Ces chercheurs et chercheuses qui font briller Tours : terres glaciales et insectes

[3/3] L’Université et le CHRU de Tours regroupent de nombreux chercheurs de talent. Nous vous en présentons plusieurs pour un court mais passionnant voyage au centre de la recherche.

LE GOÛT DES TERRES GLACIALES

Isabelle BIANQUIS. Professeur d’anthropologie

Cela a commencé à l’adolescence, par le goût des récits de voyage. Ensuite, Isabelle Bianquis s’est cherchée mais avec l’envie profonde de découvrir des terres lointaines.

C’est en croisant la route d’un professeur d’anthropologie à l’université de Strasbourg que son sort s’est scellé. Puis celui de sa thèse, toujours le fruit d’une rencontre : le vin en Alsace. Une autre rencontre la mène en Mongolie, seule, dans les années 90, à l’époque où le pays sortait du système soviétique. Une révélation.

Elle y mène des recherches innovantes sur les boissons fermentées, les éleveurs nomades consommant des alcools à base lait. « Il fallait que j’aille voir cela ! », s’enthousiasme-t-elle.

Arrivée à Tours, en 2006, elle s’attaque à une étude majeure sur le territoire et les traditions en Mongolie, « comment les rituels sont définis par le politique dans un pays qui, à l’époque, craignait de disparaître entre la Russie et la Chine ». En 2012, retour à ses premières amours, elle intègre un laboratoire de l’Université de Tours spécialisé dans l’alimentation et entame une recherche en Iakoutie, en Sibérie.

Avide des grands espaces plutôt glaciaux, son prochain projet la mènera en Antarctique. « Ce sera la première fois qu’une anthropologue sera intégrée dans les bases scientifiques ! » Son but : étudier comment les gens construisent du lien social dans des conditions extrêmes et isolées. L’alimentation bien sûr ne sera pas loin : « Je suis sûre que le rôle des repas et du chef cuisinier est important dans l’organisation de leur vie. »


LE MONDE MERVEILLEUX DES INSECTES

David GIRON Directeur de recherche CNRS et de l’Institut de Recherche sur la Biologie de l’Insecte (IRBI)

Tout a commencé ici à la faculté de Tours pour celui qui dirige aujourd‘hui un institut mondialement réputé et LA référence européenne dans le monde de la recherche sur les insectes.

Après une formation complétée aux États-Unis et au Pays de Galles, le voici revenu chez lui, à Tours, recruté au CNRS. Quand on écoute David Giron, on a immédiatement envie de plonger avec lui « dans le monde fascinant des insectes pour lequel je me suis pris en affection », un domaine de recherche vaste qui permet de partager ses connaissances avec les industries.

Ses deux axes de recherche ? D’une part, les interactions entre les insectes, les plantes et les micro-organismes. Ce qui le mène à trouver des solutions écologiques pour réguler les organismes ravageurs par exemple. D’un autre côté, il s’intéresse à la production d’insectes pour l’alimentation humaine et animale, en définissant les conditions les plus favorables à leur production.

« Nous sommes un appui à cette filière d’avenir », explique David Giron. Le biologiste croise aussi son domaine avec celui du patrimoine. Il annonce un projet avec les soieries Roze : la sériciculture, qui consiste à produire des vers à soie dans l’objectif de revaloriser cette filière en Touraine. Car le chercheur de 44 ans originaire de Loches se dit « très attaché » à son territoire.

Ce n’est pas pour rien que cet excellent vulgarisateur scientifique sera cette année l’ambassadeur de la Fête de la science pour la Région Centre-Val de Loire.

Textes : Aurélie Dunouau


> RETROUVEZ LA SUITE DE NOTRE DOSSIER DANS LE NUMERO 372 DE TMV OU EN CLIQUANT ICI ! 

 

Ces chercheurs et chercheuses qui font briller Tours : cours princières et cosmétiques intelligents

[2/3] L’Université et le CHRU de Tours regroupent de nombreux chercheurs de talent. Nous vous en présentons plusieurs pour un court mais passionnant voyage au centre de la recherche.

