Caroline Langlade : vivre après le Bataclan

Rescapée du Bataclan, Caroline Langlade a participé à la création de l’association Life for Paris et se bat pour une vraie prise en charge des syndromes post-traumatiques. Son livre Sorties de secours vient de recevoir le Prix du livre d’Actualité du Club de la Presse Centre Val-de-Loire.

(Photo Matthieu Gardes)
(Photo Matthieu Gardes)

La scène se passe à Saint-Doulchard, dans la banlieue de Bourges. Dans un beau domaine arboré, une grande demeure ancienne devenue lieu culturel municipal accueille un important salon du livre. C’est dans ce cadre qu’est remis le Prix du livre d’actualité décerné par le Club de la Presse Centre Val-de-Loire.

Caroline Langlade se tient, fragile, au milieu de la petite foule venue pour l’occasion. Tout au long de la journée, elle a signé des livres, de son écriture droite et serrée, elle a souri à des gens, écouté souvent ce qu’ils avaient à dire eux, ce dont ils se souvenaient, d’un certain 13 novembre 2015.

Ce jour-là, dans la soirée, après avoir passé la journée avec des migrants que les forces de l’ordre avaient évacués de la Place de la République, Caroline était allée au Bataclan écouter le concert des Eagles of Death Metal. C’était l’anniversaire de son compagnon, Alexandre. Puis l’horreur était advenue. Elle avait passé plusieurs heures, avec quarante personnes, otages des terroristes dans une loge de la salle de spectacle parisienne. Elle en était sortie sans blessure physique, mais gravement blessée psychologiquement.

« Ce jour-là, se souvient Caroline, j’ai basculé dans un autre monde. » La violence qui frappe les migrants, mais aussi les soldats, les aidants ou les victimes où qu’ils soient dans le monde lui devient alors intimement compréhensible. Blessée dans sa chair, jusqu’au plus profond d’elle-même, elle connaît les effets physiques du traumatisme lié à la possibilité d’une mort imminente.
Depuis, elle se bat pour les faire comprendre et accepter, ces effets. Pour que l’État fasse ce qu’il faut pour les traiter vraiment et sur le long cours. Pour que la société ne se contente pas de pleurer ses morts mais accepte aussi de réparer les vivants, comme elle le dit, empruntant la jolie formule de Maylis de Kerangal.

Elle se bat, Caroline, avec toute la fougue de son tempérament et, en dépit de tout, avec l’élégance de son sourire. Mais après tout ça, forcément, elle se bat en plus avec une arme que seuls possèdent les anges et les miraculés : l’humanité absolue. Le 13 novembre 2015, dans les ruines du Bataclan, elle a laissé la carapace que les humains se forgent en grandissant. Elle n’a plus de protection. Elle n’a plus que la chair des sentiments, l’essentiel.

En recevant le diplôme format A4 symbolisant son prix, Caroline a la voix qui tremble. En quelques phrases qui tombent dans une écoute absolue, elle dit son émotion, très simplement. Elle dit que ce prix est celui de « tous les amis » victimes comme elle. Elle est heureuse, surtout, que son livre ait été reçu pour ce qu’il est : une main tendue à une société pour qu’elle n’oublie pas ses enfants blessés.

> Caroline Langlade, Sorties de Secours (Robert Laffont), Prix du livre d’actualité du Club de la Presse Centre Valde- Loire. 19 €.

Sorties de secours : morceaux choisis du livre de Caroline Langlade 

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#Paris : des hommages, des visages

Ce ne sont pas des symboles qui sont tombés vendredi. Ce sont des femmes et des hommes qui se trouvaient là. Comme nous aurions pu nous y trouver nous-mêmes, sans distinction d’âge, de confession ou de couleur de peau. Sur Facebook, sur Twitter, on peut voir les échos de leurs vies fauchées…

PEACE, LOVE & DEATH METAL

C’est pendant la chanson Kiss the devil que le Cauchemar a débuté. Un riff délicieux subitement noyé dans l’horreur des tirs. Une chanson géniale de l’album « Peace, love, death metal ». Les Eagles of Death metal n’ont rien à voir avec les Eagles. Encore moins avec le death metal. C’est simplement du rock’n’roll. Des chansons drôles, cliché, filant la banane. Heureuses. Le public était venu pour ça. Pour l’amour de la musique, du rock, de la déconne, de la vie tout simplement. Et tout s’est écroulé. Comme aux quatre coins de Paris.
La musique est notre arme à nous. La vie et la joie de vivre aussi. On aime l’art, les terrasses, boire un coup, la musique, sourire. On aime la vie, montrons-le. La liberté est plus forte que la terreur.
Aurélien Germain

Elodie Breuil
Elle avait 20 ans et étudiait le design à l’école de Condé, à Paris. En janvier, comme beaucoup de Français, elle avait participé à la marche républicaine suite aux attentats contre Charlie Hebdo et l’Hyper Casher.

