Orientation : les formations dans les métiers du numérique en plein boom

Jeunes bacheliers, étudiant(e)s reconverti(e)s ou pros qui changent de métier : le numérique attire des publics variés pour des métiers diversifiés. Et à Tours, on peut se former !

PAM ! Ça, c’est le bruit de la grosse patte d’un mastodonte de la tech’ qui débarque en Touraine. Le 19 janvier dernier, Microsoft a en effet inauguré sa première école dans notre région : une formation de développeur en Intelligence Artificielle à Tours. Déjà présent dans différentes régions avec 37 écoles créées avec son partenaire Simplon, Microsoft n’avait pas encore mis les pieds en région Centre-Val de Loire.

Dans la pratique, cette formation accueille déjà depuis fin novembre 16 élèves. Profil type ? Aucun ! Agés de 22 à 45 ans, femmes et hommes, Français et étrangers… Leur seul point commun est de déjà maîtriser un langage de programmation et d’avoir quelques notions de mathématiques, statistiques et autres matrices.

Aux côtés de Microsoft et Simplon, on retrouve le Greta Val de Loire, et la région Centre-Val de Loire coté financement, ainsi que des entreprises partenaires qui misent sur le projet : après sept mois de formation intensive, les élèves les rejoindront pour une alternance d’un an. « C’est l’originalité de ce dispositif qui débouche sur un titre professionnel : répondre à des vrais besoins de recrutement », explique Olivier Rouet, conseiller en formation au Greta, en charge de la filière numérique.

Innovant sur la forme, le projet Microsoft ne l’est pas dans les motivations : répondre à la demande du terrain, tout simplement ! Le CEFIM en fait l’expérience depuis sa création en 2002. « La France n’était pas leader dans le secteur numérique, même avec de belles sociétés, elle accusait un petit retard technologique, lié au retard des filières de formation », commente Frédéric Dufau. « La révolution numérique a commencé il y a trente ans, elle accélère graduellement, avec des coups de boost de temps en temps. Ça a été le cas avec le Covid, car il a transformé nos usages numériques. »

« Informaticien » : non !

À la question « tu veux faire quoi plus tard ? », ne dites donc plus « informaticien ». Le terme est si générique qu’il ne veut plus dire grand-chose. Serez-vous spécialisé sur la maintenance système ? Ou branché codage (tous ces chiffres et symboles qui défilent incognito derrière les pages web que vous consultez et les programmes que vous utilisez) ? L’analyse des données ? La cybersécurité, qui a le vent en poupe ?

A la Wild Code School, on code en intensif ! (Photo Wild Code School)

Cette diversification et spécialisation des métiers reflète les évolutions techniques et les besoins du monde de l’entreprise. Résultat : les formations s’adaptent. À chaque école son credo : à la Wild Code School, comme son nom l’indique, on code en intensif pendant cinq mois, entre présentiel et distanciel. On pourra ensuite se spécialiser en sécurité ou data. Chez Supinfo, installée à Tours depuis 2006 (mais créée à Paris en 1965), on touche à tout pendant trois ans avant de se spécialiser.

Face à l’évolution du secteur, l’école s’adapte, avec l’ouverture en septembre 2022 de bachelors en marketing digital et web design. Dans ces deux écoles comme au CEFIM, qui propose développement web, infrastructures et cybersécurité, et webmarketing, l’alternance est possible, et séduit de nombreux étudiants.

Job garanti ?

95% des étudiants Supinfo ayant choisi l’alternance se voient proposer un contrat de travail avant même d’avoir décroché leur diplôme. 84 % des « Wilders » décrochent un emploi ou une formation après l’école. Même succès pour les écoles Microsoft existant dans d’autres villes. Avec un emploi quasi garanti, les salles de classes sont donc pleines d’étudiants tout frais sortis du bac, mais aussi de reconvertis venus de secteurs plus ou moins éloignés.

Du travail, il y en a. Mais le marché a un peu évolué avec le Covid, comme le précise Fanny Klauk, accompagnatrice agile chez Absydes : « Le confinement a développé le télétravail, ce qui ouvre les frontières de l’embauche. Les recherches peuvent se faire sur toute la France. En RH, on doit donc repenser la fidélisation de nos salariés, pour qu’ils ne soient pas tentés d’aller voir ailleurs », explique la jeune femme. Autre facteur-clé à ne pas oublier : l’adaptabilité. F. Dufau (CEFIM) souligne ainsi l’intérêt des recruteurs pour les « soft skills » (le savoir-être comme disaient les anciens).

« Dans ces métiers, il faut être en capacité de s’adapter, de se former, car on évolue dans un environnement qui bouge très vite ! ». D’ailleurs, qui sait ? Peut-être que notre article sera déjà dépassé au moment où vous le lirez ?

Textes : Maud Martinez / Photos : Pixabay, sauf mentions

Orientation : L’alternance donne de la voix

Être payé pour apprendre un métier ? C’est possible, que l’on soit ingénieur ou esthéticienne. La formation en alternance prend du galon et espère s’installer enfin dans tous les secteurs.

