Sur les pas de Bouddha… à Tours

#EPJTMV Des bouddhistes à Tours ? Oui, vous avez bien lu. Ils sont une quarantaine de croyants et une centaine de sympathisants à rechercher un calme intérieur.

Bouddhisme
Pour méditer, mieux vaut être en lotus, assis sur un coussin. Photo : Manon Vautier-Chollet

Ne vous attendez pas à un temple grandiloquent. Au rez-de-chaussée d’un immeuble, le local de l’association Dhagpo Tours est discret. Sur ses cinq vitres, un temple est gravé. À l’intérieur, pas de peintures murales asiatiques, ni de moines chauves en tenue. On en oublierait presque, le bouddha, objet de l’émoi, qui mesure trente centimètres de haut.

BOUDDHISMEAssis dans la position du lotus – inconfortable pour quiconque ne pratique pas le yoga ou la gymnastique -, les bouddhistes les plus aguerris récitent la prière d’introduction à la méditation. En tibétain. Car oui, les textes fondateurs ne trouvent pas de traduction française fidèle. La méditation repose sur une mécanique bien huilée : les jambes croisées, les pieds nus, la main droite dans la main gauche, le dos et la tête bien droits, le menton légèrement baissé. Règle capitale : les yeux doivent rester ouverts. Et détrompez-vous, méditer est tout, sauf relaxant. Il faut sans cesse se concentrer sur sa respiration pour prendre du recul sur ses pensées, ses émotions. Les laisser passer, ne pas les saisir.

Les pratiquants tendent tous à avoir un comportement irréprochable basé sur l’honnêteté, la générosité et la compassion, ainsi que par l’abolition du désir de nuisance et de jugement. « Nous essayons d’appliquer ces enseignements au quotidien », raconte Philippe, pratiquant assidu. Comprenez, ne pas s’énerver au volant, ne pas insulter son voisin, bref, garder son calme en toutes circonstances. Mais le bouddhisme peut aller plus loin, selon l’avancée de chacun. Par exemple, manger de la viande serait contraire à l’enseignement de Bouddha. « Être végétarien, ça permet de ne pas ôter la vie », confie Annie, 61 ans. Logique pour ceux qui pensent pouvoir se réincarner en être vivant.

Pas un, mais des bouddhismes

La méditation consciente, un moyen pour résoudre des problèmes ? « Oui parfois, répond Stéphane, le président de l’association. Mais ce n’est pas l’objectif principal. » Fernando, débutant, a son avis sur la question : « Ce n’est pas une thérapie. Pour ça, il existe des psychologues. J’apprends à mieux me connaître. »

D’autres ont besoin de partager et d’être guidés. Véronique, enseignante, a grandi dans une famille catholique. En désaccord avec les valeurs chrétiennes, elle se dirige vers le yoga avant d’entamer, seule, une pratique plus spirituelle, le bouddhisme. Mais très vite, elle a le sentiment de ne plus avancer dans son cheminement et se tourne vers une communauté.

bouddha

Finalement, le bouddhisme, religion ou philosophie ? Les visages effarés des pratiquants montrent que la question divise, et qu’ils sont lassés de l’entendre. C’est une « aventure spirituelle » pour Fernando, une « aventure intérieure » pour Philippe. Annie avoue que le bouddhisme devient pour elle de plus en plus une religion. Stéphane est catégorique : ça le dérange qu’on qualifie le bouddhisme de religion. Pourtant, des offrandes sont déposées devant l’autel du Bouddha, des prières sont récitées en cœur. Des gestes qu’ils justifient comme un premier pas vers la générosité. Curieux néanmoins pour ceux qui affirment ne pas vénérer une entité.

En guise de réponse finale, ils nous tendent volontiers le Manuel des héros ordinaires de Jigmé Rinpoché. Dès les premières lignes, la question est vite expédiée : « Le bouddhisme est-il une religion ou une philosophie ? Telle est la perpétuelle question posée par les curieux et les journalistes. […] Il nous semble raisonnable de dire que le bouddhisme est une religion pour qui le pratique comme telle, et qu’il est également une philosophie pour qui le considère exclusivement selon cette perspective. »

Mary Sohier et Léna Soudre.

