Chroniques culture : le plein de musique avec Skáld, Dirty Shirt et Pierre de Maere

L’ALBUM

SKÁLD – HULDUFÓLK

Faire revivre les mythes et le folklore scandinave et nordique ? C’est l’objectif affiché par les Français de Skáld depuis leurs débuts. Et force est de constater que la troupe y parvient album après album et transforme l’essai sur cette nouvelle offrande, malgré l’absence de ses chanteurs historiques. « Huldufólk » est un voyage, une immersion dans les temps anciens, porté par des chants en vieux norrois et des instruments d’époque, s’inspirant des textes des scaldes pour transporter son auditeur.

Preuve d’une certaine évolution, ce nouvel album fait montre de diversité, piochant dans les hymnes rythmés (l’entêtant « Elverhøy », impossible à sortir de sa tête), les atmosphères quasi chamaniques (l’excellent « Ljósálfur »), ou offrant des morceaux très éthérés (la pause « Hinn Mikli Dreki »).

Reste le choix – discutable – de placer deux reprises en bonus d’album (dont une du « Du Hast » de Rammstein, façon viking !) qui gâchent quelque peu ce beau voyage dans le temps que vient de nous offrir Skáld, une fois ce « Huldufólk » terminé.

Aurélien Germain

LE VINYLE

DIRTY SHIRT – GET YOUR DOSE NOW

Il faut imaginer la chose… Non, parce que Dirty Shirt, c’est un peu l’OVNI du rock. Le bidule ? Une tripotée de musiciens (nombreux) venus tout droit de Roumanie, balançant une fusion metal saupoudrée de grosses guitares sous-accordées, de chants folkloriques traditionnels des Balkans, de pop schizophrène où des choristes féminines entremêlent leurs voix à des chants tantôt guillerets, tantôt énervés.

Un gloubi-boulga pourtant maîtrisé, efficace et dansant. Pour réchauffer l’hiver, la joyeuse troupe ressort son album « Get your dose now » en vinyle orange, version limitée. Prenez votre dose maintenant !

Aurélien Germain


L’ALBUM

PIERRE DE MAERE – REGARDE MOI

Porté par le déjà super tube « Un jour je marierai un ange », le Belge Pierre de Maere nous livre son premier album, où se côtoient douze titres maîtrisés d’une fraicheur absolue. Aucun temps mort dans les musiques dont les colorations nous emportent littéralement et dans la profondeur des textes.

Élégant, extraverti, romantique, flamboyant, tous les qualificatifs pourraient nous venir à l’esprit ; une réussite faisant penser aux premiers ouvrages de Stromae notamment. Nominé aux Victoires de la Musique, invité dans les plus gros festivals de l’été, Pierre de Maere est à ne pas manquer en live cette année !

Hervé Bourit

Hellfest 2022 partie 2 : chiffres fous et marathon du metal

Canicule le premier week-end, début sous des trombes d’eau pour le second, avant le retour du soleil ! Mais pas de quoi décourager les festivalier(e)s du Hellfest qui, durant quatre jours supplémentaires, ont pris une nouvelle (grosse) dose de metal. Notre compte-rendu !

Hellfest pluvieux, Hellfest heureux (quand même)

En débarquant de nouveau à Clisson, pour ce deuxième week-end d’affilée du Hellfest, c’est un sublime ciel gris et de magnifiques nuages bien moches qui nous accueillent. Comparé aux 17, 18, 19 juin, la température a chuté de… 20 degrés. Rien que ça. De la canicule qui nous a fait perdre 32 litres de sueur et 10 kg de gras, voici désormais madame Pluie qui s’abat par averses sur le site clissonnais.

Vendredi 24 juin, le jugement est sans appel : la boue aura eu raison de notre première paire de baskets et le soir, nos orteils ressemblent à des Knacki® mouillées. Mais le metal réchauffe.

Des chiffres ahurissants

420 000

Cette 15e édition du Hellfest – on l’a dit – est synonyme de démesure. Sur ces 7 jours, 420 000 festivalier(e)s réuni(e)s pour l’amour du metal (et de la bière, mais chut). Les 350 groupes se répartissent sur 6 scènes, ratissant large en représentant des dizaines de genres musicaux.