DANS LA COUR DES GRANDS

Anne-Madeleine GOULET
Chercheuse au CESR en histoire des arts du spectacle

Elle fréquente les plus grandes cours princières d’Italie et d’Europe. Installée dans la salle Saint-Martin du Centre d’Etudes Supérieures de la Renaissance (CESR) auquel elle est rattachée, Anne-Madeleine Goulet nous embarque aux XVIIe et XVIIIe siècles.

Elle ambitionne d’écrire une histoire des arts du spectacle à Rome à partir des archives des grandes familles aristocratiques. C’est là que se situe l’originalité car, habituellement, les historiens travaillent sur cette époque avec les sources pontificales.

Théâtre, danse, musique…, ce qui l’intéresse c’est de comprendre pourquoi les riches familles finançaient à cette époque les spectacles. Quels en sont les enjeux économiques et politiques. Ce qui nous renvoie forcément « à apprendre des choses utiles pour aujourd’hui. Car à cette époque, art et politique étaient indissociables. Les aristocrates recherchaient des gains de prestige. Et puis on s’interroge beaucoup sur le mécénat privé aujourd’hui. »

Pour ce projet baptisé PERFORMART (2016-2021), elle a obtenu un budget conséquent de deux millions d’euros, une équipe pluridisciplinaire de 30 personnes issues de 8 pays. Cette imposante recherche est l’œuvre du CNRS et de l’École française de Rome pour laquelle elle a travaillé quatre ans. Elle a dû convaincre des institutions et des princes de lui ouvrir les portes de leurs archives. À terme, plus de 6 000 documents seront transcrits et en libre accès.

Anne-Madeleine Goulet retient également de cette aventure le travail en équipe. « Nous ne travaillons pas de la même manière et je tiens beaucoup à cette logique de projet. » Deux livres sortiront en 2021 couronnant la fin de PERFORMART. Encore la tête dans ses archives, Anne-Madeleine Goulet, n’en pense pas moins à sa prochaine recherche. Dans cette perspective, elle, vient de se mettre avec frénésie à l’espagnol.


VERS DES COSMETIQUES INTELLIGENTS

Émilie MUNNIER
Docteur en pharmacie galénique

Des résultats et un impact sur la vie réelle. Voilà à quoi aspire cette bosseuse qui, depuis qu’elle a poussé la porte de la faculté de pharmacie à Tours en 2004, n’a plus quitté ses amphis et labos. Le peu de temps libre qu’elle s’accorde, elle le consacre aux sorties culturelles. Sa spécialité ? La pharmacie galénique qui s’intéresse à la formulation et fabrication du médicament et des cosmétiques.

En clair, la chercheuse fabrique sa potion, en l’occurrence un médicament ou une crème à partir de molécules. Avec son équipe « Nanomédicaments et nano-sondes », ce sont une dizaine de personnes à travailler sur le développement de ces formules et méthodes. Et le labo tourangeau est en pointe, intégré au réseau Cosmetosciences, très soutenu par la Région. Il réunit chercheurs et entreprises du Centre-Val de Loire (dont les parfums Dior) leur permettant une visibilité européenne.

Un autre projet très concret mobilise Emilie Munnier : MISTIC, sur lequel elle collabore avec des chercheurs de l’Université d’Orléans et des partenaires industriels. « On travaille sur des nouveaux matériaux intelligents en utilisant des méthodes innovantes. Par exemple, sur une crème solaire que l’on appliquerait le matin et dont les actifs ne se libéreraient qu’au contact de la peau aux UV. »

Des méthodes déjà appliquées en cancérologie, domaine qu’elle connaît bien puisqu’elle y a débuté ses recherches. « Ce qui me plaît c’est d’être utile au quotidien. »

Textes : Aurélie Dunouau


> RETROUVEZ LA SUITE DE NOTRE DOSSIER DANS LE NUMERO 372 DE TMV OU EN CLIQUANT ICI ! 

