« Mon fils a guéri grâce aux blouses roses »

#EPJTMV Blouses blanches, blouses bleues, blouses roses, … On s’y perdrait ? Pas tellement, les blouses roses sont reconnaissables par le cœur orange brodé sur leur blouse couleur framboise. Vous avez le tournis ? On vous explique.

« Les enfants ont une force mentale que nous sous-estimons, reconnait Catherine Fournier, les trois quarts du temps, ce sont eux qui rassurent leurs parents quand ils sont hospitalisés ». Catherine Fournier est une « blouse rose ».

Vous savez ces femmes habillées en rose qui vous ont sûrement proposé des jeux dans les salles d’attente de Clocheville lorsque vous étiez petits ? Ce moment où vous attendiez depuis deux heures et que chaque sourire apporté par ces femmes était une dose de bonheur inimaginable qui vous faisait oublier votre douleur au lobe droit. Tout ça à cause de votre voisin de classe qui ne maîtrisait pas encore parfaitement l’art du découpage…

Les jeux font partie du décor.
Les jeux font partie du décor.

« Tu veux faire un puzzle avec moi mon bonhomme ? », demande Martine Antoine. Bon, en théorie vous répondez non car le puzzle ne rentre pas dans vos hobbies et à ce moment très précis vous n’avez envie que d’une chose : vous faire soigner et rentrer à la maison. Mais ce jour-là, vous dites oui. Oui, parce que ça fait passer le temps. Oui, parce que cette dame en rose a très l’air gentille. Oui parce qu’à par regarder Gulli à la télévision vous n’avez rien d’autre à faire. Et puis tout compte fait, c’est quand même sympa les puzzles : vous vous en rendez compte grâce aux « blouses roses ».

Mais qui sont vraiment ces femmes ? Pourquoi sont-elles toujours là quand il faut ? À Tours, les « blouses roses » sont environ 160 (avec pas plus de dix hommes). En France, l’association compte 3 000 bénévoles. Leurs missions sont diverses : renseigner, aider, occuper, accompagner. Des verbes d’action qui résonnent dans plusieurs lieux tourangeaux. À Clocheville, les « blouses roses » occupent les enfants dans les services comme la chirurgie, l’orthopédie, la radio et les urgences par des jeux de société, des activités manuelles ou des lectures. D’autres passent du temps dans les maisons de retraite. Les bénévoles tiennent aussi compagnie aux femmes alitées ayant une grossesse compliquée, à Bretonneau, en proposant du tricot ou de la broderie.

« On se sent vraiment utile, finalement »

En franchissant la porte de l’accueil de l’hôpital de Clocheville, vous ne pouvez pas manquer les regards de Catherine Fournier, 63 ans, et Christine Jagueneau, 60 ans. Ces deux retraitées sont derrière leur table (rose, bien évidemment), pour rassurer les parents perdus, les orienter dans les différents services et discuter avec les enfants qui s’ennuient.

Dans le courant d'air de l'accueil de Clocheville, les "blouses roses" renseignent.
Dans le courant d’air de l’accueil de Clocheville, les « blouses roses » renseignent.

Ce jour-là, en trois heures, ces deux femmes ont renseigné soixante-dix personnes. « Depuis qu’ils ont supprimé l’accueil, on occupe ce rôle. Se repérer dans un hôpital est toujours compliqué donc on les aide », explique Catherine Fournier, « blouses roses » depuis 2007. « On se sent vraiment utile, finalement », renchérit Christine Jagueneau, membre l’association depuis décembre 2018.

Retraitée depuis un an, cette dernière avait envie de s’investir pour les autres. Les « blouses roses » répondaient parfaitement à ses attentes. « Pour entrer dans l’association, on a une réunion d’information puis un rendez-vous spécialisé. Après on suit un ‘’parcours découverte’’ où on travaille dans les tous les types de services. Puis on choisit ce qu’on préfère ». Parfois, certains volontaires ne sont pas retenus, « certaines personnes sont trop fragiles psychologiquement », précise Catherine Fournier. Elle même a vu des jeunes très malades, ce qui l’a touchée et forgée à la fois. « Les enfants ont une force de caractère qu’on finit par admirer », s’enthousiasme-t-elle.

