Stand High Patrol: « L’expérimentation fait partie de notre démarche »

En 2017, Stand High Patrol publiait l’album The Shift, hommage au hip-hop des années 90. Le groupe puise son inspiration partout. Ce mélange des genres provoque un son unique qui leur a permis de s’imposer dans le milieu du dub.

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Vous avez une palette musicale extrêmement large. Ce que vous proposez est un style qui vous est propre ?

Rootystep. C’est ce que nous essayons de faire. Si on nous le dit, on est plutôt content. On s’influence de divers styles musicaux et on en propose quelque chose de différent.

Mac Gyver. Avec Rootystep, on s’est rencontré au lycée. On était tous les deux mélomanes. Le peu que je connaissais du reggae ne m’avait pas emballé. J’étais plus hip-hop et musique électronique. Rootystep m’a fait découvrir le sound system, un autre pan du reggae assez différent des groupes qui jouent sur scène. Après, on écoute de tout. On ne s’arrête jamais d’écouter de la musique. La musique qu’on fait est perpétuellement influencée.

Parmi toutes vos influences, il y a aussi le jazz. Cela a pu en surprendre voire en dérouter plus d’un. Le jazz coïncide avec ton arrivée Merry ? Comment s’est faite cette collaboration ?

Merry. Avec Mac Gyver, on se connaissait depuis quelques années. Au début, les sonorités de Stand High Patrol étaient plus électroniques, dub digital. Puis ils ont commencé à utiliser de plus en plus de samples de batterie jazz. Pour le deuxième album, ils pensaient déjà à faire intervenir un cuivre. Depuis quatre ans, je suis tout le temps avec eux.

M.G. Petit à petit, Pupajim [le chanteur du groupe] a eu un penchant pour le jazz. Écouter du jazz était devenu son obsession. Avant même de penser à Merry, Pupajim voulait déjà que ce deuxième album soit orienté jazz.

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Est-ce qu’on peut dire que vos albums sont des laboratoires dont vous êtes les chimistes ? On a l’impression qu’avec vos sons, vous expérimentez de nouvelles choses ?

M.G. L’expérimentation fait partie de notre démarche, autant dans les choix d’influences que dans l’équipement que dans les choix des morceaux. Les disques qui sortent dans le commerce, tu peux les écouter où tu veux. Mais à côté de ça, on compose des morceaux uniquement faits pour le live. Il y a des morceaux qu’on va jouer qu’une fois, parce qu’on sait qu’il sonnera bien à fort volume et pas forcément sur un disque. C’est une autre manière d’appréhender la musique. On pense surtout au moment où on va le jouer et pas forcément à comment il va être écouté à la longue. Un sound system a sa propre sono. Le matériel s’adapte au fur et à mesure de l’usage. Le son n’est jamais le même. A cause du matos, on est incapable de rejouer deux fois la même chose. Après, c’est aussi comme ça qu’on aime jouer.

Quand on est un sound system, on a l’habitude de jouer plusieurs heures. Ce système de festival où vous avez une heure de show n’est-il pas un peu frustrant ?

R. On ne va pas dire que c’est frustrant, mais différent.

M. Plus le set est cours, plus on le prépare. On aime bien avoir des sets de deux heures voire trois pour pouvoir montrer notre palette musicale.

M.G. C’est dur de faire voyager les gens en une heure mais d’un autre côté, ça nous permet d’aller directement dans des choses plus efficaces. On n’aime pas avoir des sets formatés. A chaque date, le set est différent. On essaie de se surprendre nous même pour essayer de surprendre le public.

R. On essaie toujours de laisser une place à l’improvisation.

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Moaning: « Nous démarrons notre propre culte »

Avec ses influences post-punk, shoegaze et rock indé, le trio californien Moaning signe un premier album réussi. Tmv a pu les rencontrer hier soir, quelques heures avant leur passage sur la scène d’Aucard.

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Moaning a vu le jour il y a trois ans. Auparavant, vous jouiez dans différents groupes. Comment vous êtes-vous rencontrés ?

Sean Solomon. Avec Pascal, nous nous sommes rencontrés lorsque nous étions ados. Au lycée, nous avons commencé à jouer de la musique ensemble. 

Pascal Stevenson. Dans cette école, nous faisions probablement parti des quelques personnes hors cadre. Nous écoutions de la musique punk, de la musique indépendante. 

S.S. Andrew nous a rejoint plus tard. Nous l’avons croisé sur la scène indé de Los Angeles. Nous avions les mêmes centres d’intérêt, alors nous nous sommes très vite entendus.

Andrew Mackelvie. Je jouais de la batterie dans une église contemporaine.

S.S. L’église nous a réunis (rires) ! Façon de parler… Contrairement à nous, il a eu une éducation religieuse. Plus tu viens d’une famille chrétienne, religieuse, plus tu as envie de te rebeller contre ça. Maintenant nous démarrons notre propre culte. 

