A Tours, des écoliers font leur propre JT !

À l’école Jules-Verne de Tours-Nord, des élèves réalisent journaux télévisés et flashs spéciaux de A à Z. Tmv est allé les rencontrer un jour de tournage.

Manel et Issam, les deux présentateurs du JT, sont prêts pour le tournage.
Manel et Issam, les deux présentateurs du JT, sont prêts pour le tournage.

Nous voilà, chers téléspectateurs, pour le JT de JV9 ! » C’est ainsi que Manel et Issam lancent le 9e journal télévisé de l’école élémentaire Jules-Verne, à Tours-Nord. Face à eux, Adem est planté derrière la caméra. Quant à Ayoube, en bon rédacteur en chef, il supervise le tout. Les quatre élèves de CM1- CM2 ont installé leur plateau télévisé dans la salle de classe de Pierre Deseuf, enseignant en CM2 dans l’établissement. Rien de spécial à préparer pour les décors, la classe est déjà bien pourvue. Sur les murs s’étalent du papier argenté et des affiches multicolores qui présentent les Aliens, les romans d’anticipation ou le genre post-apocalyptique. Il y a même un vaisseau Star wars accroché au plafond. « On travaille sur les auteurs de science-fiction pour enfants, précise l’enseignant. On est en train d’écrire un livre de SF dont vous êtes le héros. » Finalement, à tmv, on aurait bien envie de retourner en CM2 ! Pour filmer, pas besoin non plus de grands moyens matériels et financiers : une petite caméra numérique et un pied suffisent. Ce qu’il faut surtout : du temps. Et l’investissement de Pierre Deseuf dépasse largement le cadre scolaire.

Tout a commencé il y a trois ans. Alors que l’école s’était auparavant dotée d’une caméra pour un voyage en Angleterre, des élèves de CE2 ont souhaité l’utiliser pour filmer une séance à la patinoire. Ils décident de monter un journal télévisé et sa diffusion, dans toute l’école, rencontre beaucoup de succès. La première édition fait des émules. « Au début, nous programmions des reportages uniquement dans l’enceinte de l’école. Puis nous avons commencé à sortir. Comme cette fois où nous sommes allés aux Remparts de Tours, un samedi de 9 h à minuit. Nous avons assisté à l’entraînement et au match, visité les vestiaires, interviewé le président du club… Une sacrée journée ! », se remémore le professeur.

Ayoube, le rédacteur en chef, regarde avec attention les images tournées par Adem.
Ayoube, le rédacteur en chef, regarde avec attention les images tournées par Adem.

Ce jeudi-là, les élèves ne disposent que d’une heure pour tourner leur JT. Tous les reportages sont prêts. L’objectif ? Enregistrer la présentation du journal et les lancements de chaque séquence filmée. Les deux présentateurs répètent rapidement leur texte, inscrit sur une feuille de papier. Ici, il faut se débrouiller sans prompteur. Puis, c’est parti pour la première prise, en mouvement, à l’entrée de l’école. Pas facile de stabiliser manuellement la caméra en marche arrière ! Ayoube garde l’oeil sur chaque prise. Son avis sur la première ? « La caméra bouge trop. Il faut la refaire. » La deuxième fois, c’est le cadrage qui semble mauvais. Au bout de quatre tentatives, Pierre Deseuf intervient : il est temps de passer à la suite. « Ayoube est très attentif au résultat final, remarque-t-il. Nos objectifs ne sont pas les mêmes. Pour moi, peu importe si le journal est raté. Ce qui compte, ce sont leurs progrès en diction, en français, en concentration… »
Car l’intérêt pédagogique de ce projet est indéniable. Avant chaque reportage, les élèves rédigent une fiche de préparation. Ils travaillent ainsi l’expression écrite, la manière de poser des questions ou l’organisation dans le temps. Après le tournage, ils se chargent de visionner les vidéos, sélectionner les séquences, les monter puis écrire et enregistrer les commentaires. De multiples tâches qui leur permettent de développer des compétences scolaires. Aussi, le comité de rédaction se réunit chaque semaine sous la direction d’Ayoube.

D’ailleurs, comment appréhende-t-il sa fonction ? « Je donne des rôles aux gens, je suis le chef ! » Ce qu’il aime aussi : écrire et organiser le calendrier. « Plusieurs élèves en difficulté accèdent à ce projet, ajoute Pierre Deseuf. Un ancien présentateur, par exemple, avait de grosses difficultés d’élocution. Il passait des heures à s’entraîner. » En effet, les apprentis journalistes sont très motivés. Avec l’expérience, ils prennent confiance et commencent même à se lâcher sur la présentation. Bientôt Le petit journal bis ? « C’est bien, mais c’est plus compliqué à filmer », note leur enseignant. « Mais c’est plus génial ! », répond Manel du tac au tac. Hyper à l’aise face à la caméra, la jeune fille est aussi pleine d’enthousiasme : « Depuis que je regardais le JT de l’école, j’avais trop envie d’y participer. J’ai eu une grande chance qu’Ayoube me choisisse pour la présentation. »

Pas facile de filmer en mouvement.
Pas facile de filmer en mouvement.