« Le climat est plus apaisé quand elles sont là »

À l’heure du gouter, roulement dans le service et deux nouvelles « blouses roses » poussent un gros charriot rempli de jeux de société jusque dans la salle d’attente des urgences. Les enfants ouvrent grands les yeux et oublient tout à coup leur lobe droit. Des puzzles, des coloriages, des jeux envahissent les deux tables basses. Certains timides, certains assurés, d’autres à moitié endormis, les enfants se regroupent autour des différentes activités. Les « blouses roses » sont un réel soutien pour le corps hospitalier. « Le climat est plus apaisé quand elles sont là, les parents sont plus agréables et patients », explique Magalie Neveu, puéricultrice depuis plus de quinze ans.

Allissya fait passer le temps dans la salle d'atente des urgences.
Allissya fait passer le temps dans la salle d’attente des urgences.

Allissya, 7 ans, commence le puzzle d’Anna de La Reine des Neiges (vous savez, le dessin animé que votre petite-cousine adore mais avec une chanson qui vous libère, et vous délivre… de rien, à part l’avoir dans la tête). Sans voix, la petite fille répond aux questions en hochant de la tête. Retranscrit en mots ça pourrait donner : « Je me suis fait mal à l’école, je suis tombée. Mais là je n’ai pas trop mal donc je peux faire le puzzle d’Anna car je l’aime beaucoup ». Sur le banc derrière elle, sa mère sourit aux dames qui s’occupent de sa fille. Ces bénévoles, Sandra Damart les connaît très bien, grâce son fils. « Les blouses roses sont extrêmement utiles. En trois années de vie, mon fils n’est resté que trois mois à la maison. À la naissance, il ne respirait pas donc il a beaucoup vécu à l’hôpital. Les « blouses roses » ont été très présentes avec lui. Ce sont en partie grâce à elles qu’il est guéri aujourd’hui ».

Sur les coups de 19h30, dernier roulement. Les bénévoles marchands de sable entrent en scène et lisent une histoire aux enfants qui s’endorment paisiblement dans leur chambre avant d’affronter une nouvelle journée d’hospitalisation, aux côtés des « blouses roses ».

Salomé Raoult

Photos : Eléa Chevillard 

[#EPJTMV / Cet article fait partie du numéro 321 de tmv, entièrement réalisé par les étudiant(e)s de 2e année en journalisme de Tours]

La Ressourcerie, une fourmilière humaine

Imaginez un lieu où chacun pourrait venir bricoler, lire ou encore coudre librement avec tout le matériel nécessaire à disposition. Un endroit où au moindre problème, il y aura toujours quelqu’un de bon conseil pour vous aider et montrer que vous êtes capable de le faire. Et bien tout cela existe à la ressourcerie de La Riche. #EPJTMV

La ressourcerie, située à La Riche, ne désemplit pas de bénévoles et de clients. Photo : Alizée Touami
La ressourcerie, située à La Riche, ne désemplit pas de bénévoles et de clients. Photo : Alizée Touami

« La ressourcerie œuvre dans le réemploi, la restauration et la réparation d’objets. » Sophie Robin, fondatrice de la boutique au printemps 2015, met de côté un téléphone mural en bakélite tout juste donné. Très prisé par les acheteurs, il sera transformé en luminaire après un long débat entre les bénévoles (qui se nomment valoristes) sur son avenir. La discussion fait la force, elle intervient aussi pour fixer les prix des objets vendus à la boutique. « Les dons ne sont pas anonymes. Nous prenons le nom des donneurs car nous souhaitons qu’ils nous racontent l’histoire de leur objet ».

L’association La ressourcerie La Charpentière a vu le jour en 2014, avant le lancement du magasin. Elle porte en elle l’éducation populaire, notamment avec les habitants du quartier. « Les 378 adhérents viennent de toute la Touraine, affirme Sophie Robin. L’association compte aussi quatre salariés en CDI, un service civique et souvent des stagiaires. » Un détail mais pas des moindres, l’adhésion est à prix libre, comme les livres vendus.

Des grafitis, des bacs de compostage, l'extérieur de la ressourceriez est aussi atypique que l'association. Photo : Alizée Touami
Des grafitis, des bacs de compostage, l’extérieur de la ressourceriez est aussi atypique que l’association. Photo : Alizée Touami.

