Beat Matazz, l’as de la batterie digitale et champion de « finger drumming »

Beat Matazz, alias Marco Pillitteri, vient de remporter la médaille de bronze d’un championnat européen de « Finger Drumming » soit de batterie digitale.

Sur Instagram, ses 2 500 followers l’observent chaque semaine se laisser joyeusement posséder par sa musique. Dans son étroit studio home made, Marco Pillitteri se filme pianotant en virtuose sur un drôle d’instrument de musique, plus proche de l’ordinateur que de la grosse caisse.

« Je suis passionné de composition électronique et dans un délire assez geek », reconnaît le musicien âgé de 32 ans. Son nom de scène ? Beat Matazz.

C’est en « tambourinant » avec maestria sur sa boîte à rythmes rose aux boutons blancs que ce batteur, rappeur et compositeur, a remporté la médaille de bronze d’un championnat européen de Finger Drumming, soit de batterie digitale en version française. Un podium décroché grâce à une composition hip-hop à base sur de samples de la 5e symphonie de Beethoven et de sons créés grâce à un synthétiseur analogique japonais des années 70.

« Je suis sûr d’être à ma place »

Déjà, en 2018, pour sa première participation à un battle, après 10 années d’entraînement seul dans sa chambre, le musicien avait braqué la première place. Pourquoi se lancer dans ces compétitions où se réunit le gratin du beatmaking ? « Je ne sais pas vraiment pourquoi je le fais, mais lorsque je suis là-bas, je suis sûr d’être à ma place, de faire partie d’une tribu », sourit-il. « Plus je m’entraîne, plus je maîtrise mon art qui demande un gros niveau de technicité et de concentration. Il faut avoir la précision d’un pianiste et l’énergie d’un batteur. »

Live Finger Drumming Beatmaking Performance – Beethoven + Beat Matazz = Beathoven

JE VIENS D'ETRE SELECTIONNÉ pour le Championnat du Monde de #FingerDrumming avec ce beat vidéo 🌎 8 Finalistes, 1 Vainqueur ⚡️J-5⚡️Samples Imposés : Beethoven, ici c'est la Symphonie N°6 Pastorale.Live Stream le Vendredi 21 Aout Je vous donne RDV Vendredi 21 Aout 2020 sur le compte Twitch de Sample Music Festival pour me soutenir jusqu'au podium ♥️ ❤️ A très vite#Berlin #fingerdrumming #handmadebeatz #pinkmpc #Loveforthemusic

Posted by Beat Matazz on Monday, August 17, 2020

C’est d’ailleurs par là que l’artiste, installé aujourd’hui à Vallères, a débuté, à 6 ans, à l’école de musique de Saint-Cyr-sur-Loire. « Tout ce que j’ai appris à la batterie, je m’en sers et le transforme à la machine », observe-t-il.

Aux Beaux-arts de Bourges, puis de Nantes, Beat Matazz a ensuite laissé libre cours à son goût pour l’expérimentation sonore dans des créations musicales, en trio avec sa machine et… des bâtiments. « C’est durant cette période que j’ai commencé à créer de la musique à partir d’échantillons », se souvient-il.

Le musicien professionnel, influencé par l’artiste de hip-hop américain Flying Lotus, s’investit aujourd’hui de front dans cinq projets et groupes différents de blues, percussions de rue, jazz/ hip-hop, etc. « C’est la musique live qui me fait vibrer, c’est dans le show que je m’épanouis », souffle-t-il. Un plaisir communicatif qui séduit jusqu’à 5 000 internautes par vidéo postée.

Flore Mabilleau

> Pour le suivre sur Instagram @beatmatazz.

 

Beat Matazz balance les watts

Le Tourangeau Beat Matazz – Marco Pillitteri à la ville et ex-Funktrauma – continue de mélanger hip-hop et electro avec brio pour son projet solo. À l’occasion de la sortie de son second EP, tmv vous propose une session « track-by-track », où le musicien commente sa nouvelle offrande, chanson par chanson.