Boire un petit coup et manger ? Toujours possible partout sur les dizaines d’hectares du festival.

800 000

Entre 700 000 et 800 000 litres de bière ont été écoulés durant tout ce Hellfest, a estimé Ben Barbaud, big boss du festival. Mais – ô fichtre diantre, malheur ! – c’est 15 % de moins qu’une édition normale, « la faute » à une canicule qui aura poussé les metalleux à préférer l’eau (c’est bien) au breuvage houblonné.

5 000

Le nombre de bénévoles qui ont œuvré tout du long. 3 000 d’entre eux ont même fait les deux week-ends !

900 m2

La taille de la « loge » de Metallica, tête d’affiche de cette 15e édition, d’après le journal Ouest France. En fait, il s’agit surtout d’un mini-village, où s’affaire un staff de 120 personnes, installé exceptionnellement pour ce groupe mythique jamais venu au Hellfest.

300 000

En litres, la quantité de fioul utilisée pour l’ensemble des groupes électrogènes durant cette semaine.

74

C’est l’âge du légendaire ALICE COOPER qui a délivré un concert fun à souhait le vendredi, un spectacle, un vrai de vrai.

Y a pas d’âge pour écouter du metal !

17

En moyenne, le nombre de kilomètres que la team tmv parcourait par jour. (PS : si quelqu’un a une bonne adresse pour les massages de pieds…)

La dose de claques

[Lectrice, lecteur, on te connaît : si tu t’ennuies, tu peux aller en fin d’article pour lire notre baffouille sur la déception de cette édition ou sur le concert magique de Metallica]

Difficile de ne pas trouver son bonheur avec une telle programmation. Celui ou celle qui n’aura rien à trouver à se mettre sous la dent sera condamné à se farcir l’intégrale de Christophe Maé. Une fois de plus, c’était totale régalade.

On retiendra notamment la prestation absolument hallucinante de NINE INCH NAILS. Le groupe de Trent Reznor, que le Hellfest draguait depuis tant d’années, a enfin mis les pieds à Clisson. En mode machine de guerre. Set imparable (« Wish » en deuxième titre, façon pichenette de bûcheron), mur du son qui décolle les plombages, jeu de lumières ultra-réfléchi… La perle noire du metal indus aura mis le Hellfest à genoux.

On attendait de pied ferme, le samedi à 13 h (l’équivalent de 6 h du mat’ quand on est au Hellfest…), HUMANITY’S LAST BREATH. Un nom poétique qui signifie « Le dernier souffle de l’humanité ». Bref, une bonne dose d’optimisme en vue ! Là encore, une bonne baffe des familles, puisque les Suédois ont mis tout le monde d’accord avec leurs rythmiques syncopées et visqueuses, ces guitares sous-accordées plongeant dans les abysses de la noirceur, le tout avec une voix d’outre-tombe qui vous rappelle que oui, la fin du monde est bel et bien pour bientôt.

Humanity’s Last Breath : douceur, poésie et optimisme au Hellfest.

Dans un registre totalement différent, THE RUMJACKS a balancé son punk celtique devant une fosse bouillonnante (coucou, j’ai perdu un pied), riffs sautillants imbibés de Guinness, pour une dose de bonne humeur et un public chauffé à blanc, où l’on a pu dénombrer 12 slammeurs au mètre carré durant tout le show.
Récemment passé par Joué-lès-Tours, IGORRR a pulvérisé la scène malgré un retard de 15 minutes, amputant un set joué à cent à l’heure. Quant à MONKEY 3, le groupe suisse a offert une partition confinant au sublime, avec son stoner psyché sans paroles. Le concert, de toute beauté, s’est fini par l’extatique « Icarus » qui – on l’avoue, moquez-vous – nous a fait couler une larme.

Pas du tout metal, mais diablement superbes, NYTT LAND (du folk nordique très chamanique) et MYRKUR (un set acoustique folk danois) auront permis une bouffée d’air frais pendant ce week-end.

