MFest : « 7 ans à animer la scène metal tourangelle en se décarcassant »

Le 16 septembre, direction La Ville-aux-Dames : la commune accueille une nouvelle fois le MFest, festival metal devenu incontournable en Touraine. Tmv s’est entretenu avec Quentin, l’un des organisateurs qui parle metal, politique culturelle et économie sans langue de bois… et donne encore plus envie de faire un tour au MFest !

Le 16 septembre, ce sera déjà la 7e édition du Mfest. En regardant en arrière, comment perçois-tu l’évolution du festival ?
Une évolution un peu stagnante bien que cela ne soit pas pour nous déranger : je crois qu’on se satisfait simplement de faire quelque chose dont on n’a pas à avoir honte, en donnant de nos personnes pour un projet qui nous tient à cœur, quel qu’en soit le rendu final. C’est une toute petite barque menée par des gens qui s’investissent comme ils peuvent, à côté de vies bien remplies.
Je crois que notre évolution, c’est de se re-centrer sur l’essentiel et de ne pas confondre l’ambition et la vitesse. On est plus sage et plus rigoureux et on préfère viser moins haut pour exister plus longtemps. Ce qui nous semble vraiment important, c’est d’avoir une proposition artistique forte qui complète, tout en rupture, le paysage des musiques actuelles.

21230857_1825802704397018_5339861724892826105_nVous êtes installés à La Ville aux Dames. Comment ça se passe avec la municipalité, les habitants ?
Le festival a commencé là-bas et on doit beaucoup à la mairie de La-Ville-aux-Dames pour son ouverture d’esprit. Depuis le début, ils soutiennent le projet et les choses s’accélèrent cette année avec une implication plus accrue de leur part. Mener ce type d’activité peut  s’apparenter à un parcours du combattant, donc on le prend comme une forme de reconnaissance valorisante… d’autant plus qu’on ne fait pas dans le bal musette et que cela reste un parti-pris tout à leur honneur. Après 7 années à animer la scène metal tourangelle en se décarcassant, c’est même un grand soulagement.
Quant aux habitants, je ne pense pas que le festival ait un ancrage endémique de son emplacement, mais on aimerait vraiment, quitte à occuper un territoire, y accueillir le plus grand nombre de ses habitants, dans une logique tout à fait sociale et citoyenne. On ose aussi à penser qu’on est jamais à l’abri de passer à côté d’une véritable découverte quand on s’aventure dans une autre chapelle musicale que la sienne. La ville a forcément son lot de rockers et de personnes appréciant toute forme d’animation du tissu local.

Comment préparez-vous le festival en amont ? Ça doit être une sacrée organisation, non ?
C’est un processus qui s’étale dans le temps et qui, bien que pouvant paraître modeste, requiert un travail permanent. La programmation en est un parfait exemple, avec des centaines de mails, des dizaines de groupes contactés pour une affiche de seulement 9 groupes. Mais c’est surtout le système D et le fait de tout devoir produire sans fond de caisse, ni financement qui rend la tâche complexe et chronophage. C’est aussi le choix de tenter des affiches qui proposent des groupes étrangers exclusifs en Touraine. Nous espérons proposer une affiche plus orientée vers la qualité que vers la quantité.

Pour cette édition, vous êtes resté sur le credo « une journée de concerts ». Pourquoi ?
A la suite d’une grosse perte financière en 2015, nous avons dû réduire la voilure. Nous pensions que l’édition très réussie de 2016 nous permettrait de revenir sur un format 2 jours en 2017, mais la raison, la rigueur et les méthodes qui nous permettent d’organiser un événement sereinement et en envisageant l’avenir nous ordonnent de rester raisonnable et de poursuivre ce chemin de croix un peu plus longtemps.

Il y a cette année de nouveau du lourd côté affiche. Je pense notamment aux Grecs de Rotting Christ ou aux monstrueux Déluge. Tu as des coups de cœur, des petites préférences ?
J’aimerais beaucoup voir DELUGE, je ne trouve pas toute la scène post-black intéressante (bien qu’elle fasse évoluer le genre) mais la façon qu’ils ont de faire sonner leur composition, la dynamique et l’intensité du son m’hypnotise totalement, le groupe porte bien son nom : ils vont nous plonger en pleine tempête avec des samples léthargiques et fracasser le silence sans relâche. MALEVOLENCE promet aussi un grand moment de hardcore’n’roll surpuissant et très musical. Je sais d’avance que ça devrait plier tout le reste. Enfin, il me tarde de voir UNFATHOMABLE RUINATION, d’illustres malades venus d’outre-manche qui alignent le death-metal le plus technique mais le mieux écrit du monde. ROTTING CHRIST et sa messe épique vont faire voyager la salle en communion. Ça promet de beaux et fluides changements d’ambiance.

