A Saint-Av’, João Gonçalves l’atout culture

SPÉCIAL #SAINTAVERTIN / À Saint-Avertin, la politique culturelle est « faite maison ». Pas de boîte de production pour faire la programmation des nombreux événements culturels. Mais un homme au carnet d’adresses bien rempli. Rencontre avec le programmateur, João Gonçalves.

João Gonçalves

Pourquoi la Ville de Saint-Avertin fait-elle sa propre programmation alors qu’elle pourrait faire appel à une boîte de production, comme le font d’autres villes de l’agglomération ?
C’est la volonté du maire. C’est un « cultureux ». Il veut que la culture soit accessible à tous. Il a compris que c’est en temps de crise qu’on donne la culture aux gens. C’est pour ça que notre tarification est assez basse, on est en dessous des 30 € pour un concert. C’est une force de vouloir travailler à l’ancienne encore aujourd’hui, parce que c’est presque ça, on fait tout de A à Z. Pour avoir une belle saison qui ne ressemble pas aux autres, il faut travailler autrement. De cette façon, j’ai un timing un peu différent des autres salles, ce qui me donne la chance d’avoir des têtes d’affiche qui ne sont pas censées encore tourner. Par exemple, Pony Pony Run Run n’avait même pas commencé à composer leur album quand je les ai signés. Pareil pour Aaron, ils n’avaient pas encore mis en place leur tournée.

Huit ans plus tôt, quand vous êtes arrivé, la Ville de Saint-Avertin n’avait pas encore de service culturel. Vous êtes vraiment parti de zéro ?
En 2008, il y avait une association, il faut reconnaître leur travail car ils ont œuvré pendant pas mal d’années, avec les qualités et les défauts que peut avoir une asso. On ne peut pas dire qu’il se passait rien, mais on n’a rien récupéré. À l’époque, il y avait pas mal de rediffusion de concerts au Nouvel Atrium. On pouvait regarder par exemple le live d’André Rieu. C’est assez marrant parce que la première année, on a reçu des grands noms et on m’appelait pour me demander si c’était en vidéo. Il a fallu plusieurs mois pour que les gens comprennent que c’était du vrai live, avec l’artiste en chair et en os. On est vraiment reparti sur quelque chose de neuf.

En tant que programmateur, quelle est votre mission ?
Je bosse pour se faire rencontrer un public et des artistes. L’objectif d’un service public comme le nôtre n’est pas de remplir la salle à tout prix, mais de faire en sorte que des choses se passent sur scène. En gros, on se dit qu’on a une famille entière et chaque membre, du grand-père à la petite-fille de 20 ans, doit trouver un spectacle qui lui plaît, pas forcément le même soir mais au moins dans la saison. C’est pour ça qu’on retrouve par exemple cette année à l’Intime Festival* Agnès Jaoui, qui est plutôt grand public, à côté de Raphaële Lannadère et de H-Burns, qui font de la musique un peu plus pointue.

Comment une ville comme Saint-Avertin peut se permettre de faire venir des Agnès Jaoui, Louis Chedid ou encore Jane Birkin ?
J’ai un budget artistique de moins de 100 000 € pour payer les artistes. Je pars du principe que c’est de l’argent public, donc je négocie tout. C’est hyper stratégique et c’est là qu’est ma plus-value. Je mets beaucoup d’humain, tout se joue dans la discussion, la confiance, l’accueil. Par exemple, Jane Birkin à l’époque n’avait pas compris pourquoi elle allait se produire à Saint-Avertin et pas à Tours. Sa boîte de production lui a dit : « Tu verras, tu seras bien accueillie ». C’est très symptomatique. Il y a un retour sur investissement en fait, les grosses productions savent qu’on reçoit bien les artistes. C’est des petites attentions. Et je ne parle pas de limousine avec chauffeur. Ça peut être tout simplement un petit bouquet de fleurs, des fraises Tagada® ou le petit jus que l’artiste aime bien. On reste hyper naturel.

Quand on vient du secteur culturel, comment s’intègre-t-on dans les objectifs municipaux ?
C’est très simple, parce que l’équipe municipale nous laisse de gros moyens et nous fait confiance. À partir de là, on arrive à avoir de bons résultats et c’est un cercle vertueux. Sans langue de bois, on n’est jamais en conflit. Le budget est constant d’année en année. On a la place d’innover tant que ça fait sens. On a vraiment de la chance, même si du coup ça nous met la pression, parce que tu ne peux pas dire « c’est le maire qui m’a dit de faire ça » !

Propos recueillis par Camille Petit.

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