Voyage au cœur de la littérature jeunesse

La bibliothèque centrale de Tours abrite depuis peu le Centre de ressources en littérature pour la jeunesse, appelé Centre Patrice Wolf. Mais qu’est-ce que c’est ? Une mine d’or ! Tout simplement le meilleur et l’incontournable de la littérature de jeunesse, du début du XXe siècle à nos jours.

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Les Trois Brigands, Le Prince de Motordu, Mathilda, Petit bleu et petit jaune… Ces célèbres titres vous rappellent quelque chose ? Alors pourquoi ne pas les relire ? Ou les découvrir si vous ne les connaissez pas.

Tous, et bien d’autres pépites de la littérature de jeunesse, sont au catalogue des bibliothèques et médiathèques de la Ville.

Certes, l’emprunt nécessite une inscription payante (11,50 €), mais la consultation sur place, elle, est totalement gratuite et sans limite de temps. Et de consultation il est question au Centre Patrice Wolf. Inauguré dans l’intimité le 18 novembre dernier, il donne accès, sur rendez-vous uniquement, à la crème de la crème de la littérature de jeunesse.
On y trouve tout d’abord ce que la section jeunesse de la centrale cache – ou plutôt conserve – depuis son ouverture en 1937. Fortes d’une politique de conservation précoce, les différentes équipes de bibliothécaires qui se sont succédé ont, au fil des années, sélectionné et protégé dans leurs « magasins » les plus belles œuvres de fiction et de documentaires de l’édition jeunesse : 20 000 ouvrages de grande valeur. Plus de 300 livres d’artistes, soigneusement rangés dans les réserves, deviennent également consultables. Toujours sur demande et non en accès libre. Car ce sont des pièces rares, souvent numérotées, d’une grande beauté et d’une grande fragilité.

Enfin, le Centre Patrice Wolf donne également à voir les 15 000 titres récemment offerts à la bibliothèque par l’ancien animateur radio éponyme (lire l’interview ci-contre). Pour consulter tout ça ? Pas le choix. Vous devez prendre rendez-vous à cette adresse centrepatricewolf@bm-tours.fr
Vous serez ensuite reçus dans une salle dédiée, sur la mezzanine. Ne soyez pas surpris. Les 36 000 bouquins n’y sont pas. Seul le millier de livres de références sur la littérature de jeunesse, ses auteurs, son édition, y est rangé. Ceux que vous aurez demandés auront été préparés par l’une des bibliothécaires. Facile et pratique.

Textes et photos : Jeanne Beutter

⇒INTERVIEW DE PATRICE WOLF

 « Un livre pour enfants est une oeuvre d’art »

Patrice Wolf ne lisait pas quand il était petit. Ça ne l’intéressait absolument pas. Et pourtant, il est devenu l’un des plus grands critiques de livres pour enfant. Après 20 ans passés au micro de l’émission « L’as-tu lu mon p’tit loup » sur France Inter, il a décidé de faire don à la bibliothèque municipale de Tours de 15 000 ouvrages de sa collection personnelle.

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Pourquoi ce don ?
Pendant 30 ans, j’ai conservé l’ensemble des documents sur lesquels j’ai travaillé pour La vie du rail tout d’abord, puis pour mon association Astéroïde et enfin pour France Inter. Et comme j’ai toujours oeuvré pour le service public, j’ai souhaité tout simplement lui rendre ce qu’il m’avait donné. Le service public de la littérature, c’est la bibliothèque. Je suis installé à Tours depuis plus de 20 ans. En plus, j’ai appris récemment que c’était l’une des premières villes françaises à avoir accueilli une bibliothèque enfantine, en 1937. C’était donc tout à fait indiqué.

