Blackout total : balade infernale

Une comédie façon trip cauchemardesque à travers Los Angeles. Divertissant, sans être révolutionnaire.

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Peut-être qu’un jour, dans un avenir incertain, les distributeurs arrêteront de retitrer bêtement les films américains. Sait-on jamais, c’est beau de rêver. La dernière réalisation de Steven Brill n’échappe pas à la règle. Contrairement à ce que son titre francisé laisse supposer, Blackout total n’est pas qu’un simple ersatz de Very Bad Trip, dopé au trou noir post-cuite. Intitulé Walk of shame outre-Atlantique (littéralement « balade de la honte », une expression anglo-saxonne désignant les lendemains de soirée quand on n’assume plus vraiment sa tenue), il s’agit plutôt d’une version diurne du After Hours de Scorcese.
Dans Blackout total, Meghan Miles, jouée par la délicieuse Elizabeth Banks, est une présentatrice télé qui vient de passer une sale journée : larguée par son fiancé, promotion qui lui file sous le nez… Remède à cela ? Une grosse chouille arrosée avec les copines. Résultat de cela ? Le réveil dans le lit d’un inconnu, sévère gueule de bois à l’appui, voiture embarquée à la fourrière. Pas idéal, alors qu’elle vient d’apprendre qu’elle est de nouveau en lice pour le poste de ses rêves et doit présenter le JT… dans quelques heures.
Portable perdu dans la foulée, un trip cauchemardesque commence alors, à travers les bas-fonds d’un Los Angeles façon envers du décor.
La belle blonde, mini-robe moulante et cheveux ébouriffés, poursuivie par deux policiers ripoux la prenant pour une prostituée, plonge alors dans une virée burlesque. Une course effrénée, allant du chauffeur de taxi russe libidineux et bipolaire, aux dealers de crack foldingues (un des grands moments du film !).
Sans temps mort, Blackout total enquille les mésaventures et les quiproquos plus qu’improbables, mais envoie quelques scènes savoureuses et tordantes comme des missiles. Blackout total a beau être gentiment capillotracté (tiré par les cheveux, m’enfin !), il reste agréable et divertissant. On sourit parfois devant la bêtise et le côté invraisemblable (ah, un seul portable vous manque et tout est dépeuplé…), mais cette comédie US légère et sans prétention divertit.
Légèrement répétitif – le revers du comique de situation et de l’absurde – Blackout total s’assume pourtant totalement. Et c’est ce qui fait son charme. Un charme il est vrai, aidé par une Elizabeth Banks, malheureusement habituée aux seconds rôles, mais ici surprenante. Sexy et drôle, elle porte le film à bout de bras. Parfaite dans son rôle, elle brille en solo. Blackout total ne révolutionnera sûrement pas le genre de la comédie américaine. Ce n’est pas original pour un sou. C’est même le genre de périple vu et revu. Mais, aidé par une écriture brillante, il fait rire et sourire. Et ça, c’est déjà pas mal.
Aurélien Germain

CINE_FICHEComédie, de Steven Brill (États- Unis). Durée : 1 h 34. Avec Elizabeth Banks, James Marsden, Gillian Jacobs, Sarah Wright Olsen…

Very bad trip 3 enfonce (encore) le clou

L’ultime opus de la trilogie alterne entre le très drôle et les gags déjà vus. Les fans aimeront ; pour les autres, gueule de bois assurée.

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« Politiquement cor-rect, me re-voilà ! » Voilà ce qu’a dû crier Todd Phillips en s’attelant à la (lourde) tâche de Very Bad Trip 3. Car, après un premier volet inégalable côté humour corrosif et sa suite pas franchement réussie, il ne fallait pas flancher avant de s’attaquer à ce troisième et dernier opus.
D’autant que cette fois, ni mariage ni lendemain de fête difficile à l’horizon. Alors, comment finir la trilogie en évitant le verre de trop ? Todd Phillips a eu l’idée de proposer un « trip » foutraque et volontairement tiré par les cheveux : toute la bande d’amis a fini par s’installer dans des existences tranquilles. Alan a arrêté son traitement aux médicaments. En parallèle, le truand Marshall est toujours à la recherche de Chow pour une histoire d’or volé. Ces deux lignes directrices vont alors se percuter pour accoucher de l’intrigue principale.
Mais alors, gueule de bois ou pas ? Le troisième volet a le mérite de placer le personnage d’Alan au centre de l’histoire : l’occasion pour Zach Galifianakis de livrer une performance incroyable de justesse entre émotion et drôlerie pure. Entre la première scène, la décapitation de la girafe et celle de la mort de son père, paradoxalement hilarante, et ses passages touchants, son travail d’acteur est savoureux. À ses côtés, John Goodman excelle en truand désabusé, tout comme Ken Jeong dans son rôle de Chow cinglé et ordurier.
Le hic (ou le hips), c’est que cet ultime épisode agit comme le coup de l’étrier après plusieurs verres. Bonjour les dégâts ! Parce que les rebondissements sont quasi inexistants et se résument bien souvent à des gags éculés. Moins jubilatoire et déjanté, ce pot d’adieu se retrouve, au final, privé de la grosse biture, le genre d’aller sans retour vers le 100 % potache qui avait fait le succès du premier volet. Very Bad Trip 3 est un peu comme une bière fruitée : ça a du goût certes, mais ça ne fait pas franchement tourner la tête.
Aurélien Germain