Foulette : La révolution des culottes !

Camille et Maëva Collinet, deux Tourangelles de 23 et 21 ans, ont un projet : elles chinent des foulards pour en fabriquer… des culottes ! Foulette, leur marque de lingerie, se veut écoresponsable et anti-gaspi. Bref, faire du neuf avec du vieux.

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Camille et Maëva Collinet lancent Foulette : et si on créait des culottes à partir de foulards ? (Photo tmv)

Avec Foulette, vous voulez créer des culottes à partir de foulards. Apparemment, l’idée vous est venue un dimanche matin, après avoir refait le monde ! Racontez-nous…
Camille : Oui, ça s’est vraiment passé comme ça. On a toujours écouté des podcasts d’entrepreneurs. On rêvait toutes les deux de lancer une marque qui ait un impact positif.
Maëva : En plus de ça, on adore voyager, on avait envie de créer… Et j’ai déjà travaillé dans la lingerie.
C : L’idée est donc venue comme ça, un dimanche. On était très intéressées par la réutilisation, l’upcycling (c’est-à-dire le « surcyclage », une sorte de recyclage par le haut – NDLR). Et le foulard est une matière qui nous plaît.
M : Camille me disait toujours de noter les idées quand on en a…
C : Alors on en a parlé et de là est né Foulette. On chine des foulards aux motifs différents pour les transformer et en faire des culottes uniques. Cela évite la surproduction, le gaspillage et limite au maximum l’impact écologique. On fait du neuf avec du vieux.

Vous souhaitez limiter cet impact écologique car il y a un gros problème de surconsommation dans la mode selon vous ?
C : Oui. C’est la deuxième industrie la plus polluante au monde, elle a des effets néfastes. On utilise des milliers de litres d’eau pour fabriquer ne serait-ce qu’un seul tee shirt ! Sans compter tous les produits chimiques qui polluent les sols, etc.
M : Les gens sont sensibilisés à la protection de la planète, au mieux-consommer, au bio, etc. Mais beaucoup moins au problème posé par l’industrie du vêtement. On s’est donc dit qu’il serait bien de proposer une marque écoresponsable.
C : On veut tout de même que Foulette reste une marque tendance. Avec une belle image.
M : Nos foulards font des culottes uniques qui raconteront une histoire. Les foulards de belle qualité qu’on aura chinés connaîtront donc une nouvelle vie.

50964936_732955403747537_65456340973125632_nPourquoi avoir choisi de prendre des foulards pour faire vos culottes ? Le tissu est-il meilleur ?
M : Le foulard est souvent fait avec de belles matières, comme par exemple la soie. C’est doux au toucher, c’est beau visuellement, les motifs sont originaux. Pour l’instant, on a différents prototypes qu’on finalise. Quand tout sera prêt, il y aura des culottes de tailles S, M et L. Notre premier modèle a été réalisé il y a un mois, mais je le répète, c’est un prototype qu’on veut encore perfectionner. J’ai le souci du détail ! (rires)
C : Quand tout sera prêt, on vendra les culottes au prix de 50 €. Car c’est fait main et c’est du made in France. Chaque pièce sera unique et plutôt haut de gamme. D’où le tarif. On vise une clientèle soucieuse de l’environnement, qui aime les choses tendances et peuvent mettre un certain budget pour ça.

Sur votre site, vous écrivez qu’en France, aucune marque de lingerie féminine ne réutilise de tissus existants. Comment l’expliquez-vous ?
C : Il y a une marque pour hommes, Les Damoiseaux, qui pratique l’upcycling et reste un concept alternatif. Mais pour la lingerie féminine, ça n’existe pas.
M : La lingerie pour femmes a encore ce côté « raffiné ». On n’ose pas changer nos habitudes, on n’achète pas de lingerie de seconde main, on croit que ça donnera un côté ringard ou sale, ou je ne sais pas quoi… Mais nous, ça ne nous fait pas peur ! (rires) Notre produit sera joli, attrayant, confort. Le tissu est lavé et on utilise du coton bio pour le fond de culotte. Ce ne sera pas la culotte de grand-mère ! Ce sera comme neuf !

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Capture d’écran du compte Instagram de Foulette.

