Le commerce indépendant à Tours ? Ça bouge !

Une crise en chasse-t-elle une autre ? Covid puis inflation ont mis à rude épreuve les nerfs des commerçants. Mais le contexte socio-économique n’empêche pas des courageux de se lancer, faisant ainsi évoluer le paysage local du commerce indépendant.

Au bar Les Dix Fûts, rue Colbert, Valentin Coulon connaît un début 2023 mitigé : « 2022 était la meilleure année depuis mon installation en 2018, il y avait un effet reprise après les fermetures administratives de la période Covid. Mais depuis janvier c’est plus compliqué, et la météo n’a pas aidé. Ici, dès que le soleil revient, on a du monde. »

Samanta Nunes de la boutique Sapatos – Baia, dans le Grand Passage, attendait elle aussi de pied ferme le soleil pour pouvoir vendre sandales et ballerines. Mais il n’y a pas que la météo pour expliquer ce début d’année en demi-teinte. 2023, c’est aussi le moment de rembourser le prêt garanti par l’État souscrit pendant le Covid, pas toujours simple. Et l’inflation freine les achats plaisir.

Se renouveler sans cesse

Adieu vêtements, bijoux et gourmandises ? Pas pour tout le monde, puisqu’à la Boîte à Laine, rue du Grand Marché, Martine Bernard souligne à juste titre que tout dépend du produit proposé. Avec la laine, elle attire une clientèle venue de loin, qui n’a pas peur des intempéries.

Et en dépit de tous ces aléas, dans sa librairie Rosemonde ouverte en novembre 2022, Cloé Lebron a le sourire : « Malgré le contexte économique actuel, le démarrage a été bon, il y a vrai regain d’intérêt pour le petit commerce local », explique la jeune femme qui avoue tout de même que cette nouvelle aventure suppose un bel investissement (40 000 €), et des sacrifices.

Cloé n’est pas la seule à s’être lancée. Depuis plusieurs semaines, Damien Bonnot présente des jeux de société sur les réseaux sociaux de sa future boutique Le Sablier Curieux. L’ancien employé de Renault relève ainsi le défi d’allier sa passion des jeux de société au goût du contact clientèle, avenue Grammont.

Le pari sera-t-il gagnant ?

Pour Danièle Julien, conseillère à la Chambre de Commerce et d’Industrie, il est évident que « aujourd’hui le commerce n’est plus seulement une boutique physique, où le commerçant attend le client. Il faut aller le chercher, se faire connaître par tous les moyens, notamment les réseaux sociaux. On y entretient le lien avec la clientèle, on crée l’envie en partageant nouveautés ou vie du magasin ». Damien peut cocher cette case sur la to-do list du parfait commerçant. Et les deux suivantes aussi : choisir un emplacement où il y a du passage, et se distinguer de la concurrence.

 

Pour lui, cela passe par la vente de jeux neufs mais aussi d’occasion, et l’option café ludique, « pour me démarquer des deux super boutiques déjà présentes dans l’hypercentre ». Se démarquer, c’est ce que fait la boutique La Secourable, rue des Halles, en proposant des plantes sous toutes les formes (infusions, savons, bougies…) en même temps que des ateliers et soins bien-être.

C’est aussi l’objectif d’Émilie Tartarin avec sa boutique bio et vrac « Baucartier », quartier Paul Bert, ouverte il y a un an. « Il n’y avait pas de proposition de ce type ici, et je tenais à proposer des produits qui n’aient pas fait le tour du monde. Mais je ne m’attendais pas à ce que la rue Losserand soit aussi peu passante. »

Même difficulté pour les Sœurs Piqûres venues de Blois pour monter une deuxième boutique dans le Grand Passage : « Cet emplacement n’était peut-être pas le meilleur pour nos vêtements upcycling ? » Mais il leur faut le temps de se faire connaître ! Et les sœurs ne ménagent pas leurs efforts, en tissant des partenariats avec des influenceuses ou l’Armoire Sans Fin. Tous ces entrepreneurs sont ainsi seuls derrière le comptoir, à gérer les stocks, la relation-client, les imprévus, mais pas si seuls que ça !

« Je ne pensais pas tisser des liens aussi forts avec ma clientèle », explique Anne-Gwénolée Tu, qui a ouvert en 2017 l’épicerie Sur la Branche, place de la Victoire. Émilie Tartarin découvre ce même plaisir dans son épicerie de Paul Bert. « Des rencontres avec les clients, et aussi avec les autres commerçants », précise-t-elle.

L’entraide est en effet forte chez les commerçants tourangeaux, qui ont redonné un second souffle à leurs associations (Grand Passage, Colbert, ou les Vitrines de Tours devenues Com&A).

Lien avec la mairie, elles œuvrent aussi pour la dynamisation de leurs quartiers. D’ailleurs, on vous laisse car on a à faire : ce weekend c’est fanfare et brocante rue Colbert !

Maud Martinez