Maintenant ou jamais : surprenant !

Un film de rentrée qui n’a pas l’air comme ça… Avec la talentueuse Leïla Bekhti.

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Juliette, heureuse, visite sa future maison aux côtés de Charles, son mari, et de ses deux enfants. Image d’Épinal de la petite famille de la classe moyenne parisienne, rêves de propriétaires : mais le tableau idyllique explose un soir. Chant rles perd son travail de conseiller bancaire. Le prêt de la maison fait se craqueler le couple, désormais endetté. Le fantôme du déclassement hante alors leur appartement parisien défraîchi. Il les grignote un peu plus chaque jour. Juliette, malheureuse, se fait voler son sac en pleine balade dépressive. Concours de circonstance : elle voit dans cette nouvelle mésaventure une échappatoire. Au lieu d’appréhender son voleur à la tire, elle lui propose un pacte criminel : voler la banque qui a licencié son mari. Une mission dangereuse qui représente, pour elle, un tremplin possible vers ce bonheur disparu.

Entre thriller dramatique et chronique d’un monde en crise, Maintenant ou jamais décrit avec précision la chute inexorable d’une famille française. Film d’une époque complexe, le film verse volontairement dans le sensationnalisme pour mieux appuyer le véritable enjeu de cette histoire ordinaire : suivre Madame Tout-le-monde dans sa chute. Mais sans commenter. Images particulièrement lentes pour ce type de production tournée vers l’action, le film offre une photographie des recoins de Paris. Cages d’escalier, entrée d’appartement, métro aérien… Un cadre urbain un peu crasseux qui ne fait que souligner l’intrigue sociale, la déperdition.
Maintenant ou jamais se défie d’expliquer le comportant criminel de l’héroïne. Le non-dit. C’est la force du film de Serge Frydman : filmer les gestes approximatifs, les temps morts, gros plans de visages clos, pensifs. Le réalisateur n’a pas peur du silence à l’écran. Il l’assume même. Il ne vide pas l’action mais la remplit de vides.

Dans ces espaces débarrassés du superflu, sans sous-titres grossiers, Maintenant ou jamais prend de l’ampleur, devient oeuvre de cinéma. Cette façon de laisser la caméra tourner provoque ce que beaucoup de réalisateurs français recherchent. Les acteurs, en confiance, développent leur personnage dans les moments d’attente et évitent de tomber dans les clichés lourdauds. En tête, la performance de Leïla Bekhti. Insoumise, meneuse, indécise : son personnage s’échappe des clichés souvent réservés aux femmes dans le 7e art. Encore une preuve du talent de Serge Frydman pour bien choisir.
Benoît Renaudin

Drame français de Serge Frydman. Durée : 1 h 35. Avec Leïla Bekhti, Nicolas Duvauchelle, Arthur Dupont.
NOTE : ***

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TOUJOURS EN SALLE
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LES GARDIENS DE LA GALAXIE ***
Un aventurier de l’espace traqué par des chasseurs de primes, qui s’allie avec un raton-laveur, un arbre qui parle, une montagne de muscles bête comme ses pieds et une alien verte… Le nouveau film de James Gunn avait de quoi faire peur sur le papier. Sur l’écran, c’est une déflagration d’effets visuels, de space-opera rythmé et foldingue. Le tout dopé aux références 80’s et à un humour décomplexé délicieusement jouissif. Le blockbuster surprise de l’été ! A.G.

NOS PIRES VOISINS ***
Attention, cerveau débranché pendant 1 h 37 ! Dernière comédie US potache, Nos Pires voisins, c’est le quotidien du petit couple tout mignon avec son bébé, perturbé du jour au lendemain par l’arrivée d’une confrérie d’étudiants complètement cinglés et portés sur la fête (et la bouteille, du coup). Le trio Seth Rogen, Rose Byrne et Zac Efron fait des merveilles dans cette sorte de Projet X, version trash. Humour 100 % régressif et politiquement incorrect, bête, mais franchement drôle. A.G.

LA PLANÈTE DES SINGES ***
Dix ans ont passé. La paix entre les hommes et les singes est plus que fragile. À tel point que les deux camps sont sur le point de se livrer une guerre sans merci… Esthétiquement bluffant, ce nouveau volet est un bijou visuel qui vaut avant tout pour la performance exceptionnelle, en motion capture, d’Andy Serkis. Véritable réflexion sur la nature humaine, avec un sous-texte sociopolitique, le film est captivant, épique, mais un tantinet trop long et parfois légèrement trop manichéen. A.G.

NOTATION :
 **** CULTEissime 
*** TOPissime
** PASMALissime 
* BOFissime
X NULissime

Ciné été : Planète des singes ou American Nightmare ?