[youtube]https://www.youtube.com/watch?v=EroBj1i1zAs[/youtube]

Économiquement, comment tiens le Mfest ? Vous recevez des aides ?
Point du tout mon cher ! Cela dit, on va pas se plaindre, on court pas non plus après et monde politique et personnel municipal nous ont globalement toujours bien reçus et écoutés. Disons que c’est très chronophage, la recherche de financement est un métier en soi et notre situation de passionnés tenant un hobby sur le côté ne nous le permet pas suffisamment. On a reçu une petite enveloppe de dernière minute via, on les remercie infiniment.

D’ailleurs, la question est peut-être taboue, mais pour avoir une idée… Même si on est évidemment loin des Metallica et autres, à combien se situent les cachets des groupes que vous programmez ?
Le plus gros cachet jamais versé était de 4 500€ pour MELECHESH en 2015, ce qui était principalement le fait d’un coût de transport et de réunion des musiciens très élevé. On se situe un cran en dessous pour la tête d’affiche de cette année. Il faut bien comprendre que la majeure partie du cachet passe dans les frais de productions. Sans compter le travail que représente l’aboutissement d’un set et sa présentation sur scène (et qui ne se rémunère pas). Cela reste des montants très faibles, compte-tenu des 30 ans de carrière qu’ont certains de ces groupes, les montants dans le metal étant un peu moindres que dans d’autres domaines des musiques actuelles.

En jetant un œil à la scène locale, je trouve que les groupes de metal sont contraints de jouer et rejouer dans les petits bars de la Ville (Hurricane, Canadian…) Il y a le Mfest, le Riip Fest, mais sinon les salles moyennes semblent snober le metal. Tu es d’accord ? Tu en penses quoi ?
Je ne pense pas que les salles snobent le metal, le Temps Machine est même plutôt sensible à l’idée. Le vrai problème c’est surtout le manque de salles. Un club de 300 – 400 places comme le mythique Bateau Ivre manque cruellement en centre-ville. Le Temps Machine est une délégation de service public avec un agenda bien particulier et a donc, par conséquent, la fréquence d’accessibilité est peu élevé. Pour le reste, il n’y a pas de lieu accessible, peu cher, avec une jauge réaliste. Les orgas s’approprient donc les bars du centre-ville.
Il y’a plein de salles splendides dans toutes les communes de l’agglo mais elles ont des programmations « municipales » assez éloignés des musiques actuelles. L’espace Gentiana est un super lieu mais booké quasiment un an à l’avance. Il y’a des opportunités mais celles-ci forcent à créer une habitude pour un public potentiellement motorisé (c’est ce qu’on essaie de faire avec PHOENIX EVENT qui répond totalement à ce besoin). En tous cas, en centre-ville, le RIIP FEST propose un truc dément, mais hormis ces quelques rendez-vous, il manque des lieux de jauge « club ».

Deluge sera présent au Mfest (photo tmv / archives Hellfest)
Deluge sera présent au Mfest (photo tmv / archives Hellfest)

J’en avais déjà parlé avec l’orga du Riip Fest : le Hellfest a cette année encore ramené énormément de monde. Les médias « mainstream » commencent sérieusement à en parler et évitent de plus en plus les clichés ridicules. Comment vois-tu l’évolution de la perception du metal en France ? D’ailleurs, est-ce que cela a une incidence sur les « petits » festivals ?
Je trouve cette forme de fascination appréciable bien qu’un peu naïve. Je regrette surtout que cette « coolification » des esthétiques du metal ne s’accompagne pas forcément d’un intéressement à la musique. Ça devient une sorte de running-gag pour Yann Barthès. Impossible de nier cependant que le metal explose dans toutes les directions, fusionnent avec tout et attirent toujours plus d’auditeurs. De toute façon, ce genre s’auto-suffit depuis toujours et son intensité ne faiblissant pas, cela ne devrait pas changer.
Concernant les grosses machines que sont le Hellfest ou le Motocultor Festival, c’est génial mais c’est sûr que si tu payes ton pass pour un de ces événements (et souvent d’autres encore), tu as moins d’intérêt à payer pour te rendre dans des petits festivals, puisque ces machines offrent déjà tout ce que tu peux souhaiter voir. Mais on existerait sans doute pas sans eux et on pense de toute façon être dans une logique plus simple, avec un public plus local pour un événement humble de passionnés.