Le hip hop et l'electro, c'est Matazz de thé (oui, il fallait qu'on la fasse)
Le hip hop et l’electro, c’est Matazz de thé (oui, il fallait qu’on la fasse) [Photo tmv]

1. MA BEATZ

« Pour ce morceau d’ouverture, je voulais que l’auditeur se prenne une claque », sourit Beat Matazz. C’est chose faite avec ce Ma Beatz minimaliste, mais écrasant et tapant sec. « C’est inspiré du beatmaker Samiyam, le protégé de Flying Lotus. Il y a un beat [une pulsation sur laquelle se rythme la chanson, NDLR] bien lourd et qui donne le max de place à la voix. » Dans cette chanson, l’artiste raconte son rapport au beat qu’il imagine « comme des créatures aux pouvoirs secrets ». Mais c’est clairement l’electro qui domine ici et qui se greffe parfaitement au phrasé rappé de Beat Matazz.

2. DEDICATED INSPIRATION

« Comme son titre l’indique, la chanson parle de ma dévotion à la création. Je veux toujours aller plus loin, j’ai envie d’inspirer les gens. » Dedicated Inspiration est un morceau très charnel, aidé en cela par la sublime présence de Tilö, des Boys in Lilies. « Cela faisait pas mal de temps qu’on cherchait à faire quelque chose. Je voulais sa voix, son timbre. Ici, elle chante de manière un peu soul, c’est sensuel. » C’est le titre coup de cœur de tmv : un véritable voyage, un mélange envoûtant entre le hip-hop de la rue, l’electro planant et la douceur de la soul.

3. TANTRUM

Changement d’ambiance total avec ce Tantrum, véritable OVNI « qui parle de la Mort et de folie », précise Beat Matazz. « C’est un morceau ultra agressif, à base de samples, de basse, et de reverb. Il y a des grincements, c’est un cauchemar ! » L’ambiance glauque qui s’en dégage fait frissonner. Le Tourangeau prend l’auditeur par surprise avec cet instant bizarroïde. « C’est un univers que je veux esthétiser, un peu comme Tarantino. Je souhaitais peindre un tableau qui fait peur. » Qu’il se rassure : ça marche !

4. THE ATTACK

« Ici, j’ai samplé et trituré la B.O du film Mars Attacks ! » Normal, puisque ce morceau hyper-entêtant et dégoulinant d’esprit science-fiction « fait référence à une invasion d’aliens. » Beat Matazz avait en tête le film Signes qui l’avait bien flippé quand il était jeune (si, si, rappelez- vous de cette scène dans le champ de blé !). « C’est davantage une chanson avec une histoire et un scénario. Il y a tout de même une happy-end. À la fin, on entend l’extraterrestre chanter “ La guerre est injuste ”… »

5. THE FINGER DRUMMING MPC BEAT TAPE

L’EP se clôture comme il se doit : avec un morceau pensé comme tel, réfléchi, qui propose « toutes les instrus que j’avais stockées pour en faire un patchwork », indique le musicien. Un paquet d’ambiances, toutes plus réussies les unes que les autres. C’est le point final, sans textes, uniquement des images à se faire en tête. « Ma grosse inspiration a été Prefuse 73, hyper électro et subtil », dit-il. Avant, de nouveau, de métaphoriser : « Je suis entre le bûcheron et l’ébéniste du hip-hop fait main. »

> EP#2 dispo sur beatmatazz.bandcamp.com

> Beat Matazz sera en concert à Tours le 7 mai au festival Dance Hope.

> Dates, infos et contact sur facebook.com/BeatMatazz

On a rencontré… Beat Matazz

Ce musicien tourangeau se lance dans un projet solo. Entre lâcher prise et hip-hop. Portrait.

