Chroniques culture #72

Les chroniques culture de la semaine : avec Beirut, Mad Max, Une Belle fin et Traquemage !

LE DVD
UNE BELLE FIN
John May est seul. Son métier ? Quand une personne décède, il doit retrouver ses proches. Un jour, il doit traiter le dossier d’un homme mort sans que personne ne s’en inquiète. Film humaniste, beau et triste, Une Belle fin détricote le délicat sujet des morts anonymes dans la société. Ode à la vie ? Témoignage bouleversant de la solitude ? Still Life (titre en VO) brasse large. Une perle à (re)découvrir, agrémentée de l’interview de son réalisateur en bonus.
A.G.

LA BD
TRAQUEMAGE
Quand l’un des scénaristes les plus en vue du moment, Wilfrid Lupano, rencontre le dessinateur tourangeau le plus doué de sa génération, Relom, cela donne Traquemage, beau pastiche d’Heroic fantasy décalé. On y croise un berger héros malgré lui, une brebis déjantée, des Trolls franchement crétins, une fée très portée sur la bouteille et surtout un bon Pécadou, fromage de chèvre qui déclenche toute l’histoire. Mais chut, à vous de savourer cette histoire hilarante.
Hervé Bourit

LE CD
BEIRUT NO, NO, NO
Après des années de silence, Beirut revient avec sa pop-folk doucement mélancolique. Il faut dire que son maître à penser Zach Condon est aussi connu pour être un big boss de la dépression. Beirut accouche d’un quatrième album parsemé d’influences traditionnelles d’Europe de l’Est et de cuivres. Intéressant à bien des égards, enregistré en quinze jours à peine, l’offrande des Américains a ce petit goût de nostalgie, un côté désuet pas désagréable.
A.G

LE JEU VIDÉO
MAD MAX
Défouloir musclé pour joueurs « testostéronés » en mal de sensations fortes, Mad Max déboule sur consoles nouvelle génération dans un jeu d’action post-apocalyptique en monde ouvert. Au programme de ce titre, des courses-poursuites de folie, des combats à revendre contre des gangs pour qui tous les coups sont permis et customisation de son véhicule pour construire la machine de guerre ultime.
> Warner Bros, + 18 ans, PC, PS4, Xbox One, 50 à 70 €.
L. Soon

Une Belle fin : poignant et délicat

Pasolini livre un film humaniste, beau et triste et réussit à explorer le thème de la solitude avec brio.

Une belle fin
John May vit dans la banlieue de Londres. Seul. Son métier le passionne : quand une personne décède sans famille connue, c’est à lui de retrouver des proches. Mais dès les premières images, John May assiste seul aux funérailles. Il rédige les éloges des disparus. Seul, encore et toujours. Un jour, il est licencié sans ménagement (qui s’intéresse à ces gens abandonnés par leurs familles ? lui fait-on comprendre). Il doit alors traiter un dernier dossier, celui d’un homme mort sans que personne ne s’en inquiète : un certain Billy, son voisin d’en face…

Oubliez le titre francisé, Une Belle fin. Pensez plutôt au titre original Still Life et ses différentes significations : « Vie immobile » ou « encore la vie ». Parce qu’il est en fait question de cela dans la dernière réalisation de l’Italien Uberto Pasolini. En braquant sa caméra sur le personnage John May, le cinéaste montre dans un premier temps un anti-héros, à la vie triste et terne, où rien ne bouge. Où rien ne change.
Dans un second temps, Pasolini s’attarde sur ce solitaire qui se transcende, le jour où il entreprend sa dernière mission. Pour peindre sa transition, le réalisateur se sert habilement d’une photographie extraordinaire. Si les débuts sont sous le signe d’une esthétique clinique, dans des tons gris et bleus, le changement intervient quand John May rencontre enfin des gens. Les couleurs plus vives apparaissent et éclairent le cadre.

Avec réussite, Uberto Pasolini détricote un sujet délicat, abordant l’isolement et les morts anonymes dans notre société, sans verser dans le psychodrame de bas-étage. Dans cette entreprise, outre la pudeur de Pasolini, c’est aussi et surtout grâce au formidable et étonnant Eddie Marsan qu’Une Belle fin frappe fort. Véritable « gueule » de cinéma, l’acteur montre ici toute la justesse de son jeu. Il y a une tristesse dans ses traits ; une solitude décelable dans son regard singulier.
À travers des images fixes et de nombreux plans horizontaux et symétriques, on se laisse alors transporter dans la vie ordonnée de John May, ainsi que sa mission : en recomposant la mosaïque de la vie Billy, son voisin disparu, il reconstitue le puzzle de l’existence d’un homme abandonné par ses proches. Ira même jusqu’à retrouver la fille du défunt. Les minutes ont passé, la fin du film approche. Lancé sur une réflexion à propos de la solitude, le spectateur s’est enrichi.
Au final, est-ce une ode à la vie ? La question à peine posée, il est sonné par un final bouleversant, paradoxalement beau. Difficile de ne pas avoir le coeur serré dans cette ultime séquence.

NOTE : ***
Drame, d’Uberto Pasolini (Grande- Bretagne, Italie). Durée : 1 h 27. Avec : Eddie Marsan, Joanne Froggatt, Karen Drury…

[youtube]https://www.youtube.com/watch?v=jHRsBKjYBgc[/youtube]

NOTATION :
**** CULTEissime
*** TOPissime
** PASMALissime
* BOFissime
X NULissime