Vous êtes très actifs sur les réseaux sociaux avec la Mfest asso. C’est devenu obligatoire ? 
On joue avec facebook ! Nous, on trouve qu’on est un peu à la rue malgré tout, mais on tente, on essaie de rendre ça agréable. En tous cas, on a un véritable CM (community manager — NDLR) cette année qui cueille tout un tas de followers, c’est impressionnant ! Tant mieux, ça multiplie un peu notre portée. Mais je pense que l’identité se créée d’elle-même. On y pense pas trop !
C’est pas obligatoire, mais certains outils publicitaires permettent de garantir que l’on touche l’optimum des gens potentiellement concernés. C’est une économie de temps sur l’affichage permanent qui devient de toute façon inutile tant on est systématiquement recouvert le lendemain par des afficheurs paramilitaires.

Artwork : Liith Artworks
Artwork : Liith Artworks

En juin, vous avez eu un coup dur avec l’annulation d’un gros concert qui regroupait notamment Gorod et Agressor. Comment l’avez-vous vécu et qu’en retirez-vous ?
Très bonne question. Franchement, on n’a pas trop de regrets, c’est vraiment les vagues de la vie quoi. Je pense qu’on a été candides sur le moment, mais on aussi fait ce qu’il fallait pour une affiche exceptionnelle à un prix super raisonnable dans des conditions idéales. Je crois surtout qu’on a été pris d’amnésie quant à la proximité du Hellfest sur le calendrier. On nous y reprendra plus ! C’était dur pour les groupes cependant, c’est pas agréable d’avoir à gérer ça après les avoir motivés, sachant que ceux-là s’investissent en temps, en effort et en argent.

En 2014, lors de notre première interview, vous me disiez que le public du Mfest était « rigolard, détendu, attentif et attentionné », qu’il y avait des familles et des connaisseurs. C’est toujours le cas ? A-t-il évolué, changé ?
OUI !C’est la même mentalité de l’absence de mentalité. C’est libre, c’est relax, tout le monde s’en fout, pas de mauvais esprit mais sincèrement, j’en sais rien, faudrait aller causer avec chacun d’entre eux! (sourires)

Propos recueillis par Aurélien Germain

> MFest, le samedi 16 septembre, à l’espace Maria-Callas de La-Ville-aux-Dames. De 34 à 38 € / Gratuit pour les moins de 12 ans. 
> De 14 h à 0 h 30. 
>L’événement Facebook pour le MFest, c’est par ICI

[youtube]https://www.youtube.com/watch?v=HojQpqd7bF8[/youtube]

Changement de lieu MFest : la mairie de Saint-Pierre réagit

MFest et changement de lieu. Suite à la parution d’une brève dans tmv, la municipalité de Saint-Pierre-des-Corps a tenu à réagir.

Suite à la brève parue dans le n°216 de tmv, à propos du changement de lieu du MFest (le festival devant se produire à Saint-Pierre-des-Corps déménage à La Ville aux Dames), la mairie a tenu à réagir. Nous reproduisons leur communiqué :

« On a un brin toussé  mercredi dernier à la mairie de Saint-Pierre-des-Corps en lisant les commentaires sur le changement de lieu du festival Mfest. « Malveillance », et autres «  lenteurs administratives » ou histoire «  abracadabrantesque » , publiés sur la page Facebook de Mfest et repris par TMV, ont pour le moins laissé pantois les services de la ville qui indiquent avoir eu des échanges tout à fait courtois et agréables, tant avec Phoenix qu’avec Mfest. Phoenix n’est pas autorisé à ouvrir au public pour des raisons de sécurité. Les deux commissions de pompiers sur l’accessibilité et la sécurité de l’établissement ont rendu des avis défavorables pour recevoir du public. Le maire de Saint-Pierre a pris acte. Il s’agit là  de sécurité du public, c’est tout. Lorsqu’il y a un accident, on sait aussi faire le procès des autorités publiques qui n’ont pas pris leurs responsabilités… »

Festival metal MFest : à poil les clichés !