Beat Matazz (Photo tmv)
Beat Matazz (Photo tmv)

Absorbé par le travail, Marco Pillitteri a oublié l’heure du rendez-vous. Il se confond en excuses, au téléphone. On le rassure. « Je suis à 30 kilomètres de Tours, ça va être compliqué là. J’étais en pleine préparation de mon répertoire pour les prochains concerts. Je n’ai pas vu l’heure tourner. » Séance de rattrapage.
Rendez-vous le lendemain matin place Plum’. Il commande sa grenadine, cherche ses mots, ne veut pas trop en dire dès le début. Marco Pilliteri compose ses propres morceaux depuis des années, bien avant Funktrauma ou Madera em Trio. « Je me suis aperçu que j’avais déjà créé ma boîte mail Beat Matazz en 2010 et un profil MySpace sans jamais m’être vraiment lancé. » Sauf qu’un jour, l’évidence : il va jouer sa musique, seul maître à bord. C’était il y a quelques mois. Marre du centre-ville de Tours, il déménage à la campagne. Il s’installe avec son home studio. S’enferme et termine un premier EP de cinq titres. Mélange d’abstract hip-hop, d’electro et de jazz-rock, Beat Matazz propose une musique hybride. Une envolée dans un hip-hop presque tribal, quasi organique.
Il passe de l’anglais au français comme si de rien n’était, lance sa voix basse lancinante sur des vocalises envoûtantes. « Je trouve dans ce nouveau projet un plaisir que j’ai toujours du mal à décrire. C’est une forme de libération dans l’implication. Quand je fais de la musique, ça ne passe plus par le cerveau mais pas le coeur. »

Comme si avec Beat Matazz, il passait à la vitesse supérieure. Difficile de lui donner 27 ans. Il a dans son approche artistique une maturité digne des grands et un professionnalisme impressionnant. « Je recherche une justesse dans la création. J’ai l’impression que je pourrais faire un morceau seulement avec des solos de batterie, ce qui compte, c’est l’attitude, être juste avec ce que l’on propose. » Pas vraiment rap, ni vraiment électro ou trip-hop ? Beat Matazz évite les étiquettes ou plutôt, les collectionne, s’amuse avec.
Il vogue quand même avec un noyau dur de références : de Bonobo à DJ Shadow, il fait quelques hommages à Portishead. « Ce n’est pas évident de se lancer seul. Il faut pouvoir assumer d’afficher les failles de son être. Je ne révolutionne rien mais j’essaye d’être le plus sincère possible. » Beat Matazz a cette modestie des grands, une façon de faire à lui, une musique que vous n’entendrez nulle part ailleurs.

EN BREF
>>DANS L’ACTU
Beat Matazz EPBeat Matazz est en train de se préparer pour des live. Autant vous dire que vous allez entendre parler de lui dès que le printemps pointera son nez. Printemps de Bourges, Potager électronique… on vous tiendra au courant le moment venu. Et pour patienter, Beat Matazz vient de sortir un EP de cinq titres, La Symphonie des glaces, que l’on vous encourage à aller télécharger gratuitement sur beatmatazz.bandcamp.com

ET SINON… UN PLAT PRÉFÉRÉ ? « Les frites. Maison, congelées, je m’en fiche, j’adore ça. Et pour mon anniversaire, avec des bougies dessus, c’est parfait. »

UN LIVRE ? « Plutôt qu’un seul, je dirais la série de bouquins écrits par Carlos Castaneda. C’est un ethnologue qui a notamment passé du temps avec des sorciers mexicains. J’ai adoré l’Herbe du Diable et la Force du silence. Je suis mystique, mais de façon rationnelle. J’ai l’impression que quand on pense aux étoiles et qu’à ce moment le cerveau débloque, ça prouve qu’on ne comprend pas tout. »

UN ALBUM ? « S’il fallait en garder un seul ? Everyday de Cinematic orchestra. Je n’écoute plus rien de nouveau depuis l’arrivée de la musique en streaming. Depuis l’avènement de Deezer, je me suis replié sur mes acquis. »