Vos paroles sont simples et efficaces. Cela peut parfois contraster avec ta voix un peu sombre. C’est un contraste sur lequel vous jouez ? Vous cherchez à le mettre en avant ? 

S.S. Personnellement, j’ai beaucoup été influencé par un groupe, Microphones, et j’aime les groupes lourds qui ont des paroles douces. C’est compliqué de définir la musique qu’on fait, mais clairement, on joue de ce contraste. 

Et pourquoi prendre Moaning (gémissement) comme nom de groupe ?

Moaning. Ce premier album, c’est surtout le lien entre le plaisir et la souffrance. Comment est-ce que les deux se mélangent ? Nous sommes issus d’une génération où beaucoup de familles ne fonctionnent pas. Des familles sont dissoutes. L’amour peut être mal interprété. Notre nom de scène est venu de l’ambiguïté du terme. Il y a une vraie dualité. On peut gémir de plaisir, mais aussi de souffrance.

[youtube]https://www.youtube.com/watch?v=qdNWCgnqeMY[/youtube]


Vous avez fait la première partie du groupe METZ. Comment ça s’est passé ?

M. C’était super. Nous avons fait une tournée de cinq semaines : trois en Europe et deux aux États-Unis. Nous avions déjà fait une tournée avec eux auparavant. Lorsqu’on écoute leur musique, ils ont l’air effrayants, mais en réalité, ce sont de vrais papas. 

Votre premier album, vous l’avez signé dans l’ancien label de Nirvana. Ça ne vous met pas une certaine pression sur les épaules ?

S.S. D’une certaine manière, oui. Après, cela nous donne une certaine légitimité. Et puis cela nous pousse à travailler plus, à être plus sérieux. Nirvana était mon groupe préféré lorsque j’étais enfant. C’est même pour ça que je me suis mis à jouer de la guitare. Maintenant, je me sens épanoui (rires).

Et vos futurs projets ?

M. Nous sommes en train de travailler sur notre prochain album. Ce sera un nouveau concept, un nouveau message. Tout le monde doit se tenir prêt à affronter ça. Il faut que les gens envisagent de rejoindre notre nouveau « mouvement religieux » sur lequel nous donnerons des informations plus tard !

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Le son de la rentrée : Kommando Shamanik

Chaque semaine, notre chroniqueur Doc Pilot vous parle de ses pépites culturelles locales.