Le lien social, avant tout

 Blanc, froid et industriel, l’extérieur du bâtiment de la rue Marcel Dassault à La Riche ne dit rien de l’intérieur coloré et vivant. Des graffitis, réalisés en chantier participatif, ornent l’entrée de la ressourcerie. Un composteur et des bacs potagers pour les habitants forment une petite cour. La boutique côtoie les ateliers. L’espace est restreint mais tout est rangé. « Nous vendons des objets en ligne, aux enchères sur ebay ou des meubles encombrants sur Le bon coin », explique une adhérente. Une fois par mois, un grand déstockage est organisé pour éviter que les objets ne s’entassent.

Située à proximité de deux quartiers populaires, à la limite de Tours et de la Riche, non loin de la faculté de médecine et de la voie rapide, la ressourcerie est un lieu de brassage social. « Ici les valoristes viennent de tous les milieux et de tous les horizons professionnels.», indique Sophie Robin.

L’une des forces de la ressourcerie se trouve dans l’entraide. Si tous les outils sont mis à disposition, la technique, elle, s’apprend grâce aux conseils de chacun.  « Ici, il y aura toujours quelqu’un pour vous aider », confie … en service civique à La Charpentière depuis octobre.

Comme dans une fourmilière, les bénévoles s’activent. Chacun connaît son rôle. Sur les pancartes colorées, il est inscrit : « Des ateliers outillés et équipés par et pour les habitants. » Avec l’aide de partenaires comme le Conseil régional ou des entreprises, la Charpentière a pu se doter d’outils. « Nous sommes en plein dans l’économie de la fonctionnalité, un objet sert à plusieurs personnes », se réjouit la fondatrice.

Les bénévoles peuvent réparer eux-mêmes leurs objets ou venir en restaurer. « Ils n’ont pas toujours la possibilité de faire du bruit chez eux et ne disposent ni de la place ni des outils nécessaires », confie Sophie. Elle aime observer ce petit monde s’activer, à côté de la mascotte Charp. « Ce singe représente la malice et les savoirs faire », glisse-t-elle.

Ponctuels ou réguliers, les ateliers font l’âme de la ressourcerie. Toutes sortes de fabrications y sont réalisées, de la confection d’instrument de musique au relooking de meubles. D’une année sur l’autre, le projet grimpe d’un étage dans le bâtiment et s’aménage au fur et à mesure.  Alors que les ateliers bricolage ont fait leur place au rez-de-chaussée, la couture et l’électronique se tiennent en haut de l’escalier en bois. Avec un premier niveau saturé, le deuxième étage permet le stockage. Le dernier étage est loué à deux artisanes.

"Nom de la dame" profite de l'atelier relooking de meuble pour donner une seconde vie a un plateau. Photo : Alizée Touami.
Une bénévole profite de l’atelier relooking de meuble pour donner une seconde vie a un plateau. Photo : Alizée Touami.

 Lutte contre les déchets et l’obsolescence programmée

Les donneurs se sont multipliés très vite mais la ressourcerie s’est mise à trier. « Parfois, on nous prend pour une déchetterie ou on nous apporte des objets dégueulasses… » peste la fondatrice. La remise en circulation des objets destinés à être jetés est constamment travaillée. « Malheureusement, c’est rien comparé à la quantité de déchets », déplore Sophie.

Les biens détournés, restaurés ou réparés nécessitent un travail de longue haleine. Une part des dons doit être jetée lorsque l’intervention est impossible. La ressourcerie s’emploie dans le recyclage. Dans un coin exigu, Sophie Robin pointe les matières recyclées. « Nous recyclons le métal et le papier mais nous cherchons une solution pour le plastique car c’est plus compliqué. »

Le développement incessant de la ressourcerie ne tient pas qu’à l’énergie de ses acteurs. « Les financeurs comme les pouvoirs publics ou les entreprises sont essentiels », souligne Sophie Robin. Avec la naissance d’autres ressourceries, la grande ambition de la fondatrice de la Charpentière est de créer un circuit touristique entre celles-ci. « Nous ne sommes toutefois pas prêts de concurrencer le vin ou les châteaux » sourit-elle.

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La ressourcerie la Charpentière, 2 bis, rue Marcel Dassault, La Riche. Ouvert les mercredis, vendredis et samedis après-midi. Téléphone : 09 51 04 54 19.

 Valériane Gouban et Charles Lemercier