Tmv adore les métalleux et le metal… Mais on a joué les gros lourds en posant plein de questions hyper cliché à Quentin Rusterholtz, chargé de prod’ du festival MFest. Flûte, il est resté zen, on n’a même pas réussi à le faire craquer…

L'an dernier, au MFest (Photo RMS Event)
L’an dernier, au MFest (Photo RMS Event)

Aïe, les méchants sataniques envahissent de nouveau Rouziers. Les habitants doivent en avoir marre, non ?
Tous les gens qu’on a rencontrés sont ravis, ouverts d’esprit, curieux et gentils. On fait notre truc sans déranger personne. Comme une grande messe noire secrète (rires). La communauté de communes n’a eu aucun a priori non plus, et on a le soutien de la Fraca-ma. Ils nous ont dit qu’on faisait de la culture et qui plus est, à la campagne.

Avec un public dangereux comme ça, il doit y en avoir des problèmes…
Le seul problème qu’on a eu en 5 ans, c’est quelqu’un qui s’est mis dans le fossé, alors qu’il roulait au pas sur le parking ! Le public métalleux est hyper bien élevé…

Pittbulls in the nursery, Anaal Nathrakh, Verbal Razors…
Quels sont les plus poètes de l’affiche ? (Rires) Anaal Nathrakh, car ils s’inspirent de l’écrivain Lovecraft et parlent de la société. Hatesphere, c’est davantage une ode à la bière ! Sinon, Orphaned Land (groupe israélien qui milite pour la paix israélo-palestinienne et a été nominé pour le Prix Nobel de la paix, NDLR).

Autant de bière pour un festival… Vous êtes alcooliques ou dépressifs ?
La bière est la réponse à tout : tu loupes un exam’, tu en bois une ; tu le réussis, tu en bois une. Non, franchement, on n’écoule pas tant de fûts que ça au MFest. On ne croirait pas, hein ? Le metal, c’est que du bruit ? La musique, ce n’est que du bruit. Le metal n’est pas une musicalité très accessible. Il faut aimer l’énergie, la violence. Un non-métalleux aura du mal. Cela requiert de l’attention. C’est un bruit scientifique.

De toute façon, au Mfest, il n’y a que des mecs bande de machos !
Il y a autant de filles que de mecs ! Il n’y a que dans le metal que les nanas vont clasher les garçons dans la fosse. Elles assument à fond leur look. C’est macho en apparence, mais personne n’embête les filles. Et puis, les métalleux sont des lovers ! Ce sont de vrais canards en couple.

Il y aura un « marché » au Mfest. Bah alors, on est fans de shopping ?
Carrément ! Le metal vit beaucoup grâce aux produits dérivés. Il y a des collectionneurs, des fashionistas ! On a beau avoir 50 tee-shirts noirs de groupe… on continue d’en acheter !

Non, désolé, cette année, Kendji Girac n'est pas à l'affiche...
Non, désolé, cette année, Kendji Girac n’est pas à l’affiche…

>>EN BREF

C’EST QUAND ?
La 5e édition du Mfest se tiendra les 4 et 5 septembre, à l’Espace culturel des 4 Vents, à Rouziers- de-Touraine.
Vendredi, ouverture des portes à 17 h, et le samedi, à 13 h 30. Tarifs : pass 2 jours 35 € (préventes) ou 40 € (sur place). Sinon, 25 € la journée (préventes) ou 28-30 € sur place. Le parking et le camping sont gratuits.
> Plus d’infos sur festival-mfest.com ou encore mieux, sur l’événement sur Facebook (HOP, on clique ICI !)


CÔTÉ AFFICHE

Quatorze formations, qu’elles soient internationales, hexagonales ou locales. De quoi se nettoyer les oreilles, avec : Fleshgod Apocalypse, Orphaned Land, Melechesh, Hatesphere, Pittbulls in the nursery, Adrana, AO, Anaal Nathrakh, Pleasure to kill ou encore nos chouchous tourangeaux de Verbal Razors. Sans compter les fous furieux de Crisix (oui, oui, ça va remuer du popotin), ainsi que Nesseria, Bestial Soul et Belphegor.

