Baruc : Faire danser le quartier

19 ans et déjà engagé : Baruc Mikiene danse, bouge pour son quartier, quand il ne fait pas ses études.

Son groupe, Kobo, compte aujourd’hui six danseurs : « Quand tu prouves ce que tu vaux, on te prend au sérieux. » (Photo tmv)
Son groupe, Kobo, compte aujourd’hui six danseurs : « Quand tu prouves ce que tu vaux, on te prend au sérieux. »
(Photo tmv)

Premier contact au téléphone, à l’aise : « Vous voulez parler de moi ? C’est vrai que je suis intéressant ! » Baruc Mikiene rigole, sa remarque ingénue cache une envie d’exposer ce qu’il fait le mieux : la danse.
Une passion ? « Plus que ça. » Il arrive à l’entretien avec le look de ses 19 ans et sa longue silhouette. « J’ai grandi avec des danseurs autour de moi qui dansaient en continu, à faire des spectacles de quatre heures. J’ai fait comme eux. Je ne me suis jamais arrêté. Je ne peux pas m’arrêter, je danse quand je marche dans la rue, quand je cours. J’arrive toujours à faire deux trois pas. Au travail, les autres m’ont d’abord pris pour un fou. J’ai continué et ils ont compris que c’était important pour moi. »
Il travaille dans un entrepôt qui appartient à une marque de la grande distribution. Baruc Mikiene prépare un BTS logistique des transports en alternance. Il fait souvent les allers-retours à Vendôme pour suivre les cours.
Le reste du temps, il le passe au Sanitas, son quartier d’enfance, celui de ses potes. De ses rêves d’adolescent, quand il commençait à se produire en public. « On était plusieurs danseurs. Sans lieu, on s’est mis à danser dans la gare, pas très loin du Vinci, dans la rue. » Pendant des heures, il mélange mouvements de hip-hop, de house, de coupédécalé ou de house afro. Aujourd’hui, son groupe, Kobo, compte six membres et s’entraîne dans un local. « Quand tu prouves ce que tu vaux, on te prend au sérieux. »
Baruc Mikiene donne des cours de danse au centre social. « Les petits peuvent te prendre en exemple. Je dois leur montrer ce qui est bien, qu’ils ne répètent pas les bêtises des autres. »
Engagé, Baruc Mikiene essaye de jouer les modèles dans le quartier : « Quand tu passes ta journée en bas d’un immeuble, tu as plein d’idées qui te passent par la tête. Tu ne discernes pas le bien du mal, qu’est ce qui t’empêche d’aller voler ou brûler des voitures ? Certains jeunes ont pour modèle les clips avec des kalach’ et des filles nues, pourquoi ils ne feraient pas comme les rappeurs ? Ce n’est pas leur faute, il faut juste leur montrer d’autres choses. » Il lutte, enseigne ses mouvements de danse, prend son rôle d’éducateur à cœur.
Il est arrivé au Sanitas il y a quelques années avec ses parents. Baruc Mikiene est né au Congo, le pays de sa mère. Son père est Burundais. Il ne veut pas parler de son arrivée en Europe. « J’ai choisi de ne pas me rappeler cette période, même si elle fait partie de ma construction. »
Il a grandi dans la foi, celle de l’église évangéliste. Deux fois par semaine, il se réunit avec sa famille pour prier. Il prend la religion au sérieux. La politique l’intéresse beaucoup moins. « Je ne vais pas voter, je pense, pour les municipales ». Il est plutôt porté sur les bonnes causes, « dès qu’il y en a une, je suis là. »
Baruc Mikiene n’affiche jamais de doute. Il pousse l’optimisme à l’extrême. « Le Sanitas, c’est un quartier sensible, peut-être, mais je suis là pour prouver le contraire, montrer que nous avons des idées. On a la dalle de s’exprimer. »
Benoît Renaudin
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