Hardcore Henry : un ami qui ne vous veut pas du bien

Du film punk en veux-tu, en voilà : Hardcore Henry, filmé en FPS est une pépite qu’adoreront les gamers… et bien d’autres !

En mars 2013, la planète YouTube se prenait une petite baffe intitulée poétiquement Bad Motherfucker. Un court-métrage aux 35 millions de vues, tourné façon FPS. Soit comme « les jeux de tirs à la première personne », traduction de notre ami Wikipédia. Trois ans plus tard débarque donc son adaptation sur grand écran : Hardcore Henry, brûlot signé Ilya Naishuller.

Ultra-attendu des gamers (car tourné à la première personne) et véritable OVNI pour le reste (car tourné à la… bon ok), Naishuller voulait du « jamais-vu ailleurs » : l’ensemble des scènes est shooté à la caméra GoPro, tout en vue subjective. Ici, le spectateur est le héros du film. Vous êtes donc Henry, un homme qui revient à la vie avec une force incroyable, mais poursuivi par une tripotée de mercenaires plutôt énervés.
Ce qui est sûr, c’est qu’Hardcore Henry, en plus d’être survitaminé, est déjà un tour de force technique hallucinant. Une immersion réussie à 200 %, entre cascades improbables, corps-à-corps ‘’hardcore’’, fusillades explosives et bastons générales truculentes. Cette pépite déjantée et fantasque est en fait un film punk et jubilatoire, dynamité par une bande-son extra.

Sans temps mort (on frôle l’indigestion !), mais bourré d’idées, Hardcore Henry joue le coup des montagnes russes en piochant allègrement dans la grammaire visuelle du jeu vidéo. C’est tour à tour fou, furieux, violent et sanglant (âmes sensibles, s’abstenir)… mais c’est aussi – et étrangement – très drôle. Il suffit de voir l’utilisation du personnage joué par Sharlto Copley, dans ce délire loufoque et très second degré. De quoi d’ailleurs palier un scénario au ras des pâquerettes et une absence totale de discours. Reste cependant une caméra tellement saccadée qu’elle en rebutera plus d’un. Les autres, qui tenteront cette aventure intense, risquent de prendre un pied monumental.

Aurélien Germain

> Action, SF (Russie, USA), d’Ilya Naishuller. Durée : 1 h 30. Avec Haley Bennett, Sharlto Copley, Danila Kozlovsky…
> NOTE : 4/5

[youtube]https://www.youtube.com/watch?v=96EChBYVFhU[/youtube]

Festival Mauvais Genre : allez (re)viens, on est bien

Du 24 au 28 mars, le festival Mauvais Genre a soufflé ses 10 bougies à Tours. Films à la chaîne, courts-métrages de folie et grosse ambiance ont rythmé la Bête. Petit review, histoire de se rappeler quelques souvenirs et vous donner des idées pour compléter votre vidéothèque.

JEUDI 24 : ouvre-toi, Mauvais Genre

Dix piges. C’est qu’il se fait vieux, le sale gosse de Mauvais Genre. Le festoche de ciné le plus fendard de Tours s’est ouvert au CGR Centre vers 20 h 30, ce jeudi-là. Ou quelque chose comme ça. C’est la faille spatio-temporelle du festival : on ne sait jamais trop quelle heure il est. Bref, passé le discours du big boss Gary Constant, et de l’adjointe à la culture qui avait – parce qu’on est des stars – visiblement lu notre interview (à relire ICI), place au premier court : LIFE IS STRANGE, petite bobine belge, où un SDF squatte un manoir. Un poil déjanté et bizarroïde, le film d’Alexandre Papeians était donc une entrée sympathique et idéale avant le plat principal.

You talkin' to me Michael Bay ?
You talkin’ to me Michael Bay ?