Financièrement, comment vous vous en sortez ?
C : On va faire une campagne de financement participatif pour lancer la marque. L’idéal serait de lancer ce crowdfunding cet été, une fois que nos modèles de culottes seront parfaitement finalisés. C’est également pour voir si les gens sont intéressés par notre concept et par Foulette.
M : Le crowdfunding sera un crash-test ! Pour le reste, on a quelques dépenses. Ça nous coûte un peu d’argent pour acheter, par exemple, les élastiques, les étiquettes… Mais bon, on ne le voit pas comme un travail – on a toutes les deux un métier à côté – mais surtout comme une passion.

Aujourd’hui, où en êtes-vous dans votre projet alors ? (l’interview a été réalisée le 14 mars – NDLR)
C : Les premiers prototypes sont faits et on souhaite encore, comme on le disait, tout fignoler. L’image de la marque est installée, l’identité visuelle, forte et cohérente, également. On essaye de réunir une communauté, notamment sur les réseaux sociaux. On a eu pas mal de retours positifs !

Il y a un peu d’appréhension à se lancer dans l’aventure, quand même ?
M : Oui, il y a forcément un peu de pression. On ne veut pas que ça tombe à l’eau. On croit vraiment à notre idée. Et qui sait, si ça fonctionne bien, pourquoi pas faire aussi des soutiens-gorge fabriqués à partir de foulards ?

> Avancement du projet à suivre sur :
foulette.fr
instagram.com/foulettefrance
facebook.com/foulettefrance

Il faut sauver la lingerie Indiscrète

À Chauvigny, dans la Vienne, un atelier de fabrication de lingerie se bat pour sauver ses emplois et son savoir-faire. Car Indiscrète a une particularité : s’adapter à toutes les morphologies.

(Photo NR)
(Photo NR)

Avec près de 3 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2017, le slip et la chaussette pèsent lourd en France. La lingerie dite « à la française » est aussi réputée à l’étranger que nos parfums ou nos gâteaux mais contrairement à la pâtisserie et à la cosmétique, les marques de lingerie haut de gamme ont fait leurs cartons depuis longtemps : direction la Tunisie, la Chine, l’Inde, le Maroc, la Turquie… des pays où les ouvrières sont dix fois moins payées et où les cadences peuvent être deux fois plus élevées.
Chantelle, Simone Pérèle, Lejaby, Aubade, Darjeeling, Etam, ont fermé leurs ateliers français depuis des années. Parmi les marques qui pèsent, seul Dim fabrique encore ses collants dans l’Hexagone.

C’est ainsi qu’est née la marque Indiscrète, dans la Vienne. En 2010, Aubade délocalisait toute sa fabrication et laissait plus de cent ouvrières poitevines sur le carreau. Didier Degrand, le responsable de la production, s’associe alors à Cristelle Bois et Béatrice Mongella. Les trois ex-cadres d’Aubade réunissent leurs indemnités de licenciement et relancent un atelier de fabrication à Chauvigny.
Ils réussissent à ré-embaucher une vingtaine de couturières et reçoivent le label Entreprise du Patrimoine vivant. Mais le modèle est fragile, la concurrence est rude.

En France, une pièce de lingerie achetée sur 500 est made in France, souligne la FIMIF. Il faut 30 à 40 pièces et une heure de travail pour assembler un soutien-gorge dans les règles de l’art. Et quand la main-d’oeuvre représente 50 % du coût d’un sous-vêtement fabriqué en France, elle pèse environ 5 % en Asie ou en Afrique.

Le 24 juillet 2018, Indiscrète est placée en redressement : l’un de ses donneurs d’ordre a mis la clé sous la porte, en laissant une grosse ardoise, c’est la goutte d’eau qui coule la trésorerie fragile d’Indiscrète.
Deux semaines plus tard, Didier Degrand craque et se suicide dans l’usine. Les médias nationaux s’inquiètent alors du destin de cette petite fabrique, l’une des dernières corseteries françaises.

Aujourd’hui, le meilleur moyen d’aider les deux associées de Didier Degrand, les 22 couturières et les 120 conseillères de vente d’Indiscrète, c’est de participer à leur cagnotte solidaire et d’acheter une culotte en dentelle, parce que la magie d’Indiscrète, c’est aussi ça : habiller toutes les femmes, du 85 au 120, du A au F, du 36 au 58 et propose aussi du sur-mesure. Une rareté à préserver.

> La boutique en ligne : lingerie-indiscrete. com

> Le site de la fédération du Made in France, qui publie des enquêtes et des guides sur le sujet : fimif.fr