LA LEÇON DES PIERRES

IL Y A QUOI, DEUX MOIS, QUELQUES SEMAINES, j’y suis passé devant la vieille dame de Paris. Avec des amis, nous avions flâné sur les quais de la Seine et nous avions soudainement décidé de nous offrir une glace sur l’île Saint-Louis. Nous sommes restés quelques minutes sur le parvis de Notre-Dame, levant la tête pour guetter les grimaces des gargouilles, slalomant entre les files de touristes et les vendeurs à la sauvette. Et je me souviens avoir eu envie d’entrer. Mais le long serpent polyglotte qui s’étirait devant la façade majestueuse m’avait découragé et, une fois de plus, j’avais reporté à ma visite à plus tard. Je ne reverrai plus comme je l’ai connue la nef de la cathédrale Notre-Dame. En une nuit, le moment est passé et ce que je croyais pouvoir remettre à demain s’est soudainement évaporé. Et, curieusement, au matin de cette nuit d’incendie, ce n’est pas aux pierres que j’ai pensé. C’est aux gens. À ceux que l’on imagine tellement à portée de main, à portée de cœur que l’on ne prend plus la peine de les visiter. À ceux que l’on aime, bien sûr, mais que l’on ne fait finalement que croiser. À ceux que l’on reverra, un jour. Chacun tirera de la catastrophe de Notre-Dame l’enseignement ou la morale qu’il voudra. Moi, j’en retiens une leçon de vie : il ne faut jamais remettre une visite à demain. Matthieu Pays

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