A l’école du Parkour et du freerun

Course, saut et escalade : le parkour est l’art du déplacement en utilisant le mobilier urbain. Une école a ouvert à Saint-Pierredes- Corps et forme les yamakasi de demain.

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Le Parkour ? « C’est se déplacer de la manière la plus efficace et rapide possible d’un point A à un point B », dit Charles Brunet, ici en photo. (Photo instagram.com/haiscorentin)

Le soleil tombe doucement. Saint-Pierre-des- Corps grelotte avec quatre petits degrés en cette fin février. La fraîcheur enveloppe les ateliers de la Morinerie. Dans ce hangar, un couloir où s’alignent des locaux d’artistes. La douce quiétude est troublée par le roulement d’un skateboard qui se dirige vers le fond. Sur sa planche, Martin, jeune ado blond aux petites lunettes, aussi relax qu’un surfeur californien. Passé une porte où est collée une affiche West Coast Academy, il se dirige vers de grands échafaudages.
Dix secondes plus tard, il s’y balance, s’accroche, grimpe avec une aisance et une souplesse déconcertantes, sous l’oeil bienveillant de son mentor, Charles Brunet.

Ce trentenaire tourangeau de l’asso Gravité Zéro/Parkour37, membre de la team West Coast Academy, est un « traceur » pro qui a ouvert, en octobre 2017, une école de parkour, la première de la région. Un sport pour les adeptes de la liberté du corps et du déplacement. De quoi ravir Martin : « Ici, c’est un peu ma deuxième maison », se marre-t-il. « C’est toujours encadré, donc je peux me surpasser. »

L’école compte plus de 200 licenciés, âgés de 9 à 30 ans. (Photo Julien Pruvost)
L’école compte plus de 200 licenciés, âgés de 9 à 30 ans. (Photo Julien Pruvost)

Le cours va commencer. La voix de Charles résonne dans la salle de 400 m². Le cadran à LED au mur affiche 17 h 29 et 58 secondes. « J’avais bien dit que c’était 17 h 30 pétantes », sourit-il. Cet endroit est un rêve devenu réalité. Créé avec trois fois rien : « Après avoir galéré à trouver un lieu, un ami m’a conseillé les ateliers de la Morinerie. Le local n’était pas cher. »
Pour le matériel ? De la récup’ pour les palettes, une structure achetée à Amiens pour les échafaudages et « un grand merci à l’asso de gym de Saint-Pierre qui nous a donné certains tapis et matelas. » Soit un lieu d’entraînement idéal avant d’affronter la rue et son mobilier urbain.

NINJA WARRIOR ET ACROBATIES

Charles Brunet, prof et pro du parkour, pratique depuis 15 ans. Sa chaîne YouTube compte 67 000 abonnés. (Photo instagram.com/haiscorentin)
Charles Brunet, prof et pro du parkour, pratique depuis 15 ans.
Sa chaîne YouTube compte 67 000 abonnés. (Photo instagram.com/haiscorentin)

Tandis que Charles retrace l’histoire, Léonard, en stage ici, est en charge de l’échauffement. Poignets, coudes, genoux, chevilles, cou et nuque : tout y passe. Et c’est parti ! Par petits groupes, les jeunes élèves sautent par-dessus des blocs, s’accrochent à des hauteurs inimaginables, enchaînent roulades, « sauts de chats » et saltos. « Ouais, c’est un peu Ninja Warrior », sourit Charles, avant de charrier un apprenti qui enchaîne les pirouettes au-dessus d’un gros cube en mousse : « Si tu touches l’obstacle, c’est cinq pompes ! »
L’ambiance est bon enfant, la fraîcheur du hangar est oubliée. On s’entraîne dur. Corentin, par exemple, avec ses saltos arrières hallucinants. Il a 17 ans et pratique depuis 7 mois. Comme le prouvent ses figures, sa préférence va au freerun. « C’est une variante qui implique des acrobaties en plus. Le freerun embellit le déplacement en parkour », nuance cet ancien fan de BMX et de trottinette freestyle. Le sourire aux lèvres, engoncé dans son maillot bleu, Corentin triture sa petite barbe et s’amuse de ses débuts, lorsque, tout petit, il « grimpait déjà aux arbres ». Maintenant, c’est sur les murs en ville.
« En fait, je m’adapte aux autres dans la rue. Si quelqu’un n’avance pas devant moi, je me dis tout de suite : tiens, et si je le dépassais plutôt en m’accrochant à ce rebord de fenêtre ? Le parkour me fait découvrir la ville différemment, c’est un deuxième point de vue. Tout se joue au mental… et je n’ai pas peur du béton ! ».

L’heure tourne et c’est déjà bientôt la fin du cours. Subejan, 13 ans, le bonnet enfoncé sur la tête laissant choir ses longs cheveux, continue les figures sans s’arrêter. Trois ans de pratique, mais capable de surmonter n’importe quel obstacle et visiblement à l’aise aussi bien en parkour qu’en freerun.