Qu’y trouve-t-on de singulier ?
Ce n’est ni tout ce que j’ai accumulé au cours de ma carrière, ni tout ce que j’ai chroniqué. Il s’agit d’une sélection des livres que j’ai pu repérer depuis mes débuts en tant que critique de livre pour enfants depuis 1974. Chacun représente, selon moi, une avancée dans l’histoire du livre de jeunesse. Par leur auteur, leur histoire, leur construction, le thème abordé, la façon de le traiter, ils marquent une réelle différence avec ce qui a été fait auparavant. Voilà ce qui caractérise ce fonds. C’est un regard professionnel sur la littérature de jeunesse, sur une trentaine d’années.

Vos livres viennent s’ajouter aux différentes collections patrimoniales de la bibliothèque pour former le nouveau centre de ressources qui porte votre nom. Quel en est l’objectif ?
En France, il y a relativement peu de banques comme celle-ci, qui permette à des chercheurs, à des étudiants, à tous les professionnels de la littérature et aux amateurs de pouvoir se référer à l’histoire du livre de jeunesse, à tous ses courants, ses créateurs, etc. De ce point de vue-là, Tours devient donc une référence. Évidemment, pour faire vivre ce centre, pour le valoriser, il faut quelques subsides. Cependant, cela ne nécessite pas des sommes énormes. Il faut en avoir conscience. À l’échelle d’un budget municipal, ce n’est quasiment rien.

Un livre pour enfant, c’est avant tout une oeuvre d’art, un produit culturel. J’ai toujours essayé de bien mettre en évidence le travail des auteurs, des illustrateurs, des éditeurs et tout ce qui fait que c’est une oeuvre d’art en tant que telle.

Littérature jeunesse : « L’Indre- et-Loire est un département très gâté »

Dominique Veaute est fondatrice et coordinatrice de Livre Passerelle. Depuis 1998, cette association tourangelle sillonne le département pour chuchoter à l’oreille des petits et des grands contes, histoires et autres récits tirés d’albums illustrés d’hier et d’aujourd’hui.

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Le temps fort tourangeau de la Quinzaine du livre jeunesse 2017 s’est déroulé à l’Hôtel de ville les 20, 21 et 22 octobre derniers. Livre Passerelle y était partenaire. Quel bilan pour cette 47e édition ?
Cette année encore, ce rendez-vous autour de la littérature jeunesse, organisé par la Ligue de l’enseignement 37, a attiré beaucoup, beaucoup de monde. Il est devenu un événement incontournable à Tours. Il s’agit d’un véritable succès pluri-partenarial, avec un réel engagement de la part des libraires, des documentalistes, des associations, etc.

Les ministères de l’Éducation nationale et de la Culture ont lancé, le 12 octobre dernier, la campagne « Ensemble pour un pays de lecteurs » afin de « susciter l’envie de lire chez les enfants et les jeunes ». En tant qu’acteur spécialisé, que pensez-vous de cette annonce ?
La lecture est indispensable à tous, ce n’est pas nouveau. Plus personne ne conteste cela. Les enseignants font déjà un travail formidable dans ce domaine. Alors valoriser leurs actions, soutenir les parents, les associations, les bibliothèques, les librairies, la lecture publique, c’est très bien, c’est même évident. Nous attendons de voir les actions concrètes en faveur de ce mouvement.

Quelles pourraient être ces actions ?
Faute de financement, nous avons dû arrêter nos temps de lecture à voix haute durant les vacances scolaires. Ils étaient pourtant très fréquentés. Nous avons donc besoin d’argent pour poursuivre nos opérations. Mais au-delà de ça, il nous faut renforcer, retravailler la complémentarité entre nous et l’Éducation nationale. Nous devons pouvoir oeuvrer ensemble, à l’échelle d’un territoire. Idem avec les animateurs périscolaires. L’Indre- et-Loire est un département très gâté en ce qui concerne la littérature jeunesse. Nous avons de nombreuses librairies dont une spécialisée, des sections de bibliothèques très dynamiques, une universitaire experte, des auteurs, des éditeurs, plusieurs associations, etc. Il est important de nous donner les moyens de pérenniser l’implantation de ce réseau. Les livres ont un pouvoir de rassemblement énorme. Nous y croyons !

Propos recueillis par Jeanne Banse