Car avec MIDNIGHT, la température est remontée de quelques degrés : prenez du punk, saupoudrez de speed metal, ajoutez-y trois musiciens encagoulés dont on ne voit pas le visage, et ça donne un concert totalement maboule, finissant sur un public en feu, des cordes de basse arrachées et des types se tapant leurs instruments sur le crâne. Normal.

Midnight, quasi incognito au Hellfest…

Oh, un OVNI !

On ne misait pas grand-chose sur DIRTY SHIRT, mais c’est probablement l’une des prestations les plus remarquées et remarquables de ces dernières années au Hellfest ! Au menu ? Du metal roumain, mâtiné de folklore de Transylvanie, avec 28 (!) personnes sur scène (grosse guitare, flûte, choeurs féminin, violons et autres), pour un joyeux bordel aussi accrocheur que fantasque. En un mot comme en cent : génial.

Et la palme de la déception revient à…

Tu l’attendais, ce moment, où tmv crache son fiel. C’est pourtant avec douleur que l’on écrit ça, car la déception 2022 aura été… GUNS ‘N ROSES. Le groupe mythique de notre adolescence, ce par quoi tout a commencé, « THE truc à voir une fois dans sa vie » comme dirait mamie Guiguitte. D’autant qu’il s’agissait de la formation originale… Las. Si Duff et Slash ont été impériaux, Axl Rose a rendu ces 2 h 30 (interminables) de concert douloureuses, avec un chant aux fraises et des envolées façon canard ramolli coincé dans une porte.

Evidemment, des « Welcome to the jungle » et « Live & let die » sont toujours un orgasme auditif… Mais rien n’y fait, difficile d’entrer dans ce set aux allures de jam entre potes (pourquoi caser une reprise d’ACDC en… 4e morceau ??), desservi par un son brouillon sur certains titres. Bref, on pleure des larmes de sang. Tristesse.

Metallica, en maître sur le Hellfest

Dimanche 26 juin, dernier jour. Plus de guibolles, plus de panards, le corps suintant la bière et les lingettes pour bébé (on n’avait que ça pour se nettoyer, désolé) : mais pas l’temps de niaiser, car c’est à ce moment-là que METALLICA devait marquer le Hellfest au fer rouge. Le groupe légendaire est attendu depuis des années et des années. Ce Graal, Ben Barbaud le convoitait depuis bien longtemps, alors que tous les groupes cultes (Iron Maiden, Kiss et compagnie) sont déjà passés sur les terres clissonnaises.

À ce moment-là, le site est en ébullition. Blindé. Trop. L’orga’ a fait venir de nombreux invités et des milliers de personnes ont acheté un pass 1 jour juste pour le groupe. La circulation se fait centimètre par centimètre et il y a BEAUCOUP trop de monde. Un enfer.

Mais quand l’intro d’Ennio Morricone se fait entendre, tant pis, c’est l’excitation qui reprend le dessus. Les Californiens débarquent enfin à Clisson. Mastodonte musical (plus de 150 millions d’albums vendus dans le monde, dont un « Black Album » à 30 millions…), METALLICA dicte sa loi. Triplé « Whiplash », « Creeping Death », « Enter Sandman » pour débuter (« Bon, on a joué les plus connues, qu’est-ce qu’on peut faire maintenant ? », sourit James Hetfield), petites surprises au menu (« No Leaf Clover » ou le plutôt mal-aimé « Dirty Window »), l’incontournable ballade « Nothing Else Matters » reprise en choeur par 60 000 personnes, ou encore un « Damage Inc. » orgasmique en fin de set…

En deux heures, METALLICA aura prouvé son statut de « star » (même si l’on regrette un petit manque de mise en scène). La preuve, même le ciel s’est illuminé pour lui, avec un feu d’artifice grandiose et XXL pour clôturer cette 15e édition.
Rendez-vous les 16, 17 et 18 juin 2023 pour un retour en Enfer.

Texte, photos et vidéos : Aurélien Germain