Plat principal qui, d’ailleurs, va vite virer à l’indigestion : 13 HOURS, le gros machin de Michael – attention une explosion ! – Bay (mais c’est pas la taille qui compte). La dernière offrande du cinéaste raconte l’affaire Benghazi, en septembre 2012, durant laquelle le consulat américain en Libye avait été pris d’assaut par des djihadistes. Six hommes (des Ricains musclés qu’on n’a pas envie d’embêter) s’étaient alors risqués au combat. Histoire vraie, donc, que Michael Bay essaye de reconstituer sans patriotisme bébête. Ça ne marche pas à tous les coups, certes, mais c’est terrifiant de réalisme. Tirs, rafales, explosions, de jour, de nuit : en fait, ça en jette, mais ça patine très vite et ça tourne en rond. 13 HOURS, atrocement interminable, aura carburé pendant 2 h 24 entre blablas longuets et canardages sanglants.

VENDREDI 25 : La Nuit Interdite

C’est THE moment. Là, où le public devient fou, où l’on crie « à poiiil Gary », où les films se succèdent toute la nuit, où les poneys deviennent loups-garous.
Côté courts-métrages, on a eu le plaisir de voir JUSTINES, de Rémy Barbe et Josephine Hopkins, présents dans la salle. Hyper-influencés par Orange Mécanique et Funny Games, les deux jeunes cinéastes filment trois criminels dans l’appart de deux sœurs. Un instant séquestration qui va finalement réserver bien des surprises… Tourné avec zéro moyens, le film a le mérite d’aller droit au but et se fend même de quelques séquences mémorables, aidées par une belle brochette de comédiens (Mathieu Lourdel, une vraie gueule).
Toujours en petit format, le réussi THREE WISE MONKEYS (d’étranges événements se produisent à cause d’une sculpture représentant 3 singes) alterne entre petits moments de flippe et moments gores, jusqu’à un final qui fait mal.

THE FORGOTTEN, premier long en compet’, portait de jolies promesses, mais ne parvient pas à viser juste. THE FORGOTTEN démarre pourtant fort en suivant un père et son fils, contraints de vivre dans un squat miteux, abritant d’étranges phénomènes derrière les murs… Dommage que l’environnement et le décor soient d’ailleurs si peu exploités (cette cité était pourtant bien flippante comme il faut !). Un peu laborieux, plombé par un final expéditif, et finalement pas si excitant, malgré d’indéniables qualités, notamment avec des acteurs au top et quelques jolis moments de trouille.

Vient enfin HARDCORE HENRY, hors compet’, mais l’une des claques du festival. Ultra-attendue des gamers, la chose est effectivement intégralement filmée en vue subjective (en mode FPS pour les intimes qui font graou avec leur manette). Voilà donc Henry, tout juste sauvé par sa femme, mais rapidement la cible de mercenaires plutôt… énervés. HARDCORE HENRY, outre son tour de force technique hallucinant, est totalement déjanté, punk et jubilatoire. Sans temps mort, bourré d’idées, totalement improbable et frôlant parfois le WTF, sanglant, déjanté et drôle. Un pied monumental. [NDLR : nous y reviendrons plus longuement dans notre numéro du 13 avril]

[youtube]https://www.youtube.com/watch?v=96EChBYVFhU[/youtube]

SAMEDI 26 : PAPY PERVERS ET PASSION ESPAGNOLE

13 Cameras : un proprio qui vous veut du bien.

Premier long-métrage en compétition de la journée, 13 CAMERAS est un honnête film d’exploitation. Un couple sur le point d’imploser s’installe dans une nouvelle maison. Laquelle est en fait truffée de caméras. De quoi satisfaire le proprio, moitié dégueu, moitié pervers. 13 CAMERAS est donc certes très propre, très chouette, très divertissant, mais s’arrête au statut de petite pelloche sympa à zieuter un samedi soir chez soi. En revanche, le film de Victor Zarcoff aura permis de découvrir Neville Archambault, l’un des méchants les plus cradingues du ciné. Tellement glaçant, sale et immonde qu’il provoque tour à tour dégoût, rire et crispation.