L’un est un film à petit budget, l’autre a coûté la bagatelle de 170 millions de dollars (!), mais les deux cartonnent au cinéma. Alors, on va voir quoi ?

American Nightmare 2 : Anarchy
« Low budget, high concept ». Comprenez, « petit budget, concept fort ». C’est le credo de Jason Blum, producteur qui a donné un coup de pied dans la fourmilière hollywoodienne il y a quelque temps, en balançant à la face de tous des films de genre coûtant peu, mais rapportant un max. Au hasard ? La franchise Paranormal Activity (15 000 dollars investis pour  200 millions amassés !), ou encore Insidious 2 et Sinister. Et après le monde qui s’est précipité en salles pour le premier volet d’American Nightmare (pourtant un vrai pétard mouillé, voir notre critique ICI), mister Blum au fin nez a demandé au réalisateur James de Monaco d’en remettre une couche lors d’un deuxième opus.
american-nightmare-2-affiche-53a94808f1d2bConcept simple, mais efficace : durant toute une nuit, tout crime est légal pour la population américaine ; c’est La Purge. On copie colle donc la formule du premier épisode, mais en extérieur cette fois-ci, dans les rues de Los Angeles, où tout le monde est donc décidé à faire sa loi. En touchant la corde sensible – les armes – American Nightmare 2 réussit déjà un peu plus là où son petit frère avait échoué : effleurer une véritable satire grinçante sur un sujet hautement explosif et 100 % made in USA.  Malheureusement, le propos est rapidement amoindri, notamment par une désincarnation totale des protagonistes : tous sont absolument d’une platitude consternante, sans relief, voire carrément inexistants. Seul Frank Grillo, en flic revanchard plein de ressentiment, parvient à sortir la tête de cette bouillie de personnages pathétiques.
Bêtement schématique et manichéen (bouh, les méchants riches blancs raffinés, vilains, très vilains !), American Nightmare 2 tombe aussi dans le travers du précédent opus, avec sa photographie laide au possible, à la limite de l’illisible. Au final, faussement anarchique, contrairement à son titre, le nouveau bébé de James de Monaco reste une timide fable politico-révolutionnaire sans surprise, ni courage (n’est pas John Carpenter qui veut). Et ce n’est pas la fin, bête et surjouée, qui nous fera dire le contraire. Dommage.
American Nightmare : Anarchy, de James de Monaco. Durée : 1H 43. Avec Frank Grillo, Carmen Ejogo, Zach Gilford…

La Planète des singes : l’affrontement
Dix ans ont passé. La paix entre les hommes et les singes est plus que fragile. Tellement fragile que les deux camps sont sur le point de se livrer une guerre sans merci… la-planete-des-singes-l-affrontement-dawn-of-the-planet-of-the-apes-30-07-2014-5-g
Soyons clair : le blockbuster de l’été, c’est lui. La Planète des singes : l’affrontement, signé Matt Reeves. Succès monstrueux aux États-Unis, il a aussi rameuté plus de 412 000 personnes en France, lors de son premier mercredi d’exploitation. Un petit miracle en soi, en période estivale.
Cette suite de La Planète des singes est tout d’abord une magie visuelle. Esthétiquement bluffant, ce bijou est une réussite grâce à un seul homme : Andy Serkis, l’interprète de César. Vous ne le « verrez » jamais à l’écran, mais cet acteur (si, si, Golum et King Kong, c’était… lui!) est l’un des pionniers de la motion capture. Un procédé qui permet de retranscrire gestuelles et émotions d’un être vivant par ordinateur. Le visage d’Andy Serkis vous est donc inconnu. Ici, il est un singe. LE singe, le chef. Mais porte tous les enjeux du film. Performance technologique admirable, La Planète des singes l’est assurément. L’invisible Serkis porte le film à bout de bras (enfin, de pattes). C’est simple, les 20 premières minutes du long-métrages sont tout bonnement hallucinantes : saisissant de réalisme, cet instant peut même se targuer d’être une copie conforme de documentaire animalier. Le spectateur est happé. Subjugué. Mieux, il reste bouche bée.
C’est ensuite que tout s’enchaîne et que Matt Reeves livre sa vision des choses : ici, singes et hommes sont au même niveau. La trahison et le crime sont possibles partout. Chez n’importe qui. Avec un sous-texte sociopolitique remarquable, le film est une véritable réflexion sur la nature humaine. Philosophique, captivant, épique (cette bataille, bon sang!), généreux, mais un tantinet trop long, La Planète des singes s’impose comme LE film de l’été, en repoussant les limites techniques et scénaristiques. Et au risque de se répéter, ce chimpanzé, ce César, mérite largement l’Oscar. Bluffant.
La Planète des singes : l’affrontement, de Matt Reeves. Durée : 2 h 11. Avec Andy Serkis, Jason Clarke, Gary Oldman, Keri Russell…