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Informations pratiques :

Tél. 02 47 44 18 98

Adresse : 2 bis rue Parmentier, 37 000 Tours

Les Religions se parlent (spécial #JeSuisCharlie)

Au lendemain de l’attentat contre Charlie Hebdo, une douzaine de représentants des religions à Tours se sont réunis autour d’une même table pour parler de la tragédie. Dialogue interreligieux.

Dialogue interreligieux
Salah Merabti, président de la communauté islamique d’Indre et-Loire (à gauche) : « La majorité des musulmans aspirent à vivre dans la paix ».

Le couvent des Dominicains, rue Jules-Simon, est plongé dans la pénombre de cette nuit du jeudi 8 janvier. Silence nocturne en plein centre-ville. La réunion est prévue de longue date pour organiser un événement dans les mois qui viennent. L’actualité a rattrapé l’ordre du jour. Dans une petite salle du couvent, plusieurs musulmans de la mosquée de Bouzignac et de celle de la rue Lobin sont déjà installés. Ils discutent avec deux représentants bouddhistes zen et tibétain. Le décorum de la salle est d’une neutralité absolue. L’ambiance n’est pas forcément tendue, elle est plutôt respectueuse. L’attentat de la veille se lit sur tous les visages, le nom du journal qui a été visé n’a pas encore été prononcé. La conversation commence :
Père Jean-François Bour : « Même si les personnes changent, ce groupe est constitué depuis des années. On pourrait dire qu’il a réellement pris cette forme de rendez-vous réguliers depuis le 11 septembre 2001, un événement qui résonne aujourd’hui. »

Salah Merabti, président de la communauté islamique d’Indre-et- Loire : « Ce dialogue est indispensable pour le vivre ensemble. On se fait tout un film sur nos voisins mais c’est en discutant avec eux qu’on peut les comprendre, et même en faire des amis, des alliés. Je me rappelle des années 1980, au moment des attentats en Algérie. Nous étions déjà montrés du doigt. Nous ne pouvons pas nous justifier à chaque fois que des jeunes paumés commettent ce genre d’acte. La majorité des musulmans aspirent à vivre dans la paix. Cette minorité nous tient en prison. »

Paul Levy, président de la communauté juive de Tours : « Je suis persuadé que le vocabulaire concernant l’Islam a évolué depuis ces dernières années. Je crois que les gens sains d’esprit font la différence entre les radicaux et les musulmans. »
David Mitrani, pasteur de l’Église réformée de France à Tours : « Il faut que nous puissions envoyer un message fort : les religions sont un facteur de paix. »
dialogue interreligieux Salah Merabti : « Si vous prenez les grands ensembles, comme au Sanitas par exemple, le dialogue entre les religions se fait tous les jours, entre habitants, amis. C’est un dialogue qui n’est peut-être pas officiel mais il existe. »
Abderrahim Hami de la mosquée de Bouzignac : « Pour moi, ces jeunes qui ont attaqué le journal ne sont pas musulmans. À mon avis, c’est vers les jeunes personnes qu’il faut concentrer nos efforts, c’est avec eux qu’il faut discuter en priorité. »
Larbi Boucetta, musulman et impliqué dans le milieu associatif : « Il ne faut pas, je pense, mettre en avant les différences entre nous mais plutôt apprendre à se connaître, entre humains, avec le coeur. »
Jean-François Bour : « Tout à fait et en même temps, je suis persuadé que tout le monde vient d’un univers différent, je pense que pour avancer, nos différences sont une richesse. »
Tmv : « Que pensez-vous de Charlie Hebdo et des caricatures faites sur les religions ? »
Paul Levy : « Le rire fait partie de notre religion, les juifs sont les premiers à se moquer d’eux-mêmes (rires). »
David Mitrani : « Je respecte ce que fait Charlie Hebdo mais pour moi, j’ai toujours trouvé leur humour malsain. Ce que je défends aujourd’hui, c’est le principe de la liberté d’expression. »
Jean-François Bour : « Pour moi, les actes qui ont été commis sont un signe de faiblesse. Quand on est fort, dans sa religion, pas besoin de prendre les armes de se défendre par la violence. »
Jean-Pierre Dupont, pasteur évangélique à Tours : « Je comprends ce que peuvent ressentir les musulmans, toutes proportions gardées, car nous avons longtemps été considérés comme une secte et nous avons souffert d’insultes ou d’amalgames. »