Image19

Je ne voulais pas être assise toute la journée », « Impossible pour moi de faire de la théorie pendant des années, » « J’avais besoin de concret ». Quand on les interroge, les mêmes phrases reviennent. Alors ils ont sauté dans le grand bain. On les trouve dans les boulangeries, les garages, les boutiques de vêtements, les salons de coiffure mais aussi les banques, les cabinets de conseil, les fabricants de logiciel. Et ils sont ravis de leurs parcours, qui surprend encore. Eux, ce sont les apprentis.
Un mode de formation très marginal en France, puisqu’il concerne seulement 6 % des jeunes de plus de 15 ans. En Allemagne, c’est 20 % et plus de 75 % en Suisse ! Comme on imagine bien que la population helvète n’est pas composée exclusivement de pâtissiers et de menuisiers, c’est bien que la formation professionnelle y est tout simplement privilégiée, et ce, quelque soit le secteur d’activité et le poste exercé.

Longtemps cantonnée aux métiers manuels et aux métiers de bouche, la formation en alternance est enfin entrée dans les grandes écoles et à l’université. Mais encore trop souvent par la petite porte. « J’ai toujours été major de mes promotions et quand j’ai opté pour un master en apprentissage, certains ne comprenait pas : c’était vu comme une filière de garage, explique Julie. En 2010, l’Escem ne le présentait pas même sur son site ! C’est l’un de mes professeurs qui m’en a parlé. Ce côté négatif reste très présent : aujourd’hui encore, les gens sont étonnés que j’ai un bac +5 en alternance. » Sitôt son master obtenu, Julie a signé un CDI à la Société générale, l’entreprise qui l’avait accueillie en alternance. Et ce serait à refaire, la jeune femme le referait sans hésiter : « J’ai même eu le luxe de pouvoir choisir entre plusieurs postes à la sortie de mon école. À 22 ou 23 ans, c’est une vraie chance. »

Pour les étudiants, l’apprentissage offre deux avantages uniques : être en condition de travail réel tout en bénéficiant de la (relative) indulgence due à un apprenti et percevoir un salaire. Un étudiant apprenti de 21 ans touche ainsi 895 euros par mois, une somme qui peut faciliter la prolongation des études supérieures. Et c’est l’employeur et l’État qui financent sa formation. Un argument qui convainc aussi les jeunes qui souhaitent acquérir leur indépendance sans sacrifier leurs études.
L’université a développé son propre CFA, le Centre de Formation des Apprentis des Universités Centre-Val de Loire, qui propose plus de 100 formations en alternance, dont une trentaine à Tours : licence professionnelle Gestion de l’environnement Métier des déchets, juriste d’entreprise, Master 2 en Management des Equipes, Santé et Qualité de Vie au Travail, journaliste, génie électrique ou licence pro Optométrie et basse vision, le catalogue est large.

Des entreprises diverses et variées

Et les entreprises d’accueil se sont, elles aussi, diversifiées. On y trouve même la mairie de Tours. Depuis 2014, elle accueille chaque année des apprentis : jardiniers, cuisiniers ou techniciens en informatique… « Il nous semblait évident de soutenir ce mode de formation ». confirme Thibault Coulon, adjoint délégué à l’emploi. L’apprentissage est une évidence pour les métiers manuels, dans lesquels la pratique, la transmission du « coup de main » est essentielle. Mais il a d’autres atouts pour convaincre les futurs ingénieurs ou techniciens spécialisés. Dans les entreprise high-tech, l’alternance est un réservoir d’innovation : « L’étudiant est complètement intégré à l’entreprise, cette visibilité sur plusieurs mois le rassure et le pousse à s’investir sur des projets, explique Julien Rousseau, directeur de Suivideflotte. net, spécialiste de la géolocalisation. En reliant l’école et l’entreprise, ces travailleurs en alternance nous enrichissent : ils offrent leurs connaissances, un regard extérieur, l’expérience de leurs professeurs et celle de leurs camarades. Les stagiaires apportent beaucoup d’idées, il faut parfois leur expliquer que les propositions doivent toujours rester en adéquation avec le monde de l’entreprise et les besoins de nos clients. »

De même, dans les métiers des ressources humaines, le terrain est le pivot d’une formation cohérente, selon Bérengère, qui suit en alternance un Master 2 Management Stratégique des RH et Performance Durable à l’IAE de Tours : « Impossible de se passer de la pratique ! Notre métier est un métier social, où il faut être avec les salariés et connaître leur quotidien ».
Une fois leur diplôme obtenu, c’est cet ancrage dans le terrain qui est le meilleur atout des apprentis. Les périodes en entreprise représentent entre la moitié et les deux-tiers de leur temps de formation. Ils ont développé des compétences professionnelles, une connaissance du milieu du travail, de ses exigences, des droits et des devoirs d’un salarié, qui facilitent leur embauche. À Tours, le CFA des Douets forme chaque année un millier d’apprentis du CAP au BTS. Et pour valoriser ses formations, l’établissement mise sur deux cartes : la rareté, comme la formation ascensoriste (deux seulement en France) et l’ancrage dans le territoire pour les métiers de bouche ou de vente.
La rentrée 2017 offre ainsi une nouveauté : le CAP Vente alimentaire. Mais l’établissement l’admet : il reste un gros travail de pédagogie à faire auprès des collèges et des parents pour expliquer que l’apprentissage est tout sauf un choix par défaut. Quel que soit le niveau du diplôme.

>> FORUM DE L’ORIENTATION : Le 20 et 21 janvier, de 9 h à 17 h, au Parc des Expositions