Perso, à tmv, avec plus de 200 concerts metal à notre actif, on peut déjà vous assurer que ça va être un sacré bazar avec Anaal Nathrakh, valeur sûre sur scène, qui se la joue en mode bulldozer (personne ne sera épargné). Ainsi qu’un petit coup de cœur à Melechesh, au black metal oriental difficile à appréhender, mais ultra-technique et carrément jubilatoire. Sans oublier les Verbal Razors : cet été, celles et ceux qui étaient dans la fosse à Aucard ont pu en ressortir avec quelques kilos en moins (et légèrement en sueur… léger…).

DES EXPOSANTS
Cette année, le Mfest market s’installera sur 200 m2. Bref, le rêve pour s’habiller, mais aussi pour acheter des disques et se renseigner sur des assos… Seront notamment présents Dolorem Records, Crève clothing, ou encore Sea Shepherd Tours (l’ONG maritime vouée à la protection des espèces marines) ou encore l’excellent (sans exagérer !) artiste The Stains of Liith. C’est d’ailleurs lui qui a réalisé l’artwork de l’affiche du MFest. Son travail est hallucinant et vous pouvez en avoir un aperçu juste ici.

1 000

Le nombre de spectateurs qui se sont déplacés, l’an dernier, sur deux jours, au Mfest. « L’ambiance était top et les groupes adorables », rappelle Quentin Rusterholtz, chargé de prod’ du festival.

>> ALLER PLUS LOIN.
Histoire d’illustrer tout ça en musique, voilà quelques clips des groupes qui passeront au MFest.
[youtube]https://www.youtube.com/watch?v=gkSOpmchJiM[/youtube]

[youtube]https://www.youtube.com/watch?v=uq8zQIP5sxY[/youtube]

[youtube]https://www.youtube.com/watch?v=2JNI0vd0tz8[/youtube]

Festival MFest : Metal hurlant !

Chevelus de tout poil, unissez-vous. À l’occasion du Festival metal, le MFest, entretien avec Quentin Rusterholtz, chargé de prod.

Le Mfest se réinstalle à Rouziers cette année (Photo MFest)
Le Mfest se réinstalle à Rouziers cette année (Photo MFest)


Il y a quand même quelques concerts de metal, ici à Tours, mais aucun gros festival… Vous étiez les pionniers ?

Pionniers, je ne sais pas. Il y a eu pas mal d’initiatives, mais pas régulières. Il y a eu un creux pendant un temps. Le Black Hawk organisait des concerts avec des groupes cool, mais c’était la seule option. C’est difficile de louer des salles pour du metal : question bénéfices, etc. Le MFest, c’est un peu la seule initiative. On est contents ! Ceux qui ont voulu se lancer dans l’aventure du festival avaient la gnaque, le matos logistique et avaient une mentalité d’artisan. Sans tout ça, il aurait été dur de faire les premières éditions…

Comment est née l’idée du MFest ?
L’ancien président de l’association avait un groupe (les Caverneux). Voyant le manque de structures et étant plus dans l’action que le blabla, il a voulu se lancer. Ce n’est pas du hasard, c’est un festival créé par passion.

Niveau affiche, la différence entre la première édition et cette quatrième fournée est étonnante. Vous avez déjà de gros groupes ! 

Aborted
Aborted

C’est vrai ! Les gens seraient surpris de savoir la solidarité qu’il y a dans le monde du metal. Aussi, prenons le cachet de Napalm Death (la tête d’affiche, NDLR) : il n’est pas si élevé alors qu’ils tournent depuis 30 ans. On est contents, car on a progressé. Mais on aimerait aller encore plus vite. On souhaite juste que ce soit solide. Comme nous sommes indépendants, il y a peu de subvention, environ 1/5e du budget. Si cette année, ça fonctionne bien, on se fera coproduire pour la prochaine.

Comment est le public du MFest ?
Rigolard, détendu, attentif et attentionné, provocateur, éclectique. Il y a aussi des familles, des ados, des connaisseurs… Ils sont supporters et soutiennent le local.

Si tu devais donner envie au profane qui n’y connaît rien au metal de  venir au MFest, comment t’y prendrais-tu sans lui mettre un couteau sous la gorge ?
Oh, je lui dirais qu’il en aura pour son argent et que c’est intense à vivre, scéniquement aussi. C’est une expérience. L’affiche est variée, car « metal » ne veut rien dire, il y a un paquet de styles différents à y inclure. Il pourra profiter aussi d’une ambiance bon enfant. Et enfin, il pourra voir de la technicité musicale et essayer d’outrepasser la voix, qui est un problème pour beaucoup.