L’équipe redouble d’inventivité pour lancer ses sujets. En témoignent leurs différentes mises en scène : munis d’un sabre laser et d’un pistolet, ils se prennent pour des chevaliers Jedi. Puis, pour annoncer un reportage sur des correspondants anglais, ils boivent le thé dans une tasse à l’effigie de la reine d’Angleterre : « Hum, delicious ! ». Avec l’accent, bien sûr. Cette envie de bien faire, cet investissement, Pierre Deseuf y est particulièrement attentif. Pour autant, ce n’est pas tous les jours facile. Comme cette fois où Ayoube a piqué une grosse colère à cause d’un reportage commandé qui n’avait pas été réalisé. Aussi, les enfants s’investissent personnellement et s’exposent au regard des autres. Ce projet, ils le mènent avec une grande autonomie. Ils apprennent en faisant. Et en se trompant. « C’est aussi par la pratique qu’ils appréhendent les dessous du journalisme, ajoute le professeur. Comment sélectionner les images ? Que choisit-on de montrer aux gens ? » Parfois, lorsqu’ils décident de montrer un événement qui se passe mal, leurs camarades ne sont pas contents… Pour l’instant, ce n’est pas le souci d’Issam, le second présentateur, qui a hâte que le prochain JT soit diffusé : « On va passer devant toute l’école, on va être célèbre ! C’est mon rêve ! », s’exclame-t-il. Les parents peuvent également visionner le journal sur une page privée Facebook.

Il a fallu répéter plusieurs fois la séquence Star wars.
Il a fallu répéter plusieurs fois la séquence Star wars.

Parfois, les enfants ont même le privilège de réaliser un reportage secret. « Seuls ceux qui travaillent sur le sujet sont au courant. Il doivent garder le secret jusqu’à la diffusion. Il se sentent investis d’un rôle, et ça les met en confiance », estime Pierre Deseuf. Par exemple, lorsque deux classes ont déménagé récemment au rez-de-chaussée, des élèves ont enquêté sur les raisons de ce changement. Lorsque le flash spécial a été diffusé dans toute l’école, c’était un vrai scoop. Chaque fin d’année, les enfants réalisent même une fiction. La cerise sur le gâteau.

Reportage et photos : Nathalie Picard

Prix jeunesse : chaque voix compte !

Pour la première édition de son Prix jeunesse, la Ville de Tours a proposé à la classe de CM1-CM2 de l’école Victor-Hugo de représenter la voix des enfants. Rencontre avec les plus jeunes membres du jury.

Depuis plusieurs semaines, les cinq ouvrages en lice tournent dans les cartables avant d’être relus ensemble en classe : les CM1-CM2 de l’école Victor-Hugo sont jurés du premier Prix du livre jeunesse lancé par la Ville de Tours. Ils sont chargés d’élire, parmi 5 livres jeunesse, le meilleur document d’info et d’actualité. Et Mathieu Lamonerie et ses 26 élèves ne plaisantent pas avec leur rôle.
Le livre Malala, pour le droit des filles à l’éducation reste plus d’une heure sur le grill : religion, géopolitique, histoire…, de fil en aiguille, à travers l’histoire de la petite Pakistanaise, le maître aborde une multitude de sujets soulevés par les questions des élèves. « On va passer au vote, annonce Mathieu Lamonerie. D’abord, de façon subjective, combien attribuez-vous à ce livre ? » Chacun se dépêche d’inscrire sa note et les ardoises se lèvent une à une, comme dans une salle des ventes.
Katia lui met 10/10 mais Rodrigo n’a visiblement pas apprécié l’ouvrage et lui colle un misérable 1. « Il faut argumenter ! », rappelle le maître. Pourquoi tu lui donnes 1 ? » D’autres hésitent entre 8 et 9. Dans l’ensemble, les votes sont plutôt généreux envers Malala, et à la surprise générale, elle arrive en tête du peloton. Déception des enfants : « Ah non, on préférait l’histoire de l’avion solaire ! »

Une deuxième session de votes départage les deux leaders. Une semaine plus tard, c’est la délibération officielle. Arno, Romane, Arthur et Katia, les 4 délégués, expliquent le choix de la classe face aux autres membres du jury. Surprise : leur choix correspond à celui d’une grande partie du jury. Et Malala emporte finalement tous les suffrages.

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