« Les greeters ne m’inquiètent pas »

Émeline Gibeaux, guide-conférencière professionnelle, nous livre son point de vue sur les greeters.

Émeline Gibeaux, guide-conférencière professionnelle à Tours.

Que pensez-vous du concept des greeters ?
En soi, le concept ne me dérange pas. Au contraire, c’est une avancée pour le tourisme participatif. Dans la lignée de ce qui existe déjà depuis longtemps comme le couchsurfing. En revanche il ne faut pas faire d’amalgame, un greeter n’est absolument pas un guide-conférencier. Ce sont deux conceptions totalement différentes de la visite. Le bénévole montre la ville telle qu’il la connaît, l’apprécie. Le professionnel partage ses connaissances, historiques notamment. Mais il gère aussi toute la logistique par exemple. Aussi, un guide est apte à faire la visite à de gros groupes tandis qu’un greeter propose des balades plus personnalisées, pour un groupe de six personnes au maximum. Nous proposons aussi des visites en petits groupes, bien sûr, mais nous ne sommes pas sur le même créneau.

Quels sont les risques d’une confusion entre greeter et guide-conférencier ?
Ce n’est pas la même chose, il faut que ce soit très clair aussi bien dans la tête du greeter, du guide que dans celle du visiteur. De plus en plus, c’est vrai que le débat se pose : les gens peuvent parfois se demander s’il s’agit d’un guide-conférencier professionnel ou d’un greeter. Les confusions pourraient entraîner la concurrence déloyale. Mais je ne crois pas que ce soit le cas. Les greeters ne sont pas ce qui m’inquiète le plus pour notre profession.

Il y a eu de nombreuses manifestations de guides-conférenciers, en décembre dernier notamment, et votre slogan était : « guide-conférencier, c’est un métier ».
Oui c’était notre slogan mais il ne faisait pas directement référence aux greeters. C’était surtout une allusion au manque de visibilité dans notre profession. Beaucoup pensent qu’elle est reservée aux jobs d’été pour les étudiants ! Alors que nous avons des qualifications et des formations complexes.

Quelles sont ces formations ?
Depuis 2012, la préfecture dél ivre une carte professionnelle attestant que le guide-conférencier est titulaire d’une licence professionnelle. (Tandis que pour être greeter, aucun diplôme n’est exigé, NDLR) Ce statut avait d’ailleurs été remis en cause par une discussion autour de la loi Macron. Telle que la réforme était prévue il y a quelques mois, elle prévoyait de supprimer la carte professionnelle. Ce qui est un danger pour notre statut. Au contraire, les gros tour-opérateurs auraient été gagnants car la réforme leur aurait permis de se contenter d’accompagnateurs de voyages qui n’ont pas nos qualifications. Heureusement, nous avons été entendus après nos manifestations. Le dossier est maintenant dans les mains du ministère de la Culture, et non plus de l’Économie.

Comment va évoluer le statut ?
Les réunions entre nos syndicats et les autorités nous le diront ! Mais je crois que c’est sur la bonne voie. Nos conditions d’exercice ne sont pas faciles. Nous sommes souvent vacataires. Et au niveau administratif, c’est parfois très complexe. Donc, je ne suis pas contre une réforme, mais il ne faut pas qu’elle nuise à notre profession.

Propos recueillis par Solène Permanne.