Seul équipement nécessaire pour pratiquer le parkour ? De bonnes chaussures ! (Photo Julien Pruvost)
Seul équipement nécessaire pour pratiquer le parkour ?
De bonnes chaussures ! (Photo Julien Pruvost)

Les autres élèves s’enflamment, c’est le moment du « floor is lava » [le sol est de la lave, NDLR]. Exercice fendard : interdiction de toucher le sol avec ses pieds. Les bras sont mis à rude épreuve, on saute de bloc en bloc, les chevilles arrêtent les corps, les muscles amortissent les chutes, les pieds ne doivent pas se placer trop haut. « Ça peut être dangereux », souffle Charles. Sous leurs airs de casse-cou, les traceurs sont prudents et font preuve d’une grande maîtrise. Charles est comme un grand frère. Il chapeaute et conseille.

Les étirements indispensables. Ici, avec Subejan, 13 ans. (Photo Aurélien Germain)
Les étirements indispensables. Ici, avec Subejan, 13 ans. (Photo Aurélien Germain)

« Ici, on donne nos expériences et on découvre sa voie. La technique est là, ils travaillent maintenant leur autonomie et leur créativité. » Plus qu’un sport urbain, le parkour est une philosophie. L’association le rappelle d’ailleurs sur sa page internet : « Notre état d’esprit est l’entraide, le partage et la persévérance. » Trois valeurs respectées au pied de la lettre à l’école du parkour.

> En savoir plus : facebook.com/Parkour37000 ou pk37.weebly.com pour les cours et stages

> Vidéos : youtube.com/user/gravitezer0

Reportage : Aurélien Germain

L’équilibre parfait pour un traceur ? Souplesse et puissance. (Photo Aurélien Germain)
L’équilibre parfait pour un traceur ? Souplesse et puissance. (Photo Aurélien Germain)

Parkour à Tours : « On voit l’espace en 3 D »

Charles Brunet a 28 ans et vit à Joué-lès-Tours. Il pratique le parkour depuis une dizaine d’années. Totalement accro !

« Le Parkour, c’est être adepte de la liberté du corps » (Charles Brunet). (Photo Mary Saphy – instagram.com/marysph)
« Le Parkour, c’est être adepte de la liberté du corps »
(Charles Brunet). (Photo Mary Saphy – instagram.com/marysph)

Tee-shirt rouge, cheveux courts et visage anguleux, Charles Brunet arrive avec sa compagne et sa petite fille âgée de 3 mois. Poignée de main franche, virile. Ses paumes sont égratignées, quelques éraflures strient ses bras et ses coudes. Charles est adepte du parkour, « cette façon de se déplacer d’un point A à un point B, de la manière la plus efficace possible et le plus rapidement » (retrouvez notre dossier ICI). C’est ainsi qu’il décrit cette discipline qu’il pratique depuis onze ans. Il l’a découverte lorsqu’il était en BEP, après un reportage. « Avec un pote, on a commencé par des acrobaties sur le béton, puis on a vu des vidéos sur YouTube avec David Belle. » La référence ultime ! L’un des pionniers du parkour, le maître.

Charles, qui passait son temps à grimper dans les arbres quand il était enfant, devient vite accro. Maintenant, il escalade tout, peut se retrouver sur un toit en quelques secondes, sauter entre deux murs, franchir n’importe quel obstacle. Peu importe sa tenue, en jogging ou en jean. Pour cela, cet ancien prof de kung fu s’entraîne dur. « C’est une discipline très rigoureuse. Musculation, technique et mental : ce sont les trois piliers », glisse-t-il.
Oubliez le terme de casse-cou, il n’aime pas ça. Charles ne s’est jamais rien cassé. « Le plus gore, c’est quand je me suis ouvert la main sur une poutre. Notre hantise ? Une entorse. » Ok, soit. « Mais tous les sauts sont risqués. »

Pour décrire l’esprit de ce sport, on emploie le terme de famille. Charles acquiesce. « On est tous potes, tous soudés. L’entraide est très importante. » À Tours, Charles et sa West Coast Family (sa « team », comme il l’appelle) adorent traîner du côté d’Anatole- France. Son coup de coeur ? La place Velpeau : « Parce qu’il y a plein de murs dans tous les sens ! »
Malgré 11 ans de pratique, il continue à découvrir de nouveaux endroits. Un moyen de voir la ville différemment, aussi. Quand il marche dans la rue, lui regarde en l’air : « Grâce au parkour, on voit la nature et l’espace en 3D. » Le reste du temps, il s’occupe aussi de Parkour 37, l’association où il entraîne des jeunes. Salle Vallée Violette à Joué, il inculque aux intéressé(e)s le goût de l’effort et la rigueur. « Et un échauffement un peu hard ! », concèdet- il, en rigolant. Dans le coin, il y a une trentaine de vrais actifs, mais plus de 250 personnes s’y sont essayées. Dès 12 ans, on vient le voir pour se frotter au Parkour. « On n’a besoin de rien, il n’y a aucune excuse. Il faut juste de la motivation. »

Aurélien Germain

>>Infos et vidéos sur wcfparkour.com ou sur Facebook 

[youtube]https://www.youtube.com/watch?v=T74gdZ7KLhY[/youtube]