 

Ces chercheurs et chercheuses qui font briller Tours : vaccin contre l’hépatite C et médicament contre le Covid

[1/3] L’Université et le CHRU de Tours regroupent de nombreux chercheurs de talent. Nous vous en présentons plusieurs pour un court mais passionnant voyage au centre de la recherche.

LA QUÊTE D’UN VACCIN CONTRE L’HÉPATITE C

Philippe ROINGEARD Professeur de biologie cellulaire, chercheur en virologie

Cette sommité de la médecine qui dirige le laboratoire INSERM morphogénèse, antigénicité du VIH et des virus des hépatites, travaille avec une trentaine de personnes, dans un laboratoire du CHRU classé P3 (soit un labo totalement confiné), autour d’une palette large de virus qui embrasse le zika, le chikungunya et, depuis six mois, le Covid-19.

Il ne se voyait pas « rester les bras croisés, alors que nous avons les compétences et l’envie de comprendre le cycle infectieux du Covid. Nous avons rapidement mis le virus en culture et développé des projets ». Une étape sera d’ailleurs bientôt franchie avec la publication de résultats de recherche fondamentale.

Mais c’est surtout l’hépatite C qui occupe le temps et les pensées de Philippe Roingeard. Depuis le dépôt de son premier brevet en 2009 et l’obtention de prix les plus prestigieux dans le domaine, la mise en route d’un vaccin approche. Testé sur les animaux, il souhaite l’appliquer sur l’homme. Dans le but de passer au stade industriel et commercial, il vient d’ailleurs de créer une start-up afin de récolter des fonds privés. C’est la seule équipe à développer ce projet en France.

« La maladie est assez terrible car si on ne s’en rend pas compte tout de suite, elle peut causer des dégâts dans le foie, allant jusqu’à un cancer. » 70 millions de personnes sont infectées dans le monde, environ 300 000 en meurent chaque année. À 59 ans, Philippe Roingeard compte bien être celui qui aura couplé un vaccin hépatite B et hépatite C, quarante ans après la découverte du vaccin contre l’hépatite B par un autre illustre tourangeau, Philippe Maupas. Pour l’anecdote, Philippe Roingeard fut son élève en 1re année de pharma.


UN MÉDICAMENT CONTRE LE COVID

Alexandra AUDEMARD-VERGER Docteur en immunologie clinique

Alexandra Audemard-Verger, le mercredi 27 mai 2020 au CHU Bretonneau de Tours. (Photo : Cyril Chigot)

Arrivée au CHRU de Tours, il y a moins d’un an, pour associer à son activité clinique l’enseignement et la recherche, Alexandra Audemard-Verger, n’a pas perdu son temps. À 36 ans, cette jeune chercheuse en immunologie clinique a fait ses classes à Paris avec le Dr Lucas, à l’hôpital Cochin.

Passionnée par le fonctionnement des globules blancs, elle cherche à comprendre « les mécanismes qui font que le système immunitaire se dérègle et se retourne contre nos propres organes, comme s’il y avait un incendie ».

Et c’est ainsi que cette spécialiste des maladies rares et de la vascularite (ou l’inflammation des vaisseaux) s’est retrouvée au printemps dernier à se pencher sur les cas de COVID-19. Avec son équipe composée uniquement de femmes, elle s’est employée jour et nuit, trois semaines durant, à écrire un projet de recherche, financé par le CHRU et du mécénat.

Son idée : tester un médicament, l’anakinra, déjà utilisé pour traiter les maladies auto-inflammatoires, sur les patients atteints d’insuffisance respiratoire aiguë. Pour l’instant, 45 patients sont inclus dans cet essai thérapeutique baptisé Anaconda, il en faudrait 240 pour valider le processus.

À ce projet, la chercheuse ajoute celui d’une étude sur les lymphocytes, développée avec Christophe Paget de l’INSERM. Alexandra Audemard-Verger ? Une tête chercheuse qui ne cesse d’aller vers cette « quête de connaissances » qui la guide depuis toute petite.

Textes : Aurélie Dunouau


> RETROUVEZ LA SUITE DE NOTRE DOSSIER DANS LE NUMERO 372 DE TMV OU EN CLIQUANT ICI !