Pédagogies nouvelles : « Certaines idées sont passées dans le système »

Professeur de philosophie de l’éducation dans le département de sciences de l’éducation à l’université François-Rabelais, Laurence Cornu nous apporte son éclairage sur les pédagogies nouvelles.

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Montessori, Steiner, Freinet… Ces pédagogies semblent avoir le vent en poupe. Qu’en pensez-vous ?
En effet, il y a un intérêt renouvelé pour ces pédagogies dites « nouvelles », même si elles sont nées il y a longtemps grâce à des pédagogues comme Maria Montessori ou Célestin Freinet. Depuis la rentrée, les journaux font la part belle aux thèmes du climat scolaire, du bien-être à l’école et de la confiance. Ça correspond à des attentes de parents et d’enseignants.

Qu’est-ce qui caractérise les pédagogies nouvelles ?
Ce terme regroupe des courants portés par différents pédagogues, qui partagent des points communs. Le premier, c’est la reconnaissance, la considération et le respect de l’enfant. Une attention particulière est portée aux conditions sensibles et concrètes qui permettent à l’enfant d’être bien à l’école. Ces pédagogies s’intéressent aussi à la construction des savoirs. Comment donner du sens aux apprentissages ? Comment susciter la curiosité et l’intérêt des élèves ? Elles s’appuient sur l’expérimentation, des activités et des pratiques interactives, plus que sur une transmission verticale et unilatérale.

Comment se situent ces courants pédagogiques dans le débat sur la notation et l’évaluation ?
Déjà, elles donnent plus de crédit à l’erreur, qui devient un élément du processus d’apprentissage. Le temps de l’apprentissage est un temps pour s’exercer : soutenu par des conditions favorables et des encouragements, il laisse de la place à l’essai et à l’erreur, et permet à l’enfant de découvrir ses capacités d’exploration, d’enquête et de progression. Le temps de l’évaluation dite « sommative », qui attend des résultats exacts, arrive dans un second temps : il est bien distinct de la phase d’apprentissage.

Ce mouvement essaime-t-il dans l’Éducation nationale ?
D’un point de vue historique, ces pédagogies se sont développées en marge de l’Éducation nationale, grâce à de grandes figures qui les ont créées de leur propre initiative. Aujourd’hui, certaines de leurs idées sont passées dans le système. A l’école maternelle, des enseignants pratiquent la pédagogie Montessori. L’école primaire, elle-aussi, est ouverte par tradition à ces questions. Par exemple, la pédagogie de Célestin Freinet est utilisée dans l’enseignement publique. Au collège, c’est plus compliqué, car souvent, la pédagogie a moins de place dans l’identité professionnelle des enseignants. Pour autant, même s’il y a une certaine inertie, ça avance : des initiatives émergent au sein de l’Éducation nationale.