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Dur le retour du Sud en Touraine, le retour des couleurs violentes au pastel, des chaleurs envahissantes à la fraîcheur ligérienne ; passage à la Guinguette de Saint Avertin pour sa “ dernière ” histoire de se goinfrer de crêpes de la Smalla en guise de médecine. En bande-son Oak Ink, du Jazz intime et classieux dans une formule étrange (drums, harpe, basse), mélange antinature et ciselé pour un trip décalé…
Arrivé trop tôt au Hurricanes Bar pour voir The Roots Addicts, pas le temps d’attendre, l’envie de retrouver “ Le Vieux ”, les glaces à l’angle de place Plum puis le cocktail “ Narbey ” chez… Narbey, mais vite car à minuit l’envie d’écouter en direct la première du retour de Alain Maneval sur France Inter. Son invité, Henri Padovani, le premier guitariste de Police, homme libre ou perdant de l’Histoire ? Je suis heureux du retour de Maneval ; j’ai toujours apprécié ce mec ; ce samedi et ce dimanche il balance de l’incontournable de la fin des seventies et du début des 80’s, la belle époque si féconde, et toutes ses anecdotes à donner du sens à tous les titres…
Au courrier, le dernier album de 49 Swimming Pools et encore une fois la satisfaction canaille de se laisser séduire par un travail orienté vers le beau et l’unique, bâti à l’anglaise, dernière strate d’un triptyque aux accents növo-victoriens emprunt de classe et de romantisme absolu ; pas étonnant que les dames soient folles de ce concept. Trois fois de suite je l’écoute sans m’en lasser ; dommage je ne pourrai pas aller les voir jouer Chez Nello, oui vous avez bien lu Chez Nello : je vous le disais, ils sont étranges et vicieusement aristocrates…. Pour me nettoyer de toute cette beauté je glisse dans la flaque de bière et de sueur mêlées du Slade Alive… Autre album pour la bande-son de cette rentrée : celui de Kommando Shamanik, ethno techno rock, concept totalement dédié au souvenir des indiens d’amérique du nord, au drame du génocide et à l’ultime préservation d’une culture et d’une philosophie, le tout décliné en mantras survitaminés propres à déclencher la transe shamanique, la rencontre avec l’esprit, la danse et l’aliénation du temps aux espaces caoutchouteux dénués de référence. Ce disque est magique dans tous les sens du terme, il est didactique aussi un peu à la manière d’un guide spirituel appuyé sur la tradition mais dispensé avec la technologie musicale du 21e siècle…
Ouverture d’une nouvelle galerie rue Roger Salengro, NoWhite Cube, migration d’un espace initié à Savonnières vers le quartier des Prébendes sur deux étages avec des volumes honorables propres à offrir le recul nécessaire pour apprécier les œuvres ; diverses pratiques et supports à sensation où chacun peut trouver sa préférence, la mienne allant aux baigneuses de Juliette Gassie et aux portraits de famille de Frederic Dumain, mais aussi à la virtualité réaliste de Bertrand Robert et ses personnages d’hypernormalité impudique, à l’autre réalité de Sandrine Gayet, ma curiosité titillée par le travail de Roland Orépük même s’il ne me touche guère au cœur…
Festival Jazz en Touraine à Montlouis sur Loire ou le rendez-vous incontournable de la rentrée avec, en ouverture à Ligéria, le pianiste cubain Roberto Fonseca pour un concert intime à la Keith Jarrett, de longues pièces en solo dans des constructions évolutives mélangeant divers styles et influences. Au final un concert magistral pour un public à l’écoute, ponctués d’instants de joies osant une décontraction conceptuelle basée sur l’idée de nous retrouver « chez Roberto », dans son intimité. Sans lourdeur excessive l’artiste théâtralise sa prestation, la terminant par une suite pianiste haut de gamme avec une reprise de « La Javanaise » en épilogue. Le thème magique de Gainsbourg est repris par l’audience et c’est beau….
La rentrée c’est aussi la présentation de la saison à venir par les structures culturelles ; Marie Hindy programme l’Espace Malraux et c’est bien, car la dame est passionnée, pragmatique, humble et au service de l’optimisation du lieu et des moyens ; du bonheur du public aussi… Mes coups de cœur de ce programme : La Meute et son cirque alternatif et décalé, Ez3kiel bien sûr et la présentation de son nouvel album, « La face cachée de La Lune » ou l’interprétation du chef d’œuvre du Pink Floyd joué en direct. … J’ai vu la tournée Dark side of the Moon en 1973, je suis donc impatient de cette relecture de 2015…
Autre présentation, celle de Saint Avertin au Domaine Allias à Vouvray ( ben oué cette coterie rusée sait recevoir) : des envies et de la gourmandise dans cette programmation : Louis Chedid, Catherine Ringer, Manu l’ex chanteuse de Dolly (là, je bois du petit lait et je ne veux pas rester sage )… Jack le Chien est roi pour « Art. La Bonne Franquette », un weekend dans l’atelier de Brice Auconie pour réunir une vingtaine d’artistes sur le thème de la représentation du héros (Jack !!) : Dominique Spiessert (plus Spiess space ke Jack), Francine Gentilleti (le chien farceur), Alain Bouro (excellent), Clotilde Barcat (un chien de troupeau), François Pagé (Brice et son chien dans quelques années)… Avec le héros modèle qui court de la cave au jardin : joyeux concept entre Boule & Bill et Tintin & Milou….
[youtube]https://www.youtube.com/watch?v=VrI5DMS3Aa4[/youtube]
A La Belle Rouge soirée Kommando Shamanik, le Powwow Electrik 1… Medecine Groove trio en première partie, du métal en hommage aux hommes rouges avec un dernier morceau envoûtant et un bassiste de force et de technique armé… Puis le Kommandoh Chamanik l’un des groupes majeurs de la nouvelle scène tourangelle, concept autant musical que visuel, venu nous jouer son nouvel album (nous en parlions plus haut), collection de mantras à transes propres à rendre fou le public. Je suis impatient de les voir dans les grands festivals, la réaction devrait être magique sous la messe de ses trois acteurs : un guitariste mêlant la hargne électrique à la peinture cosmique, un homme aux machines (un sorcier devrait-je dire), le shaman Z, colonne vertébrale de l’affaire, et un infatigable joueur de didgeridoo, souffle tribal de l’ensemble : La Terre, le Feu, l’Air… Ils ont un son, un style, un combat, un pouvoir de séduction tel que le public suit et en redemande…
Au retour Maneval sur les ondes désormais la bande-son de la nuit pour ceux qui roulent entre une heure et minuit… Malheur à moi !! En ouvrant la télé au retour et tombant sur Alain Ruquier et ses deux roquets prétentieux, stériles et puants ; heureusement sur une autre chaîne, Amy Winehouse en live… Alors moi aussi j’y pars en live en passant des indiens à l’indienne…. Trop d’adrénaline pour vraiment dormir, le jour arrive dans le « Rocks » de Aerosmith… Retour à Montlouis dans l’ap’ pour le concert de Nina Van Horn, du blues rock bien seventies empreint de soul et de rythm and blues ; Masahiro Todani, le guitariste soliste, est un virtuose habité, le talent boosté par un look scénique de prince de l’électricité… Au soir je tombe à pieds joints dans l’excellent dernier disque de Christiane Grimal, avant de me finir avec « Itaipu » de Philip Glass, acheté sur la brocante Eric Geffroy… enfin l’album de Kommandoh Chamanik pour tomber en phase avec l’été indien.