Mais les ardeurs sont vite freinées avec EL MAL DEL ARRIERO. Vendu comme un « polar espagnol troublant », cet OFNI (objet filmique non-identifié) est devenue la blagounette du festival. Ennuyeux au possible, incompréhensible, étiré en longueur (là, par contre, c’est la taille qui compte), il a finalement eu raison de nos nerfs : fous rires nerveux en cascade du public, notamment de Claude Perron, présidente du jury pro, et son rire légendaire. De quoi tirer la salle de la léthargie dans laquelle elle s’était plongée. Toujours ça de pris.

[COUPURE PUB parce qu’on ne savait pas où mettre ce passage]
La rédaction de tmv tient à remercier l’intégralité de l’équipe de Mauvais Genre, des bénévoles exceptionnels, ainsi que des jurys jeune, de la critique et pro (que vous pourrez retrouver ICI).

DIMANCHE 27 : LE JOUR SANS FIN

Z’êtes toujours là ? Tant mieux, car dimanche a été une looongue journée, placée sous le signe des surprises. Notamment avec SUNSET EDGE, en compet, qui a lancé les hostilités. Signée Daniel Peddle, cette petite prod sans-le-sou et un poil confuse mais joliment emballée suit de jeunes ados dans une ville abandonnée. À ses côtés, le minimaliste CORD (qui a aussi obtenu le prix de la critique), de Pablo Gonzàlez : inventif, créatif, CORD l’est assurément. Mais ces 65 minutes souffrent tout de même de défauts, à cause d’une narration et d’un final un peu fouillis pour le minuscule cerveau de l’auteur. Et dans cette histoire mélangeant science-fiction, monde post-apocalyptique, sexualité, plaisir et contamination, les deux comédiens sont une véritable révélation, entre la sublime Laura de Boer (on sait que vous êtes en train de chercher sur Google images, héhé) et l’étonnant Christian Wewerka.

Mad in France : le best-ouf du court français.

Alors que les « à poiiiil » et les « pussyyyy » (on vous laisse chercher la traduction sur Google) rythment délicieusement cette journée, place à la séance tant attendue : Mad in France. Une sélection de courts-métrages 100 % frenchie, choisie de main de maître par sieur Erwan Chaffiot, un monsieur cool avec des goûts cool. On retiendra notamment le fantastique UN CIEL BLEU PRESQUE PARFAIT, de Quarxx, véritable brûlot brouillant la frontière entre réalité et cauchemar. Emmené par un Jean-Luc Couchard parfait (mais les fans de Dikkenek le savent), le court-métrage, glauque et sombre, est captivant de A à Z.
Surprenants, aussi, THE CURE (toxicos et vampires ne font pas bon ménage), ELLE (avec un monstre trop choupi gizou gizou) ou encore le très drôle JULIET (et son message bien piquant). LES CHRONIQUES DE LA SOURCE, lui, aura en revanche un peu perdu du public avec son scénario mal ficelé, malgré d’indéniables qualités techniques. Enfin, LA LISIERE, avec ses 16 minutes au compteur, reste un court d’anticipation difficile d’accès, mais rehaussé par sa photographie et ses acteurs talentueux.

Une sélection qui prouve de nouveau à quel point la France regorge de talents (Kev Adams, si tu nous lis…).

… DIMANCHE : TOUJOURS

Et quand y’en a plus, y en a encore, tiens. La journée s’est terminée par la soirée French Touch. L’occasion de mettre en lumière l’excellent et très étonnant LA FILLE BIONIQUE – douce rêverie mignonnette, poétique et troublante – mais aussi le pilote de RESET, série prometteuse (il y a des contaminés, des gentils et des méchants, donc on vote pour) qu’on espère voir distribuée prochainement.

Les plus courageux (et ceux qui attendaient l’after, bande de coquinous) finiront la soirée avec THE OPEN. Tourné par l’extra-terrestre Marc Lahore dans les îles écossaises, THE OPEN se situe durant la guerre. André, un coach, et sa joueuse Stéphanie, n’ont qu’une chose en tête : Roland Garros. Ils vont donc organiser cette finale tant espérée, en ayant pris soin de kidnapper un autre joueur, tout en s’entraînant avec des raquettes sans… cordage et sans balles. Avouons que dit comme ça, ce n’est pas sexy, mais THE OPEN est un délicieux moment d’absurde, de comédie, de drame, de folie, de fantastique et de sport. Si le film méritait une coupe de 15 minutes, il n’en reste pas moins prodigieux, iconoclaste et faisant valser les conventions. Jeu, set et match. (alors ça, c’est de la chute !)

[vimeo]https://vimeo.com/94489573[/vimeo]

LUNDI : AU SOLEIL (ou pas)

Mauvais Genre, un festival bien monté.

Vous les sentez les cernes ? La fatigue ? Les haleines aromatisées au couscous et à la bière ? Le festival qui finit avec son président déguisé en lapin dégoulinant ? Le lundi, c’est toujours un peu dur. Mais pas de pitié : Mauvais Genre joue encore ses dernières cartouches avec ALKI ALKI. Coup de cœur de l’auteur (toujours moi, je n’ai pas changé), cette comédie dramatique Deutsche qualität aborde le thème de l’alcoolisme – et des addictions en général – et de tous les problèmes qui en découlent. Axel Ranisch filme alors Tobias, un architecte alcoolo, constamment flanqué de Flasche, qui représente la boisson. À la fois tendre et poignant, et malgré sa photographie terriblement banale (laide diront certains), ALKI ALKI se veut dur, drôle et (d)étonnant. Une vraie surprise.

Réalisé par 10 réalisateurs, WONDERLAND clôture Mauvais Genre en demi-teinte : ce film d’anticipation (en Suisse, un effrayant nuage apparaît et recouvre tout le pays) fait écho à l’actualité et égratigne au passage le pays, les mentalités et la politique. Mais après un début intéressant, WONDERLAND (Heimatland en VO) traîne bien trop des pattes, s’étire et se perd. Reste une morale pertinente, visant à dézinguer l’image d’une Suisse repliée sur elle-même.

Pour notre part, nous nous replierons ensuite surtout sur la soirée (=fête nocturne) qui a fait suite au festival (=cernes le lendemain) et qui a clôt cinq jours fantastiques, remplis de bonne humeur. Tours n’a donc plus qu’à croiser très fort les doigts pour espérer une 11e bougie à Mauvais Genre. Allez, les sales gosses.

Aurélien Germain

Pour le Palmarès 2016 :

[nrm_embed]<div id= »fb-root »></div><script>(function(d, s, id) { var js, fjs = d.getElementsByTagName(s)[0]; if (d.getElementById(id)) return; js = d.createElement(s); js.id = id; js.src = « //connect.facebook.net/fr_FR/sdk.js#xfbml=1&version=v2.3″; fjs.parentNode.insertBefore(js, fjs);}(document, ‘script’, ‘facebook-jssdk’));</script><div class= »fb-post » data-href= »https://www.facebook.com/permalink.php?story_fbid=10153585876057810&amp;id=268009177809″ data-width= »500″><div class= »fb-xfbml-parse-ignore »><blockquote cite= »https://www.facebook.com/permalink.php?story_fbid=10153585876057810&amp;id=268009177809″><p>Palmarès 2016 : JURY : – Prix du jury long métrage : CORD de Pablo González- Prix du jury court métrage de fiction…</p>Posté par <a href= »https://www.facebook.com/Festival-Mauvais-Genre-268009177809/ »>Festival Mauvais Genre</a> sur&nbsp;<a href= »https://www.facebook.com/permalink.php?story_fbid=10153585876057810&amp;id=268009177809″>mardi 29 mars 2016</a></blockquote></div></div>[/nrm_embed]