Tours : la jeunesse en action pour la planète

Face à l’urgence climatique, l’appel de Greta Thunberg a déclenché une mobilisation des jeunes sans précédent. Dans le monde, en France… et à Tours.

(15 mars 2019 à Tours : 3 000 lycéens manifestaient pour le climat)

Et 1, et 2, et 3 degrés ! C’est un crime contre l’humanité ! » À Tours, le 15 mars 2019, 3 000 jeunes en grève scolaire manifestaient pour le climat. Une première à Tours ! L’objectif ? Dénoncer l’inaction des dirigeants politiques.

« L’appel de la militante suédoise Greta Thunberg a déclenché ce mouvement transnational. Les jeunes se reportent sur une personne de leur âge, figure d’apaisement et d’indignation morale », analyse Joël Cabalion, sociologue à l’université de Tours. En août 2018, l’adolescente avait commencé seule devant le Parlement suédois, sa pancarte « grève scolaire pour le climat » à la main.

La première mobilisation tourangelle était organisée par des lycéennes de Grandmont et Notre- Dame-La-Riche au sein du collectif « Pas de printemps silencieux ». Une seconde grève a suivi en mai, puis une troisième en septembre, avec un millier de lycéens et d’étudiants à chaque fois.

(Manifestation d’Extinction Rebellion, le 7 octobre à Tours)

Depuis, le collectif s’est structuré. En août dernier, il a rejoint le mouvement de jeunes Youth for Climate France (YFC) : « Nous sommes engagés pour le climat et l’écologie, contre le capitalisme et toutes les discriminations (racisme, sexisme…) », présente le lycéen Nicolas Mercier, membre de YFC Tours et chargé de la communication. Le mouvement se veut horizontal, sans hiérarchie : un collège tourangeau de 10 jeunes (tous lycéens) est élu tous les trois mois afin de prendre les décisions et d’organiser la vie du groupe.

« Nous sommes les adultes de demain, concernés et inquiets pour l’avenir »

D’autres initiatives sont nées de l’urgence écologique, avec des jeunes en première ligne à Tours. Comme ANV-Cop 21 et ses actions non-violentes (les décrochages de portraits présidentiels par exemple) ou Extinction Rebellion (XR), mouvement de désobéissance civile lancé fin 2018 au Royaume-Uni. « Il faut agir face à l’urgence », résume ChaBou (pseudo), 20 ans, membre d’XR Tours.

Le groupe a manifesté devant la métropole pour dénoncer les subventions à l’aéroport, organisé une marche funèbre devant la mairie ou éteint les enseignes lumineuses de magasins. « Ce sont des mouvements disparates, avec diverses formes de mobilisation (grèves, marches, actes de désobéissance civile…), mais aussi des points communs : l’environnement devient une cause dont s’emparent des jeunes, plutôt urbains, issus des classes supérieures », poursuit Joël Cabalion.

Selon les études du collectif de chercheurs Quantité critique, la jeunesse des classes populaires reste la grande absente. À noter cependant, l’initiative #MaCitéVaBriller, où des jeunes des quartiers se lancent le défi de nettoyer leur cité. À Joué-lès-Tours, l’association Salade tomate union, créée par des jeunes du quartier La Rabière, a relevé le challenge en septembre. Ce nouvel élan profite aussi à des associations historiques, comme la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO Touraine).

Fin septembre, elle lançait son groupe jeunes, avec 57 recrues (90 % d’étudiants). Du jamais vu ! « Cet engouement va nous permettre de démultiplier nos actions », se réjouit Baptiste Boulay, animateur et coordinateur du groupe à la LPO Touraine.

« La pensée politique est en pleine ébullition »

De quoi changer certains regards portés sur la jeunesse ? Assurément, « cela remet en cause une vision individualiste et je-m’en-foutiste des jeunes », pointe Joël Cabalion. Pour autant, certains adultes gardent un avis négatif sur leur mobilisation, n’y voyant qu’une seule motivation : sécher les cours… « Non, nous ne sommes pas une bande d’individus amorphes ! Nous sommes les adultes de demain, concernés et inquiets pour notre avenir. Nous voulons construire le futur dans le respect de la planète. Nous portons des alternatives tournées vers l’écologie et le social. Nous aussi, nous voulons réaliser nos rêves ! Et nous nous en donnerons les moyens », assure Nicolas Mercier à Youth for Climate.

Difficile de dire si ces mouvements changeront la donne. Une chose est sûre : « Ils transforment les individus. D’autant plus les jeunes, dont la pensée politique est en pleine ébullition », précise le sociologue. En tout cas, l’action continue. Lycéens et étudiants se donnent rendez-vous à la fin du mois, le 29 novembre, pour une nouvelle grève mondiale pour le climat.

Texte : Nathalie Picard / Photos : Hugues Le Guellec & Julien Pruvost NR

A Grande-Synthe, des lycéens tourangeaux aux côtés des migrants

Dans le dernier numéro de tmv, retrouvez un portfolio retraçant la semaine de lycéens tourangeaux qui ont œuvré auprès d’associations aidant les migrants à Grande-Synthe.

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Ils sont huit. Huit lycéens de Notre-Dame La Riche à avoir choisi de s’engager dans un projet humanitaire qui a changé pour toujours leur façon de voir la question des migrants et des différences en général.

Pendant une semaine, du 15 au 21 décembre dernier, ils ont vécu au contact des migrants, à Grande-Synthe, près de Dunkerque. Ils ont dormi dans les locaux d’Emmaüs et, chaque jour, ils ont partagé, en bénévoles respectueux des procédures en place, le travail des associations agréées.
Ils ont participé à des distributions de nourriture, ils ont joué au foot avec des gamins qui n’avaient plus souri depuis longtemps, ils ont partagé des moments et des histoires de vie avec des humains dont ils ne connaissaient pas la langue. Ils ont vu et entendu tous les acteurs de ce drame social qui se joue encore tous les jours, sous l’oeil avide des caméras comme dans l’indifférence générale.

Les migrants, bien sûr, dont les histoires les ont touchés, mais aussi les politiques, les policiers, les militants associatifs, les habitants. Ils en sont revenus à la fois plus sensibles et plus forts et ont souvent, depuis, un peu de mal à faire comprendre aux autres ce qu’ils ont vécu et la réalité de ce qu’ils ont vu. Grâce au photographe Olivier Pain, qui a vécu en immersion cette expérience, ils ont pu mettre des images et des mots sur cette semaine si particulière.

Photos : Olivier Pain, photoreporter

>> Le portfolio dans son intégralité, ainsi que les témoignages des lycéens, sont à retrouver dans le numéro 322 de tmv <<

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« On faisait des activités avec les enfants, comme du dessin et ça leur permettait de s’exprimer. Je me souviens par exemple d’un enfant qui avait dessiné des gens qui pleuraient, des bâtiments qui s’écroulaient. » « Je me souviens que le lundi, on a fait de la peinture au centre d’accueil. On a dessiné des mains de couleur sur du papier blanc et moi, j’ai trouvé ça très beau, comme un symbole. »

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« Il y a une chose qui m’a marquée : il y avait un homme, il avait des bananes et des bonbons et il me les a donnés. Même en ayant très peu de choses, les migrants voulaient nous donner ce qu’ils avaient. Quand on avait froid, on nous proposait un manteau, alors que c’était plutôt à nous de leur donner des choses, normalement. »

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