L’affiche est étonnante, car on passe du bourrin, comme Aborted, au très rare et particulier Regarde les hommes tomber. Vous souhaitez rester éclectiques ?  
C’est une volonté, mais c’est aussi suivant l’ordre des choses. En plus, on fait ça à la fin des vacances, avec des groupes qui n’ont pas fait tous les festivals… Smash Hit Combo, par exemple, va embêter un sacré paquet de metalleux, car c’est du metal avec du chant rappé. Mais ça joue bien ! On n’a pas le budget pour une grosse affiche. Et si on reste enfermés dans un style particulier, on se tire une balle dans le pied.  Cette année, on a Phazm qui vient de se reformer, ils ne sont nulle part. Trepalium aussi, nous sommes les premiers à les avoir après leur nouvel album. Otargos revient d’Angleterre etc.

Quels seraient les groupes rêvés, à obtenir un jour ?
On a failli avoir Decapitated. Personnellement, j’adorerais avoir Textures, Katatonia – mais ils sont trop chers – Entombed, Havok, Obscura, Psycroptic…

A l’époque, vous aviez tourné un faux reportage absurde et délirant sur votre festival…
Oui, c’était après un reportage sur M6 (un documentaire mensonger et subjectif qui avait révolté la communauté metal). Poncho Prod, dont je fais partie, voulait parodier leur truc, avec un ton racoleur etc. On s’est dit : allons nous jouer des clichés. C’était la couverture vidéo du fest ! Elle compte 35 000 vues, ça a buzzé sur plein de sites. C’est là qu’on voit que le metal est sous-représenté alors qu’il y a un public énorme. (Il peut être visionné ICI)

Cette année, le Hellfest a été médiatisé comme jamais et a ramené 152 000 personnes sur trois jours (lire nos articles ICI). Penses-tu que ce festival puisse bénéficier à des initiatives plus locales ?
Pour moi, les effets secondaires sont positifs. A notre niveau tourangeau, on ne voit pas encore la différence. Le pouvoir de diffusion du Hellfest ne rejaillit pas sur nous. Le public qui vient est déjà conquis, mais leur succès peut rejaillir par contre sur les médias. Et c’est une bonne chose.

Mais au fait, pour le MFest, pourquoi Rouziers et pas Tours ?
Parce qu’on nous a accueillis là ! Et on aime que tout le monde soit gagnant. Là-bas, ils nous ont fait la salle moins cher, nous ont offert un soutien psychologique durant l’organisation et un très bon accueil. Tours, on n’aurait pas pu, déjà parce qu’il n’y a pas de salle au centre. A Rouziers, on peut aussi installer le camping, le market (un marché metal, NDLR) et on n’embête personne !

Propos recueillis par Aurélien Germain
EN BREF
C’EST QUAND ?
Le MFest se déroulera les 5 et 6 septembre, à l’Espace Les Quatre vents de Rouziers-de- Touraine. Début des concerts à 18 h le vendredi et 14 h 30 le samedi. Pass 2 jours à 25 € en prévente, ou 30 € sur place (possibilité de ticket une journée). Infos sur festival-mfest.com

L’ASSO
C’est l’association MFest qui organise le festival. Celle-ci est née des cendres d’Xtreme Arts et met en place des concerts depuis cinq ans, notamment à La Belle Rouge (Joué-lès-Tours) : « Ils sont vraiment un soutien pour nous. D’ailleurs, ils ferment leur salle les deux jours du MFest et viennent au festival ! »

QUATRIÈME ÉDITION
L’an dernier, « on a fait 508 entrées. Il en aurait fallu 540. Ce n’est pas une gamelle, mais on a eu des surcoûts. Cette année, l’idéal serait de faire venir 600 personnes ».

À VOIR ABSOLUMENT
> Phazm, parce qu’ils se reforment et mélangent habilement death metal et rock ‘n’ roll (histoire de secouer sa chevelure ondoyante et sa bière).
> Aborted, parce que la brutalité musicale des Belges va vous faire péter vos plombages (histoire de reprendre contact avec votre dentiste).
> Regarde les hommes tomber, parce qu’ils sont rares sur scène (histoire de frimer aux prochains concerts).
> Napalm Death, parce que le groupe anglais, ultra engagé, est culte et a posé les bases du grindcore bien énervé (histoire de prendre une douche de transpiration si vous êtes au premier rang).
[youtube]http://www.youtube.com/watch?v=6Q6BYV9k9c4[/youtube]