Elodie Breuil

Lola Salines
Elle avait 29 ans. Elle était mariée, aimait la vie et le roller Derby. Elle était éditrice chez Gründ Jeunesse. « Une jeune femme talentueuse, lumineuse… Je suis si triste de cette jeunesse fauchée. » écrit Claudine sur sa page Facebook.

Lola salines

Mathieu Hoche
Technicien caméraman de la société Ericsson, il travaillait depuis le démarrage avec la chaîne France 24. Il a été tué au Bataclan. Il avait 37 ans et était père d’un enfant de six ans.

Mathieu Hoche

Djamila Hound
Originaire de Dreux, elle avait 41 ans et était la maman d’une fillette de huit ans. Vendredi soir, elle était à la terrasse du restaurant La Belle équipe, rue de Charrone, en compagnie d’amis. Elle a été fauchée par deux balles tirées par les terroristes.

Djamila

Véronique Geoffroy de Bourgies
Cette quinquagénaire avait créé en 2004 l’association Zazakely Sambatra, qui avait pour mission d’aider à l’éducation des enfants malgaches. Elle avait elle-même adopté, avec son mari, deux enfants venus de Madagascar. Elle a été tuée rue de Charonne.
Véronique

Cédric Mauduit
Normand de 41 ans, il était au Bataclan avec cinq amis. Originaire du Lion-sur-Mer, il était Directeur de la Modernisation du Département du Calvados.
Cédric

Elsa Delplace
Son métier, c’était la qualité de vie au travail… Être mieux dans son boulot pour être plus performant… 35 ans, d’origine chilienne, elle était née en France, sa mère s’étant exilée à Paris après le coup d’état militaire de 1973. Sa mère également tuée dans l’attentat.

Elsa Delpace

Guillaume B. Decherf
Il était l’une des plus grandes plumes du rock en France. Fan de metal, militant du hard rock, du riff qui tâche, ce papa de deux filles, connu pour sa grosse boucle d’oreille et sa connaissance encyclopédique (d’Iron Maiden à… Céline Dion !), était un critique musical visionnaire et fan de bonne bouffe. Il est mort à 43 ans.

Guillaume

Mathias Dymarski et Marie Lausch
Ils étaient originaires de Metz et ils vivaient ensemble, depuis septembre, à Paris. Ils avaient 23 et 22 ans. Ils avaient offert le concert des Eagles of Death Metal à un couple d’amis pour leur anniversaire. Ils se sont perdus dans la panique. Leurs amis s’en sont sortis. Pas eux.
Mathias et marie02

Kheirddine Sahbi
Jeune violoniste algérien, il était venu en France pour perfectionner son art. Il était également étudiant à la Sorbonne à Paris. Il est mort sous les balles vendredi soir.

Kheirddine

Marie Mosser
Elle avait 24 ans, elle était originaire de Nancy et passionnée de musique. Elle travaillait pour Mercury et pour le site Celebrities in Paris qui avait trois de ses collaborateurs présents au Bataclan (deux sont décédés) et qui a mené la recherche sur les réseaux sociaux tout au long de la journée de samedi.

Marie Mosser

Thomas Ayad
Il avait 32 ans et travaillait pour la maison de disques Mercury Records (label du groupe Eagles of the Death Metal). Il mort au Bataclan. C’est son club de hockey sur gazon qui a annoncé la nouvelle sur Facebook.

Thomas Ayad

François-Xavier Prévost
Ses copains l’appelaient Fixou. Ils ont créé une page Facebook pour lui rendre hommage. Sa trop courte vie brutalement fauchée s’y déroule en quelques photos que l’on aurait pu retrouver sur un diaporama de mariage. Il avait 26 ans.

François Xavier

Des vies, des visages parmi toutes les
victimes de cette terrible journée…

En hommage aux victimes, le lycée Vaucanson de Tours a réalisé cette magnifique initiative et photo :

PHOTO CVL Vaucanson
PHOTO CVL Vaucanson

Page réalisée par Matthieu Pays, Elisabeth Segard et Aurélien Germain

L’horreur a frappé Paris

Paris a été attaqué et touché en plein cœur, ce vendredi 13 novembre 2015.

Nous n’avons pas de mots. La gorge sèche, le ventre noué. Nos yeux sont embués de larmes. L’horreur et la barbarie ont frappé Paris hier soir.

Toute l’équipe de tmv envoie ses pensées et ses condoléances. Soyons forts et réunis dans cet atroce moment.

Vous, lecteurs, lectrices, si vous avez envie de réagir, de parler, de dessiner, d’écrire un poème, faites-le ici, en commentaire, sur notre Facebook, notre Twitter, partout. Parlez, laissez parler votre cœur.

Courage à tout le monde.

L’équipe tmv.

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