Voyage, voyage !

Partir de Touraine pour quatre ans en Australie, en Inde et au Brésil : Pierre l’a fait, et puis il est revenu.

Pierre Saikali
Pierre Saïkali a l’attitude d’un jeune professionnel de 26 ans bien dans sa peau. Petite chemise et pantalon de circonstance, son regard cherche à évaluer, il pose des questions, prend parfois le rôle de l’intervieweur. Jamais il ne se laisse démonter sur les questions personnelles. Pierre Saïkali est graphiste sur le web, il s’occupe de communication, de développer des sites web. Mais pas que…
« Il faut savoir écrire son quotidien » , lâche le jeune homme. Partir loin, l’évidence. 2009 : Pierre Saïkali a 22 ans. Il a passé toute sa vie en Touraine. Comme beaucoup, son envie de voyage le démange. C’est un « voyage initiatique » qu’il cherche. Faire des milliers de kilomètres pour se construire, sortir de chez ses parents, pù il a vécu les 22 premières années de sa vie. Fraîchement diplômé de l’école de communication visuelle de Brassart, il décide alors de partir au Brésil un mois avec une association et d’autres jeunes d’un lycée professionnel. Premier électrochoc. « Nous sommes partis à Belo Horizonte, dans le sud-est du pays, se remémore Pierre Saïkali. Notre mission, c’était d’aider à la construction d’une crèche à côté d’une favela de la ville. » Début de sa vie d’indépendance, il rencontre aussi Raisa, celle qui deviendra sa femme.
Pierre Saïkali avait pour idée de partir un an en Australie. Il garde son plan initial, le cœur un peu lourd, son billet est déjà pris. Comme beaucoup de jeunes français de son âge, son visa en poche, il va enchaîner les petits jobs pendant plusieurs mois au pays des kangourous, travaille dans une ferme qui produit des œufs. Il est aussi accueilli par plusieurs familles en échange d’un coup de main (on appelle ça le woofing). Rêves d’ailleurs, toujours plus loin, il décide de partir un mois en Inde, pour faire un peu de couch surfing. Il donne des cours d’Anglais dans un orphelinat. Aller vers l’autre : « Dans ces voyages, tu te sens parfois seul, même si tu rencontres pas mal de personnes. J’avais envie de partager ce que je vivais. » Son frère, de dix ans son aîné, le rejoint à Adélaïde, dans le sud de l’Australie pour un mois de road trip. Après des milliers de kilomètres des centaines d’images en tête, Pierre Saïkali sent qu’il doit revenir… pour repartir au Brésil.
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Retour à Belo Horizonte. « Là, je ne voulais pas forcément refaire des petits boulots. » Il rencontre une femme médecin qui lui donnera sa chance pour refaire la communication de son dispensaire. Le jeune homme a le contact facile. À aucun moment il ne parle de barrière de la langue. Il se fait très vite un réseau, répond à des commandes, commence son métier de graphiste sur le web. Ses clients sont Français, Brésiliens, Américains. Ses parents ne remettent pas ses choix en cause. « Mon père est d’origine libanaise. À 18 ans, il est parti faire ses études de médecine en France. Il a rencontré ma maman, a voulu exercer son métier ici. Il est resté. Est-ce que j’ai ça de lui ? Peut-être. » Pierre Saïkali se marie avec Raisa en 2012. Le besoin de revenir en France se fait sentir. « Au quotidien, le Brésil, c’est génial, les gens sont faciles à vivre, ils viennent vers toi facilement. Au niveau professionnel, c’est une autre histoire. Je n’en pouvais plus. »
Le couple prend la décision de venir en France, s’installer à Tours. Pierre Saïkali a 26 ans, il apprend alors qu’il va devenir papa. « Je ne suis pas toujours facile à vivre, j’ai besoin de mon indépendance, j’ai une tendance à me construire seul. Mais j’en suis conscient. »