sa petite Clio bleue, un peu cabossée. De Chambray-lès-Tours à Saint-Avertin, il célèbre la messe parfois cinq fois par semaine. Dans les églises, mais aussi dans les maisons de retraite et, plus rarement, va au chevet des malades à l’hôpital. En plus de tout ça, il doit coordonner toutes les équipes de laïcs, ceux qui s’occupent des obsèques, des mariages ou encore des baptêmes. Il a quasiment le rôle d’un chef d’entreprise. La foi en plus. Son moment préféré ? « Les sermons, j’aime donner un peu de matière à penser. »
Ce Tourangeau de naissance a beaucoup réfléchi avant de se lancer ce choix de vie. Sans parler de déclic, Vincent Marik a « cheminé ». La question du célibat, de son engagement dans une institution, il a tout posé à plat. À 28 ans, très décidé, il rentre au séminaire après quatre ans d’enseignement d’histoire dans un collège. Commence alors six années pétries de théologie, de philosophe et d’un peu de psychanalyse dans le Séminaire des Carmes, à l’université de l’Institut catholique de Paris. Il choisit de rester en Touraine, « plus que le territoire, ce sont les Tourangeaux que j’aime. » Les périodes de doute sont encore présentes. Il se met parfois en colère contre son Dieu, « je ne comprends pas que certaines personnes souffrent longtemps. Alors je lui pose des questions, je me fâche. » Il a besoin de cette humanité pour être curé.
Et puis, il y a le jazz. Dans sa voiture, une pochette d’album de Keith Jarett traîne au-dessus de la boîte à gants. Le piano résonne dans l’habitacle. Il aime l’expressivité de cette musique, sa beauté. Ces moments de pause, il les savoure. Si le père Vincent Marik doit rentrer en empathie avec les croyants, comme le médecin, il doit se protéger. « J’écoute et vois des souffrances, des peines. Je dois pouvoir y répondre, comprendre mais ne pas absorber. »

Où en sont les catholiques ?

Vous n’avez pas pu échapper au visage du nouveau pape sur tous les écrans. A tmv, on a mis un coup de projecteur sur les cathos à Tours. Et ils nous ont parlé de tout… Vraiment tout.

dossier web
Au fond de son salon traîne une guitare et un piano. Robin Durieux, avec son look de quadra dynamique est à mille lieux des stéréotypes catho. Il est en charge de l’équipe de la pastorale à l’école de Notre-Dame-La-Riche. Pour les non initiés, la pastorale, c’est en gros, des cours de catéchisme au sein d’une école catholique. Mais ne dites surtout pas ça à Robin Durieux, il le prendrait mal. « Je fais tout sauf du cathé ! Je préfère le terme de culture religieuse. J’offre aux lycéens qui viennent à mes cours, des clés pour comprendre la vie grâce à la vision d’une religion. » Et quand le mot prosélytisme est lancé, le Marseillais renvoie directement dans les cordes : « Nous avons un véritable problème avec le terme laïcité en France. Ce n’est pas parce que L’État et l’Église sont séparés que tout le monde ne peut pas exprimer ses convictions religieuses. On atrophie le spirituel dans notre pays et pour moi, c’est une des souffrances des Français. » Dans ses cours de pastorale, il « s’arrête au seuil de conscience : après, c’est à eux de choisir s’ils veulent avoir une pratique régulière. Depuis Vatican II, les évêques ont compris qu’il fallait changer la manière de parler de notre religion. Nous sommes là pour dialoguer, parler avec le monde mais pas obliger des lycéens à suivre des cours de pastorale. »
Le catholicisme est la première religion en France, il est pourtant difficile de dire combien de personnes l’Église touche en France. « Disons que lorsque des sondages sont réalisés, 60 % des Français se revendiquent catholiques », explique l’Abbé Jean-Marie Onfray, le délégué à la culture dans le diocèse de Tours. « Mais qu’est-ce que ça veut dire être catholique ? Aller à la messe régulièrement ? Dans ce cas-là, le nombre de catholiques tomberait à 2 ou 3 % de la population. À Tours, ça représenterait environ 5 000 personnes. Pourtant, beaucoup plus de personnes sont en quête de sens dans leur vie et possèdent une foi catholique sans pour autant se rendre tous les dimanches à l’église. » Quête de sens. Le terme revient fréquemment.
Début d’explication avec Jean-Marie Onfray : « Nous vivons dans une société de consommation qui rend les Français assoiffés, de connaissance, de bouffe, de tout. Il manque juste le sens. L’Église apporte ce quelque chose d’humanité que beaucoup d’entre nous recherchent. Des catholiques non pratiquants, le père Jacques Legoux en rencontre régulièrement au sein de la paroisse de la cathédrale de Tours. « Ceux qui sont dans la demande de signes de la foi sont de plus en plus nombreux. Je les vois pour le baptême d’un enfant ou un mariage. Ils n’ont jamais vraiment mis les pieds dans une église. Je ne leur ferme surtout pas la porte. » Même son de cloche pour le diacre, Jean-Louis Bonnin. Assis sur une des chaises de l’accueil du presbytère situé derrière la cathédrale, il sourit : « Je viens de passer du temps avec un couple pour préparer leur mariage, choisir des textes. La jeune femme a fait du catéchisme mais n’a jamais vraiment pratiqué ensuite car elle avait un mauvais souvenir de ces années. Elle vient de sortir, ravie, elle m’a dit que sa vision avait changé. »
Alors, l’Église change ? Elle a un nouveau pape maintenant. Mais, d’après le père Jacques Legoux, elle n’aurait pas attendu François 1er pour évoluer. « Nous sommes là pour accompagner le monde, affirme le pasteur. Prenez Diaconia 2013, c’est une démarche initiée par l’Église depuis trois ans et qui demande aux catholiques d’être solidaires avec les autres. Nous ne sommes plus, désormais, dans la charité qui implique une forme de dépendance, mais dans un échange. Les autres, même ceux qui sont éloignés de l’Église, peuvent nous apporter des choses. » Pour l’Abbé Jean- Marie Onfray, « l’Église est, aujourd’hui, à une croisée des chemins. Soit elle se replie sur elle-même comme le veulent les 3-4 % de pratiquants et devient de plus en plus identitaire, soit elle se dit mais quelle bonne nouvelle j’ai à annoncer aux hommes pour leur apporter toujours plus de dignité ? » L’arrivée de François 1er au Vatican pourrait renforcer cette ouverture sur la société. « L’Église prend son temps. La société évolue très vite mais se casse la figure très vite aussi. L’Eglise, elle, reste prudente. Par exemple, elle prend en compte, seulement aujourd’hui, les avancées des sciences humaines du début du siècle, sur la psychanalyse, l’idéologie marxiste, la science historique ou encore la sociologie. Elle a le bénéfice de l’expérience. » Friedrich Nietzsche disait au XIXe siècle Dieu est mort. Le père Jacques Legoux rigole : « Je crois